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Editorial Publié le lundi 19 avril 2010 | Demain

L’Editorial : Le bateau du western

Dans le Far West, un monde sauvage « peuplé d’Indiens féroces, et d’aventuriers de tout acabit », il y a tout. Sauf les bateaux. Est-ce parce que ce moyen de locomotion est trop lent pour un monde trop pressé ? La question reste posée. En revanche, dans le film ivoirien, un bateau a surgi. Et le western local a pris des couleurs. Un bateau dans un western, curieux non ? Certains à juste raison se sont souvenus de l’expression « mener en bateau ». Une façon bien savante de dire rouler dans la farine. Un sport dont le champion du monde toutes catégories se trouve en Côte d’Ivoire. Le dimanche 11 février 2010, les Ivoiriens ont pu voir avec un brin de curiosité les protagonistes de la crise ex-armée assis côte à côte dans un petit bateau de la marine militaire. Laurent Gbagbo et Guillaume Soro venaient ainsi achever sur la lagune un déjeuner de travail lors duquel les deux hommes ont passé en revue les questions qui paralysent le jeu politique national et la sortie de crise. Le Premier ministre a parlé après la rencontre et la croisière destinée à démontrer à tous que tout va bien au sein de l’exécutif ivoirien. Les structures techniques à charge du recensement électoral, a-t-il indiqué, seront mises à contribution pour proposer un mécanisme à même de rassurer les Ivoiriens. Tout sera fait par ailleurs pour la réunification du pays et le désarmement des forces en présence. La rencontre au palais arrivait pour mettre un terme à de longues semaines d’affrontement entre les deux signataires de l’Accord politique de Ouagadougou. Les seconds couteaux du camp du chef de l’Etat et ceux des Forces nouvelles de l’ex-rébellion se sont en effet livrés à des déclarations incendiaires et des attaques sans précédent depuis le gentleman agreement de la capitale du Burkina Faso signé le 4 mars 2007. La tendance haussière des tensions et le silence des principaux leaders des camps ont fait planer la menace d’une fin de film immédiate. Ce que les deux capitaines ont tenté de désamorcer. Mais, le film des principaux acteurs que sont le chef de l’Etat et le Premier ministre, s’il n’a pas été stoppé net avant le 11 février dernier, ne semble pas avoir beaucoup de minutes encore dans sa bobine. La raison est toute simple. Les protagonistes de la crise militaro politique ivoirienne sont actuellement à un point critique. Et les intérêts vitaux qui ont pu s’accommoder par le passé récent de complicité affichées, et de coup de patte en coulisses ne sont plus compatibles. Laurent Gbagbo a une seule hantise : la perte des élections avenir et de son pouvoir. Pour parer ce cauchemar, aucun sacrifice n’est de trop pour le locataire du palais. Et en la matière, les offensives de ses hommes contre la liste électorale provisoire, et les demandes répétées pour un désarmement unilatéral ici et maintenant de l’ex-rébellion au mépris du processus tel qu’arrêté par l’Apo, ne sont pas un hasard. Il s’agit en fait de placer le chef du gouvernement dans une position intenable et le pousser à la sortie. L’axe de communication choisi ces derniers jours par les stratèges du palais consiste à amplifier les questions de l’unification du pays avant toute élection, en montant en épingle l’insécurité dans les zones sous contrôle des Forces nouvelles. Un axe susceptible d’être mieux accepté par les chancelleries que la volonté affichée de s’opposer à l’élection par la radiation frontale de milliers de citoyens. Le résultat à bon compte étant le même. Question alors : en sortant Soro du jeu, ou tout au moins, en le neutralisant sur l’avancée du processus électoral, que gagnent Gbagbo et les siens ? Beaucoup. Le moindre n’étant pas le temps. Cet autre nom de Dieu, comme aime à le répéter le chef de l’Etat, peut permettre à terme de redistribuer les cartes. Se donner le contrôle exclusif des élections, ou à défaut se tailler une majorité sur liste. Ce qui n’est pas le cas dans la configuration actuelle. Pour le chef du gouvernement, l’enjeu, c’est son présent, et surtout son avenir politique. L’échec du processus en cours serait plus que tout, un échec personnel. Soro mise sur des élections réussies pour substituer à l’image de faiseur de guerre, celle de faiseur de paix. Une belle rampe de lancement pour des ambitions futures à peine dissimulées. Une remise en cause de l’identification, socle du combat militaire des Forces nouvelles, anéantirait durablement ce capital politique. Une perspective que ne peut envisager le chef du gouvernement. Entre les deux hommes, c’est désormais le choc. Presque frontal. Des efforts ici et là sont déployés pour retarder l’échéance. Cependant, il n’aura échappé à personne que, le lendemain de la balade en bateau, l’un des plus soumis collaborateurs de Gbagbo, Affi N’Guessan, président du parti fondé par le chef de l’Etat, a tiré à boulets rouges sur le Premier ministre. Ironisant même sur une sortie en mer d’adieu à Soro Guillaume. Comme quoi, le bateau du western ivoirien est presque à son port d’attache. Reste à savoir qui des deux chefs en sortira toujours le gouvernail en main.
D. Al Seni
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