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Société Publié le mardi 18 juillet 2017 | L’intelligent d’Abidjan

Chronique littéraire / “Chimères de verres” de Grâce Minlibé : “Une Poésie sensuelle à découvrir”

J’ai fait la connaissance de Grâce Minlibé sur les réseaux sociaux il y a environ 3 ans. Elle défendait dans ses blogs une théorie de « célibataire épanoui » qui paraissait incompréhensible à mon entendement. Une confrontation d’idées s’en suivit et nous étions d’accord sur notre désaccord. La question que je me posais : comment une si belle fille, intelligente puisse défendre des théories aussi anachronique avec le zèle fondamentaliste reproché à certains croyants ? Nous sommes devenus très proches et avons réalisé ensemble plusieurs projets littéraires. Quand je lis par la suite sa première œuvre « Chimère de verres », je réalise l’antagonisme évident avec sa théorie de « célibataire épanoui ».
Grâce Minlibé est diplômé en master en gestion des risques financiers et contrôle de gestion ; elle travaille comme analyste risques chez un opérateur de téléphonie mobile. « Chimères de verre » est sa première œuvre publiée dans les années 2014 chez « Edilivre ». Ce recueil poétique de 81 pages contient 68 textes sans table de matières. La page de couverture donne l’image d’un verre contenant un liquide rouge qui pourrait être du vin ou du sang. Ce verre secoué par un mouvement brusque ou violent, se brise en partie, puis disperse une partie de son contenu qui macule la virginité de son paysage immaculé. La chromatique du contraste : rouge et blanc, reflète l’idée d’une paix ensanglantée, d’un rêve brisé. Le titre « chimères de verre » semble confirmer l’idée de ce rêve brisé par la nature fragile du « verre » qui ne peut être reconstitué une fois ses tessons éparpillés. Ce recueil poétique offre t-il comme menu les rêves brisés de l’auteure selon l’illustration de la page de couverture ?
Je découvre une autre personnalité de Grâce Minlibé quand je lis son œuvre poétique et celle là me convient parfaitement. Ici, il ne s’agit plus de cette personnalité si intransigeante, ferme qui semble être indifférente à l’amour, défendant la théorie du « célibataire épanoui ». Fasciné par ses textes, je découvre plutôt sa merveilleuse sensibilité, sa bienheureuse fragilité, sa captivante douceur véhiculée dans des textes passionnés. Je me surprends à réaliser que c’est une Poétesse si sensuelle qui se cache sous cette carapace rigide à l’amour qu’elle défend. Je vous partage son texte qui a été mon coup de cœur. Il s’intitule « Trois hommes » à la page 10 :
Il me faut aller au confessionnal
Histoire de faire des confidences
Ce geste peut paraitre banal
Mais ce n’est pas une évidence

Je désire trois hommes à la fois
Je n’arrive pas à faire un choix
Cette situation trouble mon moi
Plonge mes sens dans un émoi

Ils ont du tempérament
Tout ce qu’il y a d’exaltant
Ils sont si différents
Tout ce qu’il y a d’attirants

L’un m’évoque la piété
Tout le contraire de la fatuité
Son charme à lui c’est sa bonté
Elle jaillit d de lui toute ouatée

Le second est super actif
Il est vif, jamais pensif
Il mène sa vie avec entrain
Il ne se met aucun frein

Il possède une jeunesse d’esprit
Qui au fil du temps n’a jamais flétrit
A ses côtés, l’air est rassurant
Avec lui, tout devient relaxant

Du dernier, j’ai des souvenirs indélébiles
Avec moi, il sait se montrer habile
Il se démarque par sa sagesse
Cela se voit dans ses caresses

Il maîtrise l’art du toucher
Je ne veux pas le lâcher
Il a un certain flegme
C’est bien plus qu’un dilemme

Pardonnez-moi mon Père car j’ai péché
Face à leur charme, je n’ai pu résister
Mais je ne regrette pas mon iniquité
Je les garde tous les trois, c’est décidé

Le lyrisme et des textes d’amour dominent son recueil poétique. La majorité de ses textes sont faits de rimes et cela donne une musicalité dynamique forte intéressante. L’on apprécie sa créativité et son imagination qui défend une thématique tout en respectant les rimes et la versification qui caractérisent son style d’écriture. Si certains textes étaient mis en musique, ils auraient du succès. Grâce développe également d’autres thématiques didactiques qui portent sur la société, la femme, les valeurs… quelques unes sur la satire politique. La force de la passion qui domine la majorité de ses textes donne une lecture appétissante de son recueil poétique. La folie d’amour qu’elle décrit, les images qu’elle utilise montrent sa culture et l’habitude de lecture des « poètes maudits » : Baudelaire, Ronsard, Rimbaud, Mallarmé… On y retrouve également un peu de style de Victor Hugo. Comme le disait l’artiste reggae Afrikaf ex Blacko , écrire semblait être pour Grâce une : nécessité, un besoin vital, c’est comme respirer , c’est fondamental… L’auteure écrit ses illusions, ses désillusions, ses peines, ses joies, ses tristesses, ses angoisses, ses doutes, ses craintes, ses espoirs, ses désespoirs, sa vision, ses valeurs …
Je vous partage un de ses textes publié sur les réseaux sociaux qui a été fortement apprécié par une majorité d’internautes. Le titre : L’amour et ses dérives à la page 27 :
J’ai une étrange manière d’aimer
Je ne me nourris que de l’inaccoutumé
Intimité corporelle, affinité illusoire
Promesse provisoire

Je penche pour les mots absents
L’horizon hypothétique
Les sentiments sous-jacents
Et les ruptures apocalyptiques

Je favorise les rendez-vous irréguliers
Les gestes dérobés
Qui entrainent une conduite inhibée

Je ne juge nécessaire que les prémices de la passion
L’amour est une chronique dont je ne lis que l’introduction
La suite ne m’enchante guère car jamais la flamme ne perdure

Selon l’analyse de certains textes par les internautes comme celui qui vient d’être publié, plusieurs y voient un pessimisme de la Poétesse en amour qui se dessine en cressendo. A cet effet, Jean Baptiste Papouin qui admire les textes de la Poétesse Grâce disait ceci : « Elle préfère le désir à la satisfaction, la puissance à l’acte. Un choix que je juge courageux et donc original pour qui veut vivre l’amour platonique… Nous sommes face à la dialectique de la vierge hypocrite : elle nous invite au plaisir tout en prenant soin de s’y dérober le moment venu… »
Le choix du genre poétique, surtout du lyrisme est une extériorisation, un partage de ses émotions et ses sentiments. L’auteure, en se livrant, se délivre et sublime ses douleurs qui deviennent une force transcendantale. L’auteure comprend la pédagogie de la souffrance et des épreuves de la vie, ce qui donne un avantage spirituel à la Poésie et fait du Poète en général « un prêtre qui s’ignore » comme le disait le Professeur et Poète Bernard Zadi Zahourou. Les chutes et les souffrances inhérentes au lieu d’être une tragédie, se transforment bien au contraire en force morale et spirituelle.
Il arrive parfois que Grâce Minlibé se justifie en disant « ce sont des textes écris pendant ma période adolescente qui ne reflète pas ma vie actuelle ». Mais il faut qu’elle assume la beauté de ses textes et la folie de l’amour qu’elle défend qui est opposé à ses convictions présentes de « célibataire épanouie ». Son œuvre poétique « Chimère de verre » a été mon délice à des heures poétiquement calmes propices aux lectures méditatives (2h à 4 h du matin). Je le recommande à tous les rêveurs passionnés de lyrisme.

Yahn Aka
Ecrivain –éditeur
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