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Société Publié le mardi 24 mars 2009 | Fraternité Matin

Insuffisance rénale : L’absence criante de médicaments menace la vie des malades

Les malades du centre de Cocody éprouvent d’énormes difficultés à se soumettre aux deux séances hebdomadaires de dialyse.

Sur trois consommables du kit, à savoir l’aiguille à fistules, le rein artificiel et la ligne, il peut arriver que l’on ne dispose que d’un seul ou deux. Réunir les trois éléments dans le kit est depuis quelque temps une équation difficile à résoudre pour les dialysés qui ne savent plus à quel saint se vouer. Malade depuis 2006, Dodo Guy se soumettait régulièrement aux séances de dialyse, au Samu, jusqu’à décembre dernier, date à partir de laquelle le manque de consommables chez lui, crée une incertitude. «Il est difficile d’avoir un kit complet. De ce fait, nous sommes obligés de nous rendre à la maison-mère, pour acheter les consommables. Ce qui nous revient cher. Car il faut débourser 14.000FCFA pour le rein, 4000FCFA la ligne et l’aiguille à fistules à 1000FCFA, soit 19.000FCFA, pour une séance qui habituellement nous coûtait 2500FCFA, en raison de la subvention accordée par l’Etat. Licencié d’une entreprise privée dans laquelle il travaillait depuis le déclenchement de la maladie, l’homme dit être pris en charge par sa famille. Quant à ses deux enfants et sa conjointe, leur sort est également entre les mains des parents.



En pleine séance de dialyse, Sonan Guy Stanislas, enseignant au ministère de l’Enseignement technique, père d’un enfant, ne cache pas non plus son inquiétude, devant son incapacité à respecter les deux séances hebdomadaires obligatoires. «Il m’arrive de rater des séances, parce que dans les conditions actuelles, il n’est pas facile de payer 40.000FCFA par semaine. Je vous assure que même pour nous- autres qui sommes encore en fonction, ce n’est pas aisé», dit-il.



Leur désarroi est d’autant grand que les tentatives pour rencontrer les autorités sont demeurées jusque-là vaines. C’est du moins ce qu’affirme Kouabenan Jean Copa, président de l’Association des dialysés de Côte d’Ivoire. «Toutes les tentatives pour rencontrer le ministre de la Santé, le Premier ministre, le Président de l’Assemblée nationale et le Président de la République n’ont pas encore abouti», dit-il, en brandissant des courriers adressés, le 12 janvier dernier au Premier ministre, le 02 février au service des Affaires sociales de la Présidence de la République et le 05 février au Président de l’Assemblée nationale, ainsi qu’au ministre de la Santé et de l’hygiène publique. Au terme de ces correspondances et demandes d’audiences, des membres de l’association ont été reçus par le directeur de cabinet du ministre, Koffi Koumi. Ainsi que le gouverneur du district d’Abidjan, Pierre Amondji, auprès de qui deux générateurs (appareil de dialyse) ont été obtenus, selon l’intervenant.



Il affirme que cette situation est à la base des décès de malades constatés depuis le mois de décembre. Onze (11) personnes pour l’heure, dont, Zadi Franck Olivier, Assohou Amessé Noba (ex-président de l’association), Bobo Nicole, Boblai Charline, Die Affoué Christine (décédée mercredi dernier). Il révèle avoir apporté des appuis financiers à certains d’entre eux qui ne pouvaient plus, en raison du coût actuel du traitement, s’offrir les séances.



Mieux, il a obtenu auprès du responsable de Médical santé, l’entreprise adjudicatrice, de vendre des kits à crédit aux malades.



Le directeur du Samu, Dr Jacques Sissoko, a rejeté toute idée de décès lié à la crise. Selon lui, les morts ne sont pas dues à l’insuffisance de séances, mais bien plus à l’état des malades. «Je ne pense pas que les décès soient dus à cette situation. Cela fait plusieurs années que les malades viennent ici. Ils ont toujours une solution à leur problème», dit-il.



Quant au Pr Gnionsahé Apollinaire, chef du service de néphrologie du Chu de Cocody, il affirme que les écueils du centre de dialyse sont liés à la mauvaise santé de la trésorerie de l’Etat. «La centrale d’achat pour tous les services de santé a des difficultés pour approvisionner les centres». Une situation qui oblige les malades à dialyser à mettre la main à la poche. Son inquiétude se justifie par le fait que de nombreux insuffisants rénaux sont des personnes à faibles revenus, voire des indigents. En outre, aucune garantie réelle n’est donnée par l’entreprise adjudicatrice et la pharmacie de la Santé publique (Psp), pour la livraison des consommables. Il reconnaît toutefois les efforts fournis par le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique, le Dr Allah Kouadio, qui a fait, selon lui, diligence pour que leur soient livrés 1000 kits. Ce geste, bien qu’accueilli par le Pr Gnionsahé et son équipe, ne met pas le centre à l’abri de toute rupture, face à la forte demande. En effet, poursuit l’intervenant, le centre de dialyse de Cocody, avec ses dix-neuf générateurs (machines) reçoit trente-huit malades par jour (1 machine est utilisée par deux insuffisants rénaux).



Au Chu de Treichville où l’on compte 7 machines depuis 2006, l’on dénombre 14 utilisateurs. Quant au Chu de Yopougon, ce sont 12 personnes qui sont dialysées sur les 6 machines. Soit au total 64 dialysés par jour, ou encore 1920 par mois. D’où l’inquiétude du Pr Gnionsahé qui plaide auprès du fournisseur pour plus d’efforts afin que le centre soit régulièrement approvisionné en consommables, en dépit des difficultés de trésorerie de l’Etat. Lui emboîtant le pas, Dr Jacques Sissoko a lancé un appel à l’Etat, pour la gestion rapide de la crise des consommables. «Nous subissons avec les malades les aléas de la trésorerie de l’Etat. En 2009, l’Etat a subventionné les consommables à 1 milliard 640 millions de F. Notre problème demeure la disponibilité des fonds. Il est important que l’Etat inscrive l’hémodialyse comme une priorité nationale, tout comme les salaires», dit-il.



Marcelline Gneproust
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