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International Publié le vendredi 24 avril 2009 | Le Repère

Chronique internationale - Comment la Chine a écrit son histoire

Pour la première fois dans l'histoire, depuis plus de vingt ans, la Chine et les autres grands pays coexistent en tant que puissance dans le même monde. C'est là un des aspects majeurs de l'ère actuelle de mondialisation, antérieure même à la disparition de l'URSS en 1991 qui mit fin au monde dit "bipolaire" caractérisé par un demi siècle de suprématie militaire des Etats-Unis et de l'URSS et par la démission du monde en des systèmes à la fois hégémoniques et antagonistes, auxquels le Tiers-monde de l'époque, celui de Bandoung essayait d'échapper.

Certes la Chine est une puissance très ancienne, héritière de l'une des anciennes civilisations connues de l'humanité, la seule qui avait traversé sans se défaire les cinq derniers millénaires. Mais jusqu'au XIXe siècle, elle a vécu au rythme de sa propre histoire et de ses dynasties, dans un monde à part, " empire du milieu " alternant moment d'unité et de désunion. L'existence, depuis l'antiquité, de quelques liens commerciaux entre l'Europe, l'orient et la Chine grâce aux routes de la soie, aux expéditions de quelques marchands ou missionnaires, aux pérégrinations de l'amiral chinois Zheng He jusqu'en Afrique, à l'échange occasionnel de présents en souverains au cours des siècles passé n'avait en rien modifié cette compartimentation du monde. Et quand les puissances occidentales en pleine expansion coloniale, ainsi que le Japon, avaient convoité la Chine au XIX siècle, celle-ci affaiblie, n'était plus alors une vraie puissance en état de se défendre mais une cible ou un marché (entre autres pour l'opium britannique). Dépecée par des puissances étrangères rivales, la Chine entra alors dans un long tunnel où elle subit occupations, traités inégaux, attribution forcée de concessions aux occidentaux, guerres civiles. Il fallut attendre le milieu du XXe siècle pour que les communistes chinois, avec Mao Tse-Tung réussissent à refaire l'unité de la Chine et à restaurer sa souveraineté. C'est la période où la Chine se referme sur elle-même à la seule alliance avec l'URSS. Elle est engagée dans une confrontation directe avec les Etats-Unis en Corée (en 1950-1951), puis indirecte avec la France dans la première guerre du Vietnam jusqu'en 1955, puis avec les Etats-Unis dans la seconde guerre du Vietnam jusqu'en 1979. Avec l'assistance soviétique, elle développe son propre arsenal nucléaire. Par " Realpolitik ", certains pays européens préconisent dès cette période des relations diplomatiques avec Pékin, qui avaient été rompues en 1949. Le général de Gaulle les rétablit en 1964. Henry Kissinger et Richard Nixon renoue par la diplomatie du ping-pong le dialogue en 1971 et rétablissent les relations diplomatiques en 1979. Pour la Chine, une satisfaction de prestige, une assurance et une sécurité vis-à-vis de l'URSS voisine et très armée. Pour les Etats-Unis, c'est une carte précieuse dans leur jeu central avec l'union soviétique, et leurs relations multiples et complexes en Asie.

Cependant, la Chine et le reste du monde, Etats-Unis, Russie France, Royaume-Uni, ne vivent pas encore tout à fait dans le même monde. Après avoir récupéré le siège permanent au conseil de sécurité, Pékin en fait un usage prudent et discret, veillant à son statut, mais évitant tout geste pouvant conduire à une confrontation.

C'est dans les années 1980 que se produit une gigantesque mutation, aux conséquences colossales. Après une période de transition consécutive à la mort de Mao en 1976, DEN XiaoPing prend en main, en décembre 1979, les destinées de la République populaire de Chine (RPC) et la lance dans l'aventure de la modernisation économique, changeant par là, même à terme, les équilibres du monde. Il le fait prudemment : " traverser la rivière en tâtant les pierres " dit-il. Mais de façon résolue. Elu président des Etats-Unis la même année, Ronald Reagan a quant à lui, pour objectif de briser la menace idéologique et militaire soviétique, ainsi que déréguler et défendre au monde, avec le soutien ardent de Margaret Thatcher élue premier ministre de Grande Bretagne en 1979 et les plus grandes entreprises occidentales, l'économie capitaliste. Il atteint son premier objectif et impulse le second. En Union Soviétique que Mikhaïl Gorbatchev est appelé au pouvoir en 1985 par un système soviétique à bout de force, qu'il libéralise (glasnot) et tente de reformer (perestroïka). Le refus de M. Gorbatchev d'employer la forme pour maintenir les régimes communistes d'Europe de l'Est, fondé sur une conviction profonde et ancienne, mène à partir de son accession au sommet, à leur chute comme des châteaux de cartes, rendant de ce fait possible la réunification allemande (1989-1991) et donnant le coup d'envoi du rapprochement des pays d'Europe Centrale et orientale avec l'organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et l'union européenne (UE, 1989-2009). Après un putsch d'arrière-garde qui tente vraiment d'interrompre le nouveau cours de l'histoire en 1991, l'Union soviétique disparaît en décembre de la même année par retrait des Etats constitutionnels à commencer par celui de la Russie qui n'hérite en partie de la puissance soviétique. En occident, de nombreux analystes et responsables politiques n'interprètent ces événements que comme la victoire occidentale, voire américaine. Pour beaucoup d'Américains cela annonce la "fin de l'histoire (Francis Fukuyama) par le triomphe des talents politiques et économiques occidentales et un " nouvel ordre international " sous le leadership américain (George Bush senior). Pour d'autres occidentaux, plus idéalistes, non nationalistes particulièrement en Europe cela fait espérer l'avènement d'une " communauté internationale " au sein de laquelle les relations internationales se conformeraient enfin aux principes de la Charte de l'organisation des Nations unies (ONU). Il y a un monde global certes, mais en réalité la notion de communauté internationale reste un bel objectif. Les Etats-Unis, puissance plus forte que toute autre puissance actuelle ou historiquement connue, ce qui ne veut pas dire qu'ils sont invulnérables. Les civilisations ne se comprennent pas toutes encore, les antagonismes n'ont pas disparu. Les valeurs talents jugées " universelles " par les occidentaux ne sont pas encore universellement reconnues comme telles. L'Histoire et les rapports de force se poursuivent. L'un des principaux enjeux en est, du point de vue chinois comme du point de vue du reste du monde, l'insertion dans le monde globalisé d'une Chine qui a connu, sous l'impulsion de Deng Xiaoping, puis de Jian zemin, et de Hu Jintao, le formidable développement que l'on sait, résultats d'une stratégie d'hyper croissance, et qui dispose en outre, à l'extérieur, d'une diaspora nombreuse et active. A quel point ce monde " global " sera-t-il modifié par ce processus ? C'est, au même titre que l'évolution de la relation entre l'islam et l'occident, une des plus cruciales questions de notre temps.

par SEM Jean-Vincent ZINSOU, Ambassadeur, Historien
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