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Art et Culture Publié le jeudi 11 juin 2009 | Le Patriote

Interview : Mamadou Toungara (Président de la CPACI) - " Nous œuvrons pour l’avènement d’une industrie audiovisuelle "

Les organisations des producteurs audiovisuels se sont fédérées au sein d’une seule entité : la Conférence des Producteurs Audiovisuels de Côte d’Ivoire (CPACI). Lors de l’assemblée constitutive, les producteurs ont porté Mamadou Latif Toungara à la tête de leur organisation. Dans cette interview, M. Toungara relève les difficultés des acteurs du secteur et lève un coin de voile sur leur collaboration avec la RTI, le seul diffuseur de leurs œuvres.

Le Patriote : Vous venez d’être porté à la tête de la Conférence des Professionnels de l’Audiovisuel de Côte d’Ivoire (CPACI). Quelle nécessité y avait-il à vous fédérer ?

Mamadou Latif Toungara : Il y avait une nécessité absolue. Le samedi matin, j’écoutais le ministre de la Culture, Augustin Komoé, sur les ondes d’une radio privée de la place. Il demandait, aux acteurs de ce secteur, de s’organiser de sorte à mieux se faire aider par l’Etat. Cette exhortation du ministre m’a interpellée et a renforcé ma conviction qu’il faut que nous soyons organisés afin de parler d’une seule voix. C’est surtout le lieu de rendre hommage particulier au ministre de la Communication, Ibrahilm Sy Savané, qui avait compris aussi qu’il fallait nous amener à nous regrouper

L.P : Quels sont les problèmes que rencontrent les producteurs audiovisuels, aujourd’hui ?
MLT : Il y a un problème de formation. Beaucoup d’acteurs du secteur ne sont pas bien formés, donc ne sont pas de véritables professionnels. En outre, nous ne sommes pas suffisamment organisés. Il y en a qui sont dans l’informel. Alors qu’il y aura plusieurs chaînes de télé et radios avec le défi de la libéralisation de l’espace audiovisuel qui sera une réalité bientôt. Il faudrait que les producteurs soient à même de vendre leurs programmes. Nous devons être une véritable industrie de production de programmes comme au Nigeria, afin de diffuser la Culture ivoirienne à tout moment. En tout cas, il faut que nous soyons très professionnels, bien formés et en règle avec l’Etat qui, en retour, a le devoir d’aménager l’environnement fiscal qui nous permette de nous épanouir.

L.P : Quel est le profil d’un producteur audiovisuel et combien de professionnels revendiquent votre organisation ?
MLT : Pour simplifier les choses, c’est un entrepreneur qui réunit les moyens de financer un rêve. C’est-à-dire un film, un téléfilm… Nous en dénombrons une cinquantaine. Il y a des producteurs indépendants et des entreprises constituées.


L.P : En l’état actuel des choses, la Côte d’Ivoire n’a qu’une seule télévision. Quel est l’état de la collaboration entre les producteurs et cette maison ?

MLT : Notre collaboration n’est pas de toute beauté. Mais nous parviendrons à solutionner les problèmes. Les missions de la télévision ont évolué depuis sa création. Elle était la voix du gouvernement, du président de la République… En 1991, il y a eu la première loi qui dit que désormais, la communication audiovisuelle est libre, à condition de respecter un certain nombre de règles. Cette loi a été améliorée par celle de 2004. La télévision d’Etat a désormais les missions d’information, de formation, de communication pour la pluralité d’opinions. Mais, aujourd’hui, à voir notre télé, on s’interroge si elle remplit ces missions ? Les producteurs sont les partenaires naturels et la télé doit diffuser nos productions. Ce sera une manière, pour elle, de contribuer au développement de la production audiovisuelle.

L.P : Quels sont les actions à prioriser dans votre programme d’activités ?

MLT : Moi, mon ambition est d’organiser les producteurs audiovisuels pour l’avènement d’une industrie audiovisuelle et relever le défi de la libéralisation en Côte d’Ivoire. Il faut que la Côte d’Ivoire entre dans le village planétaire. Mon programme s’articule autour de cinq points. D’abord, il faut nous organiser nous-mêmes en donnant un statut au producteur audiovisuel, faire de la formation, rendre l’environnement économique favorable avec l’appui de l’Etat, etc.
Dans le cahier de charges, les médias d’Etat doivent diffuser 50% d’œuvres nationales. Mais, la part des producteurs privés que nous sommes n’a jamais été clarifiée. Il est écrit également que le diffuseur national qu’est la RTI doit verser 1 % de son chiffre d’affaires annuel au cinéma et 0,5% à l’audiovisuel. C’est une loi qui date de 1995 et depuis lors, cette contribution n’a jamais été reversée. Aujourd’hui, personne ne connaît ce chiffre d’affaires. Il est dit aussi que la RTI doit déposer son bilan annuel au CNCA. Il faut que la RTI se mette en règle vis-à-vis des producteurs pour que nous soyons opérationnels.

L.P : Quel jugement portez- vous sur les productions ivoiriennes aujourd’hui ?
MLT : A quelques exceptions près, la qualité ne me satisfait pas, en tant que professionnel. Nous devons améliorer la qualité des productions audiovisuelles en Côte d’Ivoire. Les productions internes de la télé ne sont pas en marge. Les émissions de variétés musicales ont pris le dessus sur tout. Alors qu’il faut des productions qui doivent cultiver, informer sur les grandes endémies telles que le paludisme, le sida… Il faut montrer des divertissements sains aux jeunes gens. Alors, nous disons que la RTI ne fait pas de la communication audiovisuelle. C’est vrai que la télé a un déficit de matériel, mais, je pense qu’il y a des producteurs ivoiriens qui peuvent offrir de bons produits. Des fois, on constate que sur des images de reportage de la RTI, on n’arrive pas à distinguer les personnes fixées. Ce n’est pas professionnel ! Je suis vraiment dépité à des moments par la qualité de certaines productions tant internes qu’externes à la télévision ivoirienne. Et c’est ça que nous devons améliorer.

L.P : A propos de la libéralisation, combien de chaînes de télévision, pour vous, faut- il aujourd’hui à la Côte d’Ivoire ?

MLT : La libéralisation est une excellente option pour un pays. Mais, il faut qu’elle soit bien faite. Et nous sommes heureux d’avoir été informés, par le ministre de la Communication sur les études ayant trait à la libéralisation. Un dossier dont il maîtrise tous les contours. Par exemple, l’Union Internationale des Télécommunications exige que toutes les productions soient numérisées d’ici à 2015. Avec cette numérisation, il est possible de créer 20 à 40 chaînes de télévision. Mais, il ne faut pas faire comme en RD Congo où il y a 60 chaînes. Ceux qui ont mené les études de la libéralisation ont conseillé la prudence. Ils conseillent la création de deux ou trois chaînes d’abord et après on pourra accroître le nombre. Moi je suis d’avis avec eux. Ce qu’on peut faire aussi, c’est de créer des télévisions régionales qui, aux heures de grande écoute, toutes les télé régionales décrochent et se mettent sur les fréquences de la chaîne nationale. Cette libéralisation va stimuler l’émulation.

L.P : La sous-région est inondée de productions ivoiriennes. Pêle-mêle, on peut parler de " Ma Famille de Akissi Delta ; "Nafi" de Djué Djuéssi… Alors, quel est le poids des producteurs ivoiriens dans cet espace ?

MLT : Il est mitigé. Mais, c’est au prix de mille sacrifices que ces œuvres sont produites ! L’environnement n’est pas favorable à l’expansion des productions. Le poids est vraiment moyen. On doit faire plus et avoir comme premier concurrent le Nigeria. Sur le plan qualité, il faut qu’on arrive à damner le pion à ce pays. Nous avons beaucoup de potentialités. C’est l’Etat qui peut nous aider à éclore en rendant l’environnement structurel et économique sain. Puisque c’est un secteur pourvoyeur d’emplois. Tous les corps de métiers y trouvent leur compte. Puisque l’école studio n’existe plus, nous souhaitons que le ministère de la Communication puisse délivrer des agréments pour la création d’écoles de formation de producteurs audiovisuels.
Jean- Antoine Doudou
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