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Politique Publié le lundi 12 octobre 2009 | Le Patriote

Le FPI et la “nécropolitique”

On la croyait bien partie pour connaître, enfin, un épilogue samedi dernier. Mais la série mélodramatique des obsèques du professeur Frederick Guédé Guinan, déjà suffisamment riche en contrecoups plutôt macabres, n’est pas prête de s’arrêter. En si bon chemin, devrait-on dire ! Le chemin de ceux qui, depuis l’annonce du décès, le 04 aout dernier, du maire de Daloa, ne cessent, par des manœuvres honteuses et abjectes, de priver sa famille du droit légitime d’enterrer dignement un être cher. Le chemin, démoniaque s’il en est, de ceux qui semblent avoir perdu tout sens de l’éthique humaine et résolument prêts à toutes les bassesses du monde pour monnayer, à des fins politiciennes, les funérailles d’un homme qui mérite tout, sauf ce qui lui est infligé aujourd’hui.

En faisant interdire, par une Ordonnance, la levée de corps et l’inhumation au cimetière de Williamsville du professeur Guédé Guinan, alors que sa propre famille, nucléaire comme on dit, c’est-à-dire son épouse et ses enfants biologiques, avait décidé que cela fut ainsi, Lohoury Guigui, le conseiller spécial de Laurent Gbagbo, visiblement aux ordres de ce dernier, a sans doute poussé trop loin le bouchon de l’indignité humaine. Celle qui viole de façon aussi spectaculaire qu’éhontée le principe, surtout en Afrique, du respect du mort et le caractère absolument sacré des dernières volontés de celui-ci.

Le demi-frère, finalement indigne – puisqu’il n’a jamais démenti avoir répugné près de deux décennies durant son frangin –, en faisant d’abord bombarder à la grenade incendiaire la tombe de l’illustre disparu et en proférant ensuite des menaces à ses propres neveux, avait déjà fait montre d’une attitude proche de la délinquance. En les empêchant par surcroît de s’approcher de la dépouille de leur père – un important détachement de forces de l’ordre a été déployé pour la circonstance à Ivosep et à l’église Sainte-Famille de la Riviera –, Lohoury Guigui bascule carrément dans une sorte d’hystérie morale, qui ne pouvait que faire lever le voile sur les vrais desseins d’un tel déchaînement antifamiliale.

Et il suffit alors d’un rapide décodage des signes pour comprendre que le conseiller spécial du chef de l’Etat se trouve pris exactement dans la même spirale « politico-sépulcrale » que celle d’un certain Franck Guéi, du nom du fils aîné du défunt général Robert Guéi, assassiné aux prémices heures de la crise et dont l’inhumation avait connu le même tumulte funeste que celui auquel les Ivoiriens assistent en ce moment autour de la dépouille de Guédé Guina. Car autant Lohoury Guigui rue en ce moment dans les brancards de l’inconséquence et de la défiance tous azimuts, autant le jeune Franck – à l’époque totalement contrôlé par Gbagbo et aujourd’hui …conseiller spécial de ce dernier – était tout aussi sourd à toute tentative de conciliation familiale autour des obsèques de son père. La seule différence – sauf qu’elle est de taille et trahit les projets politiciens de Gbagbo – réside dans ce flagrant deux poids deux mesures observé par le chef de l’Etat, qui refuse aux enfants de Guédé Guina le droit de décider du lieu de la sépulture de leur père là où il avait quasiment poussé Franck dans le dos jusqu’à lui faire enterrer son père, même pas au cimetière, mais dans sa propre résidence, parmi les gratte-ciel du Plateau, quartier des affaires d’Abidjan.

Dans un cas comme dans l’autre, un constat se dégage. C’est celui de cette sorte d’attirance qu’éprouve notre président pour les morts qu’on pourrait qualifier de « grands », mais qui sont surtout – et ça compte énormément à ses yeux – politiquement marqués aux couleurs de ses adversaires politiques. En faisant mains et pieds pour s’approprier leurs obsèques, il a toujours à l’esprit d’en tirer des bénéfices politiques. Avec Guéi, il avait à cœur de mettre sous l’éteignoir le parti qui lui avait survécu, l’UDPCI, espérant récupérer le bastion sociologique de l’Ouest. Avec Guédé Guina, c’est surtout au RDR et à Ouattara dont le défunt était un éminent cadre et compagnon qu’il entend faire perdre des plumes. Son raisonnement en est simple : un succès populaire de ces obsèques (d’abord à Daloa puis à Abidjan), en présence de Ouattara, serait au bénéfice politique de celui-ci, surtout quand on sait qu’avant de mourir, le secrétaire national chargé de la Défense du RDR et maire de Daloa avait émis le vœu de voir son patron s’impliquer personnellement dans les cérémonies d’Adieu. Reste donc le village où on espère que Ouattara n’oserait pas arriver. C’est le sens du combat que mène en ce moment Lohoury-Guigui.

On a visiblement affaire avec cet autre feuilleton funèbre, a ce qu’on pourrait qualifier de « nécropolitique », cette politique qui veut tirer ses bénéfices du cadavre de l’adversaire la politique.

KORE EMMANUEL
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