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Économie Publié le vendredi 15 janvier 2010 | Nord-Sud

Ancien permis de conduire : Ça rackette fort à Angré et à Sébroko

Les deux centres (Angré et Sébroko) de confection du permis de conduire à Abidjan, inquiètent. Depuis la prolongation du renouvellement de l’ancien permis, les demandeurs dénoncent une forme de racket jamais vue dans les locaux de ces structures. Reportage.

Une foule agglutinée, suant abondamment sous l’effet de la chaleur torride de ce mardi, se plaint devant l’entrée de la Starten technologie, aux 2 Plateaux. Murmures de nervosité, injures, bousculade, c’est le spectacle qu’offrent ces demandeurs, une centaine, venus renouveler leur permis de conduire. Certains, fatigués de faire le rang, se reposent sous un arbre, d’autres, à l’ombre de quelques commerces qui font face au guichet.

Il est 14h, Aboubacar, arrivé depuis 6 h, n’en peut plus, il craque et décide de rentrer à la maison. Sur le chemin, certains qui l’ont remarqué le désignent du doigt : « Il était l’un des premiers à venir faire le rang, c’est maintenant qu’il a eu son reçu. » Avec le reçu, le demandeur revient faire sa prise de sang, sa visite médicale, sa photo pour le permis format ‘‘carte de crédit’’. Mais, Aboubacar, la vingtaine, n’a pas eu de reçu. Après près de 8 h d’attente harassante dans le rang, alors qu’il était le quatrième, le garçon affirme qu’il n’a pas pu entrer, hélas !
Comment est-ce possible ? « Il faut payer pour être reçu», explique-t-il, incapable d’en dire plus tellement la colère étreint sa gorge. Tout comme lui, les détenteurs de l’ancien permis qui ont bénéficié d’un prolongement de 3 mois, déchantent devant le guichet de la Starten depuis le debut du mois. « J’ai payé 30.000 Fcfa pour avoir mon reçu au lieu de 21. 500 Fcfa. Si tu ne le fais pas, on ne te laisse pas entrer » : ce sont les propos de D. M, qui rentre lui aussi à la maison. Il est venu un peu plus tard qu’Aboubacar, mais il lui a fallu payer 9.000 Fcfa à un démarcheur, en plus de 21. 500 Fcfa, le prix de renouvellement. Celui-ci est allé se concerter avec sa « vieille mère » (un agent complice) à l’intérieur pour que D. M. puisse entrer et remplir les formalités, sans faire le rang. Souvent, c’est au vigile ou à un agent de la Starten qu’il faut payer directement le passe-droit pour entrer, selon les demandeurs. Tout le monde n’a pas de quoi corrompre ces agents pour être reçu. Dans la foule, les plus intègres essayent de suivre la procédure normale. Mais, le rang est de temps en temps cafouillé par les vigiles à l’entrée. Acte volontaire ? Commentaire d’un chauffeur de taxi qui croupit depuis des heures devant l’entrée sans y avoir accès : « Ils le font pour nous montrer que celui qui ne paye pas, n’entrera pas pour avoir son reçu.» M. Brou, un demandeur, s’est mis finalement de côté, dos tourné à la bousculade. « Inutile de faire le rang parce que ça ne bouge pas », explique-t-il, grongneur. Dans la foule, quelques personnes sont… choisies par un agent qui apparaît par moments au pas de la porte pour les appeler.

Payer 10.000 Fcfa pour entrer

A chaque ouverture de cette porte, la bousculade s’intensifie, on essaye de s’infiltrer sous l’aisselle de l’agent. Mais, le vigile à l’entrée, vigilant comme un cerbère, sait qui doit entrer et qui ne le doit pas. «Ce sont les gens qui ont payé 5.000 parfois 10.000 Fcfa pour être reçus qui entrent», explique un jeune homme dans la foule. En effet, le sésame pour entrer tourne entre 5.000 et 10.000 Fcfa. Beaucoup ont de l’argent pour payer leur « droit d’entrée» en plus des frais du permis, mais, ils jouent la prudence. Car, même ayant payé pour entrer, le demandeur n’aura que le reçu d’inscription, il lui faudrait encore revenir pour les autres examens. « Et vous risquez encore de payer, car une fois que vous admettez qu’ils vous prennent des dessous de table, vous continuerez d’être racketté », indique un demandeur. Koné Mamadou, un chaufeur de gbaka (véhicule de transport commun), a vécu cette situation. «Après avoir payé 10.000 Fcfa en plus des 21.500 Fcfa exigés, l’agent qui m’a reçu m’avait assuré que je reviendrais faire mes autres examens sans faire de rang, mais, aujourd’hui lorque je suis arrivé, il m’a dit qu’il ne me reconnaissait pas. J’ai compris que je devais encore payer.» Il rentre chez lui, plus question de payer quoi que ce soit ! Il est écrit sur son reçu qu’il a dix jours pour faire ses autres examens. Mamadou espère que le tohu-bohu qui règne devant le guichet va diminuer d’ici là. Mais, la réalité est que les sites des Deux-Plateaux et de Sébroko (Attécoubé) à proxmité du Lanema (Laboratoire national d’essais de qualité métrologique et d’analyses), sont de plus en plus engorgés. A Attécoubé, comme à la Starten, les demandeurs qui viennent de l’intérieur du pays sont les plus malheureux. Car, ce n’est qu’une fois arrivés sur le site que beaucoup sont imprégnés de la dure réalité qu’il faut affronter pour avoir son permis. T.O, par exemple, est venu de Daloa. Depuis 21 jours qu’il vient faire le rang, à l’Anema, impossible d’avoir le permis. Il n’a même pas encore été reçu par un agent, à cause de la foule et du racket. Prevu pour une semaine au plus, son voyage pour avoir son permis format ‘‘carte de crédit’’ prend du temps. N’ayant personne chez qui loger à Abidjan, il est obligé de dormir à la belle étoile à la gare qui se trouve non loin de là, près de l’Onuci. Et, il y a deux jours, il a été obligé de vendre son téléphonne portable pour avoir de quoi assumer sa nourriture. Depuis que le delais de renouvellement du permis a été repoussé, ce sont des milliers de demandeurs qui ne veulent plus se laisser surprendre par la date limite qui essayent d’avoir leur document. Malheureusement, le rythme auquel sont traités les dossiers, ne rassure pas. Au vu de ce qui se passe, si les choses n’évoluent pas, le 31 mars risque d’être court et même très court pour beaucoup d’entre eux.


Raphaël Tanoh
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