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Politique Publié le vendredi 26 mars 2010 | Notre Voie

A propos du processus de sortie de crise - Sokouri Bohui : “Le contrat qui lie Soro aux Ivoiriens, c`est le désarmement”

Le débat sur la transparence des élections et le désarmement bat son plein. Dans cet entretien de ce vendredi, le député Sokouri Bohui, secrétaire national chargé des élections du FPI apporte la contradiction au Forces nouvelles qui affirment que le désarmement n’est pas un préalable à l’élection présidentielle.


Notre Voie : Les Forces nouvelles ont donné une conférence de presse au cours de laquelle leur porte-parole Me Affoussy Bamba a dit que le désarmement n’est pas un préalable au désarmement. Que lui répondez-vous ?

Martin Sokouri Bohui : C’est surprenant et regrettable d’entendre de tels propos de la part d’un partenaire engagé dans le processus de paix avec le camp présidentiel. Si de tels propos étaient tenus par le RHDP qui n’est pas signataire de l’Accord politique de Ouagadougou bien qu’il en soit partie prenante, cela me choquerait moins. Parce que nous savons tous le jeu clair du RHDP qui est pour qu’on organise les élections dans la fraude. Justement parce qu’ils sont minoritaires. Mais que cela vienne des Forces nouvelles, qui par la signature de l’Accord politique de Ouagadougou du 4 mars 2007 ont commencé a donner espoir aux Ivoiriens en renonçant à la guerre et en empruntant résolument le chemin de la paix, est tout simplement insultant.

En effet, les Forces nouvelles ont eu tout ce qu’elles ont demandé dans cette crise. le président a cédé sur toutes leurs revendications pour justement offrir la paix aux Ivoiriens. La revendication principale était que Ouattara soit candidat. Il est candidat. Il est donc candidat par la guerre. Je crois qu’ils ont trop fait et qu’il faut qu’ils arrêtent maintenant. Parce qu’ils ne peuvent quand même pas nous dire qu’après avoir fait de Ouattara candidat par la guerre, ils vont tenter de faire de lui président de la République par la fraude. C’est une chose qui ne marchera pas ici en Côte d’Ivoire.

Dans tous les cas, nous voyons le dos du nageur. Et ils doivent savoir que nous ne resterons pas inactifs à cette manœuvre. Je suis d’autant plus révolté que c’est la guerre qui est à la base du retard de notre pays et de la misère des Ivoiriens. Mais le président Gbagbo soucieux du bien-être des habitants de ce pays, a initié le dialogue direct qui a abouti à l’accord politique de Ouagadougou. Lequel accord a fait faire à notre pays des avancées notables sur le chemin de la paix. C’est pourquoi dans nos discours, nous avons toujours félicité le Premier ministre Guillaume Soro qui a saisi la main à lui tendue par le président de la République. Nous avons salué cet acte de courage dans toutes nos sorties. Tout comme nous saluons aussi cet autre acte de courage qu’il avait pris quelques jours après l’éclatement de cette guerre, où il a revendiqué la rébellion, lui donnant ainsi un visage. Cet acte ayant permis d’avoir un interlocuteur avec qui négocier pour aller à la paix. Mais nous savions tous que Soro n’était pas le commanditaire, puisqu’il était étudiant. Il n’avait pas les moyens d’acquérir les chars, les calash, les tangs, etc…. Les vrais commanditaires qui sont connus mais tapis dans l’ombre, veulent être blancs comme neige et le petit Soro a décidé d’aller au charbon. C’est le même Soro qui a signé cet accord de paix de Ouagadougou, plus précisément l’accord 4 qui stipule à son article 3 que le désarmement et la réunification du pays doivent être terminés deux mois avant les élections. Il a signé cet accord non pas en sa qualité de Premier ministre, mais en qualité de secrétaire général des Forces nouvelles. Soro doit travailler très rapidement à offrir le désarmement aux Ivoiriens. Les Ivoiriens ont accepté qu’il soit Premier ministre, la seule chose qu’il doit leur offrir en retour, c’est le désarmement. C’est le contrat qui le lie aux Ivoiriens. C’est au nom de ce même contrat que les Ivoiriens ont accepté que les cadres des Forces nouvelles soient au gouvernement. C’est pour offrir la paix aux Ivoiriens que ceux-ci ont accepté qu’ils les Forces nouvelles rentrent au gouvernement. Ce n’est pas une prime à la guerre. Ce n'est pas non plus pour que Ouattara soit président de la République par la fraude.

Dire que le désarmement n’est pas un préalable aux élections, c’est renier la signature du Premier ministre Soro. Et c’est même se moquer des Ivoiriens. Ceux-ci attendent plutôt des Forces nouvelles qui ne sont pas candidates, qu’elles les rassurent sur la transparence des élections et sur l’organisation du scrutin dans un climat de paix et de sérénité. Car les Ivoiriens et le camp présidentiel avec eux n’envisagent pas les élections sans le désarmement. Que les Forces nouvelles se le tiennent pour dit, sans désarmement, pas d’ élections.


N.V. Ouattara a déjà dit qu’on a fait les élections sous les armes ?

M.S.B. : En Irak, c’est les Etats-Unis qui ont fait la guerre à l’Irak. Et le président irakien a été tué. Il fallait donc mettre en place un nouveau régime pour diriger le pays. Parce que le pays n’avait plus de tête. Et aucun américain n’était candidat à ces élections. Et ceux qui étaient en armes, c’étaient les Américains qui n’étaient pas candidats. Mais chez nous, celui qui a fait la guerre est candidat. Donc si ses combattants sont en armes au moment où on fait les élections, le vote ne sera pas libre. Mais comme nous savons que les Ivoiriens ne voteront pas celui qui leur a envoyé la guerre, si celui-ci n’est pas proclamé vainqueur, ses combattants reprendront la guerre. C’est pour cette raison que le désarment est un préalable aux élections.



N.V. : La porte-parole des FN a aussi dit que les CEL ne seront pas renouvelées et la liste électorale ne sera pas non plus auditée.

M.S.B. : Par cette déclaration, les Forces nouvelles font fausse route, parce que à ce que je sache, elles ne sont pas candidates, du moins officiellement. Dans cette élection notre adversaire, c’est le RHDP. Est-ce que les Forces nouvelles veulent-elles dire qu’elles sont les porte-parole du RHDP ?

En ce qui nous concerne, nous pensons que le rôle des Forces nouvelles, c’est de rassurer sur la transparence des élections. Parce que leur secrétaire général est, en sa qualité de Premier ministre, le maître d’ouvrage du processus électoral. Nous avons déjà donné les raisons pour lesquelles les CEL doivent être renouvelées et la liste électorale auditée. Nous ne reviendrons pas là-dessus. Je voudrais seulement dire à l’endroit de ceux qui ne veulent pas de l’audit, que c’est leur position qui rend davantage la liste suspecte. S’ils pensent qu’elle est bonne, alors laissons l’audit confondre nous autres qui disons qu’elle comporte des tricheurs. Mais le fait qu’ils ne veulent pas du tout qu’elle soit auditée, fait planer sur cette liste, une suspicion légitime. Ils nous confortent donc dans notre position de voire la liste auditée pour voir ce qu’ils cachent. Une bonne liste peut être taxée de mauvaise par le fait que le RHDP donne l’impression de cacher quelque chose de suspect. En tout état de cause, nous, nous n’avons pas confiance en cette liste. Nous avons donc besoin qu’on nous rassure. Dans le camp présidentiel, ce que nous recherchons, c’est la transparence des élections. Si nous demandons le désarmement, c’est pour la transparence des élections. Si nous demandons l’audit, c’est pour la transparence des élections ; si nous demandons le renouvellement des CEL, c’est pour la transparence des élections ; si nous demandons la voix délibérative de tous les membres de la CEI, c’est pour la transparence des élections. Je demande donc au Premier ministre que je félicite au passage pour avoir demandé qu’on inscrive sur sa table les problèmes liés au contentieux, notamment sur ces sujets, d’inviter tous les acteurs politiques à des discussions pour rassurer l’ensemble des acteurs. C’est dans la discussion et dans la concertation que nous trouverons les solutions aux problèmes posés par les uns et les autres. Le Premier ministre doit se saisir de ce moment de l’histoire fragile et crucial de notre pays pour le conduire à une paix durable par la transparence des élections. C’est de cette façon seulement qu’il rentrera dans l’histoire par la grande porte.

Entretien réalisé par Boga Sivori
bogasivo@yahoo.fr
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