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Politique Publié le samedi 3 avril 2010 | Notre Voie

En attendant le désarmement et la réunification - Les Forces nouvelles écoulent café, cacao, bois et or dans les pays voisins

C’est le moins qu’on puisse dire. L’économie ivoirienne est pillée dans les zones centre, nord et ouest au profit des pays de la sous-région. Les produits phares sur lesquels repose l’économie de la Côte d’Ivoire sont abusivement exploités dans les zones sous contrôle de l’ex-rébellion et convoyés chaque jour au Burkina Faso, Mali, Guinée, Togo et Ghana. Le cacao, le café, le bois et l’or produits à Vavoua, Danané, Man, Bouna sont payés aux producteurs à des prix dérisoires pour être écoulés dans ces pays voisins. Notre dernier passage à Madinani nous a permis de faire l’amer constat de ce trafic qui fait mal à la Côte d’Ivoire. Les villes de Danané, Man, Odienné, Madinani, Boundiali sont les zones de transit de ces produits. «Chaque semaine, ce sont les chargements de café, de bois et de cacao qui passent par ici en partance pour le Burkina. Les camions de 30 à 40 tonnes de chargement de ces produits vont au Burkina. Quant aux chargements de 70 à 80 tonnes, ils sont acheminés vers le Togo et le Ghana. Il arrive que ces camions coupent les fils électriques dans notre région. Vraiment, nous en avons marre», a déclaré très amer, un adjoint au maire de Madinani. Il ne s’en cache plus, il n’est pas content et a mal au cœur de voir la richesse de son pays pillée par les éléments des Forces nouvelles. Le témoignage de cette autorité municipale vient éclairer le visiteur qui emprunte la voie de terre rouge entre Boundiali et Odienné. Ce tronçon est l’itinéraire d’un trafic intense. En effet, sur cette voie, il nous a été donné de voir de gros camions qui ploient sous le poids de chargements de planches obtenues du bois qui a été coupé dans ces zones qui échappent depuis 2002 au contrôle de l’Etat de Côte d’Ivoire. De nombreux sacs de cacao et de café débordent de gros camions. Entre Boundiali et Madinani, ces camions dont les chargements dépassent les normes recommandées, tombent très souvent en panne et, selon les témoignages, restent là des semaines avant d’être réparés. Mais là n’est pas le problème. Le drame, c’est que pendant que l’Etat ivoirien se saigne pour répondre aux exigences financières des Ivoiriens et particulièrement des ex-rebelles afin de sortir le pays de la crise, ces derniers se livrent à un pillage sauvage de ce qui rapporte l’argent au pays. Et les bénéficiaires sont les pays voisins de la Côte d’Ivoire qui ne cessent de chanter à longueur de journée qu’ils sont aux côtés de la Côte d’Ivoire pour l’aider à sortir de la crise et à renouer définitivement avec la paix. Le Burkina Faso, pays du président Blaise Compaoré, facilitateur dans la crise ivoirienne, est devenu la destination prisée du cacao, du café et du bois ivoiriens. On se demande bien pourquoi le facilitateur, qui est très préoccupé par la paix en Côte d’Ivoire, ferme les yeux sur ce trafic qui n’est pourtant pas de nature à faciliter le désarmement. Parce que ce trafic est fait par ceux qui tiennent les armes et Dieu seul sait combien le statu quo ante les arrange. Tant qu’on n’aura pas mis un holà à ce commerce illicite particulièrement juteux, ils s’opposeront toujours par tous les moyens au désarmement. Ces ex-rebelles sont devenus des opérateurs économiques qui, selon les nombreux témoignages, imposent aux pauvres producteurs, le prix d’achat de leurs produits. A Vavoua, Danané et Man, le kilogramme de cacao est payé à 300 FCFA ou au plus 400 FCFA contre le gré des producteurs. Alors qu’officiellement, le kilogramme de cacao est payé à 1000FCFA voire 1.200 FCFA. La difficulté pour les producteurs de ces zones est qu’ils n’ont pas d’autre choix que de vendre leurs produits aux ex-rebelles ou à ceux que ces ex-rebelles accompagnent. Celui qui tente de prendre la direction de la zone gouvernementale est menacé de mort ou taxé très fortement. Le bois est coupé par les ex-rebelles eux-mêmes sans tenir compte de l’avancée du désert, exposant ainsi tout le pays et singulièrement la partie nord de la Côte d’Ivoire qui est une zone de savane. Le bois planté par la SODEFOR, le teck, est devenu la véritable source de revenu pour certains rebelles reconvertis en exploitants forestiers. On le voit donc, l’unicité des caisses de l’Etat n’est pas pour demain pour les hommes de Guillaume Soro. Et le Premier ministre ne semble rien faire pour permettre à l’Etat de récupérer toutes ces richesses du pays. La même saignée est signalée du côté de Bouna. Selon de nombreux témoignages, des individus, venus des pays voisins de la Côte d’Ivoire, s’installent et exploitent de façon artisanale l’or ivoirien. Ils ne sont pas du tout inquiétés. Bien au contraire, ils sont couverts par les Forces nouvelles qui tirent grand profit de cette exploitation. L’or ivoirien est, dit-on, vendu au Burkina Faso. Dans les rares cas, quand les hommes de Guillaume Soro ne sont pas au centre du trafic, ils aident les trafiquants en escortant les camions à écouler ces produits dans les pays voisins moyennant de grosses sommes d’argent. Cela a été vérifié sur le tronçon Korhogo-Boundiali. Au corridor dressé à la sortie de la ville de Korhogo, les éléments des Forces nouvelles ont arrêté notre véhicule. «Prenez notre ami qui va à Boundiali. C’est un escorteur qui est venu avec un camion. Aidez-nous à le ramener à Boundiali», a plaidé un élément des Forces nouvelles en poste à ce corridor. Nous avons hésité avant de le prendre. A l’entrée de Boundiali, sont garées de nombreuses motos appartenant aux ex-rebelles qui tiennent le corridor. Visiblement, ils sont préoccupés à prendre systématiquement de l’argent à tous les camions qui passent par là. A notre arrivée, certains camions étaient en stationnement. Dans leur pratique, les éléments des Forces nouvelles escortent les camions qui se rendent soit au Burkina, au Mali, soit en Guinée pour y écouler les produits ivoiriens et en revenir avec d’autres marchandises qu’ils mettent clandestinement sur le marché ivoirien, faisant du coup une concurrence malsaine aux entreprises ivoiriennes. Combien de temps cela va-t-il durer encore ? Benjamin Koré, envoyé spécial au nord benjaminkore@yahoo.fr
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