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Politique Publié le mercredi 28 avril 2010 | Fraternité Matin

FPI : A coeur ouvert avec Abou Drahamane Sangaré

© Fraternité Matin Par Prisca
Préparatifs du 20ème anniversaire de la fête de la liberté - Le FPI reçoit la presse.
Jeudi 08 Avril 2010 – Ivotel / Dans le cadre des préparatifs du 20ème anniversaire de la fête de la liberté, le Front Populaire Ivoirien a convié la presse à un déjeuner- débat autour du thème : "Gagner les élections pour une Côte d`ivoire libre, indépendante et souveraine.
Monsieur le président du Comité central d’organisation de la fête de la liberté, on a l’habitude de fêter un quart de siècle, un demi-siècle. Mais que représentent 20 ans, pour vous, pour que ce soit une fête aussi grandiose que celle que vous préparez ?

Une fête grandiose ? On peut l’affirmer. Vous savez que la fête de la liberté a été régulièrement célébrée jusqu’en 2002. Année à laquelle il y a eu cette guerre suivie d’une crise militaro-politique qui n’a même pas fini de livrer tous ses secrets. Il fallait sauver la Côte d’Ivoire, sauver ses institutions .En effet pour que les libertés existent, il faut que l’Etat existe. Nous nous sommes attelés à ce travail et aujourd’hui, nous avons décidé de fêter la liberté parce que 2010 est au confluent de plusieurs événements. Les 50 ans d’indépendance de la Côte d’Ivoire, les 20 ans du retour au multipartisme, les 10 ans de l’exercice du pouvoir par le Président Laurent Gbagbo.

Il y a aussi, pour nous Fpi, les 22 ans du congrès constitutif et l’année électorale. Nous pensons que cette année, il fallait célébrer la liberté, montrer que nous avons fait du chemin et qu’il faut en faire davantage. On la veut grandiose à la hauteur de l’événement mais aussi à la hauteur de ce que les militants et les démocrates attendaient de nous. Parce qu’il y avait des nostalgiques de la fête de la liberté. Il faut leur répondre aujourd’hui, pour montrer que le Fpi est là et bien là pour l’année électorale. Aussi lorsque nous parlons de la victoire du Président Laurent Gbagbo au premier tour, ce n’est pas une vue de l’esprit, ce n’est pas un slogan. Nous y croyons et nous allons nous mobiliser en conséquence.

D’aucuns disent que c’est une manière, pour le Fpi de se mobiliser face à La grande majorité présidentielle qui aujourd’hui, semble vous porter ombrage.

Non, je pense que le Fpi a dépassé ces débats, il est déjà mobilisé. Le terme «remobiliser» est peut-être excessif. Puisse que nous sommes déjà mobilisés. Pendant cette crise, il y a eu une synergie pour sauver la République. Il y avait les partisans du Président Gbagbo et les militants du Fpi ; il fallait tout faire ensemble. Nous n’étions pas les seuls à nous battre pour la liberté, à savoir ce qu’est la liberté. Nous avons certes mené un combat d’avant-garde dans ce domaine mais nous ne sommes plus seuls. Tous ceux qui se sont battus pour la République, la démocratie, la patrie, se sont retrouvés à un moment donné pour faire bloc autour du Président Laurent Gbagbo. Donc, on n’a vraiment pas de problème à ce niveau. Du reste, ce qui nous unit est plus fort que ce qui peut momentanément nous diviser. Notre dénominateur commun est Laurent Gbagbo.Le FPI continue donc avec eux parce que le plus urgent, aujourd’hui, c’est de repositionner la Côte d’Ivoire. Il faut aller aujourd’hui à l’essentiel qui est l’existence de la Côte d’Ivoire et son retour sur la scène internationale. Le problème ne se pose pas au niveau des partis politiques, il se pose au niveau de la Côte d’Ivoire. Nous n’avons pas de combat à mener contre ceux qui sont pour la Côte d’Ivoire mais contre ses ennemis.



La première fête a eu lieu à Yopougon en 1991. La présente édition, 20 ans après aura lieu c’est encore à Yopougon. Pourquoi n’avoir pas choisi une ville comme Bouaké ? En outre, pensez-vous que la paix est revenue alors que le pays n’est pas encore réunifié ?

Votre question rappelle un peu les débats des premiers moments de la fête de la liberté. Certains de nos amis voulaient nous reprocher de fêter la liberté alors qu’elle n’est pas. Bientôt, on va fêter le 1er mai et pourtant l’emploi n’est pas garanti pour tous ; on fête la journée de la lèpre mais cette maladie invalidante existe toujours. On fête les libertés à travers le monde depuis 1948 mais elles sont toujours menacées. Je pense que nous avons dépassé ce problème. Par ailleurs, nous avons décidé de fêter la liberté à Abidjan toutes les années électorales. Yopougon en 1991, il fallait lancer le mouvement et Yopougon à cet égard, était essentiel parce que c’était justement pour mettre fin au débat qu’il y avait au sein de la gauche. Nous avons décidé de fêter la liberté parce que, c’est d’abord un souvenir pour ceux qui se sont battus pour son instauration, qui ont dit non à l’intolérance, à l’autoritarisme. C’est aussi l’occasion de faire un bilan. Même quand vous semez ou vous récoltez, il y a un moment où vous faites une pause pour regarder ce qui a été fait. Qu’avons-nous fait pour les libertés ? D’ailleurs ce que nous avons vu en 2002 montre bien qu’il faut à chaque fois s’interroger sur les libertés. C’est aussi un engagement qu’on prend pour les annales. Cet engagement concerne notre victoire aux élections pour reconstruire la Côte d’Ivoire afin qu’elle redevienne comme elle était. Il ne faut également pas oublier que Yopougon nous offre le plus grand espace de mobilisation. Cependant, il n’y a pas que Yopougon, il y a aussi le Palais de la Culture de Treichville pour les conférences. Bouaké était dans nos prévisions, Ça même fait objet de débat parce que c’est aussi un symbole. Mais ce qui a primé, c’est l’année électorale. En 1995, nous étions à Abidjan ; de 2000 à 2003, nous devions être à Bongouanou ; 2004 à Gagnoa, 2005 à Abidjan et 2010 encore à Abidjan. En 1995, on ne devait même pas fêter à Abidjan mais on y est revenus. Donc pour toutes les années électorales, nous célébrons à Abidjan et pour ce que nous mobilisons comme monde, il n’y a que Yopougon qui nous offre le meilleur cadre. Il y a aussi et surtout le fait que Yopougon est un symbole pour le parti en Côte d’Ivoire. Yopougon est le plus grand bastion du Fpi même si nous avons des bastions partout. Il fallait donc honorer cette commune. Nous avions même à un moment donné voulu célébrer la fête à Cocody mais là encore, les problèmes de salles, d’espace ont fait que nous sommes partis à Yopougon et Treichville. Néanmoins, vous faites bien de parler de Bouaké qui était aussi pour nous un symbole de la paix. Mais après réflexion, nous avons préféré être là où il y a le siège du pouvoir.



Pour revenir au thème de la fête, qu’entendez-vous par «Gagner les élections pour une Côte d’Ivoire libre, indépendante et souveraine ?»

Vous avez deux éléments : les élections et le cinquantenaire. Une Côte d’Ivoire libre, indépendante et souveraine fait un clin d’œil au cinquantenaire ; la Côte d’Ivoire est peut-être indépendante mais elle n’est pas souveraine. L’indépendance s’acquiert mais il faut aussi se battre pour la souveraineté. Qui est une notion extérieure, il faut pouvoir se positionner, il ne faut pas vivre sous des diktats. Les événements nous ont bien montré que nous ne sommes pas souverains. Il faut d’abord un pouvoir pour justement se battre afin que la Côte d’Ivoire puisse dire non quand elle veut dire non. Qu’elle dise oui quand elle veut dire oui. Et qu’elle ne gère que les intérêts de son peuple. A travers ce thème, il y a aussi un clin d’œil au cinquantenaire et à l’année électorale. Il faut gagner les élections. Gagner avec ‘‘ER’’ ; c’est-à-dire qu’à tout moment, en 2010, ce thème est valable aussi bien avant qu’après les élections. Si vous gagnez les élections, vous devez vous battre pour que la Côte d’Ivoire soit libre, indépendante et souveraine.



Jusqu’à quand peut-on estimer que la Côte d’Ivoire est libre ?

C’est un combat de tous les jours, un combat sans cesse renouvelé. Rappelez-vous ce que nous avons vu en 2002, où le FPI accède au pouvoir après s’être battu pour les libertés, c’est en ce moment que le plus dur commence. Aucun Etat n’est aujourd’hui libre mais il y a quand même une gradation dans l’acquisition de la liberté. Même les Etats-Unis ont des contraintes, la France a les siennes. La liberté est un processus, il faut arriver à une étape qui garantisse la stabilité et nous nous battons pour cela. De sorte qu’on pourra dire : «Ouf ! Nous avons fait le plus dur, maintenant, personne ne pourra venir nous parler de coup d’Etat, personne ne viendra nous agresser. Au moins nous pouvons penser à la prospérité et au développement de la Côte d’Ivoire».

C’est ce qui est important parce qu’aujourd’hui, quand vous êtes dans un pays européen, vous ne parlez pas de coup d’Etat. L’Afrique rime avec les coups d’Etat. Elle doit dépasser cela et avec elle, la Côte d’Ivoire. Je crois même qu’avec 2002, le regard que nous posions sur la Côte d’Ivoire change et nous amène à dire : Attention ! La liberté n’est pas encore acquise. Attention, c’est au moment où nous pensions avoir acquis la liberté que, justement, on vient vous l’arracher. Donc continuons de veiller, continuons d’être vigilants, continuons de nous battre, de nous mobiliser pour les libertés. Ce sont tous ces éléments qui vont entrer dans la célébration de cette fête.



Votre développement nous fait penser à une dialectique. Ceux qui ont pris les armes disent qu’il y avait déficit de liberté, délit de faciès, un certain nombre de maux qu’ils ont dénoncés. De votre côté, vous dénoncez une atteinte à la liberté. Finalement, on se demande où se trouve la liberté ?

Le grand débat, c’est qu’ils ont pris les armes. Nous n’avons pas pris les armes en notre temps. On peut critiquer tout dans un pays où rien n’est parfait. Je ne pense pas qu’il y’ait eu délit de faciès comme vous le dites. On peut tout dénoncer, on n’avait pas besoin de prendre les armes. Le Fpi s’est battu pour la transition pacifique à la démocratie, ce ne sont pas les moments qui nous manquaient ni les tentations. Même au sein du parti, certains de l’aile dure étaient pour qu’on prenne les armes. Le Président Gbagbo a résisté parce qu’il sait que l’avenir ne se trouvait pas là. On dit communément qui règne par l’épée périra par l’épée. On n’est jamais trop fort pour être toujours le plus fort. Quand vous allez de force en force, vous trouvez toujours quelqu’un de plus fort que vous. Dans la compétition électorale, face au plus fort, on vous permet encore de vous réassumer ; à ce niveau, il y a un disparaît au profit de l’autre. Donc la grande différence, c’est qu’on peut se battre pour les libertés, chacun à sa manière. Mais quand on prend les armes, on ne peut plus dire qu’on se bat pour les libertés. Je crois que c’est là le divorce total. «Asseyons-nous et discutons, avons-nous coutume de dire. Tout comme. Doucement, doucement, nous sommes pressés». A chaque étape de la vie de la Côte d’Ivoire, nous avons eu des raisons de prendre les armes mais jamais nous ne l’avons fait. Par exemple, le Président Gbagbo a dit : «Je ne suis pas d’accord avec l’article 11 de la Constitution mais il faut qu’il soit appliqué parce que les textes vont dans ce sens».

Quand il a combattu le Président Houphouet et que les résultats de la présidentielle ont été proclamés en 1990, des gens sont venus le voir pour dire de prendre les armes estimant qu’il avait gagné. Il a dit que cela n’est pas la solution. Quand le Président Houphouet-Boigny est mort et que certains sortaient pour triompher alors même qu’il n’était pas encore enterré, Laurent Gbagbo a dit non à la classe politique : «Enterrons d’abord dignement notre premier Président, et après on pourra se battre». Je pense qu’il a posé des actes en Côte d’Ivoire pour une transition pacifique. Et c’est un enfant des élections ; il a même refusé la conférence nationale qui nous vaut aujourd’hui des adversités parce qu’il n’aime pas les arrangements politiques, les Présidents consensuels. Il faut justement qu’on soit oint par le suffrage des urnes. Je pense que c’est ce qui fait la différence aujourd’hui, tout est possible dans un Etat tant qu’on discute, on négocie. Mais quand on prend les armes, on est dans une autre logique et voilà qu’aujourd’hui, on est obligés de déposer les armes pour revenir à la discussion. Et cela nous conforte dans notre position. C’est ce qui fait la différence entre le Fpi et les autres. Nous n’avons jamais été tentés par l’épisode guerrier, nous combattons toujours cela.



Au-delà de l’alternance avec l’arrivée de Laurent Gbagbo et du Fpi au pouvoir en 2000, que peut-on retenir comme éléments marquants dans votre marche vers la liberté et la démocratie ?

L’élément majeur, aujourd’hui, c’est la fragilité de la liberté. Vous pouvez être un enfant des élections mais quand l’enfant des élections rencontre des armes, des violences, ça devient difficile. Parce que Laurent Gbagbo est démocrate, certains veulent le pousser à la faute par une comptabilité macabre pour le faire comparaître devant le Tribunal pénal international. Je crois qu’on n’a rien compris à la démocratie et au parcours de Laurent Gbagbo. Parmi les éléments majeurs, il y a que vous avez un parti qui s’est battu dans l’opposition pour avoir le pouvoir, qui dans l’opposition a offert la paix aux autres. Ce parti est venu au pouvoir, automatiquement il y a une levée de boucliers tout simplement parce que celui qui est là a commis une faute congénitale. C’est un enfant de pauvre, un enfant qui ne prend pas le thé avec les puissances de ce monde, un enfant qui n’est pas monarchiste, qui n’est pas fils de roi. Tout ce qui se passe aujourd’hui, c’est parce qu’ils ont affaire à celui qu’on n’avait pas prévu. Alors on se coalise pour le faire partir. Quand on vient au pouvoir, il y a un état de grâce. Gbagbo n’a pas eu d’état de grâce. Il y a eu un état d’action vigilante pour ne pas tomber en disgrâce. Je pense que ce sont tous ces événements qui nous font penser aujourd’hui que le combat pour la démocratie est le combat le plus utile pour la Côte d’Ivoire. C’est par la démocratie qu’on arrive au développement et à la prospérité. Les Etats les plus puissants de ce monde sont les Etats démocratiques. Tout cela sera développé lors des conférences. On tire sur la refondation par-ci par-là. Mais tout le monde est refondateur pour les besoins de la cause. Le Fpi est un parti qui, croyant aux libertés, s’est battu pour les libertés. Et parce qu’il n’est pas adulé par certains puissants de ce monde, par ceux qui font le monde ; parce qu’il se bat pour que l’Ivoirien aspire au bonheur, au bien-être et parce qu’il refuse le diktat de l’étranger, voulant seulement satisfaire aux besoins des Ivoiriens et parce que celui qui doit diriger ce pays n’est pas un béni oui-oui, automatiquement, on lui déclare la guerre. Nous prenons du recul aujourd’hui, avec la fête de la liberté, c’est un peu une pause que nous faisons et une trêve que nous offrons à la Côte d’Ivoire. L’élément majeur, c’est ce cheminement que nous avons eu. La réflexion continue, certains nous avaient même dit que nous étions trop démocrates, il y avait un excès de démocratie, une coquetterie démocratique du Fpi. Mais nous pensons qu’en matière de démocratie, il n’y a pas d’excès. Ou il y a la démocratie ou il n’y en a pas. Et nous nous battrons toujours pour la démocratie.



Ceux qui le disent, justement, pensent que le pouvoir laisse trop faire et qu’il y a une espèce de laisser-aller.

C’est ce qu’on a appelé coquetterie démocratique ou excès de démocratie. Remarquez aussi que tout cela est voulu. Voyez un peu les conditions de notre accession au pouvoir en 2000 avec des cadavres dans les rues. On parle d’un charnier alors même que le Président n’avait pas encore accédé au pouvoir. Aujourd’hui, curieusement, ceux-là mêmes qui se disaient victimes et qui ont bruyamment ameuté l’opinion nationale et internationale sont ceux qui ont étouffé le dossier du charnier. A ce niveau donc, on ne peut pas parler d’excès de démocratie. Avec les conditions dans lesquelles se trouvait le pays, on devait quand même aller doucement. La solution était-elle de faire des procès aussi tôt arrivé au pouvoir ? C’est au bout de tout cela qu’ils ont planifié la crise de 2002 parce qu’ils se disaient : «au bout d’un mois, ils partiront ; en deux mois, ils partiront ; en trois mois, ils partiront». Mais ils constatent que non seulement ils ne partent pas mais surtout ils sont en train de réussir leur programme et d’être soutenus par la population. C’était quand même en septembre 2002 et début 2003 qu’on devait entrer dans ce que j’appelle la micro, c’est-à-dire qu’on allait s’occuper des problèmes des Ivoiriens puisqu’on avait posé déjà les grands équilibres. C’est dire qu’on était justement en train de réussir et certains se disaient que «s’ils réussissent, ils auront le temps de faire notre procès».

Vous voyez vous-mêmes les aberrations d’aujourd’hui; ceux qui parlent d’impunité sont ceux-là mêmes qui refusent de répondre à la convocation de la justice. Nous n’avons pas hérité d’un Etat fort, on est en train de mettre en place cet Etat. Donc le débat aujourd’hui, c’est l’existence de l’Etat. Je crois qu’on n’a pas la même lecture que les autres. La refondation part de là. Qu’est-ce qu’un Etat ? Quels sont les piliers d’un Etat ? C’est parce qu’il y avait des piliers vermoulus qu’on a parlé de refondation. Quand vous venez refonder, immédiatement, on vous apporte une guerre. C’est quand même difficile, dans cette conjonction d’événements, de défendre son programme. Sinon la notion d’Etat était une notion essentielle dans notre démarche. Qu’est-ce qu’un Etat fort, un Etat faible ? Un Etat peut être fort sans être dictatorial. Faut-il seulement réprimer pour réprimer ? Ce débat aura lieu à la conférence. Je retiens, pour ma part, que quand on veut être démocrate, il n’y a pas d’excès, de balises, de limites. On ne peut pas regretter d’être démocrate. Un Etat fort aussi existe dans les conditions qui font sa force ou sa faiblesse. C’est pourquoi nous voulons aller aux élections, à l’issue desquelles celui qui a le pouvoir a tout le temps. Dans un Etat fort, il faut que les populations soient à l’aise, épanouies pour qu’on n’ait même pas besoin d’avoir à réprimer ou à bander ses muscles. C’est par là que nous voulons passer pour que tout le monde puisse vivre dans une certaine symbiose, un certain épanouissement et qu’on puisse savoir quelles sont les priorités. Aujourd’hui, on manifeste parfois de façon intempestive, de façon illégale tout simplement parce qu’on veut pousser à la faute. Une manifestation dans une République, quoi de plus normal ? Mais quand on va même jusqu’à dire que ceux qui reviennent d’un mouvement de grève ont brisé une grève, ont vendu la grève, vous voyez dans quel Etat on est.



N’est-ce pas de bonne guerre ?

En politique, tout n’est pas permis. Je crois que c’est cela aussi une éthique. Il y a une éthique politique. En politique, tout n’est pas permis.



Ils disent qu’ils vous renvoient l’ascenseur !

Ah non, attention ! Nous avons travaillé dans le cadre des règlements et lois en vigueur. Je ne sais pas de quel ascenseur parlent-ils. Le Fpi n’a jamais marché avec des dozos, il n’a jamais marché avec des personnes armées. Même le 18 février 1992, quand le leader de l’époque du Fpi est venu et qu’il a vu toute cette ambiance avec des gens bardés de chaînes, il a dit de les retirer de la marche. C’est dire qu’il savait déjà ce que les gens avaient préparé. La bonne guerre, c’est l’éthique qu’on propose aux autres. On ne peut pas tout faire, dans l’opposition, c’est «l’oppo-pouvoir», c’est-à-dire l’opposition au pouvoir. Je dirai cette phrase d’Edgar Pisani que j’aime citer : «Quand on est dans l’opposition, on doit se comporter en se disant que demain, on sera au pouvoir et quand on est au pouvoir, on doit se comporter en se disant que demain, on sera dans l’opposition». Parce que ce que vous faites dans l’opposition, quand vous serez au pouvoir, on va vous faire la même chose. Je pense que nous sommes restés dans ce cadre, nous avons une éthique aujourd’hui. Je n’ai jamais vu le Fpi en train de susciter des mouvements par-ci, par-là. On savait à quel moment il fallait s’arrêter pour que l’Etat ne soit pas détruit. On peut aller dans un mouvement mais à un moment donné, il faut arrêter. Le Président Wade le disait récemment, il faut arrêter à un moment donné pour que l’Etat existe. N’oubliez pas que c’était au temps du parti unique, le combat dans le parti unique n’est pas le même que le combat d’aujourd’hui. Des gens parlent aujourd’hui, nous n’avions pas, nous, de répondant ; il fallait se battre tous les jours pour se positionner. Aujourd’hui, dès que vous faites quelque chose, votre action est pratiquement multipliée un peu partout dans l’opinion. Le contexte n’est pas le même, comparaison n’est pas raison. Malgré le parti unique, nous avons combattu en respectant une éthique. Nous avons combattu en respectant la Côte d’Ivoire et les Ivoiriens. Nous avons combattu en respectant la paix parce que c’est par la paix qu’on peut développer un pays.



Vous avez invité beaucoup d’experts pour les conférences. Mais on constate qu’il n’en existe pas qui soient issus de l’opposition ivoirienne (Rhdp) ni de la gauche des années 90. Une explication ?

Ce n’est pas une question de cadres mais d’expertise. On peut en avoir un peut partout. Si le Fpi a quelque chose à proposer, il va justement voir si ce qu’il a posé comme actions pour les libertés est essentiel. Et donc il faut d’abord être Fpi pour pouvoir suivre ce combat, qu’on propose aux autres qui peuvent après le critiquer. Vous prenez par exemple le thème : «Regard extérieur sur la refondation». L’expert est Sénégalais. L’autre vit en Australie. On pouvait prendre quelqu’un de la Côte d’Ivoire pour venir traiter ce thème. On aurait pu ouvrir le débat mais je crois qu’il fallait d’abord que ce soit des gens imprégnés du combat du Fpi, qui viennent en parler. Si l’on donne un thème comme «La pertinence de la fête de la liberté» à quelqu’un qui n’est pas pour la fête de la liberté, ce sera difficile pour lui d’en parler. «Regard sur la refondation» à quelqu’un qui n’est pas refondateur, ce sera également difficile pour lui. De toute façon, choisir, c’est renoncer. Nous nous soumettons ce jour-là à la critique et à l’auto-critique. Or pour critiquer, il faut d’abord connaître. Ce sont beaucoup plus des intellectuels que des politiques qui ont été choisis. Cependant, même s’ils n’ont pas été invités pour animer les conférences, ceux dont vous parlez peuvent venir se faire entendre pour remettre en cause ce que les conférenciers diront.



Le président du Pit, Francis Wodié, déclarait récemment que la gauche née en 1990 n’existe plus. Quel est votre avis ?

En fait, une certaine gauche n’existe plus. Vous savez que le président Wodié a été mon professeur. J’ai du respect pour tous ceux qui m’ont formé. Je préfère ne pas croiser le fer avec lui dans le cadre d’une interview. Je pense quand même que le Fpi est resté fidèle aux valeurs de gauche.

Interview réalisée par
Abel Doualy et Paulin N. Zobo
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