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Société Publié le mercredi 11 août 2010 | Le Patriote

Interview Cheick Gaoussou Dramane Ouattara: “Les épreuves ont rendu service à mon frère”

© Le Patriote Par Cecom RDR
Précampagne électorale - Alassane Ouattara dans la Vallée du Bandama: les étapes de Katiola, Timébé, Boniéré et Nièmènè
Dimanche 8 août 2010. Katiola
Son Eminence Cheick Gaoussou Ouattara revient d’Arabie Saoudite où il a pris part aux assises de la Ligue Islamique mondiale. Du 28 au 30 juillet, il a partagé avec d’autres sommités de l’Islam mondial les préoccupations de cette religion dans le monde et en Côte d’Ivoire. Dans cet entretien, il évoque les objectifs de cette rencontre et donne son avis de sage sur la situation sociopolitique ivoirienne.

Le Patriote : Son Eminence Cheick Gaoussou Ouattara, vous avez séjourné récemment en Arabie Saoudite. Quel était le but de ce voyage en terre sainte de l’Islam?
Cheick Gaoussou Dramane Ouattara : Nous étions récemment en Arabie Saoudite à l’invitation de la ligne islamique mondiale. Il faut dire que la Ligue islamique mondiale est une organisation islamique dont le siège est en Arabie Saoudite, plus précisément en Makha (Mecque). Cette ligue centralise toutes les activités mondiales en matière islamique. C’est le Roi de l’Arabie Saoudite lui-même qui en est le Président. Bien que nous ne le voyions pas souvent, ses cousins étaient présents, les membres de sa famille également.

LP : Pourquoi vous a-t-il invité ?
CGDO : Cette fois, une démarche expresse a été faite vers moi, parce que cela faisait d’une douzaine d’années qu’on ne s’était pas vu pour des raisons que vous connaissez : j’étais très malade. Ils nous ont dit qu’il (le Roi) était pressé de me voir. J’ai donc pris le risque d’y aller. Nous y sommes allés, nous avons été bien reçus avec toutes les facilités nécessaires. Nous, nous habitions à 500 mètres du «Haram». Ce qui était intéressant, c’est que le jour où nous étions fatigués, on pouvait rester et suivre la prière, voilà un peu l’objet de notre mission. C’était de faire le bilan des sept dernières années et envisager l’avenir pour le prochain quinquennat. Nous avons travaillé sur ce dossier et nous y avons apporté notre modeste contribution, en espérant qu’il en sortira quelque chose.

LP : Vous, en tant que ressortissant d’un pays comme la Côte d’Ivoire, sur quel point avez-vous mis l’accent lors des échanges ?
CGDO : En tout cas, nous avons demandé une assistance plus appropriée au regard de l’augmentation démographique de la jeunesse musulmane. Il faut la préparer spirituellement et voir où ces jeunes peuvent se retrouver pour parler d’Allah.

LP : Votre Eminence, en terme de bilan, qu’est ce que vous avez noté en termes de perspectives ?
CGDO : Chaque Etat a rendu compte de ses problèmes des dix dernières années et a proposé ce qu’ils appellent une assistance plus ardue par la culture, l’éducation. Nous, par la voix modérée de la Côte d’Ivoire, nous avons été plus calmes, à peine si nous n’avons pas demandé pardon. Quand vous demandez quelque chose, il faut savoir demander. Sinon vous risquez de tout perdre. Après cela, j’ai eu l’occasion de rencontrer, je crois le samedi soir, l’assistante du secrétaire générale (de la Ligue, ndlr). Il est passé me dire au revoir. Il a promis de passer ici en Côte d’Ivoire l’année prochaine pour voir sur place ce qu’on peut faire sur le terrain, en matière de construction de mosquée, de formation. Il faut que nous apprenions à nos enfants, à savoir ce qu’ils lisent dans le coran, ce qu’ils disent quand ils prient, autrement dit, qu’ils comprennent la langue. Il y a des écoles spécifiques qu’il faut créer. Moi, je leur ai dit que je me proposais de lancer un institut islamique panafricain qui prendrait des jeunes depuis le cours préparatoire, en Français et en Arabe jusqu’au Baccalauréat. Et ils ont apprécié cette perspective-là.

LP : A cette occasion, est-ce que vous avez échangé avec vos hôtes sur la situation politique de notre pays ?
CGDO : Vous savez, les pays membres ne sont pas nombreux. Si bien que pour prendre les décisions, il n’ y a pas de difficultés puisqu’on a souvent les mêmes intérêts. Il y a des gens qui sont à l’extérieur, mais qui peuvent avoir des choses qui leur paraissent importantes à dire. Ils peuvent venir, la porte n’est pas fermée. Mais seulement, ce n’est pas écrit dans le procès verbal. Il n’ y a que les membres élus ou choisis – excusez-moi, c’est mon cas – qui est la voix de l’Islam en Côte d’Ivoire. Il faudrait d’ailleurs que dans un délai très proche, on puisse réfléchir à un moyen de regrouper un peu les jeunes musulmans dans un cadre très souple, pour qu’ils s’intéressent de plus en plus au problème de la religion. Quand nous étions jeunes, nous allions à l’école coranique. Ensemble, on partait pêcher, ensemble on partait cultiver. Il y avait une camaraderie ambiante qui régnait entre l’ensemble des jeunes.

LP : A quoi, selon vous, est due la perte de l’esprit de camaraderie entre les jeunes ?
CGDO : Cela est dû à la structure de la société. Les chrétiens ont pris une avance dans ce domaine. Ils ont évolué et nous, nous sommes restés statiques. En tout cas, chez nous à Kong, l’enseignement que je connais depuis 40 ou 50 ans n’a pas évolué. C’est cela le drame.

LP : Qu’est ce qu’il faut pour améliorer cette situation ?
CGDO : Il faut faire un travail auprès des chefs d’établissement, auprès des Imans.

LP : Votre Eminence, quel regard portez-vous sur la situation actuelle de la Côte d’Ivoire au plan politique ?
CGDO : Vous savez, je suis hors-jeu depuis octobre 2007. J’ai été très malade depuis 10 ans. En 2007, j’ai eu un choc qui m’a conduit à une espèce de coma. Parce que j’ai été déçu par ce que je croyais possible. Cette année, je ne vais pas reconnaître la même chose. Dieu est grand, que les choix qui seront faits, soient des nôtres et que nous puissions avoir satisfaction.

LP : Cheick, pouvez-vous être un peu plus explicite ?
CGDO : En 2007, on avait lancé l’idée que les élections auraient lieu cette année-là. Moi, j’étais à l’hôpital La Salpetrière en France. Quand je suis retourné, j’ai constaté que les gens n’étaient pas mûrs, je n’avais plus de maison, j’ai atterri ici. J’ai eu un choc qui m’a conduit à la PISAM.

LP : Aujourd’hui, il y a une évolution, il y a une liste électorale, la date des élections est fixée pour le 31 octobre. N’avez-vous toujours pas confiance ?
CGDO : J’ai confiance en Allah, pas en ce que les gens font (rires).

LP : Le contentieux sur la liste électorale a commencé. Un constat est aujourd’hui fait. C’est que les demandes de radiation concernent les gens du Nord. Quel commentaire en faites-vous?
CGDO : Vous êtes du Nord, moi je suis du Nord. Nous sommes tous du Nord. Moi je veux être Président. Alors c’est moi qui devais vous poser cette question pour nourrir mes activités. Moi je n’ai pas de réponse à donner à cette question. Je vais partir dès que mon frère (ADO) va rentrer. Dès qu’il rentre pendant 24 heures, je fais le point avec lui et je rentre au village.

LP : vous êtes retranché maintenant au village. Quelles sont les activités que vous y menez ?
CGDO : Je prie beaucoup.

LP : Depuis 2009, votre jeune frère, Alassane Dramane Ouattara, parcourt la Côte d’Ivoire pour présenter son programme à ses compatriotes. Comment voyez-vous son combat politique?
CGDO : Il se bat bien. Il se bat bien. Je dirai même que les années passées ont été un salut pour lui. Maintenant, il sait à qui parler, où mettre les pieds. Or avant, il lui fallait un pédagogue, moi, pour lui dire ça. Maintenant, il n’a plus besoin de moi. Maintenant, il sait se battre. Toutefois, quand je vois des points obscurs, j’interviens pour lui dire.

LP : voulez-vous dire qu’Alassane Dramane Ouattara a mûri politiquement ?
CGDO : Ah oui ! Absolument.

LP : Le 31 octobre 2010, face à Bédié et Gbagbo, pensez-vous qu’il a de réelles chances ?
CGDO : Justement, tout ce qui s’est passé doit lui permettre d’avoir la chance du succès. Les gens ont pensé lui faire du tort, finalement, ils lui ont rendu service.

LP : A qui faites-vous allusion ?
CGDO : Vous m’avez déjà compris, c’est suffisant.

LP : Mais pas nos lecteurs…
CGDO : Vos lecteurs ont suivi le débat politique. C’est maintenant que je reprends service. Je pense que toutes ces épreuves l’ont mûri. Sous Houphouët-Boigny, nous avons fait pareil pour conduire la Côte d’Ivoire à l’indépendance. On a lutté à côté, on nous bastonnait. D’un côté, on avait les colons, de l’autre, on avait le PDCI sur le dos alors que nous étions les armes du PDCI. C’est tout ce combat qui nous a conduit à l’indépendance. Nous, on n’a pas su utiliser notre expérience, qui a débouché sur la fracture sociale qu’on a connue. Je pense que le combat du RDR est un bon combat. Je regarde de loin depuis 2000, c’est la première fois que je parle du RDR. Peut-être que si j’avais trop parlé, j’aurais pu fausser la ligne que mon frère s’est donnée. Il est sur le terrain, il a plus de responsabilité que moi. Si j’avais des critiques, je n’aurais pas manqué de le faire avec beaucoup de sagesse.

LP : Vous avez parlé tantôt de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Cela fait 50 ans que notre pays est indépendant. Vous qui avez vu la Côte d’Ivoire avant, pendant et après l’indépendance, pouvez-vous nous parler des 50 ans de la Côte d’Ivoire ?
CGDO : D’abord arrêtons-nous à 1990, jusqu’à cette période. La Côte d’Ivoire était gérée de manière musclée. On n’avait pas la possibilité de dire et d’aller jusqu’au bout de ses idées. Maintenant, les choses sont plus libres depuis 90 à 93. Mais jusqu’à la fin du siècle (2000), il y a eu quelques flottements. Après le départ du Président Houphouët (1993), il s’est passé beaucoup de choses. Il fallait passer par là pour connaître les vrais patriotes. Il y en a qui ont fait la politique de l’argent, il y en a qui ont fait la politique de leur pays, même s’ils se sont trompés par moment. Il y en a qui, disant faire la politique de leur pays, ont fait la politique de leur intérêt.

LP : Quelles sont les prières du Cheick Gaoussou Dramane Ouattara pour la Côte d’Ivoire et pour son frère Alassane Dramane Ouattara ?
CGDO : Je souhaite pour la Côte d’Ivoire, beaucoup de sagesse, qu’on refuse le recul. Parce qu’en voulant aller trop vite, on recule. En ce qui concerne mon frère, ça, c’est mon problème. Permettez-moi que je me taise là-dessus et que je fasse ce que je dois faire.

IBK et IK

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