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Société Publié le lundi 1 novembre 2010 | Le Mandat

Dossier/Style vestimentaire : Quand la modernité tue le pagne africain

A chaque génération correspond un mode d’habillement. A cheval entre la tradition et la modernité, sans ostentation et sans provocation, le pagne a parcouru plusieurs époques. Ainsi donc, il a beaucoup évolué au fil du temps. D’une nécessité impérative dans l’accoutrement de la femme, le pagne est devenu un simple accessoire. Conséquence dévastatrice de l’effet de la mode ou perte de valeur ? Qu’à cela ne tienne ! Les jeunes filles ne s’en incommodent plus. Elles se limitent au modèle occidental ou, tout au plus, elles le portent exceptionnellement à la maison ou encore lors des fêtes.

L’allure altière d’une Ivoirienne revêtue de son pagne traditionnel, qu’elle soit jeune ou vieille, mince ou corpulente, ne court pratiquement plus les rues. Pourtant, le port du pagne était autrefois un élément de taille dans l’élégance de la femme. Il était inconcevable qu’une femme se promène dans la rue en jupe ou pantalon. Aujourd’hui, le spectacle est tout autre. Des jeans, jupes ou collants serrés et taille-basse qui laissent entrevoir des attributs de la femme. Le vent de la mode est passé par là. Sans nul conteste. Une autre explication est aussi à prendre en compte : celle de ‘’l’occidentalisation’’ qui a occasionné une perte de nos valeurs. Les rares jeunes filles à s’encombrer de ces cotonnades aux graphismes et couleurs chatoyants les portent à leurs manières. La transparence et la fluidité en apparat.

Le pagne au fil des temps
Le pagne est une pièce de tissu ou de matière végétale tressée (ex : raphia), généralement rectangulaire, avec laquelle une personne se couvre les hanches jusqu’aux cuisses ou aux genoux, ou du nombril aux chevilles. Il est généralement composé d’une seule pièce. Il peut être simple, coloré, imprimé, brodé ou décoré de diverses manières. C’est le vêtement de tissus le plus simple que l’homme ait créé et porté. Il est encore couramment utilisé, notamment dans les régions chaudes. Son origine est inconnue, mais il semble avoir été porté comme vêtement, parure ou en surplus sur d’autres vêtements depuis très longtemps et sur tous les continents. Le pagne est traditionnel et moderne à la fois. Autrefois, les femmes le portaient avec une élégance naturelle et un style tout particulier. De toutes sortes et de toutes couleurs, les pagnes rivalisaient de leurs originalités. Sans conteste, ils étaient la touche indispensable dans l`habillement des femmes. Que ce soit pour un baptême, un mariage ou toute autre cérémonie que ce soit, ils sortaient en grande pompe, pour donner aux dames, une fière allure.

Jadis…, un gage de considération
«Partout où l`on allait, c`était avec le pagne. A des manifestations, au marché et même à l`intérieur de la maison, on s`accoutrait de pagnes. C`était un plaisir visuel, car ils reflètent la décence, contrairement à ce que l`on voit maintenant », regrette cette vieille dame, mère N’Guessan, proche des 70 ans, visiblement nostalgique de la belle époque. Allant plus loin, elle explique que le pagne était autrefois un signe de respect : « La femme qui ne portait pas de pagne était considérée comme une impudique. Il était inimaginable de se promener dans la rue sans le pagne noué autour des reins » à part celles qui n’avaient pas encore atteint la puberté car, « dès qu`une fille voyait ses règles, c`était une obligation de porter le pagne », renchérit-elle. Le pagne n`est pas seulement un critère de respect ou encore un allié dans l`habillement de la femme. Pour ce sexagénaire, Le pagne blanc de la mariée, chez certaines ethnies africaines attachant une grande importance à la virginité, devait être tâchée de sang le lendemain de la nuit de noce pour prouver la virginité de la mariée. Il était ostensiblement exhibé dans les rues jusqu’à la concession du mari afin de montrer à sa famille que la mariée était réellement vierge. Malheureusement, ces pratiques ont tendance à disparaître.

Entre un pagne et un pantalon jeans, y a pas match !
L’ère de la camisole et autres marinières est désormais révolue pour les jeunes filles. Place à des tenues plus osées. Aujourd’hui, c’est le phénomène du stretch qui laisse entrevoir les seins, le port du collant, les pantalons bas-tuyau,… qui sont en vogue. Elles s’habillent de cette façon parce que c’est la mode actuelle. Le pagne est donc relégué au fin fond des valises, place aux jeans et autres jupes. Modernité oblige ! En effet, nombreuses sont les filles qui arborent des jeans seulement parce qu’elles s’y sentent plus à l’aise qu’avec un pagne. Pour Solange, élève : « je m’habille tout le temps en jeans et body parce que c’est mon style et ça me va. La véritable raison, c’est que je me sens mieux dedans. Pour ma part, je ne mets de pagne que lorsque je suis à la maison, quand je cuisine, c’est plus pratique », explique-t-elle. Même rengaine du côté d’Ornéla, étudiante. « Je n’ai jamais eu de pagnes dans ma garde-robe car je n’en mettais jamais. Mais, quand je me suis mariée, j’ai été obligé d’en acheter. Pour ne pas paraître ridicule et trop moderne vis-à-vis de ma belle-famille. Pour tout vous dire, je ne savais même pas comment nouer un pagne ». Par contre, pour cette jeune dame, secrétaire dans une société, si elle privilégie les tailleurs aux pagnes, c’est plutôt une affaire de complexe : « Le pagne laisse entrevoir tes formes, le moindre de tes déhanchements. Les hommes en profitent pour te reluquer. J’en sais quelque chose : quand je suis à la maison, je porte des pagnes. Quand je passe et repasse devant mon mari, il s’en donne à cœur joie ». Est-ce à dire que les pagnes auraient des vertus séductrices ? A vérifier…

Modernité, quand tu nous tiens...
Ah ! Coquin petit pagne ! Si tu pouvais parler et nous dire combien d’hommes tu fais tomber chaque jour ! C’est la lingerie des femmes sénégalaises qui porte le coup de grâce dans les alcôves. Elle est coupée dans la soie, le satin ou le coton, ornée de petites perles, découpé selon des géométries libertines qui renseignent sur l’imaginaire érotique des femmes sénégalaises. Sa longueur varie selon les modèles. Des vertus sont données à ces pagnes qui, selon certains, servent de talismans contre les mauvais sorts… Plus qu’un must-have, les petits pagnes sont, pour les accros de la dentelle, le top des ‘’tueries sexuelles’’ ! Coupé dans la popeline, le satin, la soie, brodé ou crocheté, orné de perles, long ou court, le petit pagne peut être décliné en modèles infinis. Il véhicule souvent un message au mari, pour dire la force de son désir. Comme pour l’encens, ces nuisettes sénégalaises sont baptisées : « Faut que ça swingue dur ! » ou encore « Au summum du plaisir ! » L’indétrônable petit pagne survit au gré du temps ! Et pour cause ! Quand monsieur découvre ces dessous affriolants, il perd ses esprits et est prêt à donner tout ce que sa femme réclame. Nombre de femmes ivoiriennes ne peuvent plus s’en passer depuis sa découverte. « Je ne savais pas qu’il y avait un pagne pour séduire. C’est une amie qui est revenue du Sénégal avec et me l’a conseillé. Depuis lors, mon mari l’apprécie et le plus étonnant est qu’il y en a maintenant dans les boutiques de lingerie que j’ai visitée », a indiqué, avec passion, Mme Fofana, institutrice. En définitive, le pagne est notre origine : c’est dessus qu’on est conçu, c’est dedans qu’on est porté étant bébé, c’est dessus qu’on repose, mort.
Adèle Kouadio
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