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Politique Publié le jeudi 21 avril 2011 | L’intelligent d’Abidjan

Alassane Ouattara, une leçon de stratégie

© L’intelligent d’Abidjan Par Aristide
Audiences : le Président Alassane Ouattara a reçu le président de la Commission de la Cedeao, Victor James Gbeho
Mercredi 23 février 2011. Abidjan. Hôtel du Golf. Photo: le Président Alassane Ouattara (D), et le président de la Commission de la Cedeao, Victor James Gbeho (G)
Ils sont nombreux les Ivoiriens qui à n’en point douter avaient commencé à se poser des questions, à mettre sérieusement en doute les réelles capacités du nouveau Président de la Côte d’Ivoire à diriger ce pays. En effet, malgré le dernier verrou qui avait sauté avec la reconnaissance de l’Union Africaine, il s’est évertué à attendre encore et encore. Qui ? Quoi ? Pourquoi ? Malgré le déluge de feu qui s’abattait sur ses compatriotes, malgré les incessants appels au secours, malgré les cris détresse ; il semblait toujours aussi de marbre, toujours aussi stoïque. Continuant à exiger de son peuple, la patience. Une attitude qui sera à la longue jugée aussi peu courageuse qu’incompréhensible au regard de toutes les souffrances qu’enduraient la population. Des maux qui avaient fini par miner le moral de plus d’un Ivoirien aux prises avec les affres de la guerre. Au point où, de plus en plus de voix ont commencé à s’élever pour exiger de lui qu’il prenne des décisions ou « qu’il dégage, débarrasse le plancher ». Une colère légitime quand son adversaire, Laurent Gbagbo continuait dans une folie furieuse à faire pleuvoir un déluge de feu sur les populations.

Le stratège

En fait, l’histoire et la suite des événements ont donné finalement raison à Alassane Ouattara qui à pris tout le monde de court en se montrant fin stratège. En effet, en fin tacticien, il est allé crescendo. Primo : sur le plan diplomatique, il a fait en sorte d’isoler complètement son adversaire. Le discréditer aux yeux du monde et par là, lui fermer toutes les portes même les plus petites et les plus insignifiantes. Secundo : sur le plan économique, avec les différents embargos, il a fait en sorte d’étrangler progressivement mais sûrement et lentement les différents poumons économiques du pays qui auraient permis à l’ancien pouvoir de tenir sur le long terme. En leur coupant les vivres, il les empêchait de prospérer et donc de continuer à avoir les moyens financiers et matériels de diriger le pays. Sans grands moyens, le fruit ne pouvait que tomber à un moment ou autre. Car ne dit-on pas que « l’argent est le nerf de la guerre » ? Tertio : sur le plan militaire, en acceptant de reprendre Guillaume Soro et de le nommer aussi bien Premier Ministre que Ministre de la défense, il a fait l’option de l’expérience militaire. Mais aussi et surtout su miser sur la détermination, la ténacité, la combattivité et la loyauté d’un homme. Quatro : sur le plan humain, il a su écouter et s’abreuver à la source, s’appuyer sur la sagesse d’un Monsieur appelé Henri Konan Bédié. Un homme que le temps et les épreuves ont su rendre clairvoyant, prudent et surtout sage. De plus, il a su s’entourer d’une équipe restreinte, volontaire, acharnée au travail, au verbe rare et modérée dans les propos mais ô combien efficace.

De l’art de la patience

Et, pendant que sur le plan militaire, la bataille semblait loin d’être gagnée avec un Laurent Gbagbo des plus pugnaces, il affûtait, fourbissait lentement et sûrement ses armes. Une patience, une persévérance qui avait fini par mettre les Ivoiriens hors d’eux. Mettre leurs nerfs à vif. A la suite de la population, des voix se sont élevées même au sein du RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix) pour réclamer plus d’actions, plus de prises de risques. Tandis que, les uns déploraient la lenteur des choses d’autres exigeaient de lui qu’il prenne rapidement ses responsabilités et qu’il « en finisse une bonne fois pour toutes avec Laurent Gbagbo et les siens ». Car, nul ne comprenait sa stratégie, cette manœuvre qui consistait à attendre alors que tous attendaient de lui la prise de décisions salutaires pour tout le pays. Les décisions qui sauvent. En effet, plus la situation perdurait plus les choses allaient en se délitant. Plus la bataille finale mettant du temps à se concrétiser plus les choses allaient en empirant. Nul ne comprenait son silence alors que l’ONUCI ne bougeait pas. Nul ne comprenait son silence alors que, la résolution 1975 qui autorisait l’ONUCI à faire usage de la force pour détruire les armes lourdes des ex-FDS n’était pas appliquée. Nul ne comprenait la raison pour laquelle, il continuait encore à tolérer la présence de Young Yin Choi, le patron de l’ONUCI et Représentant de Ban Ki-Moon, le Secrétaire Général des Nations Unies ; lequel se cachait toujours derrière le mandat impartial de l’ONUCI pour ne pas appliquer la résolution 1975. Une raison plus que valable pour demander sa tête mais rien n’a été fait. Pendant ce temps, les Ivoiriens qui vivaient sous un déluge de feu et de plomb ne sachant plus à quel saint se vouer, vers qui crier, où crier leur désarroi ont commencé à en vouloir à ceux de l’hôtel du Golf . Pour eux, nul doute que le pouvoir en place avec à sa tête, le nouveau président qu’ils s’étaient choisi les avaient purement et simplement abandonnés à leur sort. Ils auraient voulu que, comme un chevalier sans peur et sans reproche, il se jette à corps perdu dans la bataille pour les délivrer de l’enfer. Ne voyant rien venir à part la sempiternelle phrase « faites confiance au président Alassane Ouattara », ils sont nombreux les Ivoiriens qui sont allés jusqu’à douter, à remettre en cause son aptitude à faire face à ce type d’adversité. Ce type de combat qui nécessite culot, agressivité et parfois brutalité. Lui, l’homme élevé à la manière occidentale, lui ; le cérébral en était-il seulement capable ?
Mais au moment où tout semblait perdu vue la combattivité des adversaires qui, dans un baroud d’honneur ont lancé toutes leurs forces, toutes leurs énergies dans ce qu’ils considéraient comme la bataille ultime ; au moment où tout le monde s’y attendait le moins ; ce fut l’arrestation de Gbagbo Laurent. Et partant, la fin d’une époque. D’une ère. Néanmoins, le calvaire aura duré quatre mois.
Quatre…longs mois. Quatre mois qui furent une éternité. Quatre mois pendant lesquels, cet homme austère au verbe rare travaillait sans relâche, tissant avec minutie et persévérance sa toile comme seule une araignée sait si bien le faire. Construisant et travaillant avec acharnement et une patience infinie comme une fourmi à la chute de son adversaire. Prouvant ainsi que, non seulement "la patience est un chemin d’or" mais aussi et avant tout une vertu que conseille et célèbre tous les livres saints et tous les sages.
A toute cette frange de la population qui réclamait des actions vigoureuses à cors et à cris, à tous ceux qui optaient pour une lutte fratricide, un combat sans merci, il a eu la sagesse d’opposer ces deux conseils du roi Salomon : « Celui qui est prompt à la colère fait des stupidités » Proverbes 14v17 et « Celui qui est lent à la colère vaut mieux qu’un héros, et celui qui se domine (vaut mieux) que celui qui prend une ville ». Proverbes 16v32. Et, pour avoir su appliquer cette tactique, su attendre son heure, su endurer pendant quatre mois les railleries, quolibets et autres humiliations, accepter l’inacceptable, accepter de négocier encore et encore, permis que ses capacités à gouverner ce pays soient remises en cause, pour avoir su faire profil bas et accepter de se justifier encore et encore à la face du monde puis à la face de l’Afrique, pour avoir accepter de se faire humble ; il a su rallier le monde entier en commençant par ses pairs africains à sa cause. Démontrant ainsi à ses compatriotes qu’il ne sert à rien de se précipiter et qu’il faut savoir attendre. Attendre même quand tout semble perdu. Que la patience est l’arme des forts et qu’il faut toujours se méfier de l’eau qui dort.

De la réconciliation et du pardon

Depuis la chute de Laurent Gbagbo, nul doute qu’ils sont encore nombreux à se poser des questions concernant sa politique. En effet, au moment où, tout le monde s’attend à ce que des gens comme les Généraux Mangou , Kassaraté, Brindou et autres soient écartés et mis en résidence surveillés comme d’autres caciques de LMP (La Majorité Présidentielle) , c’est tout le contraire. Non seulement, il semble leur avoir pardonné mieux, ils ont repris leurs différents commandements à la tête de leur troupe respective. Pis, des miliciens comme Maguy le Tocard sont en liberté et font des professions de foi après avoir devant les caméras du monde entier brûlés des hommes vifs. Il est vrai que, voir ces hommes réhabilités, voir ces hommes faire des professions de foi tardives, voir ces hommes en liberté comme si de rien n’était peu paraître incompréhensible pour le citoyen lambda voire cynique. Mais une fois de plus, le nouveau Président de la Côte d’Ivoire nous donne ici des leçons.
Primo : qui veut la paix, doit être capable de se transcender, de se dépasser pour accepter l’inacceptable. Tendre la main à l’autre pour ensemble repartir du bon pied. Pour ne pas reconduire les erreurs du passé. Faire comprendre à son peuple que la haine est mauvaise conseillère, qu’il n’est jamais bon de se faire justice soi-même quand on sait quand une guerre commence mais jamais quand elle prend fin. Secundo : quand on en charge la destinée d’un peuple, son peuple, seuls les intérêts supérieurs de la Nation ont la primauté sur toutes considérations personnelles.
A ceux donc qui seraient tentés ou rêvent d’appliquer la Loi du Talion : « œil pour œil, dent pour dent », ils devraient tous méditer cette parole issue de la bible qui dit que : « un homme coléreux excite des querelles et un homme furieux commet beaucoup de crimes. L’orgueil d’un homme le conduit à l’humiliation mais celui qui est humble d’esprit obtient la gloire » Proverbes 29 v22-23. Il ne s’agit pas d’oublier mais parce que rien ni personne, ni aucune vengeance, aucune larme, aucune arme ne pourra et ne saura ramener malheureusement ceux et celles qui ont fait le voyage final ; il ne faut pas oublier, il ne faut pas les oublier mais il convient certes au prix d’un effort surhumain de tourner la page, leur dire au revoir. Surtout leur demander de nous donner la force de pardonner à nos bourreaux, leurs bourreaux pour que revive la paix dans ce pays, pour que revive la cohésion sociale dans notre chère Éburnie, pour que revive la tolérance, pour que renaisse cette fraternité, cette hospitalité qui ont faits notre réputation de par le monde. Ce n’est qu’à ce prix, que tous ces êtres chers sans distinction aucune, sans exclusive pourront reposer en paix. Voir leur très cher pays redevenir une oasis, un havre de paix où tous ses enfants sont unis comme les doigts de la main pour regarder ensemble vers l’avenir, ce combat pour lequel, ils ont donné leur vie ; alors, ils sauront qu’ils ne sont pas morts pour rien. Que leur combat en valait largement la peine. De surcroît, la meilleure leçon que l’on puisse donner à tous ceux qui ont du sang sur les mains ou ont participé d’une quelconque manière à cette barbarie est de les laisser en vie pour qu’ils puissent expier leurs fautes toute leur vie durant.
Alors, comme, le Dr Alassane Ouattara a eu l’habitude de nous dire : « faisons lui confiance » ! Et, comme le sphinx, faisons renaître ce beau pays de ses cendres en sachant taire nos rancœurs, nos colères légitimes, nos douleurs respectives pour rebâtir une Côte d’Ivoire nouvelle, plus forte; une terre d’hospitalité et de tolérance où règne la Paix, l’Union, la Discipline et le Travail et faire en sorte de ne plus avoir à méditer sur la prophétie du père de la Nation Félix Houphouët-Boigny : « Le vrai bonheur on ne l’apprécie que lorsqu’on a perdu ». Tout en méditant par contre surtout sur l’Écclésiaste qui dit que : « vanité des vanités, tout n’est que vanité».

Marie-Laure AYÉ
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