pouvoir aux Dioulas, le pouvoir aux Nordistes, alors c’est le chaos »
Le président de l’Assemblée nationale Mamadou Koulibaly a été reçu en audience le mercredi 19 avril 2011 par le chef de l’Etat Alassane Ouattara au Golf hôtel. Le député de Koumassi a annoncé, au terme de cette rencontre, l’arrivée ce matin à Abidjan du président du Conseil constitutionnel Yao Paul N’Dré.
«J’étais à Accra, j’ai reçu un appel du président Ouattara qui souhaitait s’entretenir avec moi. J’avais moi aussi un certain nombre de choses à discuter avec lui. Je suis arrivé hier, (Ndlr : mardi) et ce matin je sors d’une audience avec lui. Nous avons parlé de plusieurs sujets. En particulier, je lui ai fait part des préoccupations des députés qui aimeraient bien qu’en début de mandat, nous puissions nous inscrire dans la légalité constitutionnelle pour que les ordonnances qui sont prises actuellement puissent faire l’objet d’une autorisation de l’Assemblée nationale et d’une régularisation. Le président a donné son accord. Les députés ont aussi suggéré que l’on puisse entrer dans l’application de la Constitution sur tous les problèmes de l’état de droit, le respect des libertés individuelles. Le président de la République m’a dit qu’il était conscient de la situation et qu’il prenait toutes les dispositions pour qu’il en soit ainsi. Au nom des députés, je lui ai signalé le problème d’insécurité. L’Assemblée ayant été pillée, mon domicile à Abidjan et à Azaguié pillés, ma famille menacée, c’est aussi vrai pour l’ensemble des députés et nous avons trouvé un cadavre en putréfaction, tous les bureaux cassés et pillés. Les députés se sont demandé dans quelle mesure ils pourraient avoir la sécurité puisqu’ils se sont déjà inquiétés de la situation auprès des ministres concernés, mais rien n’a encore été fait. Le président a donné des instructions pour que l’Assemblée nationale soit sécurisée parce que depuis les pillages, chaque jour il y a des gens qui passent pour ramasser encore ce qui est resté. Nous avons parlé de l’état de droit pour expliquer qu’il était important qu’en début de mandat, conformément aux vœux de l’Union africaine, que le président puisse avoir une prestation de serment régulière. Il a donné son accord. Et je crois savoir si je ne trahis de secret que le président du Conseil constitutionnel, Yao N’Dré est en route pour Abidjan et arrive probablement demain (Ndlr : aujourd’hui) et très rapidement le président m’a dit qu’une cérémonie sera organisée pour rester conforme aux vœux de l’Union africaine. Je lui ai dit par ailleurs que par rapport à la sécurité, de nombreux militants du Fpi et de Lmp ; ceux que l’on appelle pro-Gbagbo étaient très inquiets pour leur sécurité dans les quartiers. Ils étaient dénoncés, indexés comme si être militant de ce mouvement était une tare. Ils se cachaient, ils se sentaient brimés. Nombreux sont ceux qui ont fui et qui sont au Ghana, au Togo et au Bénin et que ce serait bien qu’on aille vers une détente pour que rapidement ces militants se sentent sécurisés dans leur quartier. Je lui ai signalé de surcroît plusieurs appels reçus d’amis, de populations bété qui disent être poursuivis, battus dans les quartiers simplement parce qu’ils sont bété. Ça ne peut pas être un défaut, l’ethnie n’est pas un défaut et si l’on peut reprocher des choses au Fpi ce n’est pas aux bété qu’il faut faire payer, si l’on veut reprocher des choses à Gbagbo Laurent, ce n’est pas aux bété qu’il faut faire payer. Si nous entrons dans ce jeu, jamais nous aurons de réconciliation, jamais nous n’aurons de paix. Le président de la République a pris le téléphone, il a appelé les ministres concernés pour que des enquêtes soient menées rapidement et que ces situations s’estompent, qu’il n’a pas envie de gouverner au nom d’une ethnie ou d’un groupe quelconque. J’en ai profité pour lui dire que l’Assemblée nationale faisait sa séance solennelle d’ouverture de la première session ordinaire de l’année 2011 le mercredi 27 avril 2011. J’en ai profité pour lui dire que la mission c’est la tension, l’absence d’état pour le moment. Les fonctionnaires qui ne vont pas au travail, les policiers, les gendarmes apeurés, les militaires effrayés et que ce serait bien qu’il parle encore une fois aux Ivoiriens mais non pas dans une interview classique comme nous l’avons déjà vu, mais que la tribune de l’Assemblée nationale pourrait être une tribune à partir de laquelle il pourrait dire exactement aux Ivoiriens où il va, comment il veut y aller et avec qui, dans quelle condition de sécurité, dans quelle condition de réconciliation et de détente et que les députés m’avaient demandé de lui adresser une invitation pour qu’il vienne s’adresser aux Ivoiriens le 27 avril. Le président m’a dit qu’il donnait son accord et qu’il se préparerait pour le mercredi 27 à l’Assemblée nationale pour s’adresser aux Ivoiriens. Je pense qu’en allant dans ce sens et si dans les quartiers, les uns et les autres arrêtaient de se bagarrer, si ceux qui ont les armes arrêtaient de menacer ceux qui n’en ont pas, si ceux qui sont Rhdp arrêtaient de faire peur à ceux qui ne sont pas Rhdp. Si les représentants locaux du Pdci et du Rdr arrêtaient de faire peur aux représentants locaux du Fpi, peut-être que nous aurons une chance extraordinaire de reconstruire ce pays après ce chaos. Mais si jamais certains pensent que l’arrivée de Ouattara au pouvoir, c’est le pouvoir aux dioulas, c’est le pouvoir aux nordistes, donc ils peuvent faire ce qu’ils veulent, alors c’est le chaos promis. Jamais il n’y aura de réconciliation, de paix, d’état et de Nation. Là où nous sommes, nous sommes loin du fond du puits. C’est vrai que les temps sont durs, les Ivoiriens pensent que nous sommes tombés, c’est grave mais il y a pire que la situation dans laquelle nous sommes. Il faut regarder ce qui est arrivé à Haïti et en Somalie. Nous n’avons pas encore vu le pire, il existe, faisons tout pour l’éviter.
Propos recueillis par Touré Abdoulaye
Le président de l’Assemblée nationale Mamadou Koulibaly a été reçu en audience le mercredi 19 avril 2011 par le chef de l’Etat Alassane Ouattara au Golf hôtel. Le député de Koumassi a annoncé, au terme de cette rencontre, l’arrivée ce matin à Abidjan du président du Conseil constitutionnel Yao Paul N’Dré.
«J’étais à Accra, j’ai reçu un appel du président Ouattara qui souhaitait s’entretenir avec moi. J’avais moi aussi un certain nombre de choses à discuter avec lui. Je suis arrivé hier, (Ndlr : mardi) et ce matin je sors d’une audience avec lui. Nous avons parlé de plusieurs sujets. En particulier, je lui ai fait part des préoccupations des députés qui aimeraient bien qu’en début de mandat, nous puissions nous inscrire dans la légalité constitutionnelle pour que les ordonnances qui sont prises actuellement puissent faire l’objet d’une autorisation de l’Assemblée nationale et d’une régularisation. Le président a donné son accord. Les députés ont aussi suggéré que l’on puisse entrer dans l’application de la Constitution sur tous les problèmes de l’état de droit, le respect des libertés individuelles. Le président de la République m’a dit qu’il était conscient de la situation et qu’il prenait toutes les dispositions pour qu’il en soit ainsi. Au nom des députés, je lui ai signalé le problème d’insécurité. L’Assemblée ayant été pillée, mon domicile à Abidjan et à Azaguié pillés, ma famille menacée, c’est aussi vrai pour l’ensemble des députés et nous avons trouvé un cadavre en putréfaction, tous les bureaux cassés et pillés. Les députés se sont demandé dans quelle mesure ils pourraient avoir la sécurité puisqu’ils se sont déjà inquiétés de la situation auprès des ministres concernés, mais rien n’a encore été fait. Le président a donné des instructions pour que l’Assemblée nationale soit sécurisée parce que depuis les pillages, chaque jour il y a des gens qui passent pour ramasser encore ce qui est resté. Nous avons parlé de l’état de droit pour expliquer qu’il était important qu’en début de mandat, conformément aux vœux de l’Union africaine, que le président puisse avoir une prestation de serment régulière. Il a donné son accord. Et je crois savoir si je ne trahis de secret que le président du Conseil constitutionnel, Yao N’Dré est en route pour Abidjan et arrive probablement demain (Ndlr : aujourd’hui) et très rapidement le président m’a dit qu’une cérémonie sera organisée pour rester conforme aux vœux de l’Union africaine. Je lui ai dit par ailleurs que par rapport à la sécurité, de nombreux militants du Fpi et de Lmp ; ceux que l’on appelle pro-Gbagbo étaient très inquiets pour leur sécurité dans les quartiers. Ils étaient dénoncés, indexés comme si être militant de ce mouvement était une tare. Ils se cachaient, ils se sentaient brimés. Nombreux sont ceux qui ont fui et qui sont au Ghana, au Togo et au Bénin et que ce serait bien qu’on aille vers une détente pour que rapidement ces militants se sentent sécurisés dans leur quartier. Je lui ai signalé de surcroît plusieurs appels reçus d’amis, de populations bété qui disent être poursuivis, battus dans les quartiers simplement parce qu’ils sont bété. Ça ne peut pas être un défaut, l’ethnie n’est pas un défaut et si l’on peut reprocher des choses au Fpi ce n’est pas aux bété qu’il faut faire payer, si l’on veut reprocher des choses à Gbagbo Laurent, ce n’est pas aux bété qu’il faut faire payer. Si nous entrons dans ce jeu, jamais nous aurons de réconciliation, jamais nous n’aurons de paix. Le président de la République a pris le téléphone, il a appelé les ministres concernés pour que des enquêtes soient menées rapidement et que ces situations s’estompent, qu’il n’a pas envie de gouverner au nom d’une ethnie ou d’un groupe quelconque. J’en ai profité pour lui dire que l’Assemblée nationale faisait sa séance solennelle d’ouverture de la première session ordinaire de l’année 2011 le mercredi 27 avril 2011. J’en ai profité pour lui dire que la mission c’est la tension, l’absence d’état pour le moment. Les fonctionnaires qui ne vont pas au travail, les policiers, les gendarmes apeurés, les militaires effrayés et que ce serait bien qu’il parle encore une fois aux Ivoiriens mais non pas dans une interview classique comme nous l’avons déjà vu, mais que la tribune de l’Assemblée nationale pourrait être une tribune à partir de laquelle il pourrait dire exactement aux Ivoiriens où il va, comment il veut y aller et avec qui, dans quelle condition de sécurité, dans quelle condition de réconciliation et de détente et que les députés m’avaient demandé de lui adresser une invitation pour qu’il vienne s’adresser aux Ivoiriens le 27 avril. Le président m’a dit qu’il donnait son accord et qu’il se préparerait pour le mercredi 27 à l’Assemblée nationale pour s’adresser aux Ivoiriens. Je pense qu’en allant dans ce sens et si dans les quartiers, les uns et les autres arrêtaient de se bagarrer, si ceux qui ont les armes arrêtaient de menacer ceux qui n’en ont pas, si ceux qui sont Rhdp arrêtaient de faire peur à ceux qui ne sont pas Rhdp. Si les représentants locaux du Pdci et du Rdr arrêtaient de faire peur aux représentants locaux du Fpi, peut-être que nous aurons une chance extraordinaire de reconstruire ce pays après ce chaos. Mais si jamais certains pensent que l’arrivée de Ouattara au pouvoir, c’est le pouvoir aux dioulas, c’est le pouvoir aux nordistes, donc ils peuvent faire ce qu’ils veulent, alors c’est le chaos promis. Jamais il n’y aura de réconciliation, de paix, d’état et de Nation. Là où nous sommes, nous sommes loin du fond du puits. C’est vrai que les temps sont durs, les Ivoiriens pensent que nous sommes tombés, c’est grave mais il y a pire que la situation dans laquelle nous sommes. Il faut regarder ce qui est arrivé à Haïti et en Somalie. Nous n’avons pas encore vu le pire, il existe, faisons tout pour l’éviter.
Propos recueillis par Touré Abdoulaye