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Société Publié le mardi 26 avril 2011 | L’expression

Pâques 2011 - Paquinou dans l’ombre de la crise

Situé à près de dix kilomètres de la capitale du centre sur l’axe menant à Sakassou, Bendèkouassikro a vibré dimanche au rythme de la fête de Pâques. Ce gros village moderne du canton Dohoun n’est pas resté en marge de la ferveur populaire qui fait monter le mercure en pays baoulé lors des festivités commémorant la résurrection de Jésus-Christ. A 14 h, dès l’apparition des premières habitations du village, en provenant de Bouaké, notre équipe de reportage baigne dans une atmosphère de joie, soutenue par des musiques urbaines et traditionnelles du pays. Elles proviennent des groupes de jeunes, de vieux assis de part et d’autre de la voie qui jouxte l’entrée du foyer des jeunes. Sous l’ombrage donné par les arbres plantés dans la vaste cour dudit foyer, Benjamin Kouamé et ses amis passent du bon temps autour de quelques bouteilles de bière. La main droite sous le menton, le jeune d’une quarantaine d’années confie que jamais il n’a vu une fête de Paquinou aussi morose. « Ce n’est pas la fête de Pâques des grands jours. Ce n’est pas ce qu’on a l’habitude de voir ici. Je suis ici en tant que déplacé de guerre. Comme moi, près de la moitié des habitants du village sont des sinistrés de la crise post électorale qui a ébranlé le pays depuis le 28 novembre. Je viens d’Abidjan. Ceci pour vous dire que ce n’est pas après un voyage spécial pour venir fêter Paquinou, que nous nous sommes retrouvés ici. On est venu s’y refugier et la fête nous a trouvé surplace », a expliqué Benjamin. Avec le vent de réconciliation et de reconstruction nationale qui souffle timidement sur le pays, avec l’avènement des Houphouétistes aux commandes, le déplacé de guerre pense que la prochaine Paquinou est prometteuse. « Le village est un territoire acquis à la cause du Rhdp. Le fait d’être ici, loin des bruits des armes qui crépitent à Abidjan, nous fait oublier toutes les souffrances que nous avons endurées du fait de l’ancien régime. Nous avions confiance au couple ADO-Bédié. Nous prions qu’il soit bien conseillé pour le retour de la paix et du développement. Si cela est fait, nous vous promettons une grande Paquinou 2012 », se convainc-t-il. Yebouet Konan, son voisin de table, partage le même optimisme. Agent commercial dans une société de la place, déplacé de guerre lui-aussi, il dit avoir la nostalgie de la fête de Pâques des moments de paix. « C’est la guerre, sinon à pareille heure, tout le village serait en ébullition. Les mets de toutes sortes surgissaient de toute part. On mangeait, on buvait, on dépensait sans arrière-pensées. Vraiment c’était la bonne époque. Que Dieu fasse que le pays renoue rapidement avec cette tranquille époque », a-t-il souhaité. Après la cour du foyer, le cap est mis sur le maquis du village. Dans les cours situées de part et d’autre des grandes artères du village, c’est l’heure du repos après le festin de midi. Cependant, certains ont rallié aussitôt le maquis. C’est le cas de Konan Kouamé et de ses compagnons. Le maquis qui, selon la tenancière, n’a pas encore été baptisé renferme quelques commodités des maquis de la ville. Espace de sonorisation, animation assurée par un Dj tonitruant…L’avantage ici, c’est la fraicheur offerte aux fêtards, par la toiture en paille. Autour des bouteilles de bière et de vin en carton, les gens dansent. Couper décaler, zouglou…toutes les musiques urbaines sont distillées dans une ambiance féerique. Malgré le bruit, Konan Kouamé explique le village mérite de danser cette année. «Avec la fin de la guerre, nous sommes libérés. Et nos frères policiers et gendarmes du village sont saints et saufs. Je remercie Dieu de les avoir épargnés», dit-il. Mais il reconnaît que cette année, ce n’est pas la grande fête du fait de la crise. «Les gens n’ont pas l’argent parce que les banques sont fermées et le café et le cacao étaient interdits d’exportation. Ce qui a eu des répercutions négatives sur la fête de Paquinou de cette année », analyse l’élève. Cette morosité de Paquinou 2011 à Bendèkouassikro n’arrange pas Yao Elisabeth, la tenancière du maquis. «D’habitude, déjà j’avais plus de 100 casiers de bière. Mais depuis hier, je n’ai vendu qu’environ 25 casiers. Il y a beaucoup de gens au village, mais ils n’ont pas d’argent. Ce sont pour la plupart des déplacés qui ont tout laissé derrière eux, avant de venir précipitamment ici. Les planteurs, nos gros acheteurs, n’ont pas effectué massivement le déplacement pour la fête», regrette la vendeuse. Koffi Alexis, le propriétaire du maquis N’Téholai ne connaît pas meilleur sort. Son maquis, à l’opposé du premier, est vide. Il pointe également un doigt accusateur sur la situation sociopolitique du pays, avant de poursuivre : « Mais, depuis avant-hier, il y a peu d’engouement. Le problème d’argent fait qu’il y a peu d’affluence». Une fête de Pâques qui a regroupé de nombreuses personnes mais qui malheureusement n’ont pas pu célébrer leur Paquinou comme elles le souhaitaient.

Marcel Konan
Correspondant régional
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