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NTIC Publié le jeudi 22 mars 2012 | Le Patriote

Interview / Capitaine Silvère Kotty (responsable de la Plate-forme de lutte contre la cybercriminalité) : “Nos requêtes auprès des fournisseurs d’Internet ne sont pas traitées et cela nous cause beaucoup de préjudices”

Des jeunes férus d’Internet ont trouvé le moyen de gagner de l’argent facilement grâce à des arnaques. Nous avons interrogé le premier responsable qui a en charge, la lutte contre ce phénomène qui entame sérieusement l’image de marque du pays. Silvère Kotty dans cet entretien, explique comment le gouvernement actuel compte réduire à sa plus simple expression, le phénomène du « broutage » à Abidjan

Le Patriote. : Qu’est-ce qu’une journée d’un agent de la Plate-forme de lutte contre la cybercriminalité ?

Silvère Kotty : Il faut dire que la plate-forme de lutte contre la cyber criminalité (PLCC) a été créée à l’issue d’un accord entre la direction de l’agence de télécommunication de Côte d’Ivoire (ATCI) et la direction de la police nationale. La Plate-forme de lutte contre la cybercriminalité fait partie intégrante de l’organigramme de la direction de l’information et des traces technologiques de la police nationale. La PLCC comprend en son sein, les fonctionnaires de police, les agents de la direction de l’informatique et des traces technologiques de la direction de la police économique et financière et des ingénieurs techniciens de l’ATCI. Nous avons également un substitut du Procureur au tribunal de première instance d’Abidjan qui coordonne le prolongement de notre activité en matière de police judiciaire. Une journée à la PLCC peut se résumer comme suit : d’abord le mode de saisine. On saisit la plate-forme soit en se rendant au Plateau, à son siège situé à l’immeuble Postel 2001, au premier étage. Ou alors, on joint la Plate-forme au 20 22 98 98. Ou tout simplement on se connecte sur notre site www.cybercrime.intérieur.gouv.ci. Vous y inscrivez votre dénonciation. Elle est automatiquement prise en compte par une équipe technique qui va entrer en contact avec vous et vous faire remplir des formulaires à l’effet de sortir des traces techniques sur lesquelles nous allons travailler. A partir de ces traces technologiques, nous adressons une réquisition à nos partenaires qui sont les fournisseurs d’accès à l’internet et les agences de transfert d’argent, les opérateurs de téléphonie qui vont nous permettre de localiser le suspect qui sera donc interpellé. Si ce suspect a du matériel informatique, ce matériel sera audité à l’effet de sortir des preuves qui pourront conduire à son arrestation

L.P : Le phénomène selon les dernières statistiques, prend des proportions de plus en plus démesurées. Quels sont les outils, les instruments, les moyens dont dispose la PLCC pour lutter efficacement contre ces malfrats nouvelles formules?

S.K. : Disons qu’effectivement, ce phénomène prend des proportions de plus en plus inquiétantes. Elle avait atteint sérieusement un certain niveau au cours de cette décennie, mais c’est maintenant que la police se met à niveau .Donc, tous les fonctionnaires, tous les agents ont une formation de base très élaborée pour lutter efficacement contre la cyber- criminalité. Je peux dire que nous avons aussi bien les moyens humains, matériels et technologiques pour traquer en temps réel, un suspect.

L.P. : Le cadre juridique actuel pour poursuivre les cyber-escrocs est-il adéquat ? Les lois pénales qui punissent les cybercriminels sont –elles rigoureuses ?

S.K. : Comme vous le constatez, nous interpellons les cybers-escrocs et nous les déférons devant le Parquet d’Abidjan. Et ces personnes sont condamnées à des peines de prison. Ce qui signifie qu’il n’y a pas de vide juridique en tant que telle. Nous travaillons donc sur la base des lois traditionnelles prévues par les codes de procédures pénales et le code pénal de Côte d’Ivoire. Alors, c’est généralement de l’escroquerie que les infractions sont qualifiées. Votre question est intéressante dans la mesure où nous constatons certaines infractions commises par les cybers escrocs n’entrent pas dans le champ juridique des lois traditionnelles. Nous estimons qu’il y a des adaptations et des améliorations à faire à ce niveau pour nous permettre de travailler avec beaucoup plus d’efficacité. Il y a un certain groupe d’infractions nouvelles dues à l’usage de matériels informatiques qui n’entrent pas dans la sphère des lois pénales traditionnelles. Nous avons, dans le cadre de l’accord signé pour la mise en place de la PLCC, élaboré un projet de loi pénale qui punit toutes les infractions nouvelles dans le domaine des NTIC. Ces lois sont donc en cours de validation par l’Assemblée nationale. Nous attendons que ces lois soient adoptées rapidement, par l’Assemblée nationale et promulguée afin de rendre la lutte contre la cybercriminalité plus efficace et plus efficiente. C’est l’occasion pour nous, d’interpeller le gouvernement et le parlement pour que le projet de loi soit adopté en urgence.

L.P. : Quelles sont les statistiques qui attestent que le phénomène a pris de l’ampleur ?

S.K. : Disons que le nombre de dénonciations que nous enregistrons au cours de ces dernières années, atteste qu’il y a beaucoup de victimes. Nous prenons l’exemple de l’année 2010. Nous avons 1770 dénonciations, ce qui est relativement important. Nous avons déféré 68 personnes qui ont été condamnées. Et actuellement, le montant total des sommes arnaquées par les cyber-escrocs chez leurs victimes, s’élève à plus de 14 milliards de FCFA. Cela fait donc perdre beaucoup d’argent à l’Etat ivoirien parce que, dans un pays où ce phénomène a pris des proportions démesurées, les investisseurs prennent la fuite. Il y a donc ce qu’on peut appeler dans notre jargon, le trou noir. C`est-à-dire que les investisseurs craignent de venir dans un pays où la cybercriminalité règne. C’est vous dire qu’il y a des pertes pour l’Etat qui ne sont même pas chiffrées. Et cela porte un coup dur au monde des affaires où tout le monde à la peur au ventre. Et la confiance n’est plus de mise.

L.P. : Quelles sont les infractions les plus courantes

S.K.: Nous avons classé les dénonciations par types d’arnaques. Nous dénombrons plus d’une dizaine. Les plus utilisées sont : l’arnaque à l’héritage, le love tchatches, la technique de loterie, l’expropriation de compte mail ou Facebook. On vous envoie un spam dans votre mail et on vous dit de mettre à jour votre compte mail et lorsque vous le réaliser, votre mot de passe et toutes les informations lui sont transmis en temps réel. Il prend possession de votre compte mail et envoie des demandes d’aide d’argent à tous vos correspondants en expliquant que vous êtes dans un besoin urgent et les personnes qui vous font confiance répondent à l’aide sollicitée. Il y a même des autorités qui ont été victimes de cette forme d’arnaque. Lorsque nous sommes saisis d’un tel cas, nous avons les techniques et les outils informatiques pour rétrocéder votre compte mail mais, vous perdez certains documents.

L.P. : Quelle forme de collaboration existe-t-il entre la Plate-forme de lutte contre la cybercriminalité et les autres partenaires ; fournisseurs d’accès à internet, entreprises de téléphonie et de transfert d’argent ?

S.K. : Il faut dire que la police ne peut faire efficacement son travail qu’avec l’apport des partenaires que sont les fournisseurs d’accès à Internet, les maisons de téléphonie mobile et de transfert d’argent. Nous relevons certaines traces technologiques et ces traces ne peuvent être matérialisées que si ces partenaires nous apportent leur concours. Je peux donc me permettre de dire que ces relations sont plus ou moins mitigées. Nous les sollicitons avec des réquisitions qu’ils ne traitent pas avec diligence et cela permet aux cyber-escrocs d’entrer en possession de l’argent soutirés. Souvent, nos requêtes ne sont pas du tout traitées et cela nous cause beaucoup de préjudices dans la lutte contre la cybercriminalité. C’est l’occasion pour nous, d’inviter ou d’interpeller ces partenaires à traiter avec diligence les requêtes que nous leur adressons. Il y va de la crédibilité de la nation ivoirienne. Et si le phénomène de la cybercriminalité est réduit à sa plus simple expression, cela leur permettra d’accroître en tant qu’opérateurs économiques, leurs chiffres d’affaires. C’est donc dans l’intérêt de tous, que nous leur demandons de traiter avec célérité les réquisitions que nous leur adressons.
Quant aux maisons de transfert d’argent, on les exhorte à beaucoup plus de responsabilité. Qu’elles mettent l’accent sur le contrôle des pièces d’identité pour le retrait d’argent. Retirer de l’argent avec des pièces d’identité fausses, cela veut dire qu’il y a de la complaisance et de la complicité à l’intérieur. Je peux donc vous dire qu’actuellement, avec les ressources humaines, techniques et matérielles dont nous disposons, le cybercriminel quel que soit son mode opératoire, son lieu de prédilection peut être traqué en temps réel et mis à la disposition du Parquet.

Réalisée par Moussa Keita
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