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Art et Culture Publié le jeudi 9 janvier 2014 | Le Patriote

Redynamisation du secteur culturel : Les grands chantiers de 2014

Une année s’achève. Une autre commence avec la promesse des fleurs. Voici un peu plus d’une semaine que nous sommes déjà en 2014. Une année importante pour le secteur culturel, tant les chantiers à défricher sont hyper importantes. Et, on l’imagine aisément, le ministère de la Culture et de la Francophonie aura encore fort à faire. Et qui sait, peut-être plus qu’en 2013. Et le tout premier défi non moins important qui attend la tutelle est incontestablement la 8ème édition du Marché des Arts du Spectacle africain (MASA), qui se tiendra du 1er au 8 mars prochain à Abidjan, Bouaké et Grand-Bassam. Le dernier MASA dit de réconciliation remonte à 2007 ! Et il ne fut pas un succès. C’est donc un challenge dantesque que le ministère de la Culture et de la Francophonie s’apprête à relever, à travers la Direction générale du MASA. Sur la question, il faut le reconnaître, les préparatifs avancent bien. Très bien même. Le discret, mais très efficace Directeur général par intérim du MASA, le Pr Yacouba Konaté, éminent universitaire et homme de culture et son équipe sont à pied d’œuvre pour que l’événement soit un succès total.
Le comité international artistique s’est réuni par deux fois en octobre et décembre derniers. La liste des troupes (une soixantaine) retenues a été arrêtée. Elle sera rendu publique, demain vendredi au cours d’une conférence de presse animée par le Pr Konaté au siège du MASA, au Plateau. De toute évidence, le Pr Konaté et les professionnels qui l’entourent ambitionnent offrir un grand MASA, digne de l’image et de la notoriété de la Côte d’Ivoire. Après une si longue léthargie, ils sont presque condamnés à l’exploit. Et vu le travail qu’ils abattent sur le terrain, il y a fort à parier qu’ils vont tenir le pari.
Le deuxième défi majeur de cette année 2014 est, sans conteste, la véritable redynamisation de l’industrie musicale. En 2013, quelques pas ont été faits par le ministère de la Culture et de la Francophonie, à savoir l’installation des "Point Info Culture", ces kiosques de vente de produits culturels notamment des CD audio et des DVD. Pour la phase pilote, l’enceinte de la mairie d’Abobo et la Place Ficgayo à Yopougon, ont accueilli quelques échantillons de ces kiosques. L’idée étant de reconstituer le circuit de distribution des œuvres musicales, il est vrai, complètement déglingué, pour ne pas dire totalement détruit, voire inexistant. De plus, une aide à la production a été apportée à une dizaine d’artistes afin de favoriser la sortie d’albums. Le Bureau ivoirien du Droit d’auteur (Burida) a reçu un appui matériel, notamment des véhicules, afin de recouvrer plus de droits d’auteurs et augmenter son assiette de perception. C’est peut-être des actes forts, mais en 2014, il faudra aller plus loin.

Ce qu’il faut pour booster l’industrie musicale

A commencer par obtenir l’application effective de la loi sur la copie privée. La « manne » qu’elle générera sera, assurément, une sacrée bouffée d’oxygène aussi bien pour les artistes que les producteurs de musique. Car, il ne faut surtout pas oublier que sans producteurs, il n’y a pas d’album. Et s’il n’y a pas d’album, il n’y a pas d’artiste. On a beau installer les kiosques de vente de CD légaux, si les producteurs sont en faillite, comme c’est le cas en ce moment, il n’y aura pas de produits pour alimenter ces kiosques.
Si la copie privée est en vigueur, dans certains pays du continent, il n’y a pas de raison que cela ne soit encore le cas en Côte d’Ivoire. Pour plusieurs observateurs de l’industrie musicale, la copie privée doit être le « gros combat » du ministère de la Culture et de la Francophonie. A cela, il faudra bien entendu ajouter l’intensification de la lutte contre la piraterie, car il ne servirait à rien d’injecter des millions dans la confection d’œuvres musicales, alors que le marché est inexistant, ou occupé par les pirates. Cela passe par le durcissement de la législation aussi bien contre ceux qui fabriquent ces œuvres contrefaites que ceux qui les revendent à tous les coins de rue d'Abidjan ou grands carrefours de la capitale économique ivoirienne. Ce n’est pas tout, il faudra également tenir compte des innovations technologiques qui impactent considérablement l’industrie musicale mondiale. Aujourd’hui, il est clair que les CD musicaux se vendent de moins en moins partout sur la planète. En France, il y a quelques années, il fallait, pour prétendre à un disque d’or, vendre au moins 100 000 exemplaires d’un single ou d’un album. Puis, le nombre a glissé à 75 000 et plafonne en ce moment à 50 000. L’heure est plutôt au téléchargement de la musique sur des plateformes payantes.
En Côte d’Ivoire, des producteurs chevronnés, entre autres, Constant Anagonou, Claude Bassolé, Henri Kattié ou encore Ousmane Diarra, qui totalisent, pour certains, une trentaine d’années de présence dans le milieu, ont décidé de mettre sur pied une plate-forme légale et payante de téléchargement de la musique, dénommée Wimbo. Elle proposera, à partir de cette année, les exclusivités et les meilleurs succès de la musique ivoirienne, africaine et internationale, aux mélomanes d’ici et d’ailleurs. Une petite révolution sous nos tropiques, qui devrait être accompagnée par la tutelle.
Dans le domaine du cinéma, les chantiers sont aussi importants. En 2013, décrétée année du cinéma, on a noté quelques frémissements non négligeables : la présence remarquée de la Cote d’Ivoire au récent Fespaco (Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou ) avec notamment le plus grand pavillon du MICA (Marché international du cinéma et de l’audiovisuel), tournage du film « Run » réalisé par Philippe Lacote, installation de l’Onac-CI (Office national du cinéma de Cote d’Ivoire) dans ses nouveaux locaux de Cocody Riviera M’Pouto, sans oublier quelques événements cinématographiques comme Clap Ivoire, Ciné Droit Libre Abidjan, le Fitha et Festilag pour n’en citer que quelques-uns. Toutefois, on regretta, qu’au cours de cette année du cinéma, aucune nouvelle salle de cinéma n’a ouvert ses portes. Heureusement que cette année, les perspectives s’annoncent quelque peu heureuses, avec la réouverture prochaine de la salle de cinéma de l’Hôtel Ivoire et également la salle de spectacles doublée de projections de l’Institut Français. Ces deux salles qui seront dotées d’un matériel de pointe constitueront deux lieux privilégiés de projections de films pour les cinéphiles.
En 2014, il faudra encourager une politique de réouverture des salles de cinéma, surtout dans les quartiers populaires d’Abidjan et poursuivre la politique de soutien aux producteurs afin que de nouveaux longs métrages soient tournés. Le prochain Fespaco, c’est dans un an ! En littérature, ce que les éditeurs attendent avec impatience, c’est l’application de la Convention de Florence, qui réduirait sensiblement le cout d’impression des ouvrages, toute chose qui accroitrait substantiellement leurs bénéfices.Pour ce qui est de la danse et du théâtre, le ministère de la Culture et de la Francophonie devrait apporter un soutien accru aux porteurs de projets dans ces deux disciplines. De même, le Cnac (Centre national des arts et de la culture) devrait faire vivre véritablement ses pôles théâtre ( à Cocody) et danse (a Yopougon), qui ne semblent pas encore avoir atteint leur vitesse de croisière, plus d’un an après leur installation.
En arts plastiques, on espère vivement que le Siapa (Salon international des arts plastiques d’Abidjan), qui a disparu des écrans radars, après une seule édition très timide en 2011, reviendra. Cette Biennale qui devait se tenir en 2013 n’a pu avoir lieu sans qu’on ne sache trop pourquoi.
Enfin, on retrouvera en 2014, les désormais traditionnels événements, tels le Femua (Festival des musiques urbaines d’Anoumabo), le Sila (Salon international du livre d’Abidjan), le Fitha (Festival international de théâtre d’Abidjan), Ciné Droit Libre Abidjan (festival de films sur les droits humains et la liberté d’expression), Festilag (Festival international du film des Lagunes), Vacances Culture, Clap Ivoire, Abidjan Festival, Fassa (Festival des arts sacrés de Korhogo), Zouglou Days et bien d’autres initiatives.
Que 2014 soit l’année de la pose des fondements d’une vraie industrie culturelle en Côte d’Ivoire. C’est tout le mal qu’on souhaite à tous ceux qui vivent de la culture et pour la culture.

Y.Sangaré
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