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Économie Publié le mercredi 10 décembre 2014 | Le Sursaut

Prix des biens et services à Abidjan: L’anarchie s’installe à Abidjan

Les prix des biens et services sur les marchés d’Abidjan évoluent au rythme des humeurs des commerçants. Dans les communes, chaque opérateur économique en fait à sa tête. Le programme d’affichage des prix piétine. Les contrôleurs du ministère du Commerce sont invisibles sur le terrain, livrant les consommateurs à eux-mêmes.

A Abidjan, chaque commerçant a ses prix. Dans un même périmètre, le même article se vend à différents prix. D’une boutique à une autre, ils sont fixés à la tête du client. A Abobo, le kilo de sucre coûte 450 Fcfa dans certaines boutiques, dans d’autres, il se négocie à 500 voire 550 Fcfa. Pour le litre d’huile, il faut débourser à certains endroits 800 Fcfa contre 850 dans d’autres commerces. Il en est de même pour tous les autres articles de commerce à travers la capitale économique. Le riz, le poisson, la viande, le kilogramme d’oignon, de tomate… aucun produit n’échappe à l’anarchie des prix. Lundi, vous avez un prix, mardi un autre ! « On a l’impression que chaque jour a son prix dans les boutiques du Mauritanien de quartier», déplore Amadou Cissé. La tendance est ‘’meilleure’’ dans les supermarchés. « Même si tous les prix ne sont pas les mêmes, dans ces espaces au moins les prix sont affichés et ne changent pas du matin au soir au gré des promoteurs », fait remarquer notre interlocuteur. L’anarchie a pris une autre tournure à la veille des fêtes de fin d’année où les commerçants, guidés par le goût du gain, en font à leur guise. « Il faut que le gouvernement mette des garde-fous comme il a fait pour le gaz. Ce n’est pas normal que dans deux espaces distants d’à peine 5 mètres, le même objet se vende à différents prix. Cela contribuera à la lutte contre la vie chère », dénonce Amadou Cissé. La campagne d’affichage des prix des produits de grande consommation a été lancée le 12 juillet 2012.

Et ce, conformément aux dispositions légales. En effet, le titre IV de la loi N°91-999 du 27 décembre 1991 relative à la concurrence stipule en son article 31-1 : ‘’Tout vendeur de produit, tout prestataire de services doit, par voie de marquage, d’étiquetage, d’affichage ou par tout autre procédé approprié, informer le consommateur sur les prix, les limitations éventuelles de la responsabilité contractuelle et les conditions particulières de la vente, selon des modalités fixées par voie réglementaire’’ et en son alinéa 2 : ‘’Les infractions aux dispositions du présent article et des textes pris pour leur application sont punies des peines d’amende prévues pour les contraventions de la troisième classe. En cas de récidive, les peines d’amende prévues pour la récidive de ces mêmes contraventions sont applicables’’. A savoir une amende allant de 100.000 à 1 million de Fcfa pour les détaillants et de 200.000 à 5 millions de Fcfa pour les grossistes. Deux ans après, la mesure est piétinée par la majeure partie des opérateurs économiques, grossistes comme détaillants.

Où sont passés les contrôleurs de prix ?

Au regard de cette anarchie sur les marchés, chacun se demande ce que font les contrôleurs de prix du ministère du Commerce pour mettre un terme à cette situation. « Avant de prendre position dans ce débat, il faut savoir que l’activité économique en Côte d’Ivoire est déterminée par le jeu de la libre concurrence. A part les produits subventionnés par l’Etat comme le gaz, chacun est libre de fixer le prix qui lui sied par rapport à sa marchandise. Ce qui est une infraction, c’est le non affichage qui a été institué en 2012 par une ordonnance », explique Doukoua Godé, président de la Confédération des organisations de consommateurs de Côte d’Ivoire. Pour ce qui est de l’absence des contrôleurs sur le terrain, Doukoua Godé accuse la lourdeur des procédures administratives. « La procédure est très compliquée pour mettre les contrôleurs sur le terrain. Le directeur central ou régional doit saisir son ministère pour signer un ordre de mission afin de procéder au contrôle sur le terrain. Et cela prend beaucoup de temps», explique le représentant des consommateurs. Qui invite les gouvernants à mandater les directeurs régionaux et centraux à signer directement les ordres de mission des contrôleurs assermentés. Il a en outre interpellé ces derniers sur la conscience professionnelle dans le cadre de cette mission. En effet, de nombreuses accusations sont portées contre ces eux. « Ils préfèrent axer leur contrôle sur les Libanais ou gros opérateurs économiques qui peuvent acheter leur silence. Une fois les dessous de table perçus, ils ferment les yeux sur l’anarchie des prix », accuse Ousmane Koné, instituteur. Vrai ou faux ? M. Koné, pour étayer ses dires, cite le non-respect des prix homologués du gaz butane et l’affichage des prix dans les surfaces. « A part les stations-services qui vendent le gaz aux prix du gouvernement, chacun en fait à sa tête. Dans les grandes surfaces et boutiques, personne n’affiche les prix», relève-t-il avant d’inviter le ministère du Commerce à entreprendre régulièrement des opérations coup de poing contre les opérateurs économiques véreux. « Cela contribuera à la lutte contre la vie chère », rassure-t-il.

Un cercle vicieux

La hausse généralisée des prix sur les marchés ivoiriens s’apparente aujourd’hui à un cercle vicieux, à l’image d’un serpent qui se mord sans cesse la queue. En amont, les exportateurs se plaignent des taxes et droits fiscaux imposés par l’État, et les grossistes se voient dans l’obligation de majorer les prix. « La lutte contre la cherté de la vie est certes l’affaire de tous, mais c’est le gouvernement qui fixe les taxes, les impôts et décide de l’assiette des prix. Si l’Etat procède à certains allègements fiscaux, les commerçants ne continueront pas d’appliquer des prix exorbitants», se défendent des grossistes. En aval, les détaillants se disent obligés de frauder à l’étiquette pour faire un petit bénéfice. « Je ne peux pas faire des prix au même titre que le vendeur de la gare ou mon voisin de quartier, car on n’a pas les mêmes fournisseurs et je dois payer le transport et autres frais de route. Comme je ne vends pas pour perdre, j’ajoute quelque chose », explique Diallo, tenant d’une boutique à Abobo Dépôt 9. « Nous proposons le vote de manière urgente du code de la consommation. Il faut lutter contre la corruption en général et le racket en particulier; veiller à la bonne application des décisions prises. Sans oublier d’engager des réformes hasardeuses et préjudiciables aux consommateurs et de réduire les multiples taxes injustifiées et pénalisantes pour le pouvoir d’achat des ménages », plaide la confédération des organisations de consommateurs. En attendant, de nombreuses personnes préfèrent se tourner vers les grandes surfaces où, selon eux, « les prix sont affichés avec garantie de la qualité des articles vendus ». Toujours est-il que la lutte contre la vie chère demeure un vaste chantier pour l’administration Ouattara.

Abou Traoré
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