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Économie Publié le mercredi 12 mai 2010 | Le Mandat

Interview /Après la 5ème Convention ordinaire du ROPPA

N’Goan Aka Mathias, Pca d’OBAMCI, révèle : « Comment j’ai sauvé la Côte d’Ivoire »
La 5ème convention ordinaire du Réseau des organisations paysannes et des producteurs agricoles de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA) s’est achevée avec la désignation par ‘’consensus’’ de Djibo Bagna au poste de président et l’adhésion du Libéria au réseau. Dans cet entretien qu’il a bien voulu nous accorder 4 jours après cette Assemblée, N’Goan Aka Mathias, Pca d’OBAMCI revient sur les grandes décisions de ces assises, des raisons de l’échec de Désiré Porquet, le candidat de la Côte d’Ivoire et des prochains combat de l’ANOPACI.

Que peut-on retenir M. le président de la 5ème Convention ordinaire du ROPPA tenue récemment à Grand Bassam?
Au moment où nous faisions la 5ème Convention à Grand Bassam, le ROPPA fêtait ses 10 ans. C’est donc une structure qui a fonctionné pendant 10 ans et dont nous sommes allés faire le point. Nous avons donc fait une convention extraordinaire pour adapter les textes. Avec le temps, certains textes n’étaient plus d’actualité pour l’organisation. Nous avons travaillé pour que les rapports soient acceptés. Parce que la convention, c’est une Assemblée générale. Nous avons fait le bilan de la situation concernant le rapport moral et financier. Il n’y avait pas beaucoup de choses à signaler s’agissant du rapport moral. Sauf que, c’est depuis 2006 qu’on devait organiser cette convention pour le renouvellement des instances. Ceux qui y étaient ont pensé bien travailler. Même s’ils ont dépassé les mandats. A Bassam, les mandats du Comité exécutif étaient terminés. En réalité, bien que le mandat soit terminé, le ROPPA est maintenant bien connu surtout sur le plan international. Le thème de cette convention était « La souveraineté alimentaire, la modernisation de l’Agriculture, l’amélioration du revenu des paysans et des producteurs agricoles». Comme vous pouvez le constater, ceux-là même qui font nos Etats (parce qu’il y a 13 Etats de la CEDEAO qui composent le ROPPA) sont les plus pauvres. Ce sont les maillons faibles. Nous devons donc continuer à travailler. Il faut que les producteurs et les paysans se mettent ensemble pour parler aux Etats pour leur dire qu’ils ont pris un engagement en 2000 ou 2001 au niveau de l’Union Africaine à Maputo, de consacrer 10% de leur budget à l’Agriculture. Mais depuis, nous n’avons jamais vu ses 10%. Et l’Agriculture n’est pas financée. C’est de tout cela que nous avons discuté. C’était convivial et le cadre aussi n’était pas mal. Les seuls problèmes, se sont posés au niveau du renouvellement des instances.

Que s’est-il réellement passé ?
Il y a eu un groupe qui avait déjà travaillé avant de venir. Les Sénégalais étaient depuis 2000 à la commande. Cela fait aujourd’hui 10 ans. Nous sommes passés à 13 pays avec l’adhésion du Libéria. Il ne faut pas qu’un seul pays dirige. Il faut que chaque pays ait son tour. La Côte d’Ivoire a toujours bénéficié depuis la création du réseau, de la première vice-présidence. C’est M. Désiré Porquet qui a représenté la Côte d’Ivoire. Nous avons pensé qu’il avait pris des attaches. A tel enseigne que lorsqu’il disait qu’il serait candidat, on se disait qu’il allait gagner. Parce que si c’était quelque d’autre, il serait nouveau. Quand il est venu nous annoncer sa candidature, nous avons réuni un conseil d’administration au niveau de l’ANOPACI pour apprécier. Il nous a rassuré qu’il a fait du travail et qu’il pouvait gagner. Ce qui a fait que le conseil n’a pas hésité à lui confier ce mandat. Arrivé à Bassam, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait d’autres candidats. Outre la Côte d’Ivoire, les pays comme le Niger, le Burkina-Faso et le Benin ont présenté chacun un candidat. Le candidat du Niger était celui qui avait le plus combattu le Sénégalais. Et puisque de 4 ans nous sommes allés à 10 ans, il a eu le temps pour mener son combat. Et il faut reconnaître que le président Djibo disait souvent que si la Côte d’Ivoire n’était pas candidate, il allait être candidat. A Bassam, malgré la candidature ivoirienne, il a maintenu sa candidature. Notre candidat Porquet nous a dit qu’il bénéficiait du soutien des pays anglophones tels la Sierra Léone et la Guinée Bissau. Et qu’il pouvait gagner. C’est la veille que nous sommes rendus compte que le candidat de la Côte d’Ivoire ne faisait pas le poids.

C’est-à-dire?
J’ai parlé avec chacun des présidents des plates-formes pour prendre le pouls de nos chances. C’est après avoir fait le lobbying que je me suis rendu compte que nos chances n’existaient pas. Parce que, c’est du bout des lèvres qu’ils ont parlé avec mon vice-président. Ce n’était pas vraiment sincère. Malgré tout, lui me rassurait. Jusqu’à une heure du matin, ils continuaient de travailler. C’est seulement dans la matinée qu’ils sont venus me rendre compte de nos tractations. J’ai aussitôt appelé notre candidat pour lui faire le point de toutes les informations dont je disposais. Aussi, fallait-il que nous prenions des dispositions pour qu’il soit candidat.

Qu’avez-vous donc fait ?
Nous avions des arriérés de cotisation qui s’élevait à 2,5 millions de F CFA que l’OBAMCI a payés. Non pas parce que le président de cette structure était candidat, mais parce que la Côte d’Ivoire avait un candidat.

Ce qui veut dire que M. N’Goan Mathias n’était pas candidat ?
Non, M. N’Goan Mathias n’était pas candidat. Mais M. N’Goan Mathias a payé pour le candidat de la Côte d’Ivoire. Je n’ai jamais été candidat. Mais j’ai demandé, au Conseil d’Administration de l’OBAMCI, de payer la cotisation de notre pays afin de permettre à Désiré Porquet d’être candidat. Parce qu’il s’agissait de la Côte d’Ivoire. Il serait mal vu que, la Côte d’Ivoire pour un problème de cotisation impayée n’ait pas accès à la salle de la convention.

Lorsque vous avez su que le candidat ivoirien n’avait aucune chance de gagner ces élections, qu’avez-vous fait ?
Le lobbying était venu trop tard. Il fallait cependant trouver une autre stratégie. Nous avons laissé tout le monde entrer dans la salle et nous avons décidé d’utiliser les textes. Parce que tout le monde n’avait pas payé ses arriérés. Aussi, y avait-il un problème de procédure qui n’avait pas été respectée. 6 pays n’étaient pas à jour de leurs cotisations. Cette thèse a été battue en brèche. Nous nous sommes focalisés sur les textes. Là encore, si on insistait, la Côte d’Ivoire a sortirait bredouille de cette convention. Alors, il m’est venu une idée. J’ai rencontré les différentes délégations en leur tenant les mêmes propos. Je leur ai clairement dit qu’elles voulaient nous mettre dans une situation d’humiliation avec l’attitude qu’elles adoptaient. Après réflexion, j’ai demandé à toute ma délégation de sortir. Et nous avons quitté la salle. C’était une stratégie. Le président sortant m’a demandé de ne pas sortir et qu’en le faisant j’allais bloquer la convention.

A quoi répondait cette stratégie ?
Comme je l’ai dit au président sortant, l’objectif était de bloquer la convention. Cependant, je leur ai signifié que je n’étais pas loin et que s’ils avaient besoin de moi, ils pouvaient me faire appel. Les 7 délégués y compris notre candidat et moi sommes sortis. 40 mn après, ils ont envoyé des émissaires nous contacter pour une médiation. J’ai donné mon ok puisque cela faisait partie de ma stratégie. Nous nous sommes réunis avec tous les candidats. Le Burkina, après s’être rendu compte que 9 pays sur 12 soutenaient le Niger et pour éviter l’humiliation, s’est retiré. Même chose pour le Benin. Ils ont donc voulu que la Côte d’Ivoire elle aussi, retire sa candidature. Nous avons refusé. C’est de cette manière que nous avons procédé et jusqu’à 18 h. Finalement, nous avons maintenu notre poste.

Ne vous êtes vous pas senti néanmoins humilié ?
Oui. Puisque le candidat lui-même s’est senti humilié. Si le candidat est humilié, c’est donc nous qui le sommes. C’est toute la Côte d’Ivoire. Lors des discussions, nous avons demandé ce qu’ils proposaient à la Côte d’Ivoire. Ils ont dit qu’ils nous accordaient la vice-présidence. Nous l’avons exigé les premiers. Après discussions, ils ont donné leur accord. Parce que, il faut dire que Djibo qui a réussi à réunir 9 pays autour de lui avait prévu le poste de premier vice-président pour la Sierra-Léone et le second au Mali. Nous avons dit que dans ces conditions, il fallait créer deux autres postes de vice-présidence pour qu’il y ait 4 postes. Les Maliens ne voulaient pas. Je leur ai dit que nous étions en négociation. Or, les femmes, à la veille, avaient demandé un poste de vice-présidence. C’est ainsi qu’ils ont accédé à notre requête en créant deux autres postes de vice-présidence dont le premier est revenu à la Côte d’Ivoire, le second à la Sierra Léone, le troisième au Mali et le quatrième à la Guinéenne qui représentera les femmes.

N’existe-t-il pas une crise de confiance entre les délégations au sein du ROPPA ?
Il n’existe pas de crise de confiance au sein du ROPPA. Parce que les pays veulent aussi le poste de président. Le Burkina ne s’y est pas pris tôt. Le Niger avait tout quadrillé avant que tout le monde n’arrive.

Comment le Niger a-t-il procédé ?
Le Niger a procédé par une attaque sur la gestion du ROPPA. Il faut reconnaître que le réseau était pratiquement aux mains des Sénégalais. Du président au coordonateur de la cellule technique en passant par le président d’honneur, tout était dirigé par le Sénégal. Ce fut le combat de Djibo Bagna. Il y a eu des pays qui l’ont compris et l’ont suivi dans cette lutte.

Quels étaient les atouts du Niger ?
Le Niger est un grand producteur de l’oignon. L’oignon est aussi un produit phare. Ce sont également de grands éleveurs. Qui parle d’élevage parle d’agriculture. Cela était déjà suffisant. Nous nous en sommes sortis avec le poste de premier vice-président. Cela, il faut le signaler, a été fait par consensus. On n’a pas eu à voter. Si on procédait par votes, la Côte d’Ivoire aurait tout perdu. Et notre candidat était M. Désiré Porquet.

La sagesse vous a donc habité ?
Oui. La Côte d’Ivoire est le pays des sages. Félix Houphouët-Boigny nous a toujours enseigné la sagesse. Il vaut mieux un mauvais arrangement qu’un bon procès.

Quel sera votre objectif dans quatre ans ?
Ce n’est pas une question de poste qui importe. Ce qui est important pour nous, c’est comment renforcer les plates-formes. Nous voulons à partir du ROPPA, un peu de moyens pour fortifier nos bases. Si les Plates-formes ne sont pas solides et que c’est seulement le sommet qui l’est, ce n’est pas une bonne chose. Il faut que les racines du ROPPA tiennent pour que le mouvement soit assis solidement.

Comptez-vous élargir le ROPPA au-delà de la sous-région ?
Bien sûr. Il y a un projet qui est en cours avec les autres composantes du reste de l’Afrique. Du 25 au 27 mai 2010, à Addis-Abeba se tiendra une Assemblée constitutive d’une plate-forme continentale à laquelle le ROPPA va participer. Notre président sortant est même candidat.

Que peut-on retenir au terme de cet entretien ?
Nous pouvons retenir qu’au terme de cette convention, nous sommes tous d’accord qu’en Afrique de l’Ouest, nous devons lutter pour la sécurité et la souveraineté alimentaire. Nous devons produire plus pour nourrir toute la population de la sous-région et pourquoi ne pas exporter vers d’autres zones. Sur ce point nous sommes tombés d’accord. Ainsi, sur le contrôle de la pénétration des Organismes Génétiquement Modifiés(OGM), nous avons décidé de former un front commun. Parce que ceux mêmes qui produisent ces OGM ne l’utilisent pas sur leur sol pour leur production. Sur le plan alimentaire, c’est la santé que nous devons préserver. Au niveau de la Côte d’Ivoire, le gouvernement n’a pas encore pris partie, donc nous attendons. Quand les autorités vont annoncer l’utilisation des OGM dans notre agriculture, nous allons alors lever le bouclier. Les chercheurs continuent leur travail sur les semences d’OGM. Il faut que le ROPPA se tourne vers un autre horizon pour pouvoir s’autofinancer. Et là-dessus, nous sommes d’accord et optimistes.

Réalisée par Evariste N’Guessan et Jules César
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