Bluffs, manips et intox n`y ont rien fait: le président sortant (plus de 38%) et l`opposant nordiste (32%) s`affronteront bien au second tour, envisagé le 28 novembre.
Cette fois, c`est l`arbitre qui fut sauvé par le gong. La Commission électorale indépendante (CEI) avait, selon la loi, jusqu`à mercredi soir pour divulguer les résultats provisoires du premier tour de scrutin. Ce fut chose faite au coeur de la nuit, moyennant quelques minutes de "temps additionnel". L`issue du combat, elle, s`est dessinée au fil des heures, à mesure que la CEI égrenait à la radio-télévision, région après région, voire, s`agissant d`Abidjan, quartier après quartier, le chapelet des pourcentages.
Cette litanie chiffrée aura donc accouché d`un ballottage entre le chef de l`Etat sortant Laurent Gbagbo, crédité de 38,30% de suffrages exprimés, et l`ancien Premier ministre Alassane Dramane Ouattara, alias ADO (32,08%), lesquels distancent nettement l`ex-président Henri Konan Bédié (25,24%). Le verdict détaillé confirme ainsi le dénouement annoncé dès lundi à la mi-journée par LEXPRESS.fr; et balaye les bluffs et les manips distillés la veille par des apprentis-sorciers de toutes obédiences, prompts à s`engouffrer dans le vide béant laissé par le silence de la Commission.
Courriels, textos, sms...
Parmi les innombrables courriels, coups de fil et textos reçus au long des 48 heures écoulées, tous "béton", tous "de source sûre", on retiendra les deux sms expédiés mardi en début de soirée par un confrère ivoirien pourtant rompu aux délices et aux poisons des moeurs politiques du pays des Eléphants. "Tu es allé vite en besogne, indiquait-il à l`auteur de ces lignes. Les tendances ont changé et donnent ADO et Bédié au deuxième tour." Le message évoquait même l`arrivée imminente du président malien Amadou Toumani Touré (ATT) et de son homologue burkinabé Blaise Compaoré, médiateur de la crise ivoirienne et parrain des accords conclus en 2007 à Ouagadougou, censés "raisonner Laurent Gbagbo." Invoquait-on en retour la convergence des indices en faveur d`une finale entre le sortant et Ouattara? Peine perdue: "Pas du tout. C`était une intox." Gbagbo précisait le second envoi, avait même ordonné le bouclage du Conseil constitutionnel, juridiction suprême appelée à valider le décompte de la CEI.
Cet échange ne donne au demeurant qu`un pâle aperçu de la floraison de rumeurs, évidemment contradictoires, qui avaient éclos mardi. Nous avons aussi eu droit -c`est la loi du sport- aux griefs de quelques internautes, nous reprochant de hasarder des "suppositions journalistiques" plutôt que d`"attendre sagement" les chiffres officiels. "Vivant en Côte d`Ivoire, précisait `dok`, je peux vous affirmer que vos pronostiques (sic) seront infirmés par les vrais résultats."
L`examen des performances respectives des trois ténors de la scène ivoirienne accrédite le diagnostic des experts de la géographie électorale: si chacun reste maître chez soi -Alassane Ouattara chez les musulmans dioulas du Nord, Henri Konan Bédié dans les bastions akan et, dans une moindre mesure il est vrai, Laurent Gbagbo en pays bété- l`urbanisation et le brassage qui l`accompagne tendent à estomper les lignes de failles ethniques dans les villes, notamment à Abidjan (30% des inscrits).
Gbagbo-Ouattara, une rivalité ancienne
Une certitude: le second tour sera chaud, voire brûlant. Rien ne prouve à ce stade que le clan Gbagbo résistera à la tentation de réveiller les démons de l`"ivoirité" aux dépens d`un ADO écarté de la présidentielle de 2000 pour "nationalité douteuse." Une aversion mutuelle ancienne et tenace sépare les deux hommes. Le fondateur du Front populaire ivoirien n`a jamais pardonné à Ouattara, alors chef du gouvernement de Félix Houphouët-Boigny, d`avoir avalisé sinon ordonné son emprisonnement. Et il le considère toujours comme l`inspirateur et le financier de la rébellion nordiste qui, en septembre 2002, faillit lui coûter son fauteuil. Quant à ADO, il rêve d`effacer l`"injustice" que constitue à ses yeux son éviction passée de l`échiquier politique.
L`enjeu identitaire risque par ailleurs de peser lourdement sur le ballottage: on voit mal Bédié, vaincu amer, se battre corps et âme pour un "allié"qu`il s`employa, dans les années 1990, à exclure du jeu national. Même si un pacte artificiel, le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), a depuis lors rapproché les deux figures de l`opposition.
Pas plus que Ouattara, Gbagbo n`est parvenu à l`emporter par KO. Reste à espérer, pour le salut de la Côte d`Ivoire, qu``ils auront l`un et l`autre la sagesse de ne pas tenter de gagner par chaos.
Cette fois, c`est l`arbitre qui fut sauvé par le gong. La Commission électorale indépendante (CEI) avait, selon la loi, jusqu`à mercredi soir pour divulguer les résultats provisoires du premier tour de scrutin. Ce fut chose faite au coeur de la nuit, moyennant quelques minutes de "temps additionnel". L`issue du combat, elle, s`est dessinée au fil des heures, à mesure que la CEI égrenait à la radio-télévision, région après région, voire, s`agissant d`Abidjan, quartier après quartier, le chapelet des pourcentages.
Cette litanie chiffrée aura donc accouché d`un ballottage entre le chef de l`Etat sortant Laurent Gbagbo, crédité de 38,30% de suffrages exprimés, et l`ancien Premier ministre Alassane Dramane Ouattara, alias ADO (32,08%), lesquels distancent nettement l`ex-président Henri Konan Bédié (25,24%). Le verdict détaillé confirme ainsi le dénouement annoncé dès lundi à la mi-journée par LEXPRESS.fr; et balaye les bluffs et les manips distillés la veille par des apprentis-sorciers de toutes obédiences, prompts à s`engouffrer dans le vide béant laissé par le silence de la Commission.
Courriels, textos, sms...
Parmi les innombrables courriels, coups de fil et textos reçus au long des 48 heures écoulées, tous "béton", tous "de source sûre", on retiendra les deux sms expédiés mardi en début de soirée par un confrère ivoirien pourtant rompu aux délices et aux poisons des moeurs politiques du pays des Eléphants. "Tu es allé vite en besogne, indiquait-il à l`auteur de ces lignes. Les tendances ont changé et donnent ADO et Bédié au deuxième tour." Le message évoquait même l`arrivée imminente du président malien Amadou Toumani Touré (ATT) et de son homologue burkinabé Blaise Compaoré, médiateur de la crise ivoirienne et parrain des accords conclus en 2007 à Ouagadougou, censés "raisonner Laurent Gbagbo." Invoquait-on en retour la convergence des indices en faveur d`une finale entre le sortant et Ouattara? Peine perdue: "Pas du tout. C`était une intox." Gbagbo précisait le second envoi, avait même ordonné le bouclage du Conseil constitutionnel, juridiction suprême appelée à valider le décompte de la CEI.
Cet échange ne donne au demeurant qu`un pâle aperçu de la floraison de rumeurs, évidemment contradictoires, qui avaient éclos mardi. Nous avons aussi eu droit -c`est la loi du sport- aux griefs de quelques internautes, nous reprochant de hasarder des "suppositions journalistiques" plutôt que d`"attendre sagement" les chiffres officiels. "Vivant en Côte d`Ivoire, précisait `dok`, je peux vous affirmer que vos pronostiques (sic) seront infirmés par les vrais résultats."
L`examen des performances respectives des trois ténors de la scène ivoirienne accrédite le diagnostic des experts de la géographie électorale: si chacun reste maître chez soi -Alassane Ouattara chez les musulmans dioulas du Nord, Henri Konan Bédié dans les bastions akan et, dans une moindre mesure il est vrai, Laurent Gbagbo en pays bété- l`urbanisation et le brassage qui l`accompagne tendent à estomper les lignes de failles ethniques dans les villes, notamment à Abidjan (30% des inscrits).
Gbagbo-Ouattara, une rivalité ancienne
Une certitude: le second tour sera chaud, voire brûlant. Rien ne prouve à ce stade que le clan Gbagbo résistera à la tentation de réveiller les démons de l`"ivoirité" aux dépens d`un ADO écarté de la présidentielle de 2000 pour "nationalité douteuse." Une aversion mutuelle ancienne et tenace sépare les deux hommes. Le fondateur du Front populaire ivoirien n`a jamais pardonné à Ouattara, alors chef du gouvernement de Félix Houphouët-Boigny, d`avoir avalisé sinon ordonné son emprisonnement. Et il le considère toujours comme l`inspirateur et le financier de la rébellion nordiste qui, en septembre 2002, faillit lui coûter son fauteuil. Quant à ADO, il rêve d`effacer l`"injustice" que constitue à ses yeux son éviction passée de l`échiquier politique.
L`enjeu identitaire risque par ailleurs de peser lourdement sur le ballottage: on voit mal Bédié, vaincu amer, se battre corps et âme pour un "allié"qu`il s`employa, dans les années 1990, à exclure du jeu national. Même si un pacte artificiel, le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), a depuis lors rapproché les deux figures de l`opposition.
Pas plus que Ouattara, Gbagbo n`est parvenu à l`emporter par KO. Reste à espérer, pour le salut de la Côte d`Ivoire, qu``ils auront l`un et l`autre la sagesse de ne pas tenter de gagner par chaos.