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Politique Publié le mercredi 29 décembre 2010 | Partis Politiques

Opinion / Comment comprendre la stratégie suicidaire dans laquelle s’enferme désespérément Laurent Gbagbo

© Partis Politiques
Sortie de crise en Côte d’Ivoire : Mission de la dernière chance - Messagers de la CEDEAO
Laurent Gbagbo s’enfonce de plus en plus dans une impasse suicidaire et guerrière qui réduit sans cesse ses marges de manœuvre. En effet, après avoir usurpé le pouvoir en dépit de toutes les règles démocratiques et de droit qu’il a lui-même acceptées et validées, voilà maintenant qu’il refuse de les respecter. Tout cela au mépris de la volonté du peuple qui a élu démocratiquement un nouveau président.

L’ancien président ivoirien qui s’est piégé tout seul dans ses propres manœuvres stratégiques boulangères se retrouve de fait dans le collimateur de la CPI, de l’ONU, l’UA et de la CEDEAO. Acculé par cette dernière organisation ouest africaine qui menace en cas d’échec de sa dernière médiation pour trouver une issue pacifique à cette confiscation du pouvoir, le mardi 28 décembre, de faire usage de la force pour le faire partir, Gbagbo contre attaque. Il menace à son tour de prendre en otage les populations étrangères qui vivent en Côte d’Ivoire, en cas d’affrontement armé. Dans sa stratégie de défiance, il a demandé à Charles Blé Goudé d’appeler les militants du FPI à manifester le lendemain de cette médiation africaine. Nous connaissons déjà donc la réponse de Gbagbo à cette médiation, tout étant déjà mis en place pour que ces émissaires africains repartent bredouilles de leur mission. De ce fait, la logique de la force armée s’impose d’elle-même avec des conséquences déjà redoutées par les populations. Gbagbo vient d’accorder une interview aux médias occidentaux dans laquelle il dit « ne pas être pour les compromis ». Cette perspective tragique provoque déjà des exodes massifs des populations frontalières du Libéria, chez ce voisin. En fait, la stratégie du Boulanger en cas d’envoi d’une force armée Ouest africaine pour le déloger, sera de faire descendre ses jeunes militants dans la rue à la place de ses forces armées, pour empêcher tout affrontement militaire. Cette stratégie lui permet également d’inverser les rapports de force en exposant ces jeunes. En cas de morts de ses militant, pendant que lui et ses barons y compris Blé Goudé, seront cachés comme des lâches, il pourra s’appuyer sur ces faits. D’une part pour accuser la CEDEAO de tueries envers des manifestants aux mains nues et porter plainte à son tour auprès de la cour pénale internationale. D’autre part, pour prendre la population ivoirienne en otage, comme bouclier humain, pour tenter coûte que coûte de s’accrocher à ce pouvoir de manière obsessionnelle et pathologique.

Comment un opposant historique a pu sombrer ainsi dans la xénophobie, la barbarie meurtrière et dans la folie suicidaire ?

Comment cet homme qui a su susciter tant d’espoir par son combat politique contre le « Vieux » a-t-il pu se laisser leurrer ainsi par son insatiabilité du pouvoir ? Comment un démocrate de toujours, qui a défendu avec force et courage les droits de l’homme et l’instauration du multipartisme, a-t-il pu ainsi basculer dans le despotisme ? Comment un opposant historique, qui a tant réclamé avec héroïsme et persévérance les droits de l’Homme et les libertés individuelles et collectives, a-t-il pu sombrer ainsi dans la xénophobie, la barbarie meurtrière ainsi que dans la folie suicidaire ?

En connaisseur de la réalité politique ivoirienne, Gbagbo a compris qu’il lui fallait satisfaire la soif et la faim de pouvoir de ses compagnons de route, et surtout des gradés des forces de défense et de sécurité ivoiriennes. Dans ce dessein, sur leurs conseils et avec leur soutien, il se trouve alors en position de se maintenir par la force au pouvoir. A vrai dire il a su se servir de leurs avidités matérielles. Cela ne fait que renforcer la volonté et la détermination du couple Gbagbo que beaucoup de ces caciques n’osent plus contrarier. Son terrible bras de fer avec la France, qu’il sait déjà perdu, continue toujours sous la pression de ses partisans, comme un trouble obsessionnel compulsif. Il lui faut donc à nouveau manœuvrer pour continuer à se sentir exister politiquement et pour être reconnu comme « celui qui a résisté seul contre toute la communauté internationale ». Il lui faut également donner le sentiment qu’il se bat pour protéger et pérenniser les avantages de ses proches, qui ne semblent pas être prêts à renoncer au goût du pouvoir, afin de continuer à avoir leurs soutiens. Pour couronner le tout, il ne faut pas sous estimer le poids de ses conseillers religieux, proches des pentecôtistes américains, qui mettent l’ancien opposant dans une situation inextricable. On sait par exemple que les Pentecôtistes américains exercent sur l’entourage de son épouse, « la dame de Sang », une forte influence spirituelle. Ces acteurs religieux, qui ont eux aussi compris l’intérêt qu’ils avaient à faire croire au Boulanger qu’il avait une « mission divine », pensent aussi à leurs propres avantages et business. De ce fait, il est pris en otage entre les conséquences de ses propres manœuvres politiques pour satisfaire sa concupiscence pathologique du pouvoir et la pression de ses proches. A cela, il faut ajouter le sentiment de revanche sur les brimades et autres massacres vécus par les Bété dans les années 70, qui est encore profondément ancré dans leur inconscient collectif. En jouant sur cette fibre sensible et ethnique, L. Gbagbo se positionne comme le successeur légitime de Kramgbé Gnagbé. Il voit là une véritable opportunité d’inscrire son nom dans l’histoire du peuple Bété, ainsi que de celle de la Côte d’Ivoire. Il poursuit ainsi le combat mené par ses prédécesseurs contre les « colons français », puis contre le Vieux.

Aujourd’hui, face aux dilemmes qui s’imposent à lui à travers les différentes pressions et résolutions prises à son encontre, L. Gbagbo vacille, doute et semble résister par principe sans vraiment y croire. A-t-il vraiment le choix maintenant ? Peut il se contredire publiquement au risque de décevoir sa base et briser le mythe qu’il s’est forgé, après être allé si loin dans sa folie de « libérateur du peuple africain » ? La menace d’une plainte auprès du TPI ainsi que de nombreuses enquêtes et résolutions des droits de l’Homme le confrontent à des choix lourds de conséquences. Il le sait, il joue une partie décisive et serrée de son avenir politique, de son positionnement dans l’histoire, et peut être même de l’avenir de toute une nation. S’il désire finir en martyr pour rentrer dans l’histoire comme « celui qui a résisté contre toute la communauté internationale et notamment face à la France pour libérer l’Afrique », a-t-il conscience qu’il prend toute une nation en otage pour satisfaire cette folie mégalomaniaque ? Peut-être qu’il est tout simplement devenu fou.

Macaire DAGRY
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