Entre le chef de l`Etat sortant et son chef d`état-major, tout semble aller pour le mieux. Une apparence bien trompeuse.
Tous les observateurs avertis l`avaient remarqué. Le chef d`état-major des Fanci a choisi l`occasion d`une visite du général de la rue pour ruer dans les brancards contre le Premier ministre Guillaume Soro. Le reportage de la ``télé mille lagunes`` est parlant. Debout, devant la porte d`entrée de ses bureaux, le général de corps d`armée, Philippe Mangou, est encadré par le commandant supérieur de la gendarmerie, Edouard Tiapé Kassaraté et Charles Blé Goudé, leader des jeunes patriotes. Alors que la rencontre qu`ils venaient d`avoir portait sur un rassemblement en l`honneur des Fds, au Stade Champroux, le 23 janvier, le Cema préfère s`en prendre au Premier ministre. Pour ce faire, il récite quasiment la litanie favorite du clan Gbagbo contre Guillaume Soro : guerre contre la Côte d`Ivoire, sang des Ivoiriens sur les mains. Comme s`il devait bien montrer qu`il n`avait plus aucun contact avec le Premier ministre, il précise bien que celui-ci avait proposé de le maintenir à son poste à condition qu`il fasse allégeance au président Alassane Ouattara. Ce qu`il a bien évidemment refusé. Une belle façon de réaffirmer sa loyauté à Laurent Gbagbo qui refuse d`accepter les résultats du scrutin et confisque le pouvoir depuis le 28 novembre. L`on note sur la forme que le général de corps d`armée (quatre étoiles) a déclaré son amour pour Gbagbo sous la supervision de Charles Blé Goudé. Aujourd`hui, il convient de se demander si le vrai objectif de la visite de ce dernier n`était pas d`arracher ces confessions publiques au patron de l`armée, alors que le président Ouattara et son Premier ministre venaient d`annoncer des ralliements dans la grande muette.
La campagne médiatique en treillis se poursuivra avec le rassemblement organisé par les jeunes patriotes devant l`état-major. Là encore, le pauvre général a dû venir haranguer cette foule professionnelle-En novembre 2004, le général Doué Mathias avait dû se plier à l`exercice. Le clou du programme était prévu au Stade Champroux. Micro en main, le Cema a été obligé d`esquisser quelques pas de danse et même de pousser la chansonnette. Il devait surtout dire haut et fort que les Fds vont défendre le régime finissant. Mission accomplie. A l`analyse, cette débauche d`énergie pour témoigner des liens forts entre le président sortant et la grande muette dénote d`un malaise. L`on pensait pourtant que tout avait été bien ficelé avant le scrutin présidentiel. Pour la fête de l`indépendance, le 7 août 2010, Laurent Gbagbo avait généreusement distribué des galons. Et mis en garde la hiérarchie : « Si je tombe, vous tombez. » Pour prévenir tout risque, le candidat Gbagbo avait discrètement convié tous les officiers supérieurs placés à des postes de commandement au temple de l`église protestante méthodiste unie du quartier de Cocody-Ambassades. La hiérarchie militaire lui avait juré fidélité devant Dieu. Détail important, Philippe Mangou, fils de pasteur, est très pieux. Un serment pris sur la Bible est sacré. C`est donc sans surprise que le 3 décembre, le Cema et les hauts-gradés des FDS sont allés faire allégeance à Gbagbo, avant même son investiture à la va-vite.
Mais, à l`évidence, Laurent Gbagbo n`était pas tranquille. Il sait que le général Mangou a côtoyé pendant trois ans ses frères d`armes des Forces armées des Forces nouvelles (FaFn).
Une marge de manœuvre rétrécie
Malgré quelques soubresauts, c`est dans la confiance que l`ancien Comthéâtre et son homologue des FaFn, général Soumaïla Bakayoko, ont mis en place le Centre de commandement intégré (Cci), noyau de la future armée réunifiée. Mangou avait aussi établi des relations cordiales avec le Premier ministre et les forces impartiales, Licorne et Onuci. Est-ce pour ces raisons que le général n`adoptait pas publiquement le discours guerrier ambiant ? On le verra d`ailleurs aller à Yopougon, le 28 décembre 2010, pour tirer une patrouille de l`Onuci des griffes des jeunes patriotes. Le Cema était-il contre l`instauration d`un blocus autour de l`hôtel du Golf ? C`est en tout cas à lui que le commandant Issiaka Ouattata dit Wattao, cema adjoint des FaFn, remettra les armes prises aux Fds, après un premier accrochage. Et, surtout lorsque les sanctions pleuvent sur le clan Gbagbo, Mangou et Kassaraté sont d`abord épargnés avant de figurer sur la liste de l`Union européenne. Autant de petits signes qui ont dû inquiéter Gbagbo qui vit dans la hantise d`un coup d`Etat militaire. Depuis la répression sanglante de la marche du Rhdp sur la Rti, le 16 décembre, le général Mangou verra sa marge de manœuvre se rétrécir au fil des jours et des évènements. Au point où il déclarera quasiment la guerre à l`Onuci, conformément au vœu du clan Gbagbo. Selon de bonnes sources, la pression de Gbagbo sur le Cema s`est accentuée lorsque sa garde rapprochée a été changée. Elle est désormais assurée par la garde présidentielle du général Dogbo Blé Bruno. C`est encore cette unité qui tient le dispositif sécuritaire à son domicile, à Yopougon.
Par ailleurs, une source militaire révèle une présence trop régulière de Blé Goudé à l`état-major. Cela ne doit rien au hasard. Selon elle, c`est le général de la rue qui semble avoir été désigné pour surveiller les faits et gestes du général de corps d`armée dont les communications téléphoniques sont passées au crible. L`on peut toutefois parier que le divorce entre les deux hommes ne sera prononcé que lorsque Gbagbo sera convaincu d`avoir totalement la main. Ou, lorsque l`intervention de l`Ecomog sera imminente.
Kesy B. Jacob
Tous les observateurs avertis l`avaient remarqué. Le chef d`état-major des Fanci a choisi l`occasion d`une visite du général de la rue pour ruer dans les brancards contre le Premier ministre Guillaume Soro. Le reportage de la ``télé mille lagunes`` est parlant. Debout, devant la porte d`entrée de ses bureaux, le général de corps d`armée, Philippe Mangou, est encadré par le commandant supérieur de la gendarmerie, Edouard Tiapé Kassaraté et Charles Blé Goudé, leader des jeunes patriotes. Alors que la rencontre qu`ils venaient d`avoir portait sur un rassemblement en l`honneur des Fds, au Stade Champroux, le 23 janvier, le Cema préfère s`en prendre au Premier ministre. Pour ce faire, il récite quasiment la litanie favorite du clan Gbagbo contre Guillaume Soro : guerre contre la Côte d`Ivoire, sang des Ivoiriens sur les mains. Comme s`il devait bien montrer qu`il n`avait plus aucun contact avec le Premier ministre, il précise bien que celui-ci avait proposé de le maintenir à son poste à condition qu`il fasse allégeance au président Alassane Ouattara. Ce qu`il a bien évidemment refusé. Une belle façon de réaffirmer sa loyauté à Laurent Gbagbo qui refuse d`accepter les résultats du scrutin et confisque le pouvoir depuis le 28 novembre. L`on note sur la forme que le général de corps d`armée (quatre étoiles) a déclaré son amour pour Gbagbo sous la supervision de Charles Blé Goudé. Aujourd`hui, il convient de se demander si le vrai objectif de la visite de ce dernier n`était pas d`arracher ces confessions publiques au patron de l`armée, alors que le président Ouattara et son Premier ministre venaient d`annoncer des ralliements dans la grande muette.
La campagne médiatique en treillis se poursuivra avec le rassemblement organisé par les jeunes patriotes devant l`état-major. Là encore, le pauvre général a dû venir haranguer cette foule professionnelle-En novembre 2004, le général Doué Mathias avait dû se plier à l`exercice. Le clou du programme était prévu au Stade Champroux. Micro en main, le Cema a été obligé d`esquisser quelques pas de danse et même de pousser la chansonnette. Il devait surtout dire haut et fort que les Fds vont défendre le régime finissant. Mission accomplie. A l`analyse, cette débauche d`énergie pour témoigner des liens forts entre le président sortant et la grande muette dénote d`un malaise. L`on pensait pourtant que tout avait été bien ficelé avant le scrutin présidentiel. Pour la fête de l`indépendance, le 7 août 2010, Laurent Gbagbo avait généreusement distribué des galons. Et mis en garde la hiérarchie : « Si je tombe, vous tombez. » Pour prévenir tout risque, le candidat Gbagbo avait discrètement convié tous les officiers supérieurs placés à des postes de commandement au temple de l`église protestante méthodiste unie du quartier de Cocody-Ambassades. La hiérarchie militaire lui avait juré fidélité devant Dieu. Détail important, Philippe Mangou, fils de pasteur, est très pieux. Un serment pris sur la Bible est sacré. C`est donc sans surprise que le 3 décembre, le Cema et les hauts-gradés des FDS sont allés faire allégeance à Gbagbo, avant même son investiture à la va-vite.
Mais, à l`évidence, Laurent Gbagbo n`était pas tranquille. Il sait que le général Mangou a côtoyé pendant trois ans ses frères d`armes des Forces armées des Forces nouvelles (FaFn).
Une marge de manœuvre rétrécie
Malgré quelques soubresauts, c`est dans la confiance que l`ancien Comthéâtre et son homologue des FaFn, général Soumaïla Bakayoko, ont mis en place le Centre de commandement intégré (Cci), noyau de la future armée réunifiée. Mangou avait aussi établi des relations cordiales avec le Premier ministre et les forces impartiales, Licorne et Onuci. Est-ce pour ces raisons que le général n`adoptait pas publiquement le discours guerrier ambiant ? On le verra d`ailleurs aller à Yopougon, le 28 décembre 2010, pour tirer une patrouille de l`Onuci des griffes des jeunes patriotes. Le Cema était-il contre l`instauration d`un blocus autour de l`hôtel du Golf ? C`est en tout cas à lui que le commandant Issiaka Ouattata dit Wattao, cema adjoint des FaFn, remettra les armes prises aux Fds, après un premier accrochage. Et, surtout lorsque les sanctions pleuvent sur le clan Gbagbo, Mangou et Kassaraté sont d`abord épargnés avant de figurer sur la liste de l`Union européenne. Autant de petits signes qui ont dû inquiéter Gbagbo qui vit dans la hantise d`un coup d`Etat militaire. Depuis la répression sanglante de la marche du Rhdp sur la Rti, le 16 décembre, le général Mangou verra sa marge de manœuvre se rétrécir au fil des jours et des évènements. Au point où il déclarera quasiment la guerre à l`Onuci, conformément au vœu du clan Gbagbo. Selon de bonnes sources, la pression de Gbagbo sur le Cema s`est accentuée lorsque sa garde rapprochée a été changée. Elle est désormais assurée par la garde présidentielle du général Dogbo Blé Bruno. C`est encore cette unité qui tient le dispositif sécuritaire à son domicile, à Yopougon.
Par ailleurs, une source militaire révèle une présence trop régulière de Blé Goudé à l`état-major. Cela ne doit rien au hasard. Selon elle, c`est le général de la rue qui semble avoir été désigné pour surveiller les faits et gestes du général de corps d`armée dont les communications téléphoniques sont passées au crible. L`on peut toutefois parier que le divorce entre les deux hommes ne sera prononcé que lorsque Gbagbo sera convaincu d`avoir totalement la main. Ou, lorsque l`intervention de l`Ecomog sera imminente.
Kesy B. Jacob
