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Politique Publié le vendredi 11 mars 2011 | Nord-Sud

Assassinats, massacres de femmes - La Côte d’Ivoire se déshumanise

La Côte d’Ivoire est prise dans une spirale de violence telle que tuer ou voir un mort dans la rue est devenue une chose banale.

Il y a des scènes qui ne choquent plus en Côte d’Ivoire : des Forces de défense et de sécurité (Fds) qui tirent, en plein jour, sur des civils, un corps criblé de balles ou égorgé, un individu brûlé vif, des hommes qui se battent à la machette… Ces actes sont devenus banals. Ils alimentent les causeries familiales les plus ordinaires. « Des corps habillés viennent de tirer sur un homme », lance la petite Awa à ses parents. L’adolescente a été témoin d’une scène qui aurait mérité une place de choix dans les faits divers il y a quelques années : des Fds de passage à côté de la pharmacie Dokui, du même quartier, venaient de tirer sur un civil. Mais aujourd’hui cela n’émeut plus personne. A la limite, certains en rient. Dans la commune de Yopougon, cette action de brûler vif une personne a été baptisée ‘’le bruling’’.
Dans un article publié le mercredi 9 mars dernier, le site Irinnews rapporte des témoignages éloquents sur la déshumanisation qui s’empare, si ce n’est déjà fait, de la Côte d’Ivoire. Un jeune homme lui a confié avoir vu, par deux fois, des personnes brûlées vives. Le dernier acte de brûlage auquel il a assisté remonte au 5 mars. « Il y avait des cris dehors et lorsque je suis sorti, c’était les corps de deux gendarmes qui étaient brandis comme des trophées de guerre. Des jeunes ont versé de l’essence dessus et ils y ont mis le feu », écrit le confrère.
« Lorsque le neveu de Maurine Koné, 33 ans, a été sauvagement assassiné sous ses yeux, ce chauffeur de bus du quartier d’Abobo Dokui ne croyait pas être en Côte d’Ivoire, a-t-il raconté. « Des jeunes l’ont descendu de son gbaka (minicar) puis il a eu le cou tranché. En voyant le corps, mes jambes ne tenaient pas. C’est une boucherie humaine inexplicable », rapporte Irinnews.
La Commission nationale des droits de l’Homme (Cndhci) rapporte, dans un communiqué datant du mercredi 9 février dernier, des violations des droits de l’Homme qu’elle qualifie d’ « actes d’une barbarie inouïe et inimaginable » : « le vendredi 25 février 2011, dans la commune de Yopougon, trois personnes ont été lynchées puis brûlées vives par des manifestants ; dans la nuit du samedi 26 au dimanche 27 février 2011, deux personnes ont été brûlées vives après avoir été ligotées dans la cour de l’émetteur de la Rti situé dans la commune d’Abobo… ».
Selon Rinaldo Depagne, analyste principal chargé de l’Afrique de l’Ouest à l’International Crisis Group, cité dans l’article, « ce degré de violence est assez inhabituel en Côte d’Ivoire ; nous n’avons même pas vu cela pendant le conflit armé, en 2002 et 2003 [au plus fort des affrontements qui suivaient une insurrection armée] ».

Le clan-Gbagbo avoue son crime
La barbarie la plus récente qui a horrifié le monde entier est le massacre de sept femmes et d’un jeune garçon de quinze ans à Abobo. Venus participer à une marche pacifique, ils sont morts, mitraillés et bombardés par un char des forces pro-Gbagbo. Alors que toutes les âmes qui ont encore un brin d’humanisme étaient sous le choc de l’horreur, les soldats de l’ex-chef d’Etat ont nié leur responsabilité dans ce qui s’était passé. Le clan-Gbagbo a poussé « la faillite morale » jusqu’au seuil de l’impensable en qualifiant cette sauvagerie de « montage ». Ainsi, un journal du clan barrait-il sa Une du 7 mars : « prétendue tuerie de femmes à Abobo – un montage grotesque ». Non seulement tuer n’émeut plus. Mais le drame, c’est que la cruauté a atteint un seuil tel qu’on se permet de nier ces ignominies.
Après avoir parlé de « montage », les partisans de l’ex-chef d’Etat reconnaissent, aujourd’hui, implicitement, qu’il y a eu tuerie à Abobo. Seulement, ils soutiennent que c’est la conséquence de la provocation des militants du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). En effet, dans une démonstration abracadabrante et fantasmagorique, un bric-à-brac intellectuel des plus risibles, le confrère, Le courrier d’Abidjan, présente une confidence dans ce sens. « La nouvelle stratégie qu’ils ont baptisée « opération Banion » consiste à payer des femmes, des gamins d’Abobo, d’Adjamé, de Yopougon, de Koumassi, des quartiers pauvres d’Abidjan pour provoquer les forces de l’ordre et les pousser à la bavure », rapporte le journal. Coulibaly Fatoumata avait 34 ans et était dans le commerce entre le Togo et la Côte d’Ivoire. Elle était mariée depuis 1997 à S.A. qui est chauffeur de gros camion. Est-ce là le profil de quelqu’un qui correspond aux balivernes qui sont rapportées plus haut ? La présidente de la Cndhci, Victorine Wodié, a raison : « la mort est (vraiment) devenue un fait banal en Côte d’Ivoire ».

Bamba K. Inza
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