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Politique Publié le mercredi 16 mars 2011 | Le Patriote

Interview / Albert Mabri Toikeusse (membre du présidium du RHDP) : “Le Panel a expliqué à Affi pourquoi Gbagbo a perdu”

L’Union africaine a donné depuis jeudi dernier son verdict. Au cours de sa dernière réunion, le Conseil de Paix et de sécurité de l’organisation internationale a rendu public ses « mesures contraignantes » aux protagonistes de la crise postélectorales en Côte d’Ivoire. Dans cette interview, le ministre d’Etat Albert Mabri Toikeusse, qui a fait le déplacement, revient sur les mesures prises par le CPS et sur le comportement des envoyés de Laurent Gbagbo à Addis-Abeba.
Le Patriote : Monsieur le ministre d’Etat, vous étiez avec le président de la République à Addis-Abeba pour le sommet du Conseil de Paix et de Sécurité sur le Panel chargé de régler la crise ivoirienne. Aujourd’hui, une polémique enfle dans l’opinion concernant les décisions qui ont été prises par les chefs d’Etat de l’Union africaine. Pouvez-vous nous dire ce qui s’est réellement passé ?
Albert Mabri Toikeusse : Moi, je ne sais pas d’où vient la polémique. Mais je voudrais dire que le président nous a fait l’honneur de l’accompagner à ce sommet important. Et en marge de ce sommet, un certain nombre de rencontres aussi importantes, notamment avec le Premier ministre éthiopien, les ambassadeurs africains accrédités auprès de l’Union africaine, le président de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique à Addis Abeba. Enfin, l’escale d’Abuja où il a eu une séance de travail importante avec le président Goodluck Jonathan. Le président nigérian est venu spécialement à Abuja pour accueillir le président. Ceci dit, les deux réunions d’Addis-Abeba devaient conclure toutes les médiations que nous avions eues depuis bientôt quatre mois. Les Ivoiriens attendaient de savoir quelle est la position définitive de la communauté internationale. Vous avez suivi ici certains faire part de leurs amitiés avec certains chefs d’Etat africains. Ils ont dit 7 sur 53. Evidemment, si c’est une note, il faut dire que c’est médiocre comme le sont leur programme et leur bilan, malheureusement. Mais je voudrais vous dire que le Panel a rencontré les parties ivoiriennes pour leur faire part de leurs conclusions. Cela s’est passé le jeudi matin. Ces conclusions ont fait l’objet d’observations de la part du Président de la République, notamment dans l’affirmation des dispositions constitutionnelles qui font du chef de l’Etat le détenteur exclusif du pouvoir exécutif. C’est essentiellement sur ce point que le Président de la République a fait ses observations. Les mêmes conclusions ont été faites à l’autre partie, notamment à la délégation conduite par Pascal Affi N’Guessan, qui représentait Laurent Gbagbo. Je ne sais pas s’il représentait Laurent Gbagbo et Paul Yao N’Dré. Puisque les deux n’ont pas eu la courtoisie de répondre à l’invitation de l’Union africaine. C’est après que nous avons eu cette déclaration fracassante dont tous les Ivoiriens ont eu connaissance. Lorsque dans l’après-midi, nous partions pour la réunion du Conseil de Paix et de Sécurité où nous devions recevoir maintenant les conclusions du Panel, nous ne nous attendions même pas à ce que ceux qui ont eu une déclaration bouillante dans la mi-journée puissent être là. Or ils sont venus s’asseoir. Pour nous, Ivoiriens, c’était la honte. C’était l’humiliation. Parce que quand vous voyez un ancien Premier ministre et chef d’un parti anciennement au pouvoir se comporter comme un vulgaire individu, manquant de respect aux chefs d’Etat avec des propos totalement discourtois, vous vous demandez si la Côte d’Ivoire peut être fière de telles personnes. C’est la conduite qu’Affi N’Guessan a eue en reprochant aux chefs d’Etat leur légèreté, le manque de consistance du document de conclusions et bien d’autres choses. Evidemment, c’était nous qui étions identifiés comme ceux qui pillaient et incendiaient nos propres maisons et les celles des cadres du RHDP. Il a dit aussi que c’est nous qui sémions la barbarie au niveau d’Abidjan ; Il a conclu en s’interrogeant sur les fondements des conclusions du Conseil de paix et de Sécurité. Puisqu’il dit qu’il a lu les documents et qu’il ne comprenait pas d’où venait le fait que le président Alassane Ouattara ait gagné les élections. Je voudrais dire que les conclusions ont été, premièrement que le président Alassane Ouattara est le président de la République. Deuxièmement, le Conseil constitutionnel devait l’investir. Troisièmement, il doit mettre en place un gouvernement d’union nationale et de réconciliation. Il y a eu ensuite la mise en œuvre de l’annexe 4 des accords de Ouagadougou. Et puis enfin, des mesures d’apaisement et de confiance et des mesures d’accompagnement qui ont annoncé. Comme annoncé, ces décisions, nous devons tous les respecter ; car elles s’imposent à nous. Et leur mise en œuvre doit tenir sur un délai de deux semaines. Le président de la République lui-même a demandé que ce soit un délai très bref. Au cours de ces deux semaines, un haut représentant de l’Union africaine viendra à Abidjan pour demander à Laurent Gbagbo de faire sa part. Puisque les mesures sont contraignantes. En ce qui nous concerne, nous attendons que ces décisions s’imposent à tout le monde pour que la paix revienne en Côte d’Ivoire.

LP : L’envoyé de Laurent Gbagbo à Addis-Abeba, M. Pascal Affi N’Guessan, a qualifié ces mesures d’inacceptables. Pensez-vous qu’après cette déclaration, le FPI et Laurent Gbagbo vont se plier à l’injonction de l’Union africaine ?
AMT : Entre une déclaration qu’on fait devant les journalistes pour faire plaisir aux militants de LMP à Abidjan et la réaction dans la salle de réunion, il y a une différence. Ce que je veux dire, c’est que la déclaration qu’on a entendue a été faite à des journalistes dehors. Nous aussi nous en avons eu écho. Et puis, il y a eu la réunion du Conseil de Paix et de Sécurité qui a eu lieu le jeudi après-midi, qui bien entendu a enregistré les observations de Affi N’Guessan, mais qui a conclu en disant : « Monsieur, vous ne comprenez pas pourquoi Laurent Gbagbo a perdu. Mais nous vous disons que Laurent Gbagbo a perdu et voila pourquoi il a perdu. A partir de ce moment-là, nous voudrions que tout le monde s’aligne à cette décision ». Et c’est comme ça que nous sommes tous sortis de la salle. C’est cela les conclusions. Le reste, c’est pour les militants de LMP et cela ne nous intéresse pas.

LP : Le pouvoir FPI qui n’entend pas les choses de cette oreille, milite pour une autre solution. C’est pourquoi à votre absence, les attaques ont repris de plus belle à Abobo. Qu’avez-vous à dire sur tout ce qui se passe à Abobo actuellement?
AMT : Je voudrais vous dire que cela ne me surprend pas. De toutes les façons, Laurent Gbagbo n’a jamais été suffisamment responsable dans sa gestion de l’Etat et dans la crise ivoirienne. Je ne peux pas comprendre que lorsque les 15 membres du Conseil de Paix et Sécurité se réunissent avec des gens qu’il dit être ses amis en Afrique, notamment Robert Mugabe et Jacob Zuma et un certain nombre de chefs d’Etat qui étaient présents, et qu’après une telle rencontre qu’il n’ait pas eu la sagesse de saisir la chance qui lui est offerte pour sortir honorablement. Ce qui se passe, les tueries et le désordre qui sont toujours entretenus, malheureusement, s’ajoutent aux charges que les Ivoiriens et la communauté internationale ont vis-à-vis de lui. Comme d’habitude, le contournement des mesures ne lui apportera rien, sinon qu’accentuer le désastre pour notre peuple. Mais je crois que tout cela ne devrait pas durer plus longtemps.

LP : Le Conseil de Paix et de sécurité donne deux semaines pour l’application des mesures contraignantes. Vous, au niveau du RHDP, êtes-vous prêts à attendre les deux semaines ou à prendre une décision avant ?
AMT : Nous, on a toujours été respectueux de notre parole, de nos engagements et des décisions de la communauté internationale. Ceux qui ne les respectent pas, vous les connaissez. Ce que nous souhaitons, c’est que dans l’intervalle des deux semaines qui nous paraissent d’ailleurs très long, l’Union africaine puisse vraiment mettre en œuvre la décision d’Addis-Abeba. Maintenant, si au bout des deux semaines rien n’est fait, nous prendrons nos responsabilités.

LP : Les Ivoiriens sont curieux de savoir comment les mesures contraignantes du Panel seront mises en œuvre. Est-ce qu’on va contraindre Laurent Gbagbo ou l’on va chercher encore à continuer de négocier avec lui ?
AMT : Non seulement on doit contraindre Laurent Gbagbo. Mais on doit le faire dans le délai. Nous attendons de l’Union africaine qu’elle se donne les moyens d’imposer ces mesures à toutes les parties, notamment à Laurent Gbagbo qui ne respecte rien. Nous attendons que cela soit fait dans les deux semaines. Aujourd’hui, il reste une dizaine de jours. C’est peu, il faut aller vite. Comme il y a un haut représentant qui doit être désigné. Nous souhaitons qu’il soit désigné dans les 48 heures et qu’il utilise la semaine qui reste pour faire en sorte que la Côte d’Ivoire retrouve la paix et la quiétude. Si ce n’est pas fait, cela montrera l’échec de la médiation de l’Union africaine que Laurent Gbagbo, lui-même, a provoqué et nous nous donnerons les moyens de le faire partir.

LP : Récemment votre résidence a fait l’objet d’un pillage et d’un sac. Celles de certains cadres du RHDP ont également vu leur résidence pillée et saccagé. Pouvez-vous nous donner vos impressions sur ce qui s’est passé ?
AMT : Effectivement, ma résidence a été pillée et incendiée. J’ai eu ensuite mon cabinet qui l’a été comme ceux d’une quinzaine des cadres du RHDP. Comme nous l’avons indiqué tantôt, cela indique le niveau d’esprit dans le camp LMP. On a décidé de lâcher tous les chiens sur les militants du RHDP. Des jeunes désoeuvrés qu’on manipule qui, finalement, viennent pour voler. Comme l’a dit mon frère Adjoumani (NDLR : le ministre Adjoumani Kobenan), ce sont des jeunes qui n’ont plus rien, qui n’ont plus d’espoir à qui on a plus rien à offrir si ce n’est le fruit du pillage des résidences des cadres du RHDP. Je voudrais dire qu’au-delà de quelques souvenirs qu’on ne retrouvera plus jamais, par exemple des photos de jeunesse, des enfants, quelques objets d’art et des documents légaux, c’est Dieu qui donne le bien matériel et il le fait partir quand il veut. Je voudrais dire que je ne suis pas préoccupé par cela. Je suis beaucoup plus préoccupé par le nombre de morts, de blessés, d’orphelins, des veuves et par des familles qui sont complètement détruites. Je suis préoccupé par les centaines de jeunes qu’on manipule et qui ne sont plus des êtres normaux. Et qu’il va falloir rattraper. C’est tout cela la difficulté de la gestion de l’après-crise. Je crois que le président de la République est impatient de prendre toutes ces questions à bras-le-corps. En particulier, la question des familles et des jeunes. Je pense que l’incendie de nos résidences et de nos biens n’est rien par rapport à tout ce bilan que je viens de faire. Ce n’est pas cela qui va nous démoraliser. Mais cela montre ce que sont Laurent Gbagbo et son clan en réalité. Ce sont des gens qui ne méritent plus jamais de diriger la Côte d’Ivoire et les Ivoiriens.
Je voudrais pour terminer exprimer toute ma compassion aux familles endeuillées, toute ma sympathie aux blessés et dire mes félicitations et mes remerciements aux sympathisants et militants du RHDP, aux femmes en particulier. Je voudrais également dire à tous les Ivoiriens que c’est le moment de rassembler et de se mobiliser. A nos militaires, leur dire qu’ils sont au service de la République. Après que la communauté internationale ait conclu en faveur de l’élection d’Alassane Ouattara, il est bon que tous se mettent à la disposition du président de la République pour que nous donnions une chance à la paix et que nous puissions reconstruire la Côte d’Ivoire. Aux jeunes désoeuvrés y compris ceux qui sont aujourd’hui manipulés, je voudrais leur dire que nous ferons en sorte qu’avec le président Alassane Ouattara il y ait des opportunités pour eux comme pour les femmes. Afin que justement ce chômage chronique ne contribue au développement de tous les phénomènes que nous déplorons. Je voudrais enfin dire aux Ivoiriens que la paix est à nos portes. A chacun de faire en sorte que nous ouvrons largement cette porte dans le rassemblement dans la foi et dans l’espérance. Pour que la Côte d’Ivoire redevienne la belle Côte d’ivoire que nous avons connue, pays d’hospitalité, de fraternité, d’ouverture et de progrès.
Réalisée par Jean-Claude Coulibaly
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