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Politique Publié le mardi 22 mars 2011 | Le Patriote

Reportage - Après l’expédition sanglante et meurtrière des soldats pro-Gbagbo / Le Patriote sur les ruines de Yopougon Port-Bouët 2

Une semaine après la descente punitive des soldats et autres mercenaires de Laurent Gbagbo, Port-Bouët 2, sous-quartier de Yopougon est encore sous le choc. Entre crainte et hantise, ceux qui y résident encore confient désormais leur vie à…Dieu ! Notre reportage.

Une carcasse de voiture calcinée jonche à deux pas de la mosquée Bilal du célèbre Imam Idriss Koudouss Koné, président du Conseil National Islamique. Non loin de là, deux autres épaves de véhicules farcis par les flammes trônent, près d’une pharmacie sur la voie principale de Port-Bouët 2, vaste bourgade de Yopougon peuplée majoritairement des partisans du président démocratiquement élu, Alassane Ouattara. En face justement de cette pharmacie, aperçoit-on un café, totalement incendié. Il s’agit du café Cristal, bien connu et prisé, avant sa destruction, par les jeunes, surtout les tourtereaux qui aimaient s’y retrouver. Là, de jeunes gens s’affairent à mettre un peu d’ordre dans l’édifice, qui a subi la furia des soldats pro-Gbagbo. Mardi dernier, ils y avaient déboulé dans l’après-midi, à bord de quatre cargos militaires, d’un véhicule de la BAE et d’un autre engin du CeCos. Avec un objectif bien précis : mettre à feu et à sang, ce quartier dont quelques jeunes manifestaient quelques heures plus tôt contre l’imposture de Laurent Gbagbo, en érigeant des barrages sur cette voie et les ruelles de Port-Bouët2.

Une semaine après, Port-Bouët 2 est encore sous le choc de cette folie destructive et meurtrière. « Ce qu’on a vécu fut terrible. Ils ont tué, pillé et mis le feu. Des gens ont été même brûlés dans leur maison », témoigne d’une voix étreinte d’émotion B., un habitant de Port-Bouët.

D’ordinaire grouillante, la voix principale, que jouxtaient plusieurs commerces avant cette expédition des hommes de Gbagbo, est déserte. Aucun attroupement d’hommes, comme on n’avait l’habitude d’en voir, n’est visible. Le quartier s’est, de toute évidence, vidé de son monde. « Beaucoup de gens sont partis, après l’attaque. Avant cette rue, surtout le dimanche, était animée », confesse D. M, un habitué de Port-Bouët, qui y a vécu durant de longues années. « Je suis aujourd’hui avec ma femme les seuls habitants de ma cour. Nous étions une cinquantaine de locataires. Tout le monde est parti », renchérit B.

Cette voie, il est vrai, offre un spectacle désolant, qui témoigne de la brutalité des mercenaires et autres miliciens de Laurent Gbagbo. Du carrefour de la mosquée Bilal à l’autre bout de la rue, qui donne sur Gesco, autre quartier de Yopougon, c’est la consternation.
De part et d’autre la route, aperçoit-on des débris tantôt de kiosques à café, tantôt de petits commerces, ravagés par les flammes. Une unité de teinture de tissus et bazins, appartenant à un artiste a été également réduit en cendres. A quelques encablures de la grande mosquée de Port-Bouët2, dont l’imam Diabaté Moussa a été ce jour-là abattu froidement par ces tueurs, c’est l’horreur. Ils n’y ont pas fait de cadeau. Des grenades ont été larguées dans des baraques qui servaient d’habitations, consumant ainsi dans les flammes des familles, surtout femmes et enfants. « Un homme et ses trois enfants ont été brulés sous mes yeux », témoigne un riverain encore sous le traumatisme de cette cruauté. Même le mur qui ceint cet édifice religieux n’a pas été épargné. Il porte encore les stigmates de cette barbarie, avec notamment les traces de feu et les impacts de projectiles. Pis, toutes les « librairies » de fortune adossées à ce pan mural et qui proposaient aux fidèles musulmans des ouvrages sur l’islam ont été saccagés et incendiés.

Des grenades jetées dans des habitations et beaucoup d’exécutions sommaires
Ce n’est pas tout. Les troupes de Laurent Gbagbo ont également fait du grabuge, dans le marché de Port-Bouët 2, situé de l’autre côté de la voie principale, sous les lignes électriques de haute tension, au pied d’imposants pylônes. Ils ont mis feu à ce marché, ravageant ainsi tout sur leur passage. Et comme si cela ne suffisait pas, ils ont mis à sac le garage Gaoussou, situé dans les environs, en prenant le soin de brûler des gros camions. Manifestement, ces hommes encagoulés, pour la plupart, puaient la haine.

Derrière le centre social de Port-Bouët, en direction d’Ananeraie, précisément vers le collègue Guichanrolais, les soldats de Gbagbo ont aussi sévi. Une grenade a été jetée dans un kiosque, le réduisant en cendres. Une autre a été, selon un témoin, balancée dans une baraque où s’était réfugié un homme à la vue des hommes en armes. « Il a été brûlé comme un écureuil », raconte notre source, avec effroi.

En plus de ces images effroyables, les habitants de Port-Bouët2 sont encore marqués par les détonations assourdissantes des larmes lourdes utilisées ce jour-là. « Nos maisons tremblaient, on avait le sentiment qu’elles allaient s’écrouler », fait remarquer un autre résident.

A Port-Bouët, les esprits sont encore marqués par cette violence aveugle et gratuite. Les forces de Laurent Gbagbo n’y ont débusqué aucun « rebelle » encore moins saisi une arme. Mais, ils ont réussi une chose : instaurer la terreur dans ce quartier pourtant tranquille et sans histoire.

« Nos nuits sont désormais longues et angoissantes. On vit désormais avec la peur et la crainte de les voir revenir », concèdent la plupart d’entre eux. Toutefois, ils s’en remettent à Dieu. « C’est lui seul qui peut nous sauver », professe un habitant.

En attendant, le quartier essaie timidement de renaître à la vie, espérant ne plus jamais revivre cette terrible journée du mardi 15 janvier 2010. Une date sombre pour l’histoire de Port-Bouët 2…

Y. Sangaré
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