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Politique Publié le lundi 30 mai 2011 | L’Inter

Nouveau régime / Adama Diomandé (partisan d`ADO): "J`ai des inquiétudes"; "Je vais dénoncer tous les travers"; "Il faut une presse de l`opposition"

© L’Inter Par DR
Humanitaire : Adama Diomandé, président de l’Association pour la Défense de la Démocratie et des Libertés - France (ADDL, France)
M. Adama Diomandé, est le président de l`Association pour la défense des libertés (ADDL) basée en France. Partisan du nouveau président de la République de Côte d`Ivoire, il nous livre ici ses sentiments après le changement de régime.

M. Adama Diomandé, vous avez été un soutien fort au président Alassane Ouattara durant les campagnes pour les présidentielles. Finalement, le président Ouattara est parvenu au pouvoir, mais dans des conditions difficiles et douloureuses. Qu’est-ce que cet avènement vous inspire?
Cet avènement m`inspire du bonheur, mais je regrette que nous ayons perdu presque la moitié de l’année par la faute du président sortant qui n’ a pas voulu accepter les règles de la démocratie. Sinon, l`élection du président Ouattara, c`est l`aboutissement d`une lutte qui a duré 17 ans, depuis la dénonciation de l’ivoirité, la dénonciation de la confiscation militaire du fait que M. Guéi n’ait pas respecté sa promesse, puis la dénonciation de l’arrivée au pouvoir de M. Gbagbo d’une manière calamiteuse. Le dernier combat aura été la dénonciation de la confiscation que Gbagbo a voulu faire de la démocratie. J’ai été très ému à Yamoussoukro, à la cérémonie d`investiture et c’est un bonheur immense pour moi. Je pense, maintenant, pour la majorité des Ivoiriens, que l`heure a sonné pour une nouvelle Côte d’Ivoire. Il faudrait que chacun se mette dans sa tête qu’il doit être un nouvel Ivoirien avec de nouvelles références et de nouvelles conceptions de la citoyenneté et du devoir du citoyen.

A propos, comment appréhendez-vous les premiers pas du régime Ouattara?
Ouattara a fait une campagne claire et nette. Il a élaboré un projet de société bâti autour d`une Côte d’Ivoire nouvelle. Moi, je me battrai à ses côtés pour que ce projet soit réalisé. Mais l’inquiétude que j’ai, c’est que les gens pensent que les projets du président Ouattara ne sont simplement qu`un catalogue de promesses. Ce projet, je l’ai soutenu, je l’ai défendu et je suis venu battre campagne pour soutenir sa mise en œuvre. Seul, Alassane Ouattara ne pourra pas réaliser ses promesses. Nous devons donc nous mettre dans la tête que pour y arriver, nous devons faire beaucoup de sacrifices. D’abord notre perception du pouvoir, notre manière de pratiquer le pouvoir doivent être perçues par tous. Regardez cette jeunesse qui n’a pas de repère! Nous ne devons pas garder nos références de corruption, de gabegie, etc. C’est pour tout cela que j’ai l’intention de revenir définitivement au pays et aider à la suite du combat.
Avez-vous quelques appréhensions déjà ?
Vous savez, il y a un gouvernement de crise qui a été formé dans une circonstance exceptionnelle. Tout ne pouvait pas être parfait, il fallait sortir de la crise. Je pense que ce gouvernement a fait ce qu’il fallait pour sortir de la crise. Maintenant, en ce qui concerne les appréhensions, moi j’ai plutôt des inquiétudes. Les comportements ne changent pas parce que c’est avec les mêmes personnes qui ont dévoyé la politique en Côte d’Ivoire que Alassane va encore travailler. Le but du travail, c’est de changer de mentalité, de repère. Par exemple, un ministre doit comprendre qu’il est ministre du gouvernement. Le budget qu’on lui donne, c’est pour servir le gouvernement. Ce n’est pas son budget à lui. Le petit douanier, lorsqu’il contrôle et perçoit des taxes, ce n’est pas pour sa poche. Même l’industriel ne doit pas corrompre, il doit payer normalement ses taxes. Pour que ton entreprise marche, tu dois payer des salaires correctes. C`est vrai, tout cela ne se fera pas du jour au lendemain. Mais, je pense que chacun d’entre nous doit faire l’effort de se placer dans ce contexte, dans cette perception du projet d’Alassane Ouattara. Malheureusement, je sens que beaucoup d’entre nous n’ont pas compris cela. Beaucoup veulent fonctionner avec la référence des gouvernements corrompus qu’on a connus. Moi, j’ai combattu tout cela et aujourd’hui je suis prêt à combattre pour qu’Alassane réalise ses projets. Et ceux qui pensent que le projet d’emploi d’Alassane est un simple catalogue de promesses, en tout cas, nous allons démontrer qu’ils se trompent. Je n’hésiterai pas à dénoncer une seule seconde les travers de ceux qui viennent au pouvoir pour s’enrichir pour eux seuls.

Vos propos ont-ils quelque chose à voir avec les ratés de l’investiture à Yamoussoukro?
Pour que la cérémonie se déroule sans raté, il appartenait au protocole d’Etat de le faire. C`est ce service qui a l’habitude d’organiser ces événements. Malheureusement, la Côte d’Ivoire n’était pas gérée. Donc, apprendre des choses sur le tas, comme ça a été le cas, forcément il fallait s`attendre à des ratés. Mais, ces ratés par rapport à l’intensité de l’évènement et du discours du président Ouattara, il n`y avait pas à redire. Un ami français m’a dit que c’est le 3e président au monde qui a eu une telle investiture avec des personnalités d`envergure. Donc, les désagréments qu’il y a eu doivent être gommés. Moi, je demande aux personnalités qui ont été choquées de comprendre cela et d’excuser l’organisation. Mais, cela ne me privera pas de critiques. Toutefois, mes critiques, je ne les mettrai pas sur la place publique, je les garde pour qui de droit.
Des voix s`élèvent, à peine deux mois après l`avènement de Ouattara, pour dénoncer la chute d’un clan et l’avènement d’un autre clan, celui notamment des nordistes, eu égard à certaines réalités. En avez-vous connaissance?
Moi, je suis un nordiste, Malinké de Zikisso dans le Sud. Je pense que c’est cette référence qu’il faut gommer dans la tête des gens. Le fait que je m’appelle Diomandé Adama, musulman, je ne suis pas forcément du nord. C’est vrai que mes grands parents sont de Séguéla, mais moi je suis né à Zikisso, sous-préfecture de Lakota. Je me considère comme un citoyen de cette région et c’est pour cela que j’ai l’intention de m’impliquer dans la vie politique locale, celle de ma région de naissance. Moi je ne suis pas dans les repères ethniques et géopolitiques. Ma région de naissance, c’est là où mon père est né, c’est là il y a été enterré, c’est là je suis né. Je pense que c’est en voyant les choses comme cela que nous pourrions aider le nouveau président. J’ai parlé de repère, mais j’ai été choqué quand j’ai appris dans la presse que l’ancien Premier ministre aide une personnalité qui a été le financier de l’ancien régime, qui a cautionné les actes de ce régime qui a enfoncé la Côte d’Ivoire dans l’abîme. Aujourd’hui, une personnalité comme l’ancien Premier ministre Seydou Diarra ne devait pas introduire cette personne, qui n’était pas invitée, à l’investiture dans la salle. Surtout que cette dernière serait sous poursuite judiciaire pour crime économique. Nous devons finir avec les interventions. Sur la question, je m’adresse aux industriels et opérateurs économiques qui se disent qu’ils ont leur ministre dans le gouvernement, donc ils peuvent ne pas être en règle vis-à-vis de loi. Ce n’est pas comme ça que la Côte d’Ivoire pourra se développer. Alassane Ouattara a quitté une fonction prestigieuse pour venir mettre la Côte d’Ivoire en ordre. Nous qui l’avons soutenu, nous devons être logique avec sa vision des choses. Moi, je me donne pour mission de dénoncer tous les travers que je vais constater. Ça ne plaira pas, mais quand on a combattu la dictature de Gbagbo, rien ne pourra nous arrêter pour que Alassane réussisse son projet de gouvernement.
Parlant de clans, il se murmure que ``les frères du nord`` contrôlent tout désormais dans le pays. Une sorte de récrimination quant à l`émergence d`un clan au détriment des autres peuples?
Je n’ai pas les mêmes références que ce que les gens font. Si on référence les gens pour des nordistes parce qu`on s’appelle Adama Diomandé, alors qu`on est citoyen de Lakota ou de Zikisso, je pense que ce n’est pas comme ça qu`il faut voir les choses. Il faut voir les choses autrement. Quelle est la compétence de chacun, et non qu`on soit originaire de ci ou de là. L`originaire du nord, est-ce qu’il n’investit pas à Divo? Est-ce qu’il ne veut pas le bonheur de Divo? C’est ça qu’il faut prendre comme référence. Le président a demandé à son parti d’être ouvert aux autres. On verra par la composition du gouvernement. Sans faire des frustrés, on ne rentre pas en combat politique pour avoir la récompense d’être nommé à un poste de ministre. On rentre en politique par conviction, en tout cas moi c’est mon cas. Malgré les brimades que j’ai du subir, les torts qu`on m`a faits, je ne dis pas que je viens avoir ma part de gâteau. Je viens pour que le programme de gouvernement que j’ai soutenu soit appliqué puisqu’il s’agit du développement de Côte d’Ivoire. Il ne faudrait pas que les gens perçoivent la chose en terme de clans et que c’est le clan des ``Dioula`` qui va arriver. Le président ne verra pas les choses comme ça. C’est pour cela que je souhaite que le RHDP soit une réalité politique pour en finir avec ce temps-là. Alassane a eu deux pieds qui sont le PDCI et le RDR pour arriver au pouvoir. Bédié et Alassane ont le devoir de faire du RHDP un parti solide pour soutenir le gouvernement d’union et là, on en finira définitivement avec les clans.
Aujourd’hui, le projet cher au président Ouattara, c’est la réconciliation. Y croyez-vous?
Oui, je crois fermement en cette réconciliation. Mais la réconciliation ne doit pas être caution à l’impunité et à l’injustice. Toutes les personnes qui ont commis des crimes politiques, assassinats inqualifiables, crimes contre l’humanité doivent passer devant la justice. La justice nationale et ensuite la justice internationale. Nous ne devons pas prendre la réconciliation en otage pour justifier cela par les poursuites judiciaires. Il n’y aura pas de réconciliation dans l’injustice. Tous ceux qui sont soupçonnés d`actes inqualifiables doivent répondre devant la justice. Le président l’a dit, et sur la question, je le soutiens totalement, parce que le cas Alassane Ouattara sera un exemple dans le monde. Il y aura désormais une jurisprudence ivoirienne qui passe par l’élection d’Alassane. C’est-à-dire un gouvernement, quelle que soit sa puissance, ne pourra plus ignorer la voix des citoyens. Il y a eu un vote démocratique et ce vote doit être respecté ; c’est ce que la communauté internationale et la France ont réalisé.
Justice face à la réconciliation à travers une commission dénommée ``dialogue,vérité et réconciliation``. A quel niveau interviendrait le pardon pour que cette réconciliation soit vraie?
Le pardon vient après la justice. Il faut qu’on reconnaisse d’abord son tort, pour demander pardon. On ne demande pas pardon tant qu’on ne connaît pas la faute qu’on a commise, il faut d’abord la justice. Il y a des erreurs qu’on peut pardonner, il y a des accidents qu’on peut accepter, mais les crimes réfléchis, planifiés, ne peuvent pas être pardonnés. Je pense que la logique du président est bonne. Aujourd’hui, je pense très sincèrement que les Ivoiriens n’auront pas de problème de réconciliation. On a vécu ensemble et à un moment donné, nous nous sommes mal comportés. Voyant le dégât que ça a causé à notre pays, les Ivoiriens ont soif de réconciliation, et je suis sûr que la réconciliation va se faire. Je suis issu d’une région qui a été impliquée dans la crise, Lakota. Mais, aujourd’hui, les gens de cette région sont demandeurs de cette réconciliation. Quand je reviendrai au pays, je m’inscrirai dans le programme d’Alassane qui est de vivre ensemble. C’est pas parce qu’on est musulman qu’on ne peut pas se mélanger au chrétien pour vivre ensemble. L`Ivoirien nouveau doit avoir ce repère et je pense qu’Alassane réussira son projet.
Peut-on parler réellement de réconciliation pendant qu`une partie des enfants de se pays, les dignitaires de l’ex-régime notamment, se trouvent à l`étranger, contraints à l`exil ou en détention?
Quand on mène un combat politique, on assume les conséquences et les responsabilités qu’on a prises à un moment donné. C’est une question de dignité aussi. C’est trop facile de planifier un combat politique qui inclut la destruction du pays pour se maintenir au pouvoir, un déni de démocratie. Dans des entretiens que j`ai eus avec votre journal avant les élections, j`ai dit que le camp présidentiel est en train de préparer un hold-up électoral. Ils ont appliqué leur plan. Ceux qui n’y ont pas participé n’ont rien à craindre. Mais, ceux qui ont planifié cela devront répondre devant la justice. C’est une question de dignité. S’ils sont conscients qu’ils sont sur le bon chemin, qu’ils viennent se justifier devant la commission. Maintenant, c’est aux Ivoiriens de voir ce qui les a poussés à faire cela et ensuite on saisira la justice. Et c’est après cela qu`on demandera le pardon. Donc, je ne vois pas la contradiction entre le fait de dialoguer et de trouver une solution pour se réconcilier et veiller à ce que justice soit faite des torts commis. Il y a des étapes à franchir, et il faut les faire avec sincérité.
Ne craignez-vous pas que les actions judiciaires s`étendent contre tout le monde puisqu’il se dit, à propos des crimes , qu`il y en a de commis dans et par tous les camps?
Je crois que le président a été clair la dessus. Tous les crimes commis seront devant la justice, et il n’a pas parlé de camp. Donc, que ce soit le camp de gauche ou celui de droite, tout le monde viendra répondre. On ne peut pas commettre des crimes au nom de la défense d`une quelconque cause. Il y a eu la guerre. Pendant la guerre, il y a eu des morts dans les combats. Il ne s’agit pas de cela. Il s`agit plutôt des crimes revanchards, bien planifiés, qui doivent être sanctionnés. Et je pense que la commission que le président a nommée va statuer sur des cas et les concernés doivent passer devant la justice.
Que pensez-vous du choix de Charles Konan Banny pour diriger cette commission ?
Écoutez, je ne voudrais pas porter de jugement. Je pense que le président a fait son choix par rapport au passé. Charles Konan Banny, c’était le Premier ministre qui avait voulu faire un tandem pour nous éviter la catastrophe, même si ça n’a pas marché. Je pense que Banny a le devoir de réussir ce challenge qu’on lui donne une nouvelle fois. Et comme il est entouré des deux grandes religions, je pense qu`il pourra s`en sortir. Mais, je souhaite qu’il soit entouré aussi de gens de la société civile pour vraiment réaliser cette réconciliation.

Comment entrevoyez-vous la mise en œuvre du programme du président Ouattara avec tout ce qui a été causé comme dégâts avant son accession au pouvoir?
D`abord, la confiscation du pouvoir par Gbagbo nous a perdu inutilement 6 mois. Ensuite, les dégâts sont tellement énormes que tout ce que le président Ouattara va entreprendre sera utile et nécessaire. Mais, il connait son projet qu`il peaufine, depuis son engagement politique. C’est pour cela qu`il n`a pas eu de difficulté à le faire valider par ses alliés politiques qui l’ont soutenu au deuxième tour. Je pense qu’il n’aura pas de problème dans la réalisation de ce projet, avec la confiance du monde international économique et du monde politique ivoirien. Tout le monde n’a pas cette caution. Mon inquiétude, c’est l’Ivoirien d’abord. C’est pour cela j’insiste sur le nouvel Ivoirien qui va construire la nouvelle Côte d’Ivoire. On doit gommer tous nos repères de corruption, de gabegie et de clans pour penser à la Côte d’Ivoire.
N`avez-vous pas d`appréhension quant à l`impact des pillages, des énormes dégâts collatéraux commis sur la mise en œuvre du programme des nouveaux dirigeants
C’est pour cela que j’ai regretté que l’ancien président n’ait pas fait la passation du pouvoir dans des conditions normales. Quand on aime son pays, on pense à tout cela au lieu de sauvegarder un pouvoir personnel. Donc, on va faire avec, parce qu`on est obligé. Le défi qu’Alassane lance aux Ivoiriens, c`est que nous devons sortir de cette situation. J’étais à l’investiture à Yamoussoukro. Quand j’étais jeune, j’ai beaucoup critiqué la folie de grandeur de feu le président Houphouët-Boigny. Mais, j’avoue que j’ai pris 48 heures pour visiter les coins et recoins de Yamoussoukro, et j`ai appréhendé combien cet homme était un visionnaire. Aujourd’hui, Alassane n’aura aucune difficulté à faire redécoller ce pays. Il suffit de se mettre au travail et la Côte d’Ivoire repartira du bon pied. En ce qui concerne ceux qui ont subi des dégâts personnels, l’effet de la guerre et de l’incompréhension, nous devons prendre tout cela sur nous et reconstruire notre pays. Pour cela, on a besoin d’une opposition crédible, qui doit comprendre qu’elle a commis des erreurs politiques et qu`on ne peut pas faire sans elle. Il faut faire avec elle. C`est pour cela que je souhaite, dans votre domaine, qu’il y ait une presse de l’opposition. Pas une presse transformée en presse de la haine, une presse critique de l’opposition qui donne un projet différent de ce que le président Alassane propose. Comme cela que le débat démocratique sera complet.
Vous entendez rentrer pour servir votre pays. A quel niveau ?
Aller me faire connaître dans mon village à Zikisso, mener une campagne et puis me présenter à toutes les élections. Et si j’arrive à me faire élire, je vais porter la voix de la nouvelle Côte d’Ivoire à l’Assemblée nationale. Je n’ai pas mené mon combat politique pour être nommé à un poste de ministre. C’est le président qui décide pour les postes de nomination. J’ai la conviction qu’Alassane sera un meilleur président et je me mets à sa disposition pour réaliser son projet.

Entretien réalisé par F D.BONY
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