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Politique Publié le samedi 2 juillet 2011 | Le Nouveau Réveil

Le procureur répond aux questions des journalistes : “Nous jugeons d’abord ceux qui ont tué”*

Monsieur le procureur, pourquoi depuis l'ouverture des enquêtes, ce sont les partisans de Laurent Gbagbo qui sont arrêtés. Est-ce à dire que ceux du Président Alassane Ouattara sont irréprochables ?
Je vous remercie pour votre question. Je voudrais vous dire ceci : si pour le moment, vous avez l'impression que nous nous intéressons à une seule catégorie de personnes, c'est pour des raisons d'organisation du travail, et surtout il faut une logique dans la conduite des investigations. Pendant des semaines, des gens lançaient des appels à la haine, à la xénophobie. Ils commettaient toutes sortes d'atrocités dans la ville d'Abidjan et sur certains partis du territoire national. Une armée arrive, elle met fin à ces violences, et on nous demande d'ouvrir une enquête sur ce qui s'est passé ! Mais le premier reflexe de l'enquêteur n'est pas de se précipiter sur celui qui est venu empêcher les autres de commettre les crimes qu'ils étaient en train de commettre. C'est de chercher à savoir qui était en train de faire quoi en ce moment précis. Pourquoi les autres sont venus intervenir. Et si pendant l'enquête, il s'avère que ceux qui sont les saveurs ont outrepassé leur droit et qu'ils ont commis des crimes, nul n'est au-dessus de la loi, on pourrait s'intéresser à eux. Mais, prenez l'exemple de Yopougon, tout le monde a suivi ce qui s'est passé à Yopougon. Des mercenaires, des miliciens commettaient des atrocités d'un autre âge. Ousmane Chérif arrive avec ses soldats. Ils mettent fin à ces barbaries d'un autre âge. Deux jours après que les canons se sont tus, des gens sortent avec des rapports pour dire Ousmane Chérif a commis des massacres, il faut le poursuivre. Ils ne demandent pas qu'on poursuive ceux qui étaient en train de commettre toutes ces atrocités à Yopougon. Mais agissant ainsi, le parquet se met immédiatement à la place des mercenaires et autres miliciens puisque la guerre des fusils est terminée, on nous demande d'aller arrêter ceux qui sont venus mettre fin à ces violences. Ce n'est pas logique. L’on voudrait qu'on s'intéresse d'abord aux faits qui ont engendré l'intervention des autres. Ensuite comme nul n'est au-dessus de la loi, s'il s'avère qu'ils ont commis des atrocités, on s'intéresse à eux. Mais ne demandez pas au parquet de se mettre à la place des miliciens, des mercenaires pour combattre les Forces républicaines. Il y a eu une situation, nous menons les investigations, nous arriverons à la fin de l'enquête, et vous pourrez dire s'il s'agit d'une justice des vainqueurs ou bien d'une justice des vaincus.

Qui sont les 21 personnes inculpées ?
Ces 21 personnes sont soit des membres du gouvernement illégitime de M. Laurent Gbagbo ou des collaborateurs. Vous donner comme ça 21 noms, je pourrais le faire si j'arrivais au bureau. Mais sachez que, entre autres personnes inculpées, il y a M. Aké N'gbo, le Premier ministre de M. Gbagbo, il y a Alcide Djédjé qui était son ministre des Affaires étrangères, etc. Il y a 21 personnes, excusez-moi, je ne peux pas vous donner les 21 noms comme ça. Il faut que je me réfère à une liste. Mais toutes ces personnes se trouvent à la Pergola. Dans la première procédure relative aux infractions commises au préjudice de l'Etat, 15 personnes sont effectivement inculpées. Et dans la seconde procédure, c'est-à-dire celle relative à la sûreté de l'Etat, 21 personnes sont déjà inculpées. Mais les investigations se poursuivent. Et comme le disent les anciens, le juge est saisi des faits comme le stipule l'article 78 du code de procédure pénale.

Les enquêtes du parquet ne vont-elles pas se chevaucher avec celles de la Cour pénale internationale (Cpi) au niveau des crimes de sang ?
L'enquête de la Cpi n'a pas encore commencé, et il n'est pas exclu que nous collaborons. De toutes les façons, les crimes pour lesquels la Cpi est compétente, ce sont les crimes contre l'humanité, les génocides et autres. Nous, nous enquêtons, nous récoltons les éléments que nous pouvons récolter et nous allons aviser à la fin de l'enquête préliminaire. La Cpi fera son travail mais une collaboration n'est pas exclue. Elle est même souhaitée.

Qui sont les 6 dernières personnes inculpées ?
Je crois que le juge d'instruction est mieux placé pour vous le dire. Les noms ne sont pas importants. Vous pourriez les avoir en passant à mon service. Mais il n'est pas utile de venir avec les noms de ces personnes ici.

Où se trouvent les personnes contre qui il a été délivré des mandats d'arrêt ?
C'est le juge d'instruction qui a émis les mandats d'arrêt. Il sait très bien où ces personnes se trouvent. Le mandat d'arrêt est destiné à un Etat. Pour qu'il y ait un mandat d'arrêt international, il faut d'abord qu'il y ait un accord de coopération entre cet Etat et la Côte d'Ivoire. Donc si on a pu établir un mandat d'arrêt, c'est qu'on sait où se trouvent ces personnes et on sait au moins qu'il y a un accord de coopération, un traité.

Vous parlez d'arrestations et de détentions préventives. Quelles sont les conditions de détention quand on sait que la Maca n'est pas en mesure d'accueillir des pensionnaires ?
Le code de procédure pénale dispose que les détentions préventives s'exécutent dans une maison d'arrêt. Mais à l'impossible, nul n'est tenu. Les maisons d'arrêt n'étant pas fonctionnelles, ces personnes ont été placées en détention préventive à l'hôtel la Nouvelle pergola. Je crois qu'être à l'hôtel est même plus confortable que n'importe quelle prison au monde. S'ils se plaignent des conditions de détention, je ne sais pas…mais comme l'a annoncé le garde des Sceaux, les maisons d'arrêt seront fonctionnelles bientôt et les choses vont rentrer dans l'ordre.

Un analyste écrivait récemment que le gel des avoirs que vous avez opéré n'est pas un fondement juridique. Que répondez-vous à cet analyste ?
Comme vous, j'ai lu les élucubrations de certaines personnes. Mais sachez que l'article 41 du code de procédure pénale de Côte d'Ivoire dit ceci : le procureur de la République procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la poursuite des infractions à la loi pénale. On me dit que des gens ont pillé des banques. On me rapporte que des gens s'organisent pour déstabiliser le pays, on me rapporte que des gens qui ont commis des crimes de masse se trouvent à l'extérieur et des mouvements suspects s'opèrent sur des comptes. Si je suis un enquêteur sérieux, que dois-je faire ? Est-ce que ce texte ne me permet pas de dire au banquier : arrêtez tout mouvement sur ces comptes pour me permettre de faire les vérifications ? Quand on dit : ou faire procéder à tous les actes nécessaires pour la constatation et la poursuite des infractions à la loi pénale. Qu'est ce que cela signifie ? Et puis, on nous reproche d'appliquer une décision de l'Union européenne. Par ailleurs, le Parquet ne prend pas de décision, le Parquet n'est pas en train d'appliquer une décision de l'Union européenne. Mais sachez que le Parquet fonctionne sur dénonciation. J'aurais pu dire vu l'état produit par telle personne…on me dit qu'en Europe, nous avons sanctionné telle ou telle personne. J'ai dit, cette décision prise là-bas est comme une dénonciation. Je la prends comme une dénonciation et vu les pouvoirs que nous confère l'article 41 du code de procédure pénale, je décide de geler les avoirs de telle ou telle personne pour les nécessités de l'enquête. Est-ce que pour les nécessités de l'enquête, ce n'est pas possible ? J'attends qu'on me le dise. J'attends que ces brillants analystes me précisent le contenu exact de l'article 41 du code de procédure pénale.

Propos recueillis Par Diarrassouba Sory
Ph : Olga Ottro
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