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Politique Publié le lundi 25 juillet 2011 | Le Temps

Toulepleu: Une ville fantôme tente de revivre

Après les douloureux événements de la crise post-électorale, les populations du grand
ouest et plus précisément du département de Toulepleu, se font toujours prier pour
rejoindre leurs foyers respectifs. Ce samedi 16 juillet 2011, il est 9 heures lorsque le
véhicule de la croix rouge de Côte d’Ivoire qui nous transporte s’arrête devant les
nouveaux locaux de ladite ONG installés dans le quartier Beau Soleil. Le temps en ces
temps de pluie est clément et quelques rayons de soleil contribuent à la gaieté de notre
arrivée. La ville est calme et on n’observe pas d’attroupement de population qui, en
pareille circonstance, accourt pour créer le spectacle. C’est une ville vidée de sa population
qui nous accueille. Dans la cour du nouveau siège de la croix rouge de Côte d’Ivoire,
les agents informés attendaient notre arrivée. Et, quelque chose de curieux attire notre
attention. Les enfants qui d’habitude forment le gros lot du contingent des spectateurs,
manquent terriblement à la fête. A cela s’ajoute, le nombre trop élevé de personnes
âgées qui observent sans mot dire le remue-ménage. Une jeune femme prend courage et
s’approche du groupe formé par le personnel de la croix rouge en pleine discussion. Sans
complexe, elle s’introduit et offre ses services. « Je tiens un restaurant tout juste à côté
de vous. Si vous voulez vous restaurer, je suis prête à vous apporter les plats ici dans les
locaux», dit-elle. Tout le monde est curieux de découvrir ce fameux restaurant qui dans
cette grisaille vient proposer ses services. En effet, à quelques pas des bureaux, Mme
Hortense a installé son maquis pour recevoir les rares visiteurs de l’ONG. Les plats sont
démocratiques et varient entre 150 et 250 FCFA. Le plat de riz accompagné de sauce
graine et un morceau de poisson si vous avez la chance, coûte 250 FCFA. Elle ne vend
pas de viande parce qu’il n’y a pas de bras valides pour aller à la chasse.

Exode massif de la population

Le calme de la ville fait penser à un exode massif des populations. Dans le quartier Lycée
qui vous reçoit dès que vous entrez dans la ville, ce sont les FRCI que l’on rencontre.
D’habitude, les véhicules marquent un arrêt à ce check-point avant de poursuivre leur
marche. Malheureusement, il n’y a pas de véhicules ni de taxis qui passent dans ces
environs. Les seuls véhicules qu’ils voient à longueur de journées, sont ceux des soldats
ONUCI et ceux des ONG. Le passage du véhicule de la croix rouge est accueilli avec
beaucoup de soulagement par quelques passants qui nous saluent avec de grands gestes
des mains. Dans la ville tout est pillé. On peut voir de loin des maisons dont les toitures
sont décoiffées. C’est le cas dans les quartiers Libreville, Beau Soleil, Kan racine et Lycée
pour ne citer que ceux-là. C’est un triste décor qui accueille le visiteur qui s’aventure
dans ces lieux vidés par leurs populations. Adèle est une femme âgée qui vient d’arriver
de son exil volontaire. Elle vit dans le quartier Toulepleu village et ne cache pas son
amertume. « J’ai quitté mon domicile à Kan racine où je vivais avec ma famille. Au plus
fort de la guerre, j’ai perdu mon mari et deux de mes enfants. J’ai de la peine à retourner
là-bas » confie-t-elle. Cependant, au commerce, un autre sous quartier de la ville qui fait
office du grand centre des affaires, un commerçant qui a requis l’anonymat distille de
la musique du terroir. Sa boutique est bourrée d’appareils électroniques, des postes de
radio double cassette. Il n’y a pas d’affluence mais quand on a une idée de la situation
que vit la population, on peut aisément dire qu’il a de la chance d’égayer ses frères avec
de la musique pour se donner un peu de contenance. Le Préfet de Toulepleu M. Diarra
Karim ne dit pas le contraire des choses. La situation pour lui est insoutenable, mais il
fait avec. Son bureau est installé dans les locaux de l’hôtel de Toulepleu qui lui sert de
lieu de fonction. La vie est pénible pour le premier responsable qui vit une vraie galère. «
C’est dur ici. La situation sécuritaire est vraiment préoccupante et il se pose des problèmes
de communication. Le réseau électrique est affecté et il est impossible de communiquer
avec l’extérieur. Pas non plus de réseau de la téléphonie mobile », confie-t-il. Le Préfet ne
perd pas espoir, il bataille dur pour faire renaître sa ville pillée et dévastée. A cet effet, il a
initié avec l’aide quelques volontaires, l’opération ville propre. Une façon pour le premier
responsable de cette ville d’insister sur le retour de ses administrés qui se font désirer. En
ce qui concerne l’hôpital central de Toulepleu, il a complètement été pillé et saccagé.

Hôpital de Toulepleu pillé

Faut-il noter que ce centre de santé a bénéficié d’une caravane de santé qui a séjourné
dans cette ville du 10 septembre 2010 au 10 octobre 2010. L’ex-chef d’Etat M. Laurent
Gbagbo avait équipé cet hôpital à hauteur de 40 millions FCFA. A cette période, le bloc
opératoire a été entièrement équipé par l’Etat de Côte d’Ivoire et le conseil général de
Toulepleu dirigé en son temps par le Président Yro. Aujourd’hui, un médecin chirurgien
et un anesthésiste dépêché sur les lieux, ne peuvent pas exercer convenablement. Parce
que le bloc opératoire avec tout son équipement a été pillé. La population vit difficilement
et n’arrive plus à se soigner. Abandonnée, cette population vit le martyr et se meurt.
Dans tout le département de Toulepleu c’est la désolation. Des villages entiers comme

Doho, Méo, Sahibly, Pantrokin, Zionbly, Guiéllé, Bloc, Péhé, Diahibly, pour ne citer
que ceux-là ont systématiquement été pillés et saccagés. Les populations apeurées vivent
dans la hantise d’une éventuelle attaque qui pourrait encore les surprendre. C’est une ville
fantôme, désertée qui tente de revivre.

Jean-Baptiste Essis
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