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Politique Publié le jeudi 8 septembre 2011 | Notre Voie

Réconciliation nationale : Ceux qui vont faire échouer Banny

© Notre Voie Par Prisca
Commission Dialogue-vérité et réconciliation : le Président Charles Konan Banny rencontre ses collaborateurs
Mardi 6 septembre 2011. Abidjan. Siège de la Commission Dialogue-vérité et réconciliation, Cocody Riviera
La cooptation au sein de la Commission dialogue, vérité et réconciliation, de personnes très en verve, depuis septembre 2002, au profit de certains leaders politiques au détriment d’autres, risque de faire capoter la mission confiée à Banny.

L’ex-Premier ministre, Charles Konan Banny, réussira t-il à réconcilier les ivoiriens après plus d’une décennie de crise marquée par la guerre postélectorale qui a fait officiellement 3000 morts ? Bien malin qui pourra répondre à cette question. Les observateurs nationaux et internationaux veulent bien croire en la capacité de M. Banny à conduire sa mission avec succès. Sa carrure de personnalité fière qui semble attachée à son indépendance pourrait être un atout. Ses premiers pas (discours et audiences accordées à différents groupes sociaux) ont d’ailleurs suscité de l’espoir. Mais depuis la publication, lundi dernier, de la composition du bureau central de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (Cdvr), l’espoir fait visiblement place au scepticisme. Et pour cause. La liste des membres concoctés par le président de la Cdvr en concertation avec Alassane Dramane Ouattara comporte des noms qui n’inspirent pas confiance et qui font déjà jaser. Il s’agit notamment des trois vice-présidents désignés pour conduire l’opération aux côtés de Charles Konan Banny. Ce sont sa Majesté Désiré Amon Tanoé, Roi des N’zima-Kotoko de Grand Bassam, l’Imam Boikari Fofana, Cheick de la communauté musulmane et président du conseil supérieur des Imams (Cosim), et Monseigneur Paul Siméon Ahouana, Archevêque métropolitain de Bouaké. Bien que jouissant du respect pour le rang qu’elles occupent dans la société, force est de reconnaitre que ces trois personnalités religieuses et traditionnelles n’ont toujours pas été au-dessus de la mêlée politique en Côte d’Ivoire.

« On ne veut pas que je sois candidat à l’élection présidentielle parce que je suis musulman »

Bien au contraire, elles ont pris très souvent fait et cause pour des chapelles politiques et se sont présentées, pour certaines, à plusieurs occasions, comme des soutiens indécrottables et indéfectibles d’Alassane Dramane Ouattara et son parti, le Rdr. Militant ou sympathisant du Rdr, c’est selon, Cheick Boikari Fofana, par exemple, arbore le profil le plus éloquent de cette accointance avec le nouveau chef de l’Etat. L’on se souvient que juste après le déclenchement, en septembre 2002, de la rébellion armée, ce leader religieux, prétextant que sa vie était menacée par le pouvoir Gbagbo (?), s’est retiré délibérément aux Etats Unis où il s’est fait octroyer un statut d’exilé politique. Ce stratagème conçu dans les laboratoires du Rdr avait pour but de diaboliser le régime du Président Laurent Gbagbo en faisant croire au monde entier qu’en Cote d’ivoire, les musulmans étaient menacés de mort. D’autant qu’Alassane Dramane Ouattara prétendait depuis 1995 qu’on ne voulait pas qu’il soit candidat à l’élection présidentielle parce qu’il est musulman. Evidemment, c’était archifaux. Mais durant son séjour au pays de l’oncle Sam, l’Imam Boikari Fofana, selon des sources concordantes, était au service de Ouattara et passait le clair du temps à dénigrer le régime Gbagbo. Rentré au pays, quelques années plus tard, il a été désigné Cheick de la communauté musulmane de Côte d’Ivoire avec l’appui actif d’Alassane Dramane Ouattara. C’est d’ailleurs l’une des raisons des relations heurtées qu’il entretient avec l’autre leader de la communauté musulmane ivoirienne, l’Imam Idriss Koné Koudouss. Celui-ci estime, au dire des sources informées, que la charge de Cheick de la communauté islamique devrait lui revenir de droit parce qu’il était aux côtés des musulmans durant la crise depuis septembre 2002. Il n’aurait pas non plus apprécié le soutien non feint de Ouattara à Boikari Fofana. Le camp Boikari Fofana qualifie d’ailleurs, à tort, depuis lors, Idriss Koné Koudouss de pro-Gbagbo.

Bavard sous Gbagbo, muet sous Ouattara

Mgr Paul Siméon Ahouana n’est également pas à l’abri des suspicions légitimes. Le jadis bouillant évêque dont les homélies étaient particulièrement enflammées sous la transition militaire conduite par feu le général Robert Guéi (décembre 1999-octobre 2000) et sous le régime du président Gbagbo est devenu muet depuis l’arrivée au pouvoir d’Alassane Dramane Ouattara suite au coup d’Etat de la France, en avril dernier. L’homme de Dieu connu pour ses vérités crues aux dirigeants politiques ivoiriens n’a pas dit un seul mot sur le drame d’avril dernier et la situation sociopolitique qui prévaut dans le pays depuis cette date. Il n’a jamais condamné la grave insécurité que les forces pro-Ouattara des Frci font subir aux populations ivoiriennes. Alors même que les églises catholiques et les prêtres en sont victimes, Mgr Ahouana ne bronche pas. Les Ivoiriens vivent dans un Etat de non-droit avec une recrudescence des enlèvements et prises d’otages contre rançons payées aux forces pro-Ouattara. Les exécutions extrajudiciaires sont dénoncées par les organisations internationales de défense des droits humains, la justice des vainqueurs sévit, les arrestations abusives, les occupations illégales de domiciles privés, le racket, la corruption constituent autant de réalités existant sous le régime Ouattara qui méritent une réaction de Mgr Ahouana. Mais le prélat garde le silence laissant le peuple ivoirien à son triste sort. Un sort que les Ivoiriens continuent douloureusement d’expérimenter à l’intérieur du pays où les forces pro-Ouattara ont droit de vie et de mort sur les populations. L’exemple des massacres de plusieurs centaines des hommes, femmes et enfants ainsi que les expropriations des terres à l’Ouest par les forces pro-Ouattara sont éloquents. Quand on se souvient que sous Gbagbo, Mgr Ahouna était monté avec véhémence au créneau pour condamner l’affaire Probo Kouala, on s’étonne qu’il reste aphone face aux massacres de plusieurs centaines d’Ivoiriens par les forces pro-Ouattara. Même si un mort est important, plusieurs centaines de morts ne devraient que susciter l’indignation. L’attitude de Mgr Ahouana sous le régime Ouattara apparaît comme une complicité. Car, l’adage ne dit-il pas que qui ne dit mot, consent? Un tel membre de la Cdvr sera t-il capable d’œuvrer efficacement à l’éclatement de la vérité ? Quant au Roi Desiré Tanoé, il a certes l’avantage d’être discret dans ses rapports avec Alassane Dramane Ouattara et Henri Konan Bédié, deux des trois acteurs ivoiriens de la crise dans notre pays. Mais le chef des N’zima-Kotoko de Grand Bassam cache difficilement sa haine pour le couple Gbagbo. Il aurait des relations, dit-on, toujours à fleurets mouchetées avec Mme Simone Ehivet Gbagbo, originaire de Bonoua, dans le département de Grand Bassam. Avec de tels profils que doit-on attendre des vice-présidents du président de la Cdvr? Imposés quasiment, a-t-on appris, à Banny par Alassane Dramane Ouattara, Cheikh Boikari Fofana, Mgr Paul Siméon Ahouana et sa Majesté Désiré Tanoé ne sont-ils pas en mission commandée? La réconciliation nationale tant souhaitée par les ivoiriens et les vrais amis de la Côte d’ivoire ne devra pas se faire avec une commission taillée sur mesure pour imposer la volonté d’un camp sur l’autre. Ou occulter la vérité pour laisser triompher le mensonge. Depuis 1960, de nombreux mensonges jalonnent l’histoire de la Côte d’Ivoire (exemples : les raisons des génocides Sanwi et Guébié ; les complots de 1963 ; les relations franco-ivoiriennes, les origines de M. Ouattara ; l’ivoirité etc.). Il est grand temps d’y mettre un terme et la Cdvr pourrait y contribuer si les jeux ne sont pas pipés d’avance. La balle est dans le camp de M. Banny.

Didier Depry et Jean Khalil Sella
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