x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Politique Publié le samedi 24 septembre 2011 | Le Patriote

Justice, Etat de droit, Sécurité, opportunité d’investissement…Ce que Ouattara a dit pour convaincre les Américains

© Le Patriote
Rencontre entre le President Alassane Ouattara et le President de la Banque Mondiale robert zoellick lors de son sejour americain
Sécurité, humanitaire, développement. Tels sont les sujets qui ont meublé les conférences prononcées jeudi et vendredi derniers par le chef de l’Etat, Alassane Ouattara. Invité par l’International peace Institute (IPI), le NDI et la Conférence du Black Caucus, Alassane Ouattara a entretenu un public composé d’hommes d’affaires, de diplomates et d’étudiants américains ou de la diaspora africaine. Après son allocation lors des débats de la 66eme session de l’Assemblée générale de l’ONU, le Président de la république a dit sa volonté de replacer la Côte d’ivoire au cœur du leadership ouest africain. Nous vous proposons de larges extraits de sa Conférence prononcée en anglais devant l’IPI.

Question : Que pensez-vous de l’utilisation de la violence pour parvenir au pouvoir ?
ADO : Je crois beaucoup en l’Etat de droit et au processus démocratique. En fait, qu’avons-nous fait ? Vous devez savoir sans doute que Laurent Gbagbo a reporté cinq fois les élections. Les élections présidentielles devraient avoir lieu en 2005, Il les a reportées. Le Président du PDCI et moi, nous nous sommes dit qu’il faudrait avoir du temps. Nous savions que nous remporterions ces élections. Le deuxième tour de l’élection a eu lieu le 28 novembre 2010. Quelques moments après, je savais que j’avais gagné. J’ai essayé d’appeler le président Gbagbo, mais je n’ai pas réussi à le joindre. Quand il m’a rappelé, alors que je croyais qu’il le faisait pour me féliciter, il m’a dit : « ce n’est pas fini. On continue de se battre ». Vous connaissez la suite. Nous ne sommes pas très contents de la façon dont certaines organisations ont géré cette affaire. Laurent Gbagbo a refusé de reconnaitre le résultat des élections malgré les évaluations des organisations internationales. Nous avons alors décidé d’avoir une intervention de la CEDEAO, car cela devenait un risque trop grand. Gbagbo avait commencé à utiliser ses armes lourdes et tuer plusieurs centaines de personnes dans la capitale. Nous avons toujours temporisé. Neuf délégations sont venues à Abidjan pour dire au président Gbagbo : « vous avez perdu les élections, quittez le pouvoir. Il a dit « je réfléchis, on verra ». Mais il a continué à s’accrocher au pouvoir par la violence. A ce stade, nous avons décidé, avec le Premier ministre, secrétaire général des Forces nouvelles, que nous n’avions plus le choix, et qu’il fallait passer à une autre phase pour installer le président démocratiquement élu. Différents ambassadeurs en place ont dit à Gbagbo qu’il lui fallait éviter le bain de sang. Le chef d’Etat-major de l’armée a même démissionné pour se refugier à l’ambassade d’Afrique du sud. Il a dit à Gbagbo qu’il ne voulait pas se battre et qu’il devrait laisser s’appliquer la décision de l’UA. Gbagbo a refusé d’écouter l’armée puisqu’il avait des miliciens et des mercenaires sur qui il comptait pour s’accrocher au pouvoir. La force a donc été un dernier recours. C’est contre notre philosophie. Mais c’est Laurent Gbagbo qui est totalement responsable de l’utilisation de la force en Côte d’Ivoire. Il a eu de nombreuses opportunités d’aboutir à une solution pacifique, il les a toutes refusées.

Q : Quel est la situation sécuritaire en Afrique de l’Ouest ? Et quel leadership pensez-vous que la Côte d’Ivoire peut avoir dans la sous-région ?
ADO : Tout a vraiment commencé au Libéria, il y a plus d’une vingtaine d’année. Puis cela s’est répandu vers les autres pays comme la Sierra Leone, la Guinée ou la Côte d’Ivoire. Au Liberia, les élections sont prévues en octobre 2011. Les mercenaires du Liberia sont allés vers d’autres pays. Nous avons eu des élections transparentes en Sierra Leone, en Guinée et en Côte d’Ivoire. Il est très important que les élections se déroulent bien au Liberia et que ces élections soient protégées. C’est pour cela que sous l’égide de la CEDEAO, nous avons tenu une réunion, il y a environ deux semaines avec le Burkina Faso, le Liberia et la Guinée. Nous enverrons des forces de police de la CEDEAO au Liberia de manière à soutenir véritablement le processus électoral. Nous souhaitons que tout se déroule dans la paix et que quiconque gagne, aie la victoire. Je crois que si au Liberia, de manière pacifique, les choses de déroulent, ce serait positif pour la sous-région. Nous croyons beaucoup à l’intégration politique. Nous devons dépasser l’intégration monétaire actuelle. Mais comment réaliser cela ? Au niveau de l’Union ouest-africaine, au mois de juin, nous avons évoqué la question. Avec le Nigeria, nous avons évoqué plusieurs fois la question. Le président Goodluck Jonathan est très impliqué à ce sujet. Nous allons trouver une formule pour simplifier les choses. Nous allons donner plus que nous avons actuellement.

Q : N’y a-t-il pas une alternative aux élections, étant donné que les élections nous divisent en Afrique ?
ADO : Chaque démocratie a un coût. Y a-t-il une alternative aux élections ? Je ne crois pas. Clairement, j’y suis opposé. La démocratie et la liberté sont liées. Elles ne peuvent pas être séparées. Il n’y a donc aucun moyen de faire autrement. Il y a un an, l’Egypte, la Lybie et la Tunisie n’étaient pas à ce niveau. Qui aurait pensé que ces pays y seraient, que leur pays revendiquerait la liberté ? Le manque de liberté d’expression, et d’autres libertés, comme celle d’obtenir un emploi, est à la base des changements. En Afrique, nous avons franchi une bonne étape. Je suis très heureux de m’être engagé dans cette voie. Quand je suis venu aux Etats-Unis, j’avais 21 ans. J’en suis venu à la conclusion que la force de ce pays vient du respect de la liberté fondamentale et celui des institutions. Je suis rentré chez moi en Côte d’Ivoire, avec cette idée. Je donnerai à mon pays la démocratie. Aujourd’hui, je suis Chef d’Etat, je suis donc heureux d’avoir cette opportunité. Je ne ferai rien pour entraver la liberté fondamentale. Les élections doivent être transparentes. Si je gagne tant mieux, sinon ce n’est pas la fin. Au cours des cinq années à venir, nous allons renforcer cela.

Q : Qu’en est-il du débat sur la citoyenneté ?
ADO : La question de la citoyenneté est un problème majeur en Côte d’Ivoire. Mais, ce n’est pas la faute à un politicien en particulier. Nous avons tous, d’une manière ou d’une autre, contribué à exacerber le problème. Nous devrions maintenant nous rassembler et nous assurer que les solutions doivent être trouvées. Les enfants qui sont par exemple nés ici, leur acte de naissance, ce n’est qu’un petit papier. Grâce à cela, ils ont la citoyenneté américaine. En Côte d’Ivoire, ce sont des grands papiers. Sur les certificats de nationalité, il est écrit que si vous avez des doutes, il faut vous référer à l’administration pour confirmer ou infirmer la nationalité. Une personne peut donc décider de confirmer ou infirmer, c’est qu’il y a problème. C’est pour cela que les choses n’avancent pas. Quand on mettra en place l’Assemblée Nationale, c’est l’une des premières actions que j’entreprendrai. Nous passerons en revue la Loi sur la nationalité. Nous devons avoir une notion claire de la nationalité et de la citoyenneté.

Q : Que ferez-vous pour le respect de l’Etat de droit ?
ADO : Au cours de la période passé, le droit a été manipulé. Dans certains secteurs au plus haut niveau. Il n’est donc pas facile de gérer les choses. Mais cela dépend de la détermination dont nous devons faire preuve. Vous savez, j’aurai pu faire comme le Président Gbagbo et nommer un Conseil constitutionnel aux ordres. J’aurai pu choisir quelqu’un proche de moi ou quelqu’un proche de mes visions politiques ou philosophiques. Mais, j’ai nommé à la tête de la plus haute cour judiciaire de Côte d’Ivoire, une personnalité reconnue comme un socialiste alors que moi je suis libéral. C’est une personnalité qui a marché avec Laurent Gbagbo. Il (Pr Wodié francis, ndlr) a été ministre du Président Bédié. Il n’est pas influençable. Il est reconnu en premier lieu comme un spécialiste du droit constitutionnel. Je l’ai choisi. Il est compétent et respecté. Je lui ai dit : ‘’je vous nomme, mais vous avez la responsabilité de vous assurer que le pays marche selon les règles du droit’’. La crise est partie de la Cour constitutionnelle. L’ancien chef de cette Cour connaissait les résultats. Mais il avait certainement peur d’aller en prison et il me l’a dit en tête-à-tête. « Nous connaissons les résultats, mais nous avons peur d’être tué ». Encore une fois, il est important d’avoir un leadership. Si les magistrats commencent à savoir que leurs décisions doivent être bonnes, cela sera très utile. J’espère que nous serons capables de dénoncer certains magistrats corrompus et les traduire en justice.

Q : Quel lien y a-t-il entre l’Etat de droit le processus de réconciliation ?
ADO : En ce qui concerne le lien entre la réconciliation et la justice, nous avons une Commission Dialogue vérité et réconciliation, mais à côté, il y a processus judiciaire. Il ne faut pas mélanger les deux. Les gens ont commis des actes. Ces actes devront être examinés par les juges. Si un juge décide d’envoyer quelqu’un en prison, la personne ira en prison. La seule exception que j’ai faite, c’est avec Laurent Gbagbo et sa femme. Ils ont commis beaucoup de crimes économiques. Ils ont pillé les caisses publiques et pris indument de l’argent à la Banque centrale. Ils ont pris dans des camions près d’un demi-million de dollars. Ils ont été inculpés. J’aurai pu les laisser aller en prison. Mais, pour leur rang et leur dignité, j’ai accepté qu’ils soient détenus dans les villages éloignés. La Commission Dialogue, vérité et réconciliation dispose de deux ans pour écouter tout le monde. S’il y a des recommandations, en ce moment-là, nous déciderons. Peut-être, y aura-il des recommandations vers le pardon ? De toute manière, pour moi, tuer des gens n’est pas acceptable.
Q : Comment éviter que cela ne se reproduise ?
ADO : Je pense que tout dépend de nous. Nous devons accepter le fait que tous les Ivoiriens sont égaux devant la loi. On a mis dans la tête de certaines personnes qu’il y a beaucoup de catégories d’Ivoiriens. Nous devrions véritablement accepter le fait que nous sommes tous égaux devant la loi. Cela n’était pas bon. Ce n’était pas juste. Cela a créé des problèmes. Il faut de la transparence dans le processus électoral. A cela s’est ajoutée l’action des juges. Beaucoup de comportements doivent changer. Chaque fois que j’aurai l’occasion de parler à mes compatriotes, je leur parlerai de tolérance. Je suis musulman, mon épouse est catholique et certains de mes enfants sont protestants. Je ne m’interfère pas. C’est important que nous leaders du pays, ne propagions pas les messages de haine. Nous devrions tous faire ce que nous pouvons pour que cela ne se reproduise plus en Côte d’Ivoire pour éviter que nous commettions les erreurs du passé.

Q : Les organisations des droits de l’Homme ont publié les documents de crimes sérieux et de violations des droits de l’Homme par vos soldats et par d’autres soldats, proches de Gbagbo. Qu’allez-vous faire à ce propos ?
ADO : Tel que je l’ai dit, nous n’avons pas de catégorie de citoyens. Nous n’avons pas différentes manières de traiter les personnes. Nous avons décidé d’établir les faits par la mise en place d’une Commission d’enquête. En particulier, sur les événements à l’Ouest du pays et dans une commune du district d’Abidjan. Vous savez très bien qu’il y avait des violences et l’utilisation d’armes lourdes. Beaucoup de gens ont été tués. A la fin de la guerre, il ya eu une tentative de revanche. C’est clair, il y a eu des crimes des deux côtés. La Commission devrait être à même de nous dire pourquoi cela s’est produit. Quand ? Bien sûr, s’il y a des abus, il doit y avoir des procès. Je n’ai aucun problème avec cela. Maintenant, nous avons dit aux organisations des droits de l’homme de mettre à notre disposition, leur documentation pour une évaluation sur la sincérité de ce qui s’est produit. Nous avons aussi des documents. Si nous étions satisfaits de la situation, nous n’aurions pas constitué de Commission. Je n’écoute pas un camp pour me faire un avis. Nous souhaitons un Etat de droit.
Charles Sanga (Envoyé spécial à New York et Washington)
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Politique

Toutes les vidéos Politique à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ