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Société Publié le jeudi 29 décembre 2011 | L’Inter

Reportage / Après plusieurs mois d`exil : Sur le chemin du retour des réfugiés ivoiriens du Liberia

Dans le cadre du rapatriement volontaire des réfugiés ivoiriens vivant au Liberia, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) a organisé le jeudi 08 décembre 2011, une opération de rapatriement. Elle concerne un groupe de 546 personnes vivant jusque-là à Nimba county et Grand Gedeh au Liberia, et ayant fui les violences de la crise post-électorale. Notre équipe de reportage a partagé avec elles l'ambiance de retour.

Partie de Toulepleu à 10 heures dans un véhicule du HCR ce jeudi-là, notre équipe de reportage est arrivée, après 35 minutes de route sous une chaleur accablante, au bureau des Douanes de Pekanhoubli (dernier village ivoirien avant la frontière) sur une voie poussiéreuse. A ce poste frontalier, nous apercevons le sous-préfet de Tiobly, Kouassi Koffi, venu accueillir les réfugiés ivoiriens vivant au Liberia. L'administrateur civil à qui nous nous présentons, ne manque pas d'extérioriser sa joie de venir à la rencontre de ses compatriotes. ''Nous sommes en période électorale (Ndlr ; campagne pour les législatives) en Côte d'Ivoire. Mais pour le retour des réfugiés, nous avons pris toutes les dispositions ; de sorte que nous pouvons rassurer qu'il n'y a aucun souci à se faire au plan sécuritaire'', confie-t-il avec une pointe de sourire en coin. Après quelques minutes dans ce village frontalier où la vie reprend timidement son cours normal, notre équipe de reportage décide de passer la frontière, de commun accord avec d'autres confrères de la presse nationale et internationale, venus vivre, en témoin privilégiés, cet événement. Le commandant du détachement des Forces républicaines de Côte d'Ivoire (Frci) de Toulepleu, Sangaré Aboubakar, dont les éléments assurent la sécurité aux côtés de la force des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI), consent volontiers à nous accompagner. A 10 heures 55, nous voilà à Biahi, premier village du Liberia. Au poste de police, nous échangeons des civilités avec les agents des douanes. Sur place, nous reconnaissons Zoom Dosso, correspondant de Radio France internationale (RFI) et de l'Agence France presse (AFP) au Liberia. Ce dernier, qui fait jouer à fond les liens de confraternité nous sert de guide de circonstance ; et c'est lui qui nous apprend que les réfugiés ivoiriens se trouvent dans un centre de transit à Toe Town, une ville située à une quinzaine de Km de Biahi. Très disponible, le confrère se propose de nous y conduire à bord de son véhicule de type 4x4. Mais avant, il présente ses hôtes au chef de brigade, James Young, ainsi qu'aux éléments de la DST libérienne. ''Quand nous recevons des étrangers chez nous, nous leur donnons de la cola. Nous vous offrons de la boisson parce que lorsqu'on se retrouve en Côte d'Ivoire, nous faisons l'objet d'attention particulière. Ivoiriens et Libériens sont condamnés à collaborer pour la simple raison que lorsqu'un problème majeur survient dans un camp, cela affecte forcément l'autre'', se convainc Philip Nabgé, responsable du service de renseignements qui s'adresse à nous à travers un interprète. Après cette partie de ''libation'' qui nous a permis de parler de tout et de rien, cap est mis sur Toe Town que nous regagnons à 11 h 40.

État d'esprit des réfugiés

Dans cette localité, rien de particulier, personne ne fait vraiment attention à ce retour des réfugiés ivoiriens. C'est le train-train quotidien. Pour tout dire, les habitants vaquent à leurs occupations. Notre guide conduit directement notre équipe de reportage vers le centre de transit situé à l'Est de la ville. Sous un préau de fortune, nous trouvons Fatim Mohamed, chargée de protection au HCR Liberia occupée à remplir plusieurs documents. Autour d'elle, plusieurs enfants scotchés aux pagnes de leurs mères attendent sous le soleil avec leurs bagages. Interrogée, la chargée de protection du HCR nous dévoile le nombre de réfugiés devant rentrer en Côte d'Ivoire. ''Initialement au nombre de 738, c'est en définitive 546 réfugiés appartenant à 219 familles qui prennent le chemin pour la Côte d'Ivoire. Ils sont venus volontairement se faire enregistrer pour être évacués dans leur pays'', confie notre interlocutrice, soulignant que cette opération de rapatriement qui devrait se dérouler la veille, mercredi, n'a pu être effective pour une raison de procédure. En effet, poursuit Fatim, une vingtaine d'autobus arrivés de la Côte d'Ivoire pour ce convoi a été refoulée à la frontière libérienne pour défaut de document administratif. Mais à présent, rassure-t-elle, tout est rentré dans l'ordre. Une incursion dans l'univers des réfugiés ivoiriens permet de mesurer la joie qui se lisait sur les visages ; ceux-ci sont au comble de la félicité à la seule idée de retrouver leur pays après de longs mois d'exil. ''Je suis originaire du village de Gbahounié (Danané) que j'ai fui avec mes deux enfants depuis décembre 2010 suite aux violences post-électorales pour me réfugier au Liberia. Aujourd'hui, je suis contente de retourner dans mon pays, parce que j'ai appris que la paix est revenue. Il est toujours mieux d'être chez soi'', raconte avec une émotion sincère Gba Marthe, une jeune ivoirienne de 43 ans qui s'est empressée de prendre place à bord du minicar N° 23, à l'appel de son nom par un employé du HCR. Comme elle, d'autres personnes, en majorité des femmes et des enfants, sont heureuses de signer ce grand retour au pays.

Ces réfractaires au retour

Mais, dans l'ensemble, certains réfugiés ne partagent pas le même enthousiasme. Une bonne frange affirme jouer la carte de la prudence. Et c'est bien le cas de Vodjouo Annick, au seuil de la vingtaine, qui a à ses côtés ses deux enfants. ''Moi, j'attends encore un peu. Pas parce que je suis trop à l'aise ici, mais je vis encore le traumatisme de cette guerre. Face aux tueries, j'ai quitté Toulepleu, le 23 mars 2011, avec mes enfants par la brousse pour regagner le Liberia'', raconte-t-elle le regard hagard. Ziadé Serge, 36 ans, ne dit pas autre chose ; il n'est pas encore prêt pour le départ au pays. Et l'homme a ses raisons. ''Mon père et ma mère ont été tués pendant la crise. Et ceux de nos parents qui viennent au marché ici affirment que ma maison a été incendiée au quartier ''Bon Soleil'' à Toulepleu. Donc, je n'ai plus rien à faire en Côte d'Ivoire'', coupe-t-il sèchement. Pour notre interlocuteur, un retour à Toulepleu dans ces conditions serait synonyme d'oisiveté. Quant à Gbéhé Gabriel, 77 ans et Kouyo Benoit 74 ans, rencontrés dans les rues de Toe Tonw, ils ont dit ne pas être informés sur l'opération de rapatriement des réfugiés ivoiriens vivant au Liberia. Après avoir marqué notre étonnement face à de telles affirmations, les deux vieillards peinent à convaincre et s'emmêlent dans des détails. Bref, une fois les procédures administratives terminées dans le centre de transit de Toe Town, le convoi s'ébranle, dans un nuage de poussière, vers la Côte d'Ivoire. Lorsque le cortège passait la frontière entre les deux pays, il était environ 14 heures. Côté ivoirien, l'on constate que le sous-préfet de Tiobly n'avait pas bougé malgré la canicule. Après une pause ayant permis aux parties ivoirienne et libérienne d'échanger des documents, le voyage reprend. Une partie du convoi se dirige au centre de transit de Toulepleu quand l'autre prend la destination de Danané. A Toulepleu, des kits constitués de tentes, de couvertures, de seaux, de savons, de casseroles... sont remis à chaque réfugié, sans oublier un apport financier pour une prise en charge de trois mois. ''Cet argent pourra servir à chaque réfugié à développer un commerce le temps de reprendre ses activités habituelles'', commente un responsable du UNHCR Côte d'Ivoire qui a souhaité garder l'anonymat.

G. DE GNAMIEN
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