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Politique Publié le jeudi 26 janvier 2012 | L’intelligent d’Abidjan

9 mois après la chute de Gbagbo / Un observateur conseille : Le FPI doit se soumettre à un bilan, celui de sa fin tragique

Le meeting planifié par le FPI, le samedi 21 janvier dernier, n'a pu se tenir. A peine entamé, il a été émaillé de violence et soldé par une perte en vie humaine et de nombreux blessés. Comme il se doit en pareille circonstance, des condamnations n'ont pas manqué de fuser, autant que des déclarations de désignation de coupables et d’explications relatives aux circonstances et causes de ce drame. Ici encore, la passion a pris le pas sur la raison et les émotions ont eu raison du discernement, de la retenue et de la pondération.

La sagesse commande, dans de telles situations, d’attendre les résultats de l’enquête diligentée par les autorités ivoiriennes pour établir des responsabilités,
identifier les coupables et permettre à la justice de se faire. C’est, du reste, ce que le Ministère de l’Intérieur recommande. Loin de moi l’idée d’entretenir une polémique indue ou de donner une importance excessive à un incident comme notre pays en connaît depuis quelques années, ce qui est en contradiction avec l’assertion selon laquelle la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui, contrairement à celle des dix dernières années, marcherait sur la tête!
Ce qui se donne comme matière à réflexion, à mon avis, porte sur une notion élémentaire, celle de liberté et de responsabilité. Dans l’espace public, la double notion de liberté et de responsabilité est garantie par la Loi fondamentale, qui dispose, en son article 13, que «les Partis et Groupements politiques se forment et exercent leurs activités librement sous la condition de respecter les lois de la République, les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie. Ils sont égaux en droits et soumis aux mêmes obligations ». Liberté et responsabilité font écho avec droit et devoir. Autant il n’existe aucune liberté sans responsabilité, sinon celle qui implique le désordre, la chienlit, l’anarchie ; autant il n’est pas de droit sans devoir!
Le FPI, comme toute autre formation politique, a, en principe, le droit d’organiser des meetings. Que ce parti puisse librement tenir des réunions publiques pour communier avec ses militants et partisans n’est récusé par aucun esprit épris de paix et de démocratie. Même si, sous son règne, les manifestations de l’opposition étaient étouffées dans l’œuf ou matées dans le sang par des éléments de l’Armée et des miliciens à sa solde, nul ne saurait conseiller de donner au FPI la monnaie de son change, pour ne pas verser dans la pratique de la revanche et des représailles.
Il est, cependant, nécessaire de noter que le drame que la Côte d’Ivoire vient de connaître appelle tous ses fils et filles à plus de devoir que de droit, dans la quête de la paix, dans la recherche de l’harmonie brisée. Il se dégage une exigence de discernement, une invite à l’introspection, dans les actes que les partis politiques, ainsi que leurs leaderships et militants, posent pour insuffler une dynamique de paix et de concorde dans notre pays.
En soumettant une demande d’autorisation au Ministère de l’Intérieur pour la tenue de son meeting, le FPI semble s’inscrire dans la logique de la liberté d’organisation d’une activité régulière et permise par la loi ; mais également dans l’esprit de la responsabilité de contribuer à la préservation de l’ordre public. Ceci commande la tenue d’un discours empreint de raison, de modération et de courtoisie. La rhétorique de la libération de la Côte d’Ivoire que le FPI entretient dévoile une stratégie de clair-obscur, pour ne pas dire qu’elle trahit une tentative de contestation de l’autorité publique ou simplement de sa récusation et de déstabilisation du pouvoir.

Les propos guerriers, le verbe hargneux et la parole morveuse conduisent à conditionner des foules dans l'incivisme pour les pousser à la violence et à la mort.
On aboutit, inéluctablement, à l’esprit de sédition, à la résurgence de la culture de la violence verbale en prélude à des actions de troubles à l’ordre public.
On le voit, le scénario de Koumassi s’est répété à Yopougon, avec des jets de pierres et autres actes de violence de la part d’éléments incontrôlés et non identifiés, vecteurs de troubles et adeptes de la chienlit. En condamnant ces actes de violence avec la dernière énergie et en souhaitant que les coupables soient appréhendés et traduits en justice, on ne saurait ne pas faire usage du proverbe du terroir, qui dit qu’en prodiguant des conseils au renard, il faudrait également raisonner le poulet.
S’il revient aux autorités de prendre toutes les dispositions appropriées pour permettre qu’une manifestation de parti politique soit organisée avec toutes les garanties de sécurité, il est du devoir des leaders de parti politique de contribuer à la formation de la volonté du peuple et à l’expression du suffrage, comme le prescrit la Constitution, dans un discours qui exprime les valeurs républicaines. Les partis politiques sont en porte-à-faux avec les principes cardinaux qui fondent la République, qu’ils sont tenus de défendre, lorsqu’ils s’engagent dans des manœuvres de sédition, suscitent des agitations et installent le pays dans une atmosphère de tensions perpétuelles. Cela procède d’une logique de coup d’Etat permanent.
A travers cette rencontre mort-née du 21 janvier, le FPI était à plus d’une tentative, après les meetings avortés de Bonoua et de Koumassi, organisés selon le même casting et avec les mêmes objectifs, pour ne pas dire des résultats similaires. Dès lors, on est porté à s’interroger sur l’opportunité et la nécessité de meetings publics, pour battre le rappel des troupes, à la suite des tristes événements que la Côte d’Ivoire a vécus dans le prolongement de l’élection présidentielle de 2010. Que recherche le FPI à travers ces rencontres? Quel est le fond du message que la direction du parti de Laurent Gbagbo compte-t-il passer aux militants et au reste des Ivoiriens?

Ici et maintenant, il faudrait conseiller au FPI de changer son fusil d’épaule.
Il ne sert à rien d’appeler à des rassemblements de foule pour la reprise du contentieux électoral soldé depuis 2010-2011. Il est vain d’actionner et de manipuler des foules pour espérer obtenir la libération de Laurent Gbagbo et des autres cadres de son parti en détention. Il serait, en revanche, indiqué d’engager des réflexions en profondeur, sur le contenu idéologique de ce parti, ses méthodes et ses discours, pour un nouveau départ. Ceci est la voie de la raison, de la rigueur et du courage. Hors de cela, le FPI tourne en rond, en manque de repère, dans le dilatoire et la mystification.
En dehors de ses cadres qui sont en détention ou en exil, de quelles intelligences, génies et ressources le FPI dispose-t-il pour se réorganiser et se requinquer en vue de reprendre sa place sur l’échiquier politique ivoirien? Quelles sont les mutations auxquelles il est inexcusablement soumis? Quel bond qualitatif doit-il opérer? Avec qui engagerait-il des actions pour réussir à se repositionner? Quel temps cela prendra-t-il? Quelles nouvelles visions, quels enjeux et quelles orientations compte-t-il donner à son engagement en faveur d’une Côte d’Ivoire réconciliée, rassemblée et apaisée? Comment peut-il contribuer à ces chantiers en gardant son identité? Comment doit-il se restructurer pour reprendre langue avec la majorité des Ivoiriens qui lui a tourné le dos? Comment espère-t-il rallier les peuples de Côte d’Ivoire à son dessein en faveur de leur devenir?
Plus que des meetings de démonstration de force, le FPI a besoin de s’interroger sur son passé, son présent, pour se définir un futur qui soit autre chose que le parcours et le sort de ses leaders, principalement Laurent Gbagbo. En consentant à s’ouvrir de nouveaux sillons, en acceptant de se remettre en question, en prenant l'engagement de se sonder, le FPI pourrait se donner un nouveau souffle de vie. En allant en congrès ou en convention, le FPI se soumettrait à un bilan, le sien, celui de sa gestion du pouvoir et de sa fin tragique, qu’il a, jusqu’à présent, refusé de dresser. Car il ne pourra pas fuir perpétuellement sa propre ombre, sauf s’il consent à mourir !
Yao Ngoran

New York, le 24 janvier 2012
Manu101@comcast.net
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