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Afrique Publié le samedi 24 mars 2012 | Le Patriote

Mali / Amadou Toumani Touré : Les raisons d’une chute

© Le Patriote
Son Excellence Monsieur Amadou Toumani Touré
Président de la République du Mali
Le Mali est retombé dans le cycle infernal des coups de force depuis le jeudi dernier. On croyait après deux décennies de démocratie, ponctuée d’une alternance en 2002, le spectre des lendemains incertains définitivement écarté. Mais hélas ! Le pays de Soundjata Kéita est rattrapé par ses vieux démons. Le président Amadou Toumani Touré a été emporté depuis le jeudi dernier par le tourbillon de la mutinerie qui secouait les casernes maliennes depuis le mardi dernier. Les mutins réclamaient au pouvoir plus d’armements pour combattre la rébellion touareg dans le nord désertique. La mutinerie s’est rapidement muée en confrontation armée. La contestation a glissé sur le terrain politique en l’espace de 24 heures. Les militaires en colère, en lieu et place d’armes, réclament le départ du président Amadou Toumani Touré dont ils traitent le régime d’ « incompétent ». Le jeudi 22 mars, très tôt le matin, les mutins attaquent le palais présidentiel où des échanges de tirs ont lieu avec la garde présidentielle. Les mutins réussissent à s’emparer du siège du pouvoir à Bamako. Les minutes qui suivent, une déclaration à la Nation est faite. La Constitution est suspendue. Les institutions de la Républiques sont dissoutes. Le coup de force se précise. Il a un visage et une voix. Le chef de la junte est le capitaine Sanogo Haya Amadou et son porte-parole est le lieutenant Konaré Amadou. Le Mali et le monde entier est dans la consternation. Mais que s’est-il passé pour que l’on en arrive là ? Les raisons du putsch qui est survenu au Mali depuis jeudi dernier sont multiples. Elles relèvent de causes à la fois exogènes et endogènes. La première cause, la plus évidente d’ailleurs, est la rébellion touareg. Depuis le début de l’année 2012, le Mali est frappée de plein fouet par l’action insurrectionnelle du Mouvement national de Libération de l’Azawad. Des militaires targui partis combattre en Libye, traverse le Niger et une partie de l’Algérie pour se retrouver dans le nord du Mali. Ces vétérans de la guerre de Libye, puissamment armés, soumettent très rapidement les troupes de l’armée malienne stationnée dans la région de Kidal. L’armée malienne surprise par la puissance de feu des rebelles tente tant bien que mal à résister à l’insurrection naissante. Mais sans succès. Les rebelles gagnent du terrain et plusieurs dizaines de militaires de l’armée régulière malienne sont tués. Pendant ce temps à Bamako, le président ATT cherche les voies et moyens pour sortir son pays de la nasse touareg. Mais ses initiatives sont jugées timides par une partie de la classe politique et par les hommes troupes qui estiment qu’il ne fait pas suffisamment d’effort pour permettre à l’armée d’éradiquer la rébellion naissante. Là où une grande partie de l’état-major prône la manière forte pour régler la question touareg, le président Amadou Toumani Touré préconise le dialogue avec les insurgés. Les semaines passent. Les médiations n’apportent rien. Au contraire, les rebelles touaregs qui refusent de dialoguer, font tonner les canons. Au fil des jours, la rébellion gagne du terrain. Le moral des troupes est au plus bas. Et pourtant à Bamako, le président ATT se mure dans un mutisme et fait du surplace. Au sein de la population, des voix s’élèvent de plus en plus pour dénoncer l’immobilisme qui s’installe à la tête de l’Etat. Mais le président malien s’obstine à prôner le dialogue avec les rebelles. Une attitude mal comprise par les hommes de troupe qui subissent de cinglants revers sur le terrain. Il est normal que dans un tel contexte les velléités antidémocratiques ne manquent pas de refaire surface. « Nous sommes venus renverser le régime incompétent du président ATT », clament haut et fort les auteurs du putsch. C’est connu. Lorsque la Grande muette bute contre l’ennemi, elle a tendance à se retourner contre celui qui l’utilise. La deuxième raison est d’ordre politique. L’élection présidentielle est prévue pour le 29 avril prochain. Mais à quelques semaines de cette échéance, rien n’est fait. Le président ATT également ne fait rien pour rassurer les uns et les autres. Pire, par son attitude, il réussit à monter toute la classe politique contre lui qui, à tort ou à raison, le soupçonne d’utiliser la crise comme prétexte pour se maintenir au pouvoir. Malgré ses professions de foi de ne pas briguer un autre mandat, l’immobilisme du chef de l’Etat malien est considéré comme une volonté cachée de s’accrocher au fauteuil présidentiel. C’est la raison pour laquelle jusqu’ici, en dehors des condamnations qui fusent de l’étranger, aucun leader politique malien n’a encore condamné le coup de force. Il n’est pas exclu qu’une partie de celle-ci ait poussé dans le dos les instigateurs du pronunciamiento. La dernière raison est de nature diplomatique. Tout le monde sait que le nord désertique du Mali sert de base-arrière à de grands bandits et terroristes de tout acabit. Al Qaeda au Maghreb islamique y a fait son refuge. Des bandes de ravisseurs puissamment armés également. Dans cette zone désertique très vaste qu’est le nord du Mali, ils y détiennent des otages, pour la plupart des Occidentaux. Les otages français employés d’Areva qui ont été enlevés au Niger y sont séquestrés. Des tentatives conjointes entre l’armée française et l’armée malienne pour les libérer ont toutes échoué. La Mauritanie, également menacée par les terroristes, a dû faire intervenir son armée sur le territoire malien pour combattre des combattants d’AQMI soupçonnés d’avoir perpétré des actions terroristes sur son territoire. Une action qui avait même créé un moment des brouilles entre Bamako et Nouakchott. Les autorités maliennes avaient accusé la Mauritanie d’avoir violé son territoire. Les autorités mauritaniennes estiment que le pouvoir malien ne fait pas assez pour traquer les terroristes qui pullulent sur son sol. Ce sentiment est également partagé par la France et certains Etats occidentaux qui considèrent que le régime du président ATT fait preuve amorphisme à l’égard des dangereux bandits armés qui détiennent des otages dans le vaste désert malien. Il n’est donc pas exclu que l’ancien homme fort de Bamako ait été l’objet d’un lâchage de la part de ses alliés traditionnels qui ne le considère plus comme un interlocuteur crédible dans ce dossier des otages occidentaux. De là à vouloir changer la donne politique au Mali, le pas est vite franchi. Amadou Toumani Touré, en un mot, est un incompris, victime de sa philosophie empreinte d’humanisme que beaucoup assimilent à un manque de courage politique.
Jean-Claude Coulibaly
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