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Société Publié le lundi 26 mars 2012 | Trait d’Union

Dossier / Les prêtres et le célibat : Révélations troublantes

C’est connu. Les prêtres de l’Eglise Catholique romaine ne se marient pas. Le débat sur le sujet est pourtant loin d’être clos. La vie de célibat et de chasteté est loin d’être aisée pour eux. L’épreuve est d’autant plus éprouvante que ces valeureux serviteurs de Dieu jouissent de toutes leurs capacités physiologiques. Comment les prêtres vivent-ils cette ‘’contrainte ‘’ ? Nous avons infiltré le milieu. Selon sa définition étymologique, le célibat est la condition d’une personne en âge d’être mariée mais qui ne l’est pas par suite de circonstance particulière ou d’un vœu. La chasteté pour sa part, est l’abstinence de toute relation sexuelle. Au sein de l’Eglise Catholique latine, l’opinion retient que les prêtres ont fait le vœu de respecter ces deux privations. Non seulement ils ne doivent pas fonder un foyer, mais ils doivent également s’abstenir de toute relation sexuelle et donc de ne pas avoir des enfants. De plus en plus, des voix s’élèvent pour suggérer que la possibilité soit donnée à ces hommes qui ont décidé de se consacrer entièrement à leur Créateur, de se mettre en ménage et d’avoir officiellement des enfants. D’autres plus incisives, n’hésitent pas à vitupérer contre ces prélats, les accusant de violer constamment cette disposition de l’église. A l’évidence, cela amène à s’interroger sur les réels fondements de ce célibat ecclésiastique, assez contraignant de nos jours. Surtout que d’autres religions (la religion musulmane notamment) et même les Eglises évangéliques qui ont sensiblement les mêmes missions du salut de l’âme des hommes, permettent à leurs guides d’avoir une vie familiale normale. Fondement biblique De nos investigations auprès de certains hommes religieux que nous avons approchés dans différents diocèses du pays, il ressort que le célibat des prêtres, même s’il n’est pas théologiquement lié au sacerdoce, est bibliquement fondé. L’argumentaire qu’ils ont développé se réfère au chapitre 19 des écrits de Saint Mathieu dans le nouveau testament. A ses disciples qui l’interrogeaient sur le célibat, Jésus Christ répondi en effet au verset 12 : « Car, il y a des eunuques qui le sont dès le ventre de leur mère, il y en a qui le sont devenus par les hommes, et il y en a qui se sont rendus eux-mêmes eunuques à cause du royaume des cieux ». Au dire des hommes religieux, les prêtres catholiques se sont délibérément rangés dans la troisième catégorie de ces groupes évoqués par le Christ. Autre référence évoquée est le verset 35 du chapitre 20 du livre de Saint Luc, toujours dans le nouveau testament. « Mais ceux qui seront trouvés dignes d’avoir part au siècle à venir et à la résurrection des morts ne prendront ni femmes ni maris » révèle ce verset. A ce passage biblique, les défenseurs du célibat au sein de l’église catholique adjoignent le chapitre 7 de la 1ère épitre aux Corinthiens en son verset 32 «Or, je voudrais que vous soyez sans inquiétude. Celui qui n’est pas marié, s’inquiète des choses du Seigneur ». Au fond, en privant les prêtres de fonder un foyer, les figures de proue de l’église catholique ont à cœur de les éloigner de toute obligation familiale. Les astreignant sur la base des fondements bibliques évoqués plus haut, à consacrer toute leur énergie à la cause divine. «L’église catholique n’a rien contre les femmes. Au contraire, elle encourage et célèbre le mariage de ses fidèles. Savez-vous qu’au début de l’histoire de l’église catholique, les prêtres se mariaient ? », révèle un guide religieux qui a expliqué que ce n’est qu’un peu plus tard que cette disposition a été révisée. Pour corroborer ces affirmations, un autre prélat approché, a fait des confidences : « De nos jours, les diacres permanents de l’Eglise Catholique se marient. Ceux-là célèbrent la messe mais ils y a certains rituels qu’ils ne peuvent pas faire. Ces diacres permanents qui sont des laïcs qu’on ordonne (ils le sont à vie), peuvent même habiter sur une paroisse et avoir une vie familiale. En Côte d’Ivoire, nous comptons quelques diacres permanents à Abidjan et à l’intérieur du pays. Mais les prêtres eux, sont astreints au célibat. » L’ennui est que l’observation de ce célibat (et surtout celle de la chasteté) est loin d’être aisée. Au demeurant, de multiples scandales mettant en scène des prêtres et des femmes (et même des enfants) ont déjà été enregistrés dans plusieurs localités en Côte d’Ivoire. Ailleurs aux Etats Unis et au Canada, nos investigations ont révélé que depuis 1985, plusieurs dizaines de cas de déviations sexuelles mettant en cause des prêtres et autres religieux ont été enregistrés. Les poursuites judiciaires engagées contre ces ecclésiastiques ont coûté très cher aux diocèses américains. Prêtres séduits De l’ensemble des entrevus avec les prélats qui ont voulu se confier à nous sous le sceau de l’anonymat, il ressort que les hommes religieux catholiques sont de plus en plus la cible des femmes. Mariées ou pas. « Certaines femmes vous viennent avec la claire intention de vous draguer » fait savoir un chef de l’Eglise Catholique. Même son de cloche avec cet autre guide chrétien qui raconte avoir été longtemps harcelé par une femme mariée à qui le mari n’accordait plus la moindre attention. « Quand j’ai compris ses intentions, j’ai été obligé de garder mes distances » révèle-t-il. Un autre témoignage de prêtre que nous avons recueilli a plutôt des relents superstitieux. « Certaines femmes commerçantes croient que le fait d’entretenir des relations sexuelles avec un prêtre, a l’avantage de faire prospérer leurs activités économiques. Et pourtant, ce ne sont que des préjugés», laisse-t-il entendre. A l’évidence, la situation de vie solitaire des prêtres est sujette à plusieurs tentations. « Certaines femmes viennent uniquement à nous avec la simple curiosité de ‘’découvrir’’ ce qu’il y a sous la soutane de l’homme de Dieu», argumente un guide religieux. Face à toutes ces ‘’ attaques ‘’ jugées démoniaques, la plupart des prêtres rencontrés, ont soutenu avoir recours à la prière constante pour maintenir le cap. Arguant qu’en réalité, les hommes religieux, après avoir passé huit années au séminaire pour leur formation, sont dans des dispositions psychologiques à même de les aider à affronter les tentations. « Tout est dans le mental. On n’oblige personne à servir Dieu en tant que prêtre. Si vous avez décidé de vous y engager, il faut être prêt à assumer cette fonction», note un abbé en fonction que nous avons approché. En dépit de tout, les hommes religieux reconnaissent qu’ils restent tout de même des êtres humains et que certains d’entre eux peuvent ‘’ chuter ‘’. « Mais n’est pas cela l’essentiel. L’essentiel, c’est de pouvoir se relever quand on a chuté et de partir de bon pied. Jésus lui-même, lorsqu’il a porté sa croix, a chuté plusieurs fois. Mais il s’est toujours relevé pour continuer son chemin», assure l’un de nos interlocuteurs. En tout état de cause, les religieux qui se sont confiés à nous, ont affirmé vivre leur célibat avec dignité et responsabilité, s’insurgeant même contre certains de leurs collègues qui, à un moment donné, aurait revendiqué le mariage des prêtres. Cette position des hommes religieux catholiques n’épouse malheureusement pas celle des chrétiens qui fréquentent leurs paroisses respectives. Avis de fidèles chrétiens Si certains estiment que la vie privée des hommes religieux ne les intéresse pas, 90% des chrétiens que nous avons consultés pour avoir leur avis sur le célibat des prêtres catholiques, pensent qu’une suppression de ce vœu de célibat ne serait pas une mauvaise idée. « Il y a des décennies, le célibat des prêtres pouvait être accepté, mais les temps ont changé et l’église devrait songer à s’adapter à l’évolution du temps», pense A. Clément, chrétien chargé des ressources humaines dans une inspection de l’enseignement primaire de l’intérieur du pays. G. Simplice, informaticien âgé d’une trentaine d’années, se dit pour sa part surpris d’apprendre que les prêtres ont fait un vœu de chasteté «Je savais que les prêtres ne se mariaient pas mais je ne savais pas qu’ils devaient également rester chastes. Je connais une jeune femme qui est la maîtresse d’un prêtre. Cette femme ne s’en cache pas. Je pense que le Pape devrait réviser sa position sur le célibat des prêtres catholiques», indique-t-il. Et K.K.Daniel, un commerçant chrétien, d’emboucher la même trompette « Nous avons connu un prêtre dans la région du Ifou qui était constamment avec deux adolescentes. Selon lui, c’est par ces filles que Dieu passait pour lui adresser des messages. Au bout du compte, l’une des filles est tombée enceinte. Tout laissait croire que l’auteur de la grossesse n’était nul autre que le guide religieux. Je pense qu’en laissant les prêtres se marier, ces genres de déviations peuvent être évitées», suggère-t-il. K. Sévérin, chauffeur de taxi, est plus incisif «Nos prêtres d’aujourd’hui ne sont pas comme ceux d’autrefois. Ils sont de plus en plus jeunes et roulent dans de belles voitures. Ce qui attire forcement les femmes. Le plus grave, c’est qu’ils sortent même avec des femmes mariées. Récemment on a lu dans la presse le cas de celui qui luttait une grossesse avec l’un de ses collègues. C’est honteux. Il faut les laisser se marier à l’instar des Pasteurs qui me paraissent relativement plus rangés», dit-t-il.

Témoignages troublants

Bertrand Y. chrétien en poste dans une structure financière témoigne : «Une fois, alors que j’étais allé voir un ami dans sa clinique à Abobo pour passer un temps, il m’a demandé de le laisser seul un moment. Plus tard, j’apprendrai qu’un prêtre y était venu faire avorter sa petite amie. C’est scandaleux pour ces gens qui n’ont aucune crainte de Dieu ». Autre réaction, celle d’un policier: «La chasteté des prêtres, ce sont des histoires. Quand j’étais à Abengourou, une femme est venue porter plainte contre un prêtre parce qu’il l’avait abandonnée après l’avoir engrossée. C’est avec délicatesse que nous avons réglé cette affaire», révèle cet officier de police. La révélation faite par un autre fidèle chrétien est édifiante : « En 2010, un fidèle chrétien a déféqué nuitamment sur l’hôtel d’une nouvelle Eglise pour protester contre un prêtre qui, selon lui, sortait avec sa conjointe. Il a fallu l’intervention de l’évêque pour purifier les lieux et calmer cette affaire honteuse», a-t-il confié. En somme, de nombreux observateurs, s’appuyant sur ces déviations constatées ici et là, en appellent à une révision de la position de l’église romaine latine sur le célibat des prêtres. Une récente enquête en France révèle que le nombre des diacres permanents (qui eux, se marient) s’accroit au détriment des prêtres. Au demeurant, ladite enquête note que de nombreux couples dans la phase de préparation de leur mariage, préfèrent se confier à ces diacres permanents, plus enclins à leur prodiguer des conseils pratiques. Jorge Ribeiro, un ancien prêtre qui enseigne à l’Université de Brasilia (au Brésil), soutient que 1 prêtre sur 5 renonce à ses vœux pour se marier. Richard S., psychothérapeute et ancien moine bénédictin révèle pour sa part que plus de la moitié des prêtres américains ne seraient pas fidèles à leur vœu de célibat. Pis, « 50 % des prêtres qui viennent me voir pour des troubles psychologiques, ont des problèmes d’ordre sexuel», explique Valerio Albisetti, un psychologue catholique italien, qui suggère lui, un sacerdoce tardif repoussant l’âge minimal d’entrée au séminaire. Visiblement, le célibat ecclésiastique pose des difficultés. Par ailleurs, permettre à ses serviteurs de Dieu, qui ont choisi de faire un travail bénévole, de se marier, obligerait l’Eglise romaine latine à leur octroyer des ressources financières pour subvenir à leurs obligations familiales.
Joseph KISSY
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