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Société Publié le lundi 2 avril 2012 | Le Mandat

Après la crise : Toumodi entre doute et espoir / Les trois grosses plaies qui rongent la Cité des Agoutis

La longue crise politico-militaire, qui a défiguré la Côte d’Ivoire, fait désormais partie des douloureux souvenirs dans la mémoire collective. Mais, à Toumodi comme dans bien d’autres contrées du pays, les stigmates de cette longue traversée du désert sont encore profonds. Malgré tout, la cité des Agoutis ne veut pas sombrer dans un désespoir qui signifierait le chaos total.

Pour le visiteur qui met les pieds à Toumodi la première fois, après la grave crise que vient de traverser la Côte d’Ivoire, l’apparence de la ville en mouvement qu’elle donne fait croire tout de suite que tout baigne. Et pourtant! En effet, ce département naguère travailleur et prospère a vu ses potentialités économiques chuter de façon drastique, depuis plus d’une décennie. Une visite dans certaines grosses bourgades modernes comme Kahankro et Bendressou permet de mesurer le poids des dérapages politico-militaires de la crise dans cette belle région. A Bendressou, par exemple, l’usine de transformation de manioc, I2T (Ivoirienne de technologies tropicales), est fermée depuis plusieurs années. « L’usine a été fermée par le gouvernement en septembre 2002, c’est-à-dire après l’éclatement de la crise.

Sur les 65 employés permanents, seuls 20 sont restés pour l’entretien de l’espace vert. C’est une société d’Etat qui est également spécialisée dans la recherche sur les produits vivriers », explique Hyacinthe Koffi, un des responsables de l’entreprise, joint au téléphone. Dix ans après, l’usine a pris un sérieux coup. Une bonne partie des installations est rongée par la rouille. Les femmes et les jeunes qui en étaient les principaux producteurs croupissent, de ce fait, sous le poids d’une pauvreté endémique. Les maquis et autres commerces, autrefois florissants grâce aux gains générés par le commerce de cette denrée, ont mis la clé sous le paillasson; l’animation du village s’en ressent durement. L’exode vers les villes est dorénavant la panacée pour échapper à une situation intenable. Une dure épreuve que le chef de Bendressou, Nanan Kouamé Raphaël, souhaite voir se régler rapidement : « Vous voyez toutes ces villas ? La plupart d’entre elles ont été réalisées avec les ressources générées par la production de manioc. Mais, tout cela relève désormais du passé, parce que l’usine est fermée. C’est vraiment dommage pout toutes les populations qui en profitaient. Le village s’est vidé de tous ses bras valides. Notre plus grand rêve aujourd’hui, c’est de voir cette entreprise rouvrir. Cela permettra de relancer l’activité économique dans toute la localité ». Un vœu qui pourrait se réaliser avec le nouveau pouvoir. Qui en a déjà donné un signal. « Le président Alassane Ouattara a déjà envoyé des émissaires ici, ainsi qu’à l’usine de la Sivoma (Société ivoirienne de manioc), située à Tontonou. Les envoyés du chef de l’Etat se sont rendus également à Dimbokro pour faire l’état des lieux en ce qui concerne l’usine Utexi. De plus, lors de sa dernière mission dans notre pays, la Banque mondiale a visité l’usine de Bendressou. Nous espérons que les choses seront rétablies plus rapidement qu’on l’aurait pensé », se réjouit Hyacinthe Koffi.

Kahankro, un héritage mal géré

Si à Bendressou l’usine de transformation de manioc a tiré le rideau, sur décision gouvernementale, à Kahankro, la fermeture de la grande scierie ADK, qui faisait la fierté de cette localité de plus de 6.000 âmes, est liée, selon les villageois, à une mauvaise gestion. A en croire toujours les mêmes sources, les héritiers de feu Niangoin, propriétaire de l’entreprise, ont confondu les finances de la société avec leurs poches. Confrontés à d’énormes difficultés financières, ils n’ont pas trouvé mieux que de liquider les différentes pièces importantes des machines de l’usine. Aujourd’hui, c’est avec une vive douleur que les populations évoquent le glorieux passé de ce vaste domaine quasiment absorbé par la brousse. Tout comme à Bendressou, les jeunes (garçons et filles) qui ne trouvent plus de salut sur place ont pris le chemin de l’aventure.

Cette histoire de bitume...

L’autoroute du Nord touche pratiquement Kahankro, qui se trouve désormais logé entre l’ancienne voie venant de Toumodi et cette nouvelle route. Au début des travaux de ce nouvel ouvrage tant attendu, le village aurait convenu avec la société en charge de leur réalisation que l’axe reliant la nouvelle et l’ancienne route via Kahankro soit bitumé. La voie a été tracée, à la grande joie des populations. Hélas, alors que les travaux sont sur le point de s’achever, point de bitume sur cette route, malgré toutes les garanties et même des pots de vin qu’auraient perçus certains responsable de l’Ageroute, à en croire notre informateur. D’où la grogne des villageois. Plusieurs séances d’explications ont eu lieu entre le maître d’ouvrage (Soroubat) et les responsables du village avec, à leur tête, Nanan Kouassi Yao, mais rien n’a changé. De son côté, la société Soroubat évoquerait les dédommagements qu’il faudrait consentir pour la destruction des plantations situées en bordure de l’autoroute, pour justifier le non- bitumage de l’axe en question. De quel côté se trouve donc la vérité ? Seules les autorités en charge des infrastructures économiques pourraient répondre à cette question.

L'insécurité, l’autre poison qui tue Toumodi

Passé le combat contre l’imposture de l’ex-régime, Toumodi se trouve désormais confrontée à une autre équation. Celle de l’insécurité. Ville carrefour, la cité des Agoutis couvre une population cosmopolite, au sein de laquelle se retrouvent, malheureusement, de tristes individus qui ont choisi de violer la quiétude de leurs concitoyens. Vols à mains armées, braquages, viols sont le lot quotidien d’une population qui ne demande qu’à vivre en sécurité.

La police et la gendarmerie, bien qu’en place depuis la fin de la crise, restent impuissantes, faute d’armes adéquates et de véhicule d’intervention. Excédés, certains habitants ont fait appel à des dozos pour leur sécurité, mais cette option se heurte à l’opposition de la majorité qui ne jure que par les forces officielles et légales. ‘’Nous ne voulons pas de dozo pour notre sécurité. Toumodi a toujours été pour la légalité. De par sa position de ville-carrefour qui facilite le brassage de populations de divers horizons, elle doit être protégée efficacement par les forces de sécurité légales, c’est-à-dire la police et la gendarmerie’’, a dit Nanan Konan N’Guessan, chef central de Toumodi. En attendant une solution efficace et définitive, Toumodi fait avec. La mort et la hantise des braquages dans l’âme, les populations continuent d’espérer, surtout après les assurances du président de la République, Alassane Ouattara, sur RTI1, il y a quelques jours.

MASS DOMI
(Envoyé spécial)
massoueudomi@yahoo.fr
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