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Politique Publié le mardi 3 avril 2012 | Nord-Sud

Augustin Thiam, gouverneur du district de Yamoussoukro : “Je n’ai de comptes à rendre qu’au président de la République”

C’est un gouverneur de district, par ailleurs cadre du Rassemblement des républicains (Rdr), « excédé », qui répond à ses détracteurs dans l’affaire du licenciement d’un employé du district. Il lance un appel aux cadres du Pdci et présente ses projets.

Depuis trois mois, vous êtes au centre d’une polémique qui vous a fait démissionner de la tête de la chefferie Akouè. De quoi retourne cette affaire?
Tous problèmes confondus, le plus difficile dans la vie, ce n’est pas de parler, c’est de se taire. Vous dites trois mois, il s’agit d’un peu plus que ça. Effectivement, il n’y a pas de semaine sans que je fasse la Une d’un des nombreux journaux que comp­te la presse ivoirienne. Pendant longtemps, j’ai refusé de parler, de m’ex­pri­mer. J’ai laissé dire et écrire tout et n’importe quoi. Le temps est peut-être venu maintenant de dire deux ou trois petites choses. Au départ, de quoi s’agit-il ? D’un problème administratif qui a été secondairement politisé. J’ai été nommé gouverneur du District et, au bout de huit mois, je ne n’avais jamais vu l’un des employés du district, Kakou Kouadio Paul, qui était responsable de la planification, à la Direction de l’Agriculture. Quand j’ai pris fonction, j’ai aussitôt imposé, dans chaque service, des réunions hebdomadaires. Je détiens toutes les feuilles de présence. Monsieur Kakou Kouadio Paul n’assistait pas aux réunions de son propre service ni à une quelconque autre réunion. J’ai organisé des rencontres, des dîners, chez moi, avec mon personnel. Il n’est jamais venu à aucun de mes dîners, ni d’ailleurs à aucune de mes rencontres. Et j’apprends qu’il est candidat du Pdci aux élections législatives auxquelles moi-même je suis candidat. Avez-vous avisé? Au cours de mes tournées, pendant la campagne électorale, je suis passé dans son village qui est Séman. En public, devant tout le village, j’ai interpelé son chef en lui disant : « nanan, vous avez un enfant qui s’appelle Paul. Il est au District mais il ne travaille pas. Quand la campagne va finir, dites-lui que si je ne le vois pas, je vais le renvoyer ». La campagne finie, je remporte les élections. Je demande à voir M. Kakou Kouadio Paul, on me dit qu’il est parti en congé. Donc, je commence à m’interroger.

Comment quelqu’un qui ne travaille pas part-il en congé ? Et qu’avez-vous ?
Je demande à consulter sa feuille de demande de congé. Il existe un document administratif qu’on appelle fiche de départ de congé. Il y est, nombre de jours sollicités : 30 jours. Curieusement la période indiquée dans le libellé par mon collaborateur part du 18 novembre 2011- 17 novembre 2012. C’est dire qu’il demande quatorze mois. Je me suis donc demandé quel est ce chef de service qui a donné quatorze mois de congé à quelqu’un. Et la ligne en dessous, l’année 2012 est confirmée. Ce qui veut dire que ce n’est pas une erreur de saisie informatique de texte. Donc sous prétexte de demander 30 jours, il demande 14 mois. Je demande à rencontrer ses supérieurs hiérarchiques. Ils sont venus s’excuser. Contre eux, je n’ai pris aucune sanction. Mais quand je demande à voir Kakou Paul, il est déjà parti en congé. Je refuse donc de lui accorder son congé, au motif que nous sommes dans une période de cueillette et que nous avons besoin de lui. J’attends donc son retour. C’est ce document que le même Kakou Paul va, par la suite, brandir à travers la presse, pour, d’après lui, attester qu’il a suivi la procédure de départ en congé.

Que dit la procédure ?
La procédure dit que Kakou Paul ne peut partir en congé tant qu’il n’a pas signé de sa main un certificat de cessation de service. Du temps de mon prédécesseur, Kakou Paul avait obtenu un tel certificat de cessation de service. Il est donc au courant de la procédure. Il est parti sans ce certificat de cessation de service. Donc il est en faute. Quand il revient, de lettres d’explication en lettres d’explication, il essaie de se justifier. Mais, pendant tout ce temps M. Kakou Paul ne se déplace jamais. Il ne cherche pas à me voir. Manifestement, il ne cherche pas la con­ciliation. Donc je prends la décision de le licencier. Quelle est la réaction de Kakou Paul ? Conférences de presse, meetings. ‘’J’ai été injustement renvoyé’’,calomnie, in­vecti­ve. Il s’associe avec des jeunes qui disent qu’ils ne sont pas contents de ma gestion. Les journaux s’en saisissent. Un jour, j’ai demandé à voir son dossier d’embauche. Dans ce dossier d’embauche figure un seul et unique document, un certificat de fréquentation délivré par le directeur de l’Inp-Hb, Adoh Gossan. Kakou Paul aurait été inscrit à l’Inset en première année de Bts option commerce en 1982-1983. Le document est signé en 2005. Il y a donc 23 ans entre la prétendue inscription et la date de délivrance du certificat. Deuxième faille dans ce certificat, l’Inset ne délivre pas de Bts. Il délivre un Dut.

Qu’a-t-il répondu à cela ?
Il dit avoir été inscrit dans une école qui ne délivre pas le diplôme dont il se prévaut pour venir travailler au gouvernorat. J’ai écrit à l’Inp-Hb, pour demander de rechercher M. Kakou Kouadio Paul dans leurs fichiers. Ils répondent qu’ils n’ont pas trouvé le nom de M. Paul dans leurs fichiers. Troisième faille dans le certificat, ce n’est pas le directeur de l’Inp-Hb qui doit signer les certificats de scolarité mais le service de scolarité de l’Inp-Hb. Bref ! Tout porte à croire que Kakou Kouadio Paul peut être poursuivi pour faux et usage de faux. Par ailleurs, le cadre organique des emplois du district dit ceci : pour la fonction qu’occupait Kakou Paul, il faut être titulaire d’un Bac D. C’est parce que M. Paul ne pouvait pas prouver qu’il est titulaire d’un Bac D, qu’il a produit ce certificat de fréquentation en 2005. En disant au payeur, « payez-moi, je m’en vais chercher mon Bac D ». Nous l’attendons toujours, nous sommes en 2012.

Entre-temps qu’avez déduit de cette situation ?
Kakou Kouadio Paul n’a même pas la qualification requise pour le poste qu’il occupe. Mais par dessus tout, c’est son attitude de manque d’humilité qui a fait que nous avons découvert cela. Si dès le départ, il était, par exemple, venu présenter ses excuses, je n’aurais jamais découvert tout ce que je suis en train de vous dire. Par la suite M. le préfet de Région, à ma demande, appelle mes détracteurs et leur demande : ‘’vous qui vous plaignez, apportez-nous les diplômes de Kakou Paul’’. Cela fait trois mois, ils sont allés chercher ses diplômes. On les attend toujours. Il paraît qu’il a un diplôme d’ingénieur qu’il aurait obtenu ; je ne sais comment. Même si au départ, dans la forme, le conseil du district m’a reproché la façon dont je l’ai renvoyé, il a fini par me donner raison au dernier conseil sur le fond. En réalité, j’aurais dû me référer au conseil avant de prendre la décision. Mais dans l’urgence, la loi me permet de licencier avant d’informer le conseil.

Quels sont les dessous politiques de cette histoire ?
Dans ses déclarations, M. Kakou Kouadio Paul dit que le Gouverneur du District bafoue l’autorité d’Henri Konan Bédié et d’Alassane Ouattara, qu’il renvoie un cadre du Pdci, que je me « venge» de lui parce qu’il a osé se présenter contre moi aux élections. Quelle meilleure vengeance y a-t-il que la victoire puisque je l’ai battu aux élections… Par ailleurs, je n’ai bafoué aucune autorité. Je n’ai pas renvoyé un cadre du Pdci. J’ai seulement renvoyé un cadre incompétent, absentéiste, qui ne va pas au travail. Il aurait été du Rdr, j’aurais fait la même chose.

Pourtant, visiblement le Pdci à Yamoussoukro s’est ligué contre vous.
Pas tous ! Ce sont certains membres du Pdci parce que Paul est le permanent du Pdci à Yamoussoukro. Il faut croire que les autres membres ne connaissaient pas sa situation de manque de diplômes.

Certains avancent le nom du maire Gnrangbé, parmi ses soutiens.
J’ai présenté tous ces documents au maire et au préfet. Le maire lui-même a été professeur à l’Inset. Il sait que cette école ne délivre pas de Bts. Comme la planche Paul est une planche pourrie, personne ne cite plus son nom. Aucun media ne cite son nom, mais pour eux, il faut destituer Thiam. Pourquoi ? Je suis en droit de me demander si je ne suis pas victime d’une cabale politique. Et que le fait que je sois apparenté au Président Félix Houphouet-Boigny et que j’ai remporté les deux postes de député au titre du Rdr à Yamoussoukro que le Pdci considère comme son fief, c’est ça mon crime. C’est cela qu’on ne me pardonne pas. D’où l’acharnement de certains cadres du Pdci contre moi.

Si vous avez apporté les preuves à Gnrangbé, pourquoi la polémique persiste-t-elle ?
Le maire les détient tous les documents que je vous ai montrés aujourd’hui. Il est parfaitement informé de la situation. Si vous prenez la liste de mes détracteurs, Djaha Koffi Lucien, chef de cabinet du maire, militant du Pdci ; Kakou Paul, permanent du Pdci, Isidore Diallo qui donne des certificats de bonne conduite aux chefs à tour de bras, militant du Pdci ; un certain de Gaule, militant du Pdci, Aimé Kouadio, président de la jeunesse communale, militant du Pdci. Les cinq ou six, sont tous militants du Pdci. Et tous, plus ou moins proches collaborateurs du maire. Peut être que le maire n’est pas au courant. Mais s’il sait, c’est grave. S’il ne sait pas, c’est grave. Mais que fait-il pour que cela s’arrête?

Le malaise est donc profond…
Je comprends d’autant moins l’acharnement du Pdci parce que la configuration politique de Yamoussoukro est faite de telle sorte que, arithmétiquement, le Rdr ne peut pas gagner des élections si en face de lui le Pdci est uni.

Mais que s’est-il passé ?
Les deux candidats qui ont été imposés par le Pdci ne convenaient pas aux autres militants du parti à Yamoussoukro. Ce qui a suscité des candidatures indépendantes. Et, au lieu de deux can­didats du Pdci en face de nous, nous avions quatre, cinq candidats. Première chose, les voix du Pdci se sont donc divisées. Deuxième chose, pour des raisons que j’ignore, les militants Pdci ne se sont pas déplacés pour aller voter. Pour les 21villages de la commune, le taux de participation était autour de 25% et 27%. Troisième chose, le Rdr n’a pas présenté de candidat dans la sous-préfecture, à ma propre demande. J’ai de­mandé à ma hiérarchie de concentrer tous nos efforts sur la commune parce que je savais qu’en face le Pdci était divisé. Et que si nous étions unis en face d’un Pdci divisé, nous ne pouvions que gagner. C’est exactement ce qui s’est passé. Donc la défaite du Pdci est le résultat de ses inconséquences locales. En toute logique, ils ne devraient s’en prendre qu’à eux-mêmes. Il s’agit de faire l’union pour les prochaines élections. Et nous, tout en ayant gagné les élections, nous sommes prêts à aller en Rhdp. Mais si demain le Pdci continue à être divisé, les mêmes causes produisant les mêmes effets, ils auront la même défaite. Certains membres du Pdci de Yamoussoukro, quand ils ont la fièvre, ils cassent le thermomètre. Et c’est moi leur thermomètre. Ils veulent me casser. Le thermomètre ne fait que dire ce que tu as. Mais ce n’est pas lui l’origine de ton mal. Et si ma victoire était un thermomètre, ça devait agir comme un signale d’alarme pour le Pdci. Je dis au Pdci : « ressaisissez-vous. Faites l’union autour de vous. Et intégrez le Rdr dans votre union et allons au Rhdp ». On dit que je suis Rdr et en même temps que je suis le petit neveu d’Houphouet-Boigny. Donc j’ai une peau Rdr et un sang Pdci. ...............

Interview réalisée par Marc Dossa, envoyé spécial à Yamoussoukro
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