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Politique Publié le mercredi 27 février 2013 | Le Temps

Affaire «7 femmes tuées à Abobo» - «Abobo la guerre» de Leslie Varenne : Le livre qui dévoile le complot

«Le 3 mars, deux ou trois mille femmes défilent aux cris de «Gbagbo dégage». La manifestation est bon enfant. (…) Le rassemblement se tient au rond-point d’Anador, aussi appelé le carrefour du Banco. Le cortège croise les chars sortant du camp-commando d’Abobo pour aller se ravitailler au camp de gendarmerie d’Agban, circulant en sens inverse de la manifestation en direction d’Adjamé. Les femmes leur adressent des coucous de la main en signe de ralliement. Elles sont certaines d’avoir en face d’elles des tanks soustraits à l’armée par le Commando invisible lors des batailles. Subitement, des tirs atteignent les femmes. Le cortège panique, les femmes crient, s’enfuient dans la stupeur générale, personne ne comprend ce qu’il se passe. Officiellement, sept femmes meurent ce jour-là (…) Je n’étais pas sur place ce jour-là, mais lors de mes voyages à Abidjan, j’ai enquêté sur cet événement. Il me faudra des mois pour comprendre ce qu’il s’est réellement passé. Dans cette affaire, de nombreux points sont particulièrement troublants. Abibia, une marcheuse témoigne : «Au départ, nous ne voulions pas y aller. Abobo était en guerre à cette époque et cette marche était dangereuse.

Mais le Golf nous a rassurées, il nous a dit que les Fongnons (les hommes du Commando invisible, ndlr) sécuriseraient la marche, et nous, nous avions une totale confiance en eux. Le Golf nous avait dit aussi que l’Onuci serait là. C’est pour cela que nous y sommes allées confiantes, habillées en boubous. Nous étions tellement rassurées qu’une des femmes est venue avec son bébé dans le dos. Elle est morte, mais personne n’a jamais mentionné le décès de son enfant.» De son côté, le Commando invisible a été totalement surpris par cette manifestation : il n’avait tout simplement pas été prévenu par le Golf. Lorsque les hommes d’IB ont vu les femmes affluer, ils ont tout fait pour leur dire de rentrer chez elles. Mais ils ont seulement réussi à faire rebrousser chemin aux mères qui arrivaient de PK 18 et d’Anyama. En outre, à l’époque, le rond-point d’Anador n’est pas encore un territoire sous leur contrôle. Le choix du lieu du rassemblement est donc curieux. Pourquoi donner le rendez-vous sur la route et à l’heure où les chars passent pour aller se ravitailler ? Huit mois après, Abiba s’interroge toujours : «Je n’ai pas toujours compris pourquoi le Rhdp a choisi ce lieu.» L’endroit aurait pu apparaître comme stratégique si les femmes avaient marché en direction d’Abidjan, mais le meeting de fin de cortège devait avoir lieu devant la mairie d’Abobo. Autre élément incompréhensible, les femmes et les chars circulent en sens inverse, donc ils se font face. Or, les femmes sont atteintes dans le dos par des balles de mitrailleuse. Selon tous les témoignages recueillis, les tirs sont partis de la station Mobil à quelque quatre cents mètres environ du rond-point d’Anador. Les douilles ramassées par un des combattants du Commando invisible arrivé sur place après les tirs sont des douilles de calibre 12,7. Or les chars russes de Laurent Gbagbo sont équipés de mitrailleuses de 14 mm. (…) Le corps d’une femme a été emmené par sa famille, présente à proximité et inhumé le jour même.Selon des témoins, les corps des six autres femmes auraient été ramassés par des jeunes hommes du Rdr, parti d’Alassane Ouattara, puis transportés dans des estafettes (petits fourgons, ndlr). (…) Autre point étonnant : même en ces temps troublés, à Abidjan, la procédure est stricte, les victimes auraient dû être transportées à la morgue d’Anyama. Une autopsie aurait dû être pratiquée et les cadavres auraient dû être remis aux familles. Or, il n’en a rien été. Les six corps ont été enterrés dans un terrain vague, à l’insu de leurs parents, qui mettront des mois avant de connaître le lieu d’inhumation. Plusieurs mois après les faits, la Cour pénale internationale (Cpi) se rend en Côte d’Ivoire et ne rencontre pas les familles. En revanche, l’Onuci a interrogé les parents des victimes pour connaître leur version des faits et les a encouragés à prendre des avocats. Mais sans le soutien d’une organisation, comment ces familles pourraient-elles suivre une procédure aussi complexe et payer les honoraires des avocats ? Le parquet d’Abidjan, lui, signale l’ouverture d’une procédure. Lors de mon investigation, j’apprendrai que deux commandants proches de Guillaume Soro étaient sur place ce jour-là. Etaient-ils là pour protéger les manifestantes ?»

«Des gars de l’Onuci en tenue de camouflage»

(Le livre « Abobo la Guerre» retrace aussi le transfert de Laurent Gbagbo et de ses proches à l’hôtel du Golf en ces termes): « Une heure après l’arrivée de ces illustres hôtes, son QG (l’hôtel du Golf, ndlr) est à nouveau attaqué à l’arme lourde. Comme la première fois, cette offensive ne fait ni blessé grave ni dégât majeur. Pourquoi les fidèles de Gbagbo bombardent-ils le lieu où se trouvent leur chef et son clan ? Pourquoi prennent-ils le risque de les tuer ou de les blesser ? Cette nouvelle agression a de quoi étonner. Un fonctionnaire de l’hôtel Sebroko révèle la vérité : «C’est l’Onuci qui s’est tiré dessus lors des deux attaques, celle du 9 avril et celle du 11 avril, contre le Golf. La première fois, c’était pour légitimer les opérations en cours après la demande de cessez-le-feu de Laurent Gbagbo. La deuxième pour justifier sa capture et faire diversion. Un militaire ayant séjourné un mois à l’hôtel Sebroko après la guerre confirme : «En fait ce sont les gars de l’ONUCI en tenue de camouflage qui ont fait le coup. Bien sûr, les gars qui défendaient le Golf n’étaient pas au courant».

Extraits du livre de Leslie Varenne
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