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Art et Culture Publié le mercredi 6 mars 2013 | Le Patriote

Interview / Michel Ouédraogo (Délégué général du Fespaco) :“Le temps du numérique est arrivé pour le festival”

© Le Patriote Par DR
FESPACO 2013: le Premier ministre burkinabé visite le stand MICA
Mardi 26 février 2013. Ouagadougou. Le Premier Ministre Luc Adolf Tiao visite les expositions au siège du Fespaco.
Délégué général du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), M. Michel Ouédraogo a annoncé lors de la clôture du Fespaco 2013, d’importantes reformes pour la 24ème édition prévue du 28 février au 7 mars 2015. Il s’agit de l’ouverture de la compétition long métrage aux films sur support numérique, ainsi qu’à ceux de la diaspora, et aussi de l’augmentation de la dotation des Prix qui récompensent les trois premiers prix du Fespaco. Le Patriote : M. Le Délégué Général, quelles sont les raisons profondes qui ont motivé ces reformes ? Michel Ouédraogo : Vous savez, 2015, ça se prépare maintenant. Nous avons fait de très grandes annonces. Nous allons premièrement ouvrir la sélection aux films de la diaspora et vous savez que les films de la diaspora bénéficiaient d’une fenêtre dans la compétition du Fespaco. Si nous voulons aujourd’hui bénéficier de l’expérience de nos frères de la diaspora, il faut bien qu’on les accepte et qu’on les intègre. On ne peut pas les considérer comme des frères, et les marginaliser dans ce que nous faisons. Ils doivent se sentir Africains. C’est pourquoi, nous avons pris la décision pour que la compétition s’ouvre aux films de la diaspora. L.P : Pourquoi cédez-vous maintenant à la requête des cinéastes qui ne comprenaient que pas le Fespaco s’arc-boute à la pellicule 35 mm ? M.O : C’est la deuxième importante. Comme vous le savez, la question du format numérique qui se posait avec acuité. Le débat a été mené durant plusieurs années, bien avant moi. Nous avons poursuivi le débat. Il faut savoir que les textes que nous appliquons ont été écrits par les cinéastes africains. Ce sont eux qui ont exigé que ne soit retenu pour la compétition long métrage que des films tournés sur le support 35 mm. On ne peut pas attaquer une compétition et dire à la mi-temps du match qu’on s’arrête pour changer les règles du jeu. Aujourd’hui, ils veulent, pour la plupart, passer au numérique. Pour autant, il y en a qui sont encore contre le passage du 35 mm au numérique. C’est leur droit. De notre, nous estimons qu’il faut accompagner la technologie. J’ai toujours dit qu’il faut chaque chose en son temps. Et le temps du numérique est arrivé pour le Fespaco. Nous pouvons maintenant passer à ce format parce que nous avons un bâtiment qui sera achevé bientôt. Donc, nous aurons une salle propre à nous. Nous allons pouvoir l’équiper proprement pour répondre aux qualités requises, pour des projections en numérique, avec des formats très précis. Avec l’évolution technologique, le Fespaco ne pouvait pas ne pas franchir le pas pour aller vers le numérique. L.P : Et l’augmentation de l’enveloppe des Prix qui récompensent des Etalons, c’est pour susciter une émulation chez les cinéastes? M.O : Pour nous, cette 3ème reforme est tout aussi importante que les deux premières. Le Prix de L’Etalon de Yennenga, est resté pendant plusieurs années le même sans connaître une évolution, alors que le Festival a pris une autre dimension. Je pense qu’il faut coller le Prix du festival à ce que représente aujourd’hui le Fespaco. C’est un grand festival, et un grand festival doit faire en sorte que ce prix ait de la valeur. C’est pourquoi, nous avons souhaité avec le soutien et l’accompagnement des plus hautes autorités de ce pays faire en sorte que le prix de l’Etalon d’or de Yennenga soit doublé. Ce sera l’un des grands festivals dans le monde qui peuvent donner des prix de cette hauteur. L.P : En ouvrant la compétition long métrage aux films de la diaspora, les cinéastes du continent ne seront-ils pas défavorisés dans la course pour les Etalons quand on sait que ceux de la diaspora ont plus de moyens? M.O : Vous savez, ce ne sont pas les moyens qui font les films. C’est l’intelligence d’abord. Nous, Africains, sommes aussi intelligents que ceux de la diaspora. Je pense que là, c’est la qualité qui fera la différence. Il ne faut pas qu’on se cache derrière des vitres fumées qui ne servent à rien. Ecrire un scénario, faire un film, c’est l’intelligence. Après, il faut chercher les moyens pour le tourner. Je pense qu’aujourd’hui, il y a des Africains qui font des films de qualité. Ceux que nous avons eus cette année pour le Fespaco peuvent aller partout dans le monde. Et certains cinéastes sont en Afrique. Moussa Touré (réalisateur de « La Pirogue ») vit à Dakar. Alain Gomis ( Etalon d’or avec « Tey ») a tourné son film au Sénégal même s’il vit entre la France et ce pays. Il y a donc bien des réalités qui prouvent que le cinéma africain se porte bien, à travers les professionnels du cinéma. Je pense qu’on n’a pas peur de la diaspora. LP : Revenons à l’édition 2013 du Fespaco. Si l’organisation dans l’ensemble a été maîtrisée, on a noté une faible affluence des festivaliers venus d’Europe et d’Amérique, sans doute à cause de la crise au Mali. Cela vous fait-il peur pour l’avenir ? M.O : Il faut qu’on cesse de croire qu’un événement dans une partie de l’Afrique doit faire coucher toute l’Afrique. S’il y a des difficultés dans d’autres pays, il faudrait ailleurs qu’on sente que l’Afrique vit, et qu’elle reste débout. En Europe et en Amérique, il y a des difficultés, mais l’Europe et l’Amérique continuent de vivre. Partout dans tout le monde, il y a des difficultés, mais on n’arrête pas le chrono. LP : Mais la psychose des enlèvements et des attentats est bien réelle ? M.O : Ce n’est pas parce qu’il y a un problème au Mali que j’ai peur. J’ai peur tous les jours. Quand je sors à Ouaga tous les jours, j’ai peur. On peut me cogner à mobylette. Moi, je peux cogner quelqu’un. Tous les jours, c’est un danger de la vie. Il faut qu’on soit réaliste et pragmatique. Nous essayons de comprendre que, dans la vie, il y a des difficultés et que nous devrions faire avec. On ne doit pas se cacher les yeux, fuir les difficultés. Ce que je souhaite pour le Mali et pour l’Afrique, qu’il y ait la paix sur tout le continent. Propos recueillis par Y. Sangaré, envoyé spécial Ces reformes qui vont tout changer C’était une requête de nombreux cinéastes. Le Fespaco a fini par y céder. Du moins, ce sera effectif lors de la 24ème édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou, qui se tiendra du 28 février au 7 mars 2015. Dans deux ans donc, c’est une petite révolution, le Fespaco accueillera désormais dans la compétition long métrage, qui décerne les trois Etalons (Or, Argent et Bronze) de Yennenga, des films sur support numérique. Fini, l’exigence obligatoire du support 35 mm, qui avait par le passé, occasionné l’exclusion de certains films dans la course aux Etalons. On se souvient qu’en 2011, il avait fallu de peu que «Le Mec idéal», d’Owell Brown ne soit pas retenu pour le Fespaco, parce qu’il n’était pas en 35mm. C’était donc un casse-tête pour les cinéastes, surtout les jeunes qui, s’ils espéraient prétendre à l’Etalon de Yennenga, devaient absolument kinéscoper leur film. Autrement dit, le transférer du support numérique à la pellicule 35 mm. De toute évidence, cette première reforme est une innovation de taille. Et on comprend l’enthousiasme qui accueille cette décision. «Il faut la saluer et avec elle, les autres», note, avec satisfaction, Euzhan Palcy, réalisatrice martiniquaise et présidente du jury long métrage du Fespaco 2013. Pour Alimata Salembéré, pionnière du Fespaco et invitée d’honneur de cette 23ème édition, qui s’est achevée dimanche dernier, «c’est un bond qualitatif». « C’est une très bonne nouvelle qui ne peut que réjouir les cinéastes», renchérit-elle. A la vérité, le Fespaco ne fait que s’aligner sur les grands festivals du monde, qui ont, tous ou presque, intégré le numérique dans leur sélection de films. Cela dit, pour la majorité des réalisateurs, singulièrement ceux de la jeune génération, c’est un «verrou» qui saute. Et, ça change beaucoup de choses, puisque la course aux Etalons sera désormais plus ouverte pour les prochaines éditions. Toutefois, avec la deuxième reforme, elle le sera davantage, avec l’entrée en lice des films de la diaspora. En revanche, la concurrence, elle, s’annonce plus que rude. Car, face aux moyens importants des cinéastes de la diaspora, il faudra, pour ceux qui vivent et travaillent sur le continent, plus d’ingéniosité et d’imagination dans l’écriture et la réalisation de leurs oeuvres. Même si le Délégué général du Fespaco, Michel Ouédraogo, estime que «faire un film, c’est l’intelligence d’abord», force est de reconnaître que les moyens aident à mieux raconter une histoire. Enfin, la troisième et dernière reforme va clairement susciter un engouement chez les cinéastes, autour du Fespaco. Tout comme elle pourrait doper la production cinématographique en Afrique. En doublant la récompense pour chacun des trois Etalons qui passent respectivement à 20 millions de FCFA pour l’Or, 10 millions pour l’Argent et 5 millions pour le Bronze, le Fespaco devient encore plus attractif. Avec ce beau pactole, il y a, naturellement, de quoi pousser les cinéastes à non seulement faire des films, mais également à postuler pour le festival. Et c’est le cinéma en Afrique qui s’en portera mieux… YS
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