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Politique Publié le lundi 15 juillet 2013 | Le Patriote

Issiaka Diaby (Président du CVCI) répond à Dano Djédjé et les autres: “Les propos du FPI sont la confirmation de son esprit criminel”

© Le Patriote Par FN
Activités du President de la Commission dialogue, vérité et réconciliation : Charles Konan Banny reçoit Miaka Ouréto et la direction intérimaire du Front populaire ivoirien (Fpi)
Lundi 25 juillet 2011. Abidjan. Siège de la Commission dialogue, vérité et réconciliation(CDVR). Photo: Sébastien Dano Djédjé
La réponse du FPI à l’appel lancé par le président de la République à Korhogo continue de susciter de vives réactions. Surtout au sein des victimes. Nous avons rencontré M. Issiaka Diaby, président du Collectif des Victimes en Côte d’Ivoire. Dans cet entretien, il ne manque pas de fustiger l’attitude du FPI et conseille plutôt aux autorités de s’occuper des victimes qui se sentent abandonner. Interview.
Le Patriote : Le FPI a répondu à l’appel lancé par le chef de l’Etat à Korhogo, qui conseillait aux dirigeants de ce parti de demander pardon aux victimes. « Demander pardon à qui ? Et pourquoi ? », a rétorqué le ministre Dano Djédjé. Quant à Richard Kodjo, secrétaire général par intérim, il a dit ceci : « C’est à nous qu’on doit demander pardon. Car c’est nous qui sommes les victimes ». Que vous inspirent ces propos ?
Issiaka Diaby : Ces propos sont la confirmation de l’esprit criminel du FPI. Voici un parti qui, depuis 1990, a introduit la violence dans la politique en Côte d’Ivoire. A chaque fois qu’il pose un acte, au lieu d’assumer, il accuse toujours les autres. Le 18 février 1992, lorsque le Plateau a été mis en feu et à sac lors d’une marche organisée par ce parti, ses dirigeants ont opté pour la même stratégie. Quand Laurent Gbagbo, Simone Gbagbo et les autres ont été arrêtés suite à cette marche dénommée « l’assaut final », le FPI a parlé de complot, au lieu d’assumer sa part de responsabilité dans les événements qui se sont déroulés au cours de cette journée de triste mémoire. Laurent Gbagbo condamné a été par la suite libéré. Huit ans après, en octobre 2000, s’appuyant sur des thèses xénophobes et tribalistes, le même FPI fait massacrer plusieurs centaines de jeunes gens sur la base de leur nom et de leur origine. « Mille morts à droite, mille morts à gauche, j’avance », avait lancé Laurent Gbagbo à cette période. Il y a eu le charnier de Yopougon. Lorsque les victimes et parents de ces victimes réclamaient que justice soit rendue, ce sont les mêmes propos de dédain et d’injures qu’on leur a servis. En lieu et place du pardon attendu, on a préféré traquer tous ceux qui réclamaient que justice soit faite, y compris votre serviteur. C’est cette attitude de mépris et de fuite en avant qui a provoqué les événements de septembre 2002. Donc l’attitude du FPI, face à la douleur et aux traumatismes des victimes, n’est pas quelque chose de nouveau. Ce parti, après le coup d’Etat manqué du 19 septembre 2002 et la rébellion, pour se maintenir au pouvoir, a terrorisé la population civile dans la zone qu’il contrôlait. Souvenez-vous des escadrons de la mort qui ont assassiné Camarah Yêrêfê dit « H », Emile Téhé, Benoît Dacoury-Tabley pour ne citer que les plus illustres de leurs victimes. Ensuite, Jean Hélène et Guy-André Kieffer. Porter à cette époque un nom à consonance nordique ou s’habiller en boubou, c’était s’exposer au danger et à la mort. Les choses ont été ainsi jusqu’à l’élection présidentielle de 2010. Au moment où les autres s’investissaient dans la campagne présidentielle, au FPI on investissait dans les armes. Ils ont armé la jeunesse pour tuer leurs semblables et tous ceux qu’ils considèrent comme leurs adversaires politiques. Le FPI a mis en place un plan de confiscation du pouvoir. Pour se maintenir au pouvoir, ses dirigeants ont trouvé nécessaire de massacrer la population. Notamment ceux qui sont supposés avoir voté pour le candidat Alassane Ouattara. A la fin du premier tour et au deuxième, vous avez vu que les attaques se sont tournées vers les Baoulé que les partisans de Laurent Gbagbo ont accusé de l’avoir trahi. Vous avez aussi constaté que certains ressortissants de la sous-région, en l’occurrence les Burkinabé, les Maliens, les Togolais, les Béninois, etc. ont été l’objet d’attaques. Parce que, selon le FPI, leurs pays soutenaient Ouattara dans la crise postélectorale. C’est pourquoi, nous les victimes, nous persistons et nous signons. C’est le FPI qui est l’origine des 3000 morts de la crise postélectorale.

LP : Mais le FPI dit que c’est plutôt lui qui est la victime ?
ID : En février 92, ils ont prétendu qu’ils étaient les victimes, alors qu’ils ont cassé et brûlés. En 2000, après avoir massacré de centaines de jeunes, ils ont dit la même chose. Ils n’ont rien fait. Ils ont dit que ce n’était pas eux. Le charnier de Yopougon était un montage, selon eux. En février 2011, quand ils ont massacré les femmes à Abobo, ils ont parlé du complot de bissap. Donc, ce sont des gens qui ne regrettent jamais leurs actes. Cela fait partie de leur nature. En racontant encore que ce sont eux les victimes dans tout ce qui s’est passé lors de la crise postélectorale, ça veut dire qu’ils sont prêts à recommencer si on leur en donne l’occasion. Mais, pour cette fois, nous disons stop. Car, ils doivent répondre de leurs actes devant la justice. Nous les victimes, nous veilleront à cela. Dano Djédjé et Kodjo Richard sont des individus perdus pour la société. Ces deux hommes ne méritent pas de vivre en société. Car ce sont de véritables dangers publics. Leur place est à la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan. Le FPI doit dire merci au président Alassane Ouattara. S’il voulait agir comme Laurent Gbagbo l’a fait en 2000 en disant à l’armée et ses jeunes patriotes : « Faites votre travail », ils ne seront pas là en train de narguer et mépriser ainsi les victimes. Ils ont intérêt à suivre les conseils du chef de l’Etat, au risque de se retrouver un jour en face des victimes que nous sommes.

LP : 84 pro-Gbagbo dont Simone Gbagbo passeront devant la Cour d’Assises après la confirmation des charges retenues contre eux. Quel commentaire faites-vous de cette décision de la Chambre d’accusation ?
ID : Cette décision nous fait plaisir. Pour les victimes, elles-mêmes, une telle décision apaise les c?urs. Nous disons que justice sera enfin rendue. C’est l’occasion de dire aux dirigeants du FPI qu’ils ne brûleront jamais la Côte d’Ivoire. Car nous savons que tout ce qu’ils font, ils le font pour provoquer les victimes. Leur objectif est de nous pousser à bout pour nous amener à nous venger. Mais nous disons qu’ils n’y parviendront pas. Et ils paieront tôt ou tard ce qu’ils ont fait aux victimes. Je vous informe que nous avons saisi le ministre de la Justice et le Président de l’Assemblée nationale pour leur dire que nous allons nous opposer à toute forme d’amnistie et que nous allons nous donner les moyens de combattre cette loi. S’ils ne veulent pas avoir en face d’eux les victimes et les parents des victimes, qu’ils n’y pensent même pas.

LP : A vous entendre, vous n’êtes pas dans la logique du pardon. Or le président de la République conseille au FPI de demander pardon.
ID : le président Ouattara lui-même, est une victime. Nous lui demandons plutôt d’être plus regardant envers les victimes. Nous en avons actuellement besoin. Les victimes, il y en a des deux côtés. Les jeunes qui ont été armés par le FPI, il ne faut pas les voir comme des bourreaux. Mais plutôt comme des victimes. Blé Goudé est une victime du système mis en place par le FPI et Laurent Gbagbo. Guillaume Soro était dans le même cas que Blé Goudé. Il était avec Laurent Gbagbo. Mais il a pu s’extirper des mains de Laurent Gbagbo grâce à son éducation et sa force morale. Les jeunes, qui étaient aux mains des manipulateurs fins comme les dirigeants du FPI, n’ont pas eu la chance que Guillaume Soro a eue. C’est vers ces jeunes que le président de la République doit se tourner. C’est sur eux qu’il doit concentrer ses efforts et non sur les dirigeants du FPI. Le molosse ne change jamais sa manière de s’asseoir. L’esprit criminel qui anime les dirigeants du FPI ne les quittera jamais.

LP : Mais que faut-il faire donc de l’appel du président de la République ?
ID : Aujourd’hui, nous sommes dans une disposition d’esprit où il n’est pas évident qu’on n’écoute le président de la République. Nous ne sommes pas prêts à l’écouter, vu la situation dans laquelle, nous les victimes, nous nous trouvons aujourd’hui. Quand il s’agit de Simone Gbagbo et les autres, les autorités sont prêtes à tout. Elles sont à leurs petits soins pendant que nous les victimes, nous sommes abandonnées. C’est la raison pour laquelle le FPI se comporte ainsi. Nous disons qu’il est grand temps de laisser les bourreaux là où ils sont et de s’occuper un peu des victimes.

LP : Vous parlez d’abandon des victimes. Soyez plus explicite.
ID : On ne peut pas accepter aujourd’hui qu’après deux ans de pouvoir que des victimes aient encore des balles reçues lors de la crise postélectorale dans leur corps. Parce qu’ils manquent de soins appropriés. Il n’est pas acceptable que des orphelins et des veuves soient sans assistance. C’est le vrai sens du sit-in que nous avons organisé lundi dernier au Plateau sur l’esplanade de l’ancien marché. Nous demandons au gouvernement de rectifier le tir avant qu’il ne soit trop tard. Nous demandons aux autorités de s’occuper des victimes. Nous leur avons transmis à ce sujet nos revendications pour le respect de nos droits et de notre dignité de victimes en six points. Nous attendons qu’elles réagissent pendant qu’il est encore temps.

LP : Vous avez également demandé qu’il y ait des mesures d’accompagnement dans le processus de remise des corps exhumés des fosses communes de la crise postélectorale. Où en est-on avec le dossier ?
ID : Cette situation, malheureusement, n’est pas encore réglée. Les parents n’ont encore rien reçu. Nous avons transmis nos doléances au président de la République pour qu’au moins les frais de funérailles soient pris en compte. Pour permettre aux familles d’organiser des obsèques dignes à leurs proches tués au cours de ces douloureux événements, selon les rites de leur religion et selon leurs coutumes. C’est un droit fondamental. Nous avons entendu que le gouvernement s’attelait à le faire. Mais pour le moment, on n’a pas encore été officiellement saisi et aucun parent ne m’a appelé pour me dire qu’il a obtenu satisfaction.

LP : Pourquoi les choses trainent-elles à votre avis ?
ID : Les choses trainent par manque de volonté politique. Car n’oubliez pas que nous avons affaire à un Etat. Le pouvoir à l’heure actuelle est plutôt concentré sur les bourreaux au lieu de s’occuper des victimes. Et cela en rajoute à notre tristesse et nos traumatismes. Nous demandons aux autorités d’oublier un peu le FPI et de se concentrer sur les victimes. Y compris la jeunesse que le FPI a armée pour massacrer les populations. C’est sur eux qu’il faut se concentrer et non les dirigeants du FPI. Qu’on laisse les politiciens pour s’occuper des victimes et vous verrez que les choses avanceront dans le bon sens. Il faut laisser les Dano Djédjé, Kodjo Richard et les autres. Car un jour, ils seront en face des victimes.

Réalisée par Jean-Claude Coulibaly
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