x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Afrique Publié le jeudi 23 janvier 2014 | Diasporas-News

Angola : miracle économique et succession au sommet de l’Etat

© Diasporas-News Par DR
José Eduardo dos Santos est le président du Mouvement populaire de libération de l`Angola (MPLA) depuis 1979 et le deuxième chef de l`État angolais
L’Angola est devenu en une décennie le pays idéal pour investir, s’enrichir et ce grâce à un flot continu d’hydrocarbure. Seul hic : la redistribution de pétrodollars ne profite pas à toute la population. Le MPLA sera-t-il capable de relever le double défi : un développement socioéconomique équilibré et une transition en douceur au sommet de l’Etat ?

Le nouvel Eldorado

Juste retour des choses, le sang coulé des millions de morts de la guerre d’indépendance et de la guerre civile aurait-il fait jaillir de la terre des ressources naturelles abondantes à l’origine du boom économique que connaît l’Angola aujourd’hui ? Fer, or, diamant, uranium et surtout l’exploitation du pétrole et du gaz ont contribué à l’essor fulgurant de ce pays. Troisième puissance économique du contient et second pays producteur d’Afrique derrière le Nigéria, il tourne à environ 1,8 millions de baril/jour. Les réserves sont nombreuses ; outre l’exploitation sur terre dans l’enclave de Cabinda, les découvertes de nouveaux gisements prometteurs en zone offshore auraient permis à l’Angola d’envisager son avenir avec sérénité. Mais le cours de ce long fleuve tranquille a été troublé quelque peu par un contexte international défavorable, il y a cinq ans. Les revenus pétroliers représentaient plus de la moitié de son PIB et tiraient une croissance annuelle de l’ordre de 15% voire 20% avant la crise financière des subprimes de 2009. En effet, la chute du cours mondial du brut a provoqué un déséquilibre macroéconomique dans la mesure où le budget de l’Etat reposait sur 70% des exportations d’hydrocarbures. Face à la baisse brutale de ses réserves en devises et l’inflation galopante induite, l’Angola a été obligé de solliciter le concours des bailleurs de fonds. Le FMI lui a concocté un programme d’ajustement structurel en contrepartie d’un accord de prêt de 1,5 milliard $. Sortie de cette mauvaise passe en 2012, la reprise économique est de nouveau au rendez-vous mais avec une croissance moindre de l’ordre de 6%.

Cet avertissement a fait prendre conscience aux dirigeants angolais de la nécessité de la diversification de ses activités économiques pour se soustraire de la dépendance du pétrole. Outre les transports, l’énergie hydroélectrique, le secteur du BTP – Bâtiments et Travaux Publics - devient maintenant une activité sur laquelle l’économie angolaise entend s’appuyer. Luanda n’a plus rien envié aux capitales occidentales : les grues de construction de gratte-ciels foisonnent à côté des anciennes demeures coloniales. Les véhicules 4x4 et les berlines allemandes vrombissent en pleine ville sur de larges avenues récemment construites. Comme les restaurants et les magasins qui poussent comme des champignons attirés par les pétrodollars d’une nouvelle bourgeoisie consumériste.

Une grosse machine nommée Sociedade Nacional de Combustíveis de Angola (SONANGOL) est le fer de lance de cette diversification à outrance. Il s’agit de la société nationale de pétrole, chargée de l’exploitation et de la production du pétrole. Génératrice de plus de 30% du PIB, elle est devenue plus puissante que le gouvernement. Elle gère ses revenus au travers d’un fonds souverain doté de 5 milliards de $ ; une sorte de holding qui dresse sa tentacule sur l’économie angolaise et internationale grâce à une prise de participation par l’intermédiaire d’une trentaine de filiales d’entreprises. Depuis 2004, la SONANGOL a signé une joint-venture avec le China International Fund dont le siège se trouve à Hong-Kong. Elle a donnée naissance à la China Sonangol aujourd’hui présente sur plusieurs points du globe : Europe, Afrique, Amérique du Sud (Venezuela), Irak ou Iran et ce dans des domaines aussi variés que les NTIC, l’ingénierie, la logistique et la prise de participation financière…

La Chine et le Portugal
Le partenariat avec la Chine est somme toute naturel dans la mesure où les deux pays pratiquent un capitalisme d’Etat. L’Angola a épousé les thèses du marxisme-léninisme avant de se convertir au moment du début de l’exploitation de son pétrole. En termes d’Investissements Directs à l’Etranger (IDE) c’est-à-dire l’indicateur qui permet de définir le volume de capitaux introduits dans un pays, la Chine arrive deuxième en Angola. En contrepartie, plus de 50% de l’exportation du brut angolais est destiné à l’Empire du milieu. Les entreprises chinoises raflent les grands contrats tels que la réhabilitation de la ligne de chemin de fer Luanda-Malange ou bien la construction des routes. Subrepticement, une main d’œuvre chinoise défiant toute concurrence abreuve le marché du travail local. Ce sont des ouvriers en fin de contrat sur des chantiers qui ne retournent pas tout de suite chez eux.

Ironie du sort, même le Portugal, ancienne puissance coloniale, entend désormais profiter de cet essor pour se refaire une santé économique. Les jeunes diplômés portugais préfèrent maintenant prendre le chemin de l’exil doré angolais plutôt que de se morfondre dans leur pays où le taux de chômage dépasse les 15%. Combien sont-ils en Angola ? 120.000 résidents ou sinon le double ! Les sociétés portugaises forment le gros du bataillon des quelques 500 filiales étrangères installées en Angola, soient environ 35%. Et le tropisme naturel, des pays lusophones pour Lisbonne bénéficie également au secteur immobilier. Les richissimes angolais investissent dans la pierre dans l’ancienne métropole. Catalogué parmi les PIGS (Portugal, Irlande, Grèce, Espagne), le Portugal contraint de se serrer la ceinture cherche un ballon d’oxygène pour son déficit budgétaire. Plusieurs banques portugaises ont été sauvées de la faillite grâce au concours de capitaux angolais par l’intermédiaire de l’incontournable Sonangol. Ainsi La Millenium BCP avec une ardoise de presque un milliard $ a été recapitalisée par une syndication du fonds souverain angolais et de la banque du Brésil ;

Le revers de la médaille du miracle économique
Du temps béni de la période 2003–2008 ou encore lors de la reprise économique de 2012, les chiffres de la croissance ne se traduisent toujours pas en termes de mieux-vivre pour la majeure partie des 20 millions d’habitants. Comme dirait le vieil adage de l’homme de la rue africain : « la croissance ne se mange pas ». Une étude de l’Initiative pour la Transparence des Industries Extractives (ITIE) de 2012 a mis en évidence l’opacité de la vente de brut par les Compagnies Pétrolières Nationales (CPN) qui sont des Etats dans l’Etat. En 2011, le FMI a ainsi signalé un écart de 32 milliards de $ dans les livres de comptes de l’Etat angolais ; il s’agit pour l’essentiel des retenues à la source opérées par la Sonangol. Or, une partie de cette manne financière devrait servir à améliorer les services publics tels que la santé et l’éducation. L’Angola n’a pas réussi a endigué les plaies qui rongent les pays en développement : mortalité infantile, pauvreté endémique d’au moins 35% de la population, taux d’analphabétisme élevé, manque de logements, accès à l’eau potable… Paradoxe, le pays qui détient des milliers d’hectares de terres arables est obligé d’importer des biens alimentaires ; lesquels coutent très chers à cause de l’afflux de devises étrangères ; donc inaccessibles au commun des mortels. Le salaire de la classe moyenne n’arrive même pas à suivre de l’inflation. La capitale Luanda est ainsi désertée par ses habitants face à la hausse exorbitante des loyers. Les luandais sont ainsi relégués en grande banlieue, contraints de prendre les rares « candongueiros » - minibus – pour rejoindre leur lieu de travail.

L’incontournable MPLA
Le pouvoir politico-économique est verrouillé par le parti majoritaire au pouvoir depuis 1975. La composition de l’élite angolaise a été déterminée par la répartition géographique de la population au moment du déclenchement de la guerre d’indépendance en 1961. La zone d’influence du Mouvement Pour la Libération de l’Angola (MPLA) recouvre le territoire de l’ethnie Ambundo (environ 30% de la population). Ses membres sont des citadins, des métis vivant à Luanda et le Centre-Nord du pays. L’Union Nationale pour l’Indépendance Totale de l’Angola (UNITA) avait pour base le Centre-Sud où sont localisés les Umbundo - 35% de la population –. Enfin le Front National de la Libération de l’Angola (FNLA) est formé de l’ethnie noire Bakongo (10% de la population), habitant à l’intérieur du pays avec un fort ancrage rural.

Au moment de l’ouverture des négociations avec la puissance coloniale en 1975, cette répartition géographique a eu une importance capitale dans le choix du mouvement d’indépendance qui dirigera le pays. Le MPLA a eu une rente de situation détenant en son sein la capitale Luanda qui centralisait toute l’administration et ses infrastructures comme le port et l’aéroport. A la mort du président Agostinho Neto en 1979, ce fut le général meneur d’hommes qui a été désigné comme son digne successeur : José Eduardo dos Santos (JES). Ce sont les cadres du MPLA, les anciens militaires et les grandes familles traditionnelles qui forment aujourd’hui l’oligarchie angolaise. Elle a largement profité de la reconstruction économique et de l’exploitation du pétrole à la fin de la guerre civile de 2002. Le centre de décision du pouvoir est le Comité Central et le Bureau Politique du MPLA. Et au sommet de la pyramide trône le charismatique et mystérieux JES, est chef de l’Etat depuis 33 ans. En 2008, avaient eu lieu les premières élections législatives depuis la fin de la guerre civile. L’écrasante majorité obtenue par le MPLA lui conféra la possibilité de modifier la Constitution. Il en usa et abusa en organisant un référendum en 2010. Il déboucha sur l’amendement d’un article qui permet une concentration du pouvoir entre les mains du chef de l’Etat dans la mesure où c’est que la partie majoritaire à l’Assemblée Nationale ; laquelle désigne de facto le président de la République. Les partis d’opposition sont mis sous l’éteignoir comme l’a encore prouvé la victoire électorale du MPLA, avec un score de 70% en août 2012. Le paysage politique angolais restera figé pour longtemps ; il dépendra des changements impulsés en interne au sein du MPLA.

Le système « MPLA » survivra-t-il à la mort de son leader ?

José Eduardo dos Santos (JES) est âgé de 71 ans. Sa succession est un sujet brulant que personne n’ose ouvertement poser alors que sa santé fait l’objet de rumeurs récurrentes. En 2006, les murs des palais nationaux bruissaient de la maladie et de l’affaiblissement de JES. Certains cadres du MPLA avait alors organisé une recomposition du pouvoir en interne au cas où… Résultat : le général Fernando Garcia Miala, directeur des Services de renseignements a été limogé et jeté en prison, au motif assez fallacieux de « désobéissance à la hiérarchie ». Il a sans doute payé cher sa coopération ouverte dans la lutte contre le terrorisme avec la CIA et de certains services de renseignements africains ; ce qui lui a valu la méfiance de JES et son incarcération.

De nos jours, le vice-président Fernando da Piedade Dias dos Santos est constitutionnellement le deuxième personnage de l’Etat. En ces temps où JES s’est absenté de la scène nationale et internationale, les rumeurs ne cessent de se gonfler. Au mois d’août dernier, il était « en visite privée » à Barcelone. Pourquoi le chef d’Etat angolais était-il absent du sommet sur la sécurité qui s’est tenu à Paris au mois de décembre 2013 ? La RTP – chaîne nationale portugaise – a annoncé fin novembre qu’il avait été hospitalisé dans un service d’oncologie à Barcelone. Manuel Vicente, ancien PDG de la puissante Sonangol jusque l’année dernière, fait figure de dauphin. Sa nomination au poste de ministre de la Coordination économique alors qu’il venait d’être imposé par JES comme Secrétaire du Bureau Politique en 2012 plaiderait en sa faveur.

Alex ZAKA
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Titrologie

Toutes les vidéos Titrologie à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ