x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Économie Publié le mardi 11 février 2014 | Diasporas-News

Invité du mois / Dogad Dogoui, Président du « Africa SMB Forum », Directeur d’un cabinet conseil en communication à Paris et fondateur du réseau Africagora

© Diasporas-News Par DR
Dogad Dogoui, Président du « Africa SMB Forum »
Diasporas-News : La première édition du « Africa SMB Forum » aura lieu à Casablanca ; quels ont été les critères de ce choix ?

Dogad Dogoui : Pour mettre en œuvre le 1er forum de la plateforme (Small and Medium-sized Business) consacrée à l’interconnexion, au financement et au développement des PME en Afrique, nous avons retenu la candidature de Casablanca (face à Abidjan, Addis-Abeba et Libreville) pour valoriser sa position de hub vers l’Afrique Subsaharienne. De plus, les infrastructures hôtelières, la desserte aérienne et le tissu d’entreprises locales ont emporté la décision.

D-N: Au moment où on parle de croissance soutenue des économies africaines grâce à la hausse du cours des matières premières et aux investissements dans les infrastructures, n’est-ce pas incongru de vous occuper des PME ? Pourquoi ce choix décalé ?

D.D: Notre choix n’est pas décalé. Il est celui de l’avenir de l’Afrique et de la croissance inclusive, créatrice d’emplois locaux au service des populations. Le secteur privé est le véritable moteur d’une croissance économique durable en Afrique. Dans ce cadre, les PME y représentent 90% des emplois et un quart du PIB global du continent (soit 450 milliards de Dollars US), mais seulement 20% d’entre elles ont accès au crédit bancaire. Nous avons donc choisi de nous occuper des PME, éléments clés d’une croissance inclusive pour réduire la pauvreté, créer des emplois locaux et assurer la redistribution.

D-N: Les petites et moyennes entreprises ont-elles réellement accès aux marchés en Afrique ?

D.D: Nous ne méconnaissons pas les soucis des PME africaines pour accéder aux financements de leur développement, ainsi qu’aux marchés publics et à la sous-traitance privée. C’est justement la raison pour laquelle la plateforme Africa SMB a été créée en septembre 2012, après une dizaine d’années d’échanges et de contacts avec des entrepreneurs et créateurs du continent. « AFRICA SMB FORUM » est une réponse aux problématiques rencontrées par les patrons de PME : nous leur offrons un cadre permanent d’échanges et de rencontres, pour établir des contrats d’affaires et des alliances commerciales, industrielles, technologiques et financières, d’une part, avec leurs homologues des 5 Communautés Economiques Régionales (CER), d’autre part avec des entreprises et investisseurs d’Occident et des puissances émergentes d’Asie, du Moyen-Orient et d’Amérique Latine.

D-N: L’industrie extractive (pétrole et mines), vorace en capitaux, ne serait-elle pas un handicap au développement du tissu économique des pays africains ?

D.D: Pas nécessairement. Les pays d’Afrique regorgent de richesses dont eux-mêmes et le monde entier ont besoin pour faire tourner l’économie. Les mines et les énergies fossiles composent aujourd’hui une grande partie des ressources de nombre d’états africains. Il appartient à ces derniers de mieux investir dans tous les pans de leur économie et de préparer l’avenir de leurs propres populations. Les monarchies pétrolières du Golfe ont démontré les possibilités de diversification offertes aux économies nationales par la manne tirée du pétrole et du gaz. L’industrie extractive peut être le point de départ du développement du tissu économique de certains pays africains, si les dirigeants font preuve de vision à long terme et de sagesse dans la gestion.

D-N: D’autant plus que leurs activités s’apparentent à un pillage de nos ressources : remontée des bénéfices en Occident et très peu de royalties versés aux pays producteurs ?

D.D: Il n’y a pillage dans certains cas que parce des états ont mal ficelé les contrats qui les lient aux grosses compagnies internationales. Des cas célèbres de dysfonctionnements ont amené les groupes étrangers à des efforts dans la transparence des procédures et contrats, dans la gestion de leur image et dans leur implication réels au développement économique et humain des zones exploitées des pays producteurs. Permettre à un investisseur étranger (d’Occident, d’Orient ou d’Afrique) de rapatrier dans les dividendes de son engagement, est un gage de bonne gouvernance et de respect des normes du commerce mondial. Encore faut-il que les dirigeants des pays producteurs comparent les offres de tous les coins de la planète (Afrique compris) et négocient en amont une participation effective aux activités et des royalties en droite ligne avec les intérêts de leur pays.

D-N: Vous militez pour une économie ouverte (intra-africain, international) comme moyens de développement, ne faudrait-il pas au préalable former des « champions » nationaux ?

D.D: Pas de préalable à cela. Il existe des Afriques : de plus en plus de pays recèlent de managers et de sociétés aptes à participer effectivement au développement économique de leur pays, et aux investissements étrangers. C’est à partir de transferts de compétences bien négociés dans les contrats avec des groupes étrangers, que l’Afrique formera de plus en plus de champions nationaux, régionaux et panafricains. A même de relever les défis de l’industrialisation, de la création de filières économiques intégrées avec formation professionnelle, investissements ciblés et sous-traitance. Je crois beaucoup au « Intra-African Trade », aux échanges commerciaux, industriels et financiers entre pays africains : nous avons voulu insister dans les conférences, ateliers et rendez-vous BtoB sur ce fort potentiel de marchés intérieurs aux Afriques. A l’exemple des liens en progression entre d’une part, Afrique Australe et de l’Est, d’autre part, Afrique Centrale et de l’Ouest.

D-N: Croyez-vous au rôle d’intégrateur d’une puissance économique régionale ? Si oui, citez-nous quelques pays susceptibles d’entraîner ses voisins ?

D.D: Plus qu’intégrateur, les puissances économiques régionales jouent un rôle moteur de locomotives industrielles, commerciales et ou financières. C’est le cas de Nigéria, Ghana et Côte d’Ivoire (à l’Ouest), de Maroc et Egypte (Nord), de Cameroun, Congo et Gabon (Centre), de RD Congo, Ouganda, Kenya et Ethiopie (Est), d’Afrique du Sud, Angola et Maurice (Sud).

D-N: Au nom de la libre-circulation des biens et services, les directives internationales très contraignantes - OMC, ACP – ne risquent-elles pas d’étouffer dans l’œuf l’avenir économique du continent africain ?

D.D: Les négociations du commerce international n’ont pas toujours été bien menées par les états africains mais l’avenir économique du continent passe également par le commerce intra-africain. Sans compter que la donne change de plus en plus avec l’arrivée de nouvelles puissances à la recherche d’alliances : gageons que les Afriques sauront négocier au profit de leurs nations, populations et économies avec la Chine, l’Inde, la Corée du Sud, la Turquie, la Malaisie, le Brésil, Singapour, le Qatar, Abu Dhabi.

D-N: Comment voulez-vous transformer ou produire dans ces pays où les intrants voire les produits finis importés coûtent moins chers que les produits locaux ?

D.D: Vous soulignez ici le problème des fournisseurs et des sous-traitants locaux. Il est à inscrire à tous les schémas d’investissement des pays d’Afrique, afin d’assurer un approvisionnement local pour les industries de transformation. Au-delà de la main d’œuvre recherchée pour palier à la hausse des salaires en Chine (H&M produira en Ethiopie), les pays africains doivent négocier la participation de PME-PMI locales aux marchés accordés aux groupes : le transfert de compétences est à ce prix pour fournir des outils et techniques adaptés aux filières de production et de transformation locale.

D-N: Nos « cerveaux » partent aujourd’hui monnayer leur talent hors du continent, avec quelles ressources humaines assurerons-nous notre essor ?

D.D: La mondialisation des échanges a permis l’accélération des déplacements et des migrations de population, gages d’acquisition de compétences et d’expériences utiles au développement, à condition de pouvoir et savoir les mettre au service du continent. Partir est utile. Revenir pour s’investir est précieux pour l’Afrique. A l’instar des diasporas nigérianes, ghanéennes, kenyanes, marocaines ou maliennes, ou encore celle d’Inde ou de Chine, qui ont su tisser une toile dans le monde pour apprendre au contact des autres et mieux réinvestir leur pays, avec la bénédiction des autorités.

D-N: Quelles articulations entre Public et Privé, quant à l’investissement en termes de moyen de communications, de facilitation des investissements ?

D.D: Au Public, les investissements dans les infrastructures structurantes du développement (centrales énergétiques, réseaux routiers et ferrés, ports, …) et les garanties du « Doing Busines ». Au privé, les secteurs productifs de l’industrie, du bâtiment, du commerce, des services et de la finance. A chacun son rôle mais dans un dialogue permanent, notamment dans les cas de partenariat public-privé (PPP). A chacun son rôle pour le développement.

D-N: Lors du « Africa SMB Forum », un workshop sera réservé à « l’accès au financement ». Quid des coûts de facteurs de production, des carcans administratifs, des infrastructures ?

D.D: Pendant 3jours (12, 13 et 14 mars 2014), les participants inscrits auront la possibilité de participer à 5 conférences, 12 ateliers thématiques et 10 rendez-vous qualifiés et pré-organisés. Parmi les ateliers, 4 sont dévolus aux financements (où les trouver ? comment les obtenir ? quels types ? …), 4 aux marchés Export et 4 aux renforcements des capacités du dirigeant. Bien sûr, les PME en Afrique (comme partout dans le monde) rencontrent souvent des difficultés pour mobiliser les financements, les partenariats et accéder aux marchés. Mais, l’Afrique change à grande vitesse, s’équipe d’infrastructures modernes et accélère les moyens de communication utile aux échanges.

D-N: A quelle échéance pensez-vous que les PME prendront-elles le relais du développement économique à la place de l’industrie extractive ?

D.D: L’Afrique a besoin impérativement des deux : les PME-PMI pour libérer les énergies créatrices d’activités et d’emplois, les industries extractives pour constituer les fonds souverains et d’investissements nécessaires au développement économique. Mais, la pression démographique et des populations jeunes offrent à l’Afrique un formidable potentiel de croissance à partir du vivier de compétences et de consommateurs.

D-N: Un mot de la fin

D.D: J’encourage les lecteurs de « Diasporas-News » à la recherche de partenaires, de financements et de marchés, à rejoindre le « AFRICA SMB FORUM » du 12 mars à 12h30 au 14 mars à 15h pour s’informer, être conseillés et rencontrer leurs futurs clients, partenaires, distributeurs. Rendez-vous à Casablanca, pour « interconnecter et financer les PME pour l’emploi et la croissance inclusive ».


Lamine THIAM
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Économie

Toutes les vidéos Économie à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ