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Politique Publié le vendredi 11 avril 2014 | Nord-Sud

Crimes postélectoraux : Y a-t-il une justice des vainqueurs en Côte d’Ivoire?

C’est à y perdre son latin! Les mêmes personnes qui ont réclamé à cor et à cri que la justice se décide à juger ou à libérer les partisans de Laurent Gbagbo, en prison depuis deux, sont en train de tirer à boulets rouges sur la justice ivoirienne. Pour les uns, le procès annoncé des proches de l’ancien chef de l’Etat, ne sera qu’une parodie de justice, quand les autres, tentent de se persuader que ce jugement est hautement politique. Un troisième grou­pe, fait remarquer que la justice a des effets néfastes sur le processus de réconciliation nationale. Des raccourcis, pour le moins inquiétants ! Quel sort devrait-on réserver aux personnes mises en cause ? Sans doute que certains souhaitent qu’on les libère purement et simplement. Une option très grave puisqu’elle préconise, en termes clairs, qu’on passe par pertes et profits les crimes constatés pendant la crise postélectorale. Et dire que leur culpabilité n’est pas encore établie ! Ce souhait de voir se refermer la parenthèse de la crise postélectorale, sans procès, est donc abject, incongru de leur part. Me Hervé Gouaméné, l’un des avocats des personnes mises en cause, assure que la procédure engagée contre les responsables de l’ancien régime au pouvoir, pue à plein nez la manipulation politique. « On reproche à ces personnes d’avoir soit pris part à un gouvernement illégitime, soit d’avoir collaboré avec un gouvernement. Donc, pour nous, il s’agit tout simplement d’un procès politique qui consiste à sanctionner l’adversaire politique d’hier », critique-t-il, au micro de Radio France internationale (Rfi).

Procès politique : une vieille rengaine 

Dès lors qu’il reconnaît, lui-même aussi explicitement, que ces personnes ont participé ou collaboré avec un régime illégitime, pourquoi veut-il faire croire que la procédure est politique, au lieu d’avancer des éléments tendant à minimiser les actes ou à disculper ses clients ? N’est-il pas tenté par la solution de la facilité, en jetant l’opprobre sur l’appareil judiciaire ivoirien ? Mieux, pour éclairer la lanterne de l’opinion nationale et internationale, ceux qui sont chargés de conduire la procédure, depuis le débarquement de Simplice Koffi Kouadio, sont pour la plupart, des membres du Parquet du Plateau, du temps du règne de Laurent Gbagbo. L’exemple le plus illustratif, étant que le nouveau procureur de la République, près le tribunal du Plateau, Richard Adou, était un bras droit (procureur adjoint) de Raymond Tchimou, le tout-puissant procureur qui a régné pendant les dix ans de pouvoir de M. Gbagbo. Mais au-delà de ce brouhaha, une certaine opinion est prompte à critiquer le recours à la justice internationale, notamment la Cour pénale internationale (Cpi), pour régler les problèmes internes aux Etats africains. Pourquoi alors cette levée de boucliers, quand la justice ivoirienne décide de prendre ses responsabilités pour juger les Ivoiriens ? Pourquoi n’a-t-on pas la même réaction véhémente quand, en France par exemple, la justice se met aux trousses des dirigeants français lorsque ceux-ci ne sont plus aux affaires ? On l’a vu avec Jacques Chirac ; on le voit avec Nicolas Sarkozy, Balladur, Guéant, Tapie, Lagarde… En Afrique, on le voit avec Zine el-Abidine Ben Ali et Hosni Moubarak, les anciens présidents tunisien et égyptien, emportés par le printemps arabes, au Maghreb. «Apprenons à rendre compte, quand nous avons été aux affaires. Sans doute qu’il faut recadrer certaines procédures, mais dans l’ensemble, quand les gens sont poursuivis, par ailleurs, ils s’organisent pour contrebalancer et démonter les accusations portées contre eux. Malheureusement, en Afrique, on se con­tente de dire que les procès sont politiques et, l’opinion internationale, friande de sensationnel, se laisse prendre par le discours», argumente un spécialiste du droit, proche du Rassemblement des républicains (Rdr). «C’est en faisant con­fiance à nos institutions que nous allons les aider à se renforcer, à se consolider», insiste ce juriste qui trouve tout aussi maladroite, la position défendue par ceux qui pensent que la réconciliation est en péril, quand la justice s’exerce. «Ce raccourci est un dangereux amalgame. Le Président Ouattara a promis d’amnistier ceux qui le méritent. Assurément, il entend laisser la justice faire ce qu’elle a à faire, avant d’entrer en scène. Pourquoi ne lui fait-on pas confiance ou veut-on mettre la charrue avant les bœufs ? Arrêtons avec les solutions de facilité. Si on libère les gens sans jugement, que dira-t-on aux victimes qui réclament justice ?», s’interroge-t-il. «Justice et réconciliation sont complémentaires, laissons donc de côté nos émotions. L’autre argument farfelu qu’on entend souvent, c’est la fameuse justice des vainqueurs. Ceux qui le disent sont totalement de mauvaise foi. Là encore, le président de la République a pris des engagements fermes, et il convient d’attendre la fin pour le juger sur ses actes. La justice suit sa marche et, selon toute vraisemblance, c’est après avoir évacué le dossier de ceux par qui la crise est survenue, qu’elle s’intéressera à ceux qui ont certainement commis des dérapages, en tentant de régler la crise», instruit ce responsable.
Marc Dossa
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