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Société Publié le mardi 15 avril 2014 | Cote d’Ivoire Economie

Transports terrestres/ Les coxers : des intermédiaires parasites, mais utiles !

Dans le milieu du transport ivoirien, une catégorie d’acteurs se fait remarquer de fort belle manière. Il s’agit des coxers, qui ne sont pas légalement reconnus, mais apportent une contribution tout de même remarquable. Incursion dans leur gotha, au sein de la gare routière d’Adjamé.


A partir de 4 heures 30 du matin, les premiers coxers se signalent sur les grandes artères des gares routières. Pour la plupart, ce sont des jeunes analphabètes, déscolarisés ou sans emploi qui s’adonnent à cette activité. Beaucoup d’entre eux élisent domicile au sein des gares ou à proximité. Agées de 16 à 35 ans en moyenne, ces personnes physiques et volontaires sont prêtes à apporter leurs services aux passagers. Ils se chargent d’aider ou d’accompagner les clients aux différentes gares pour emprunter les autocars. A Abidjan, ils sont présents dans presque toutes les grandes gares routières, et principalement à la grande gare d’Adjamé, là où les liaisons avec toutes les gares des villes du pays sont les plus denses. Les coxers y ont basé leur empire depuis belle lurette. En effet, un contrat implicite est établi entre les gestionnaires des gares et ces intermédiaires dont le rôle principal est d’apporter de la clientèle pour être rémunéré lorsque le passager paie son titre de transport.
De façon générale, certaines sociétés de transport et les petites gares, notamment celles des minicars, communément appelés «gbaka», s’appuient sur les coxers pour capter de la clientèle. Il convient également de préciser que toutes les gares routières n’acceptent pas de négocier avec ces intermédiaires du transport. A Adjamé, le plus gros transporteur, à savoir l’Union des transports de Bouaké (UTB), est un exemple. Au sein d’une forte concurrence, ces facilitateurs représentent un apport considérable pour les transporteurs individuels et informels qui n’ont pas tous les moyens de faire du marketing et d’avoir une bonne visibilité sur le marché. C’est là que les coxers ont toute leur raison d’être dans la sphère du transport en Côte d’Ivoire.

Une activité assez rémunératrice
C’est à partir de 6 heures du matin que le ballet des coxers commence véritablement. Ils sont dans toutes les rues et contrées conduisant aux gares dans la commune d’Adjamé. Leur base reste l’axe principal reliant la Gare-Renault au marché Gouro, où les fruits et légumes sont vendus (deux lieux de repère biens connus à Adjamé, dans la commune d’Abidjan). Dès qu’une personne présente une allure de voyageur, c’est la ruée vers cette dernière pour savoir où elle se rend exactement. Deux, trois, voire quatre coxers peuvent intervenir à la fois. Les questions fusent : «Tantie, où allez-vous ?» «C’est Daloa, Gagnoa, ou Soubré ?» «Maman, est-ce que vous partez à Yamoussoukro, Bouaké ou Korhogo ?», interroge le jeune coxer Ibrahim Touré. «Je suis prêt à vous accompagner jusqu’à la gare et vous ne devrez rien payer. C’est la gare qui me gère», ajoute-t-il dans un français improbable afin de rassurer dame Soumahoro. Dès que la personne affiche sa destination, le coxer propose ses petits services : porter les bagages, indiquer la trajectoire, prendre les raccourcis pour atteindre au plus vite la gare routière, indiquer le coût du transport, etc. Si la personne peine à répondre, c’est le plaidoyer pour la persuader dans l’espoir du gain.
Dès que le client précise sa gare et qu’il se trouve dans le champ de compétence du coxer, c’est un client à protéger contre les rivaux, pour le mener jusqu’à destination de la gare. Dans le cas contraire, c’est aussitôt l’abandon car les coxers ont d’autres personnes à vite conquérir pour rentabiliser leur journée. Ils se battent tout au long de la journée contre le soleil et les intempéries pour accompagner les passagers et collecter des primes qui vont de 100 à 300 FCFA, voire 500 FCFA par client. Entre 12 heures et 14 heures, le volume du trafic baisse et les coxers en profitent pour se redonner de la force. Mais cela n’est pas un temps mort car toute opportunité est aussitôt saisie. La conquête des passagers reste de mise jusqu’à 18 heures 30. Il faut alors gagner des parts à tout prix, même si le passager se rend à la gare par ses propres moyens. Le coxer est tout proche pour collecter son gain et la ténacité s’impose. A partir 19 heures, c’est le bilan des activités journalières et certains coxers se retrouvent avec pratiquement 3 000 à 7 000 FCFA comme recettes engrangées. Ce qui représente près de 90 000 à 210 000 FCFA par mois pour celui qui travaille ardemment. En réalité, le travail du coxer n’est pas aussi déshonorant que d’aucuns peuvent penser. Des personnes y gagnent sainement leur vie et parviennent, avec leur gain quotidien, à nourrir leur famille (nombreuse pour certains). Mais les contours de cette activité laissent aussi apparaître de nombreux points d’ombre.

Quand les coxers deviennent malhonnêtes
Dans le milieu du transport, de nombreuses imperfections sont à relever. Et les coxers ne sont pas en marge des déboires observés. En effet, certains d’entre eux ne manquent de faire du double emploi. En plus de la prime versée par le gestionnaire de la gare, le jeune coxer n’hésite pas à demander ou soutirer de l’argent aux passagers. Plusieurs stratégies sont adoptées, telles l’aide apportée par le port de bagage comme service additionnel, l’exposition des problèmes personnels, etc. Très souvent sensibles, les voyageurs font des gestes sporadiques pour soutenir leur bienfaiteur du jour. A côté de cela, il est à relever, par moments, quelques actes déplorables. Sur le chemin de la gare routière, certains coxers disparaissent avec les bagages et effets personnels des voyageurs. Des cas de vols ont été observés, et même des agressions physiques à des endroits de la gare. Parfois, des complicités existent avec des délinquants qui vadrouillent le long des rues. Par conséquent, le métier de coxer est souvent assimilé au banditisme. De nombreuses personnes ont été victimes de malversations, ce qui amène certaines d’entre elles à éviter que ces intermédiaires ne s’approchent d’elles ou les suivent, les jugeant directement ou indirectement comme sources de problèmes.
Malgré toutes ces déviations, il convient de reconnaître reconnaît que les coxers restent des acteurs importants du dispositif des transports routiers et interurbains, aussi bien à Abidjan qu’à l’intérieur du pays. Des transporteurs ou propriétaires de gares ne sauraient s’en passer parce qu’ils constituent un levier indispensable pour faire le plein de leurs autocars et accroître leur chiffre d’affaires. Depuis des décennies, le métier de coxer est pratiqué et ne saurait disparaître de sitôt. Reste cependant à mieux organiser cette activité afin de lui donner plus de portée dans le nouveau paysage du transport terrestre en Côte d’Ivoire.

ASSANE DE YAPY
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