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Art et Culture Publié le samedi 26 avril 2014 | Nord-Sud

Avant son inhumation : révélations sur la fortune de Bruly Bouabré

© Nord-Sud Par DR
Frédéric Bruly Bouabré, poète, écrivain, penseur et dessinateur ivoirien
Frédéric Bruly Bouabré, décédé le 28 janvier, sera inhumé le 3 mai. Avant l’ultime voyage, plusieurs intellectuels lui ont rendu hommage, jeudi à Abidjan.

Des intellectuels ivoiriens ont célébré, jeudi, au Musée des civilisations de Côte d’Ivoire au Plateau, Frédéric Bruly Bouabré, l’écrivain, le poète, le philosophe, le créateur de culture, l’humaniste, le religieux, le dessinateur…, décédé le 28 janvier 2014. Une initiative du professeur Séry Bailly qui la situe comme un devoir national, car Bruly a porté haut le nom de la Côte d’Ivoire dans de nombreuses capitales culturelles du monde. Une façon pour ces éminences grises «d’assumer leur part de deuil». Pour éviter que le natif de Zéprégühé (Daloa) le 11 mars 1923, parte dans l’indifférence, une table ronde a été organisée. «Pleurer, chez nous, c’est faire de la poésie. Il s’agit avec des paroles qui sortent de l’ordinaire, d’évoquer, de célébrer, d’émouvoir afin de faire entrer dans les cœurs et dans les mémoires le défunt», a-t-il fait savoir. Gbeuly (devenu Bruly), Bouabré, lui-même, se définissait comme ‘’un chercheur non reconnu parce que non connu’’. L’exercice, en ce jour d’hommage, était de mieux faire connaître cet homme multidimensionnel chez lui, en Côte d’Ivoire.

Qui est Bruly Bouabré ?

Pour le ministre de la Culture et de la francophonie, Maurice Kouakou Bandaman, «il apparaît comme un homme fait pour la remise en selle de l’humanisme qui s’éloigne des hommes et pour la défense et l’illustration des valeurs africaines de civilisation». «Là où l’homme ordinaire ne voit rien, il trouve le chemin de la bonne observation», a-t-il apprécié. Pour Zio Moussa, journaliste, c’est « l’un des meilleurs Ivoiriens», quand Agnès Kraidy, sa consœur, l’a présenté comme «une légende». «C’est quelqu’un qui croyait en lui-même. Comme le dit un conteur de Kong, dans la vie, il y a deux types de personnes: ceux qui portent leurs pantalons et ceux qui se font porter par leurs pantalons. Ceux qui veulent être quelqu’un et ceux qui vivent leur vie comme ça vient. Bruly voulait être quelqu’un », selon une illustration faite par le professeur Yacouba Konaté, galeriste. Pour sa part, N’Guessan Kouakou François, professeur de sociologie, l’a défini comme «l’humilité même ». « S’il était présent dans cette salle, c’est au fond qu’il serait assis », a-t-il présumé.

Que valent ses œuvres ?

L’on est tenté de se demander pourquoi autant de qualificatifs à l’endroit d’un vieil homme qui portait un collier de cauris sur la tête, et qui passait inaperçu, même à Yopougon-Gesco, où il a rendu l’âme. La réponse à cette interrogation donnée par Yacouba Konaté a fait jaser dans la salle. «Aujourd’hui, Bruly Bouabré est l’un des deux artistes les mieux connus de notre histoire culturelle», a-t-il informé. Après avoir expliqué comment il est entré en contact avec Yaya Savané, son curateur au plan national et André Magnin qui le représente au plan international, le professeur de philosophie a lâché: « Le dernier jour de l’exposition ‘’Les Magiciens de la terre’’ (1989), un collectionneur milliardaire entré en contact avec Magnin, achète tous les dessins de Bruly. Ceux qu’il a faits, ceux qu’il pourrait faire. Ce qui a fait monter sa cote. Il n’avait plus le droit de vendre ses œuvres. J’insiste là-dessus parce qu’aujourd’hui des personnes vendent de faux Bruly Bouabré. En 2004 et 2005, ses dessins se vendaient à 1.500 Euros (environ un million F.Cfa) la pièce.» Et d’ajouter: «Il y a un an, avec Yaya Savané, nous avons fait le point des œuvres de Bruly qui ont été vendues et dont il a perçu les sommes en liquide. Nous étions à 1 milliard 300 millions F.Cfa. De 1989 à l’année dernière (Ndlr : 2013), il a eu au moins quatre fois cette somme ». Face à un tel succès commercial, le galeriste s’est offusqué de certains écrits qui ont présenté M. Bouabré comme quelqu’un qui a été délaissé au soir de sa vie. « Ces derniers temps, de nombreuses personnes ont écrit que Bruly a été négligé. C’est l’un des artistes les mieux défendus aussi bien en Côte d’Ivoire qu’à l’international. Quand il est tombé malade, il a eu une prise en charge de la présidence de la République. Et ce n’était pas pour trois jours ou trois semaines », a-t-il rétabli.

Bruly l’écrivain, le prophète

‘’La légende de Domin et Zêzê’’ reste son plus grand succès littéraire, au dire du professeur Konaté. « Son livre édité par le groupe Magnin en fac-similé (écriture originale de Bruly), de 600 pages est vendu à 220.000 F.Cfa », a-t-il révélé. Celui qu’on a présenté comme un prophète dit avoir reçu une révélation, le 11 mars 1948, alors qu’il était en service à Dakar au Sénégal. «Le ciel s’ouvrit devant mes yeux et sept soleils colorés décrivirent un cercle de beauté autour de leur Mère-Soleil, je devins Cheik Nadro: celui qui n’oublie pas», écrivit-il. Depuis lors, la révélation lui a permis d’inventer une écriture africaine, qui ne soit plus celle du Blanc. Et qu’il a appelée l’ «alphabet bété ».

Le 3 mai, a informé l’ambassadeur Dalo Bouabré, porte-parole de la famille, Cheik Nadro sera remis définitivement à la terre de Zéprégühé, après une veillée traditionnelle. A Abidjan, une veillée traditionnelle est prévue à la place Ficgayo, dans la commune de Yopougon, le mercredi 30 avril. La levée du corps se fera le 2 mai, suivie du transfert dans son village.

Par Sanou A.
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