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Faits Divers Publié le lundi 2 juin 2014 | Nord-Sud

Affaire ‘’35 tonnes de médicaments prohibés saisies à Roxy’’ /Koné Sita, présidente de la Cofcer : «La vente de médicaments n’est pas rentable…»

Selon la présidente de la Coopérative des femmes commerçantes de Roxy et Extension(Cofcer), sa structure ne s’oppose pas à l’opération initiée par la police anti-drogue. Pour Koné Sita, les vendeuses de produits pharmaceutiques demandent des mesures d’accompagnement pour faciliter leur reconversion.

Après l'opération de saisie de leurs marchandises par la police anti-drogue mardi, des commerçantes vous accusent de les avoir abandonnées à leur sort. Que répondez-vous ?
Si elles ont dit cela, je pense qu'elles ne disent pas la vérité. Parce que je me suis battue durant des années en les sensibilisant et en organisant le secteur. Vous savez, le trafic de médicaments se fait dans tous les pays, mais on le cache. Il faut souvent être discret. J’ai organisé plusieurs réunions de sensibilisation avec mes sœurs. Je leur ai parlé. Je leur ai dit que cette activité ne peut pas prospérer. J'ai tout fait. J'ai tout dit, mais rien n'a changé. Je leur ai parlé du projet de reconversion. Nous avons monté le dossier de financement à nos propres frais. J'ai dépensé plusieurs millions afin qu'elles souscrivent au projet. Une structure de microcrédit nous a demandé une caution. J'ai payé de ma poche la somme de 2 millions Fcfa que j’ai déposée à la banque. J'ai fait tout cela, mais elles ne veulent rien savoir. Certaines d’entre elles refusent d’adhérer au projet de reconversion.

En quoi consiste ce projet ?
Il s'agit de la construction de magasins. Ce qui a été déjà fait. Les magasins se trouvent au sein de mon marché. Je leur ai proposé de vendre d’autres marchandises telles que les pagnes, les bijoux, les vêtements pour enfants. Vous savez, pour vendre les médicaments, on doit se cacher. Nous sommes conscientes que c'est une activité illégale. Il faut dire la vérité, même si cela doit vous coûter la vie. Il faut reconnaître que nous avons dépassé les bornes.

Comment avez-vous réagi lorsque la police est entrée en action ?

Nous pensons qu'en toute chose, il faut savoir agir. La force n'est pas la solution pour régler le problème de Roxy. Les femmes ont été brutalisées. Ce n'est pas bien. Toutefois, mes sœurs ont avoué que je les avais prévenues. Elles ont reconnu que si elles m'avaient écoutée, elles ne seraient pas dans cette situation. Elles ont reconnu que je les avais averties en leur demandant d’arrêter de vendre les médicaments. Ce sont des femmes qui se sont installées à Roxy il y a de cela plus de 40 ans. Chaque chose en son temps. Aujourd'hui, le temps de la reconversion est arrivé. J'ai pris mon bâton de pèlerin depuis septembre 2011 pour les sensibiliser afin qu'elles abandonnent la vente de médicaments. Nous avons mobilisé dix mille femmes à Abidjan et à l’intérieur du pays. Elles ont accepté de se reconvertir. Mais nous demandons l’appui des autorités pour qu’elles nous aident dans ce travail difficile. Les données ont changé. L'hôpital général d'Adjamé (situé à proximité du marché, Ndlr) va ouvrir ses portes bientôt. C'est inadmissible que l'on puisse vendre des comprimés devant un hôpital.

Selon vous, pourquoi ces commerçantes refusent d'abandonner la vente de médicaments?
Ce n'est pas facile pour ces dames qui sont pour la plupart des veuves ou des chefs de familles. Elles ne connaissent pas d’autre activité que la vente de médicaments. Pour qu'elles puissent accepter d'arrêter le trafic de médicaments, c'est un travail de longue durée. C’est pour cela qu’à travers la coopérative, nous leur expliquons qu’on peut faire une activité commerciale autre que la vente de produits pharmaceutiques.

Qu'est ce que vous leur avez proposé de concret?

Certaines parmi elles ont compris. Grâce à notre projet, elles ont changé d'activité. Elles vendent des pagnes, des habits pour enfants, des bijoux. Mais il existe encore des poches de résistance. Il faut laisser le temps au temps pour que les mentalités changent. En réalité, la vente de médicaments n’est pas une activité rentable. Elles ne gagnent rien si ce ne sont que des problèmes à longueur de journée. Le conseil que je ne cesse de leur donner, c'est qu'elles doivent se reconvertir. Il y a d'autres marchandises qu'on peut vendre pour gagner son pain. Nous avons établi un plan d’affaires qui définit la stratégie de commercialisation de produits manufacturés. Il existe sur place des entreprises qui peuvent être des fournisseurs de la coopérative.

Qu'est-ce qui vous a motivé à mettre en place une coopérative?
L'union fait la force, dit l'adage. J'ai mis en place cette coopérative afin que mes sœurs et moi puissions travailler ensemble. Plus de 10.000 femmes ont été recensées sur toute l’étendue du territoire. On s’est inspirées de l’expérience des "nana benz" au Togo. Nous avons construit un marché avec l’aide d’un opérateur économique. Des magasins existent. Des anciennes vendeuses de médicaments ont accepté de se reconvertir. Elles louent ces boutiques pour vendre des pagnes, des bijoux et autres marchandises légales qui n'ont rien à avoir avec les produits pharmaceutiques. J'ai fait des prêts remboursables à ces femmes afin qu'elles puissent acheter les marchandises pour les revendre. Elles sont au nombre de 500. Ce n'est pas facile, mais j'ai confiance en l'avenir. Nous travaillons chaque jour pour nos sœurs. Nous leur demandons d’accepter de se reconvertir. C'est mon combat pour les femmes de Roxy.

Avez-vous des soutiens dans ce combat ?

Nous comptons sur nous-mêmes d'abord. Nous avons entrepris des démarches auprès du ministère du Commerce, du ministère de la Santé afin qu'ils nous viennent en aide. J’ai demandé que les autorités créent une plateforme de rencontre entre les industriels et nous. Mais nous n'avons jamais eu de suite favorable.

En son temps, le ministre N'Dri Yoman (ex-ministre de la Santé, Ndlr), était disposée à nous écouter. Nous étions avancées dans le dossier avec elle. Malheureusement, elle a quitté le gouvernement. Nous sommes sans interlocuteur. Pendant la crise postélectorale, au moment où il n'y avait pas de médicaments dans les hôpitaux, tout le monde venait se ravitailler à Roxy. Plusieurs responsables politiques sont venus ici. Nous soutenons les actions du gouvernement. Cependant, nous souhaitons que les autorités acceptent de discuter avec nous. Pour montrer notre bonne volonté, une brigade de surveillance constituée de femmes a été mise en place pour faire la police au sein du marché.

Réalisée par Ouattara Moussa
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