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Économie Publié le vendredi 19 septembre 2014 | Cote d’Ivoire Economie

Projets d’infrastructures : zoom sur les grands chantiers de l’Etat

© Cote d’Ivoire Economie Par DR
Projets d’infrastructures : zoom sur les grands chantiers de l’Etat
l’élan de la relance économique, le gouvernement ivoirien a mis le cap sur de grands travaux d’infrastructures économiques. Quelque trois années après, il paraît judicieux de porter un regard critique sur ces chantiers. Où en sommes-nous exactement?


Depuis 2012, la Côte d’Ivoire est à nouveau en chantier, et principalement dans le district autonome d’Abidjan. Plusieurs projets et programmes financés par l’Etat ivoirien et ses partenaires au développement donnent une nouvelle allure à son paysage économique. Et de nombreux observateurs, aussi bien locaux qu’étrangers, louent ces performances réalisées dans un tel laps de temps. «Côte d’Ivoire is back», a-t-on souvent entendu, suite aux bons indicateurs macro-économiques. Ce sont les investissements publics dans les infrastructures qui ont stimulé le taux de croissance du Produit intérieur brut (PIB) à hauteur de 9,8% en 2012 et 8,5% en 2013. Et le taux d’investissement a atteint les 16,5% du PIB en 2013, après le niveau de 13,7% en 2012. Au titre des réalisations, on remarque l’échangeur de la Riviera-2, le troisième pont d’Abidjan, le pont de Jacqueville, l’autoroute Abidjan-Grand Bassam, le château d’eau de Bonoua, le pont de la Marahoué, le barrage de Soubré... Des chantiers d’infrastructures qui méritent d’être passés au scanner. Certains avancent à un rythme convenable tandis que d’autres connaissent des couacs dans leur exécution.

Echangeur de la Riviera-2 : livré sans être inauguré
A Abidjan, la construction de l’échangeur de la Riviera-2 est l’un des plus vieux chantiers de l’Etat. Initié le 25 novembre 2011, cet édifice public a connu d’énormes difficultés dans sa mise en œuvre. D’un côté, la Banque mondiale, qui est le principal financier dans le cadre du Projet d’urgence d’infrastructures urbaines (PUIUR) a toujours indiqué que le projet ne souffrait pas de financement. Mais de l’autre côté, les choses ont vraiment piétiné du point de vue technique. Ce qui a valu de nombreuses critiques sur les compétences de l’entreprise AID-Sartem, qui a remporté le marché par appel d’offres – un Groupement d’intérêt économique (GIE) qui faisait ses premiers pas en terre ivoirienne. Ce chantier a réellement traîné, mais les automobilistes ont été surpris, le 31 mars dernier, de l’ouverture de la partie souterraine (le tunnel) de l’échangeur de la Riviera-2 à la circulation. Tandis que les travaux se poursuivaient sur les voies latérales (les contre-allées) quatre autres mois durant. Cependant, l’échangeur de la Riviera-2 a été livré sans que les pouvoirs publics n’aient fait son inauguration officielle, comme à l’accoutumée en terre ivoirienne. Les raisons ? Le retard patent qu’a connu l’exécution de ce chantier d’infrastructure, d’un coût global de 6,2 milliards de francs CFA.

De même, l’on se demande si cet ouvrage est réellement achevé. Jusqu’au 31 août 2014, les voies latérales n’étaient pas encore ouvertes à la circulation publique, en dépit des quatre feux tricolores intelligents installés. Des spécialistes relèvent aussi plusieurs défauts, notamment au niveau des finitions de l’ouvrage. Il n’y a pas de tracé de la chaussée, la propreté des lieux reste à désirer, etc. Autant de petites choses qui manquent encore à cet ouvrage public. Et les dernières pluies diluviennes ont mis à nu d’autres dysfonctionnements techniques. Notamment de l’eau stationnée dans la partie souterraine du pont, obstruant ainsi la chaussée et provoquant un ralentissement des véhicules. Un rattrapage technique s’est opéré avec la pose de grilles métalliques en remplacement du béton armé. En somme, l’échangeur de la Riviera-2 est livré, mais ne présente guère l’éclat d’un édifice neuf.

Le troisième pont d’Abidjan tiendra ses promesses
Contrairement à l’échangeur de la Riviera-2, la construction du troisième pont, baptisé Henri-Konan-Bédié, évolue à un rythme raisonnable, et même accéléré par endroits. D’un coût estimé à 124 milliards FCFA, les travaux ont officiellement débuté le 7 septembre 2011 et devront s’achever le 31 décembre 2014. A quelque quatre mois de l’échéance, le constat sur le terrain est tout simplement remarquable quant à la célérité des opérations. En effet, le français Bouygues Construction, qui déteint 47,04% de la concession, jouit d’une grande notoriété en matière de réalisation des gros ouvrages publics. En Côte d’Ivoire, Bouygues a déjà démontré son expertise dans la conception et la réalisation de plusieurs édifices publics. Hormis la technicité déployée, les Ivoiriens attendent de voir si cet opérateur est capable de tenir ses promesses. Notamment celle de livrer le troisième pont d’Abidjan avant la fin de l’année 2014.
Une analyse des trois composantes du projet s’impose. Au niveau de l’ouvrage principal, c’est-à-dire le pont long de 1500 mètres sur la lagune Ebrié, l’on peut estimer à plus de 90% le taux de réalisation. Rappelons que le dernier caisson fut posé depuis le 17 juin 2014. A la fin du mois d’août, l’on en était au revêtement de la chaussée et travaux de finitions, avec la réalisation des quatorze postes à péage. Quant à la voirie reliant la Riviera-2 au pont HKB, les travaux sont presque achevés. La bretelle de connexion à l’échangeur de la 2 est en cours. De l’autre côté, l’axe Anoumabo-boulevard VGE connaît également des avancées remarquables. Et l’éclat des travaux de l’échangeur à trois niveaux en est une belle illustration. Tout semble aller en parfaite harmonie et les professionnels des grands travaux affirment déjà que le pari est tenable. Vraisemblablement, la livraison du troisième pont pourra se faire dans les délais requis au vu de l’état d’avancement à quatre mois de la date butoir. Certains parlent même d’une concrétisation avant l’échéance. L’on pourrait aussi imaginer l’inauguration du troisième pont d’Abidjan en même temps que celle de l’échangeur de la Riviera-2. Il s’agit bien de deux projets d’infrastructures connexes.

Le pont de Jacqueville en pleine renaissance
Officiellement, le 8 juillet 2009 a marqué le début des travaux du pont de Jacqueville, confié à l’entreprise égyptienne Arab Contractors. Cet édifice public est le plus ancien parce qu’il date de plus de cinq années. Un chantier qui a connu plusieurs difficultés dans son exécution. D’abord, il y a eu le refus de certaines autorités traditionnelles (les peuples allandjan, aïzi et akouri – les 3A) de désenclaver leur région. Les barques étant les seuls moyens d’accès à cette île sablonneuse, détachée de la terre ferme à la faveur de la construction du canal de Vridi. Puis des conflits se sont déclenchés entre populations villageoises et pouvoirs publics. On a aussi parlé de l’abandon du chantier pour des pesanteurs spirituelles. Et enfin, la crise postélectorale, avec ses revers, et la politique ont pris le dessus. Des chocs qui ont pesé sur la bonne marche du projet.
En février 2013, l’on n’était qu’à 40% de taux de réalisation, quatre années après le démarrage du chantier, sans que les travaux n’aient réellement avancé des mois après. Dans son édition de septembre 2013, Côte d’Ivoire Economie classait le pont de Jacqueville au titre «des vastes projets… presque à l’arrêt», voire à l’abandon. Depuis, le gouvernement ivoirien, conduit par son Premier ministre, Daniel Kablan Duncan, a pris le devant pour donner un coup d’accélérateur à son édifice public. Comme une renaissance pour le pont de Jacqueville, redimensionné à 608,10 mètres de long et 10 mètres de large. Des ressources financières ont été urgemment débloquées pour que ce projet de 18,6 milliards de francs CFA aille de l’avant. Le 6 juin 2014, le chef du gouvernement ivoirien a effectué une visite de terrain pour voir les choses de plus près. «Nous sommes présentement à 70% d’exécution. (…) Nous envisageons de terminer l’ouvrage entre novembre et décembre 2014», avait-il précisé. L’échéance est-elle tenable ? A quelque quatre mois de la deadline, trois équipes de techniciens et ouvriers travaillent en alternance, nuit et jour, pour tenir la promesse du Premier ministre. Soulignons que ce pont a été réévalué à près de 22 milliards de francs CFA.

Des Chinois à l’œuvre sur l’axe Abidjan/Grand-Bassam
La voie express Abidjan/Grand-Bassam est sans doute le tronçon routier présentant le plus important trafic du pays. Une étude du ministère des Infrastructures économiques l’estime à 13.000 véhicules par jour. C’est un fort potentiel à valoriser et à capitaliser, surtout que cet axe routier conduit aux frontières du Ghana, du Togo, du Bénin et du Nigeria. D’ailleurs, les membres de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) sont convenus de réaliser une infrastructure routière qui parte du Sénégal jusqu’au Nigeria. Il s’agit de la route transafricaine Dakar-Abidjan-Lagos. Chaque pays doit construire son tronçon routier. C’est ainsi que les autorités ivoiriennes ont lancé les travaux de construction de la voix express Abidjan/Grand-Bassam à deux fois trois voies le 3 août 2012. Un marché qui a été concédé de gré à gré par le gouvernement ivoirien à la China Machenery Engeneering Corporation (CMEC) pour 62 milliards francs CFA. Deux ans après, le constat est que les travaux évoluent à un rythme acceptable. 360 travailleurs, dont 120 Chinois sont à l’œuvre, et les techniciens de l’empire du Milieu essaient d’imposer leurs empreintes sur cette autoroute. Ils travaillent pratiquement sept jours sur sept, avec des machines et outillages spécifiques importés de Chine.
Ici, efficacité et endurance vont de pair, dans un seul but. Celui de livrer l’ouvrage dans les délais requis, fin décembre 2015. Ayant achevé une partie des travaux sur l’axe Gonzagueville/Grand-Bassam, long de 16,3 km, les Chinois sont présentement à l’œuvre sur le tronçon Port-Bouët/Gonzagueville, distant de 6,9 km. Ils redimensionnent et élargissent la chaussée en deux fois trois voies. Déjà, le bitume est posé à quelques endroits et l’on commence à avoir une bonne visibilité de cette autoroute transfrontalière. Un ouvrage d’une importance capitale pour l’économie ivoirienne car le trafic pourrait atteindre les 20 000 véhicules par jour une fois le chantier terminé, selon les estimations du ministère en charge des Infrastructures économiques. Toutefois, les Ivoiriens restent impatients et attendent le top départ des travaux sur le tronçon Grand-Bassam/Noé, à la frontière du Ghana voisin. Un autre défi à relever par le gouvernement ivoirien, dans l’idée de construire une «Cédéao des peuples», et non des nations !

Les Abidjanais attendent toujours l’eau de Bonoua
Depuis le 6 août 2013, les travaux d’adduction d’eau de la ville de Bonoua pour ravitailler la partie sud d’Abidjan sont en cours. L’objectif est simplement de combler le déficit en eau potable des populations abidjanaises, estimé à 150.000 mètres cubes par jour. Rappelons que les besoins sont évalués à 500.000 mètres cubes d’eau, alors qu’il n’y a que 350.000 mètres cubes disponibles. D’où l’urgence de ce projet d’intérêt socio-économique et sanitaire. Le coût global est estimé 50 milliards FCFA. Une autre équipe de travailleurs chinois, à travers la Société China Geology Ingenering Company (CGC), se déploie sur le chantier. Un prêt a été octroyé par Eximbank, une banque chinoise, pour l’exécution des travaux qui doit durer vingt-quatre mois.
A mi-parcours, l’état d’avancement des travaux semble raisonnable, mais il paraît difficile de se prononcer pour savoir si les délais seront tenus. Entre-temps, les populations abidjanaises continuent de vivre un calvaire avec des coupures incessantes et l’absence totale d’eau dans diverses localités. Raison pour laquelle ces Ivoiriens restent le regard tourné vers la nappe souterraine de la ville de Bonoua. Elle devra fournir, à terme, près de 80.000 mètres cubes d’eau par jour. L’espoir est-il permis ? Il faut encore attendre une année pour répondre. Sans ignorer que le château de Bonoua est loin de répondre aux attentes de l’ensemble des Abidjanais, puisqu’il faudra encore 70.000 mètres cubes d’eau par jour pour couvrir toute la ville. Et la population abidjanaise s’accroît au fil des jours… Une situation qui reste toujours problématique, même si d’autres projets ont été initiés par l’Etat ivoirien en matière d’adduction en eau potable. A l’intérieur du pays, c’est encore une autre bataille, car plus de 50% des populations n’y ont pas accès…

La qualité des travaux souvent mise en cause
En Côte d’Ivoire, bon nombre de chantiers sont certes exécutés, mais demeurent critiquables en termes de qualité. Aussi bien à Abidjan qu’à l’intérieur du pays, l’on admire ces travaux lorsqu’ils sont achevés et livrés. Mais quelque temps après, le constat est très souvent amer. En témoignent des désastres parfois impressionnants causés par les dernières pluies diluviennes (de mi-mai à juillet 2014). Au niveau du carrefour du Zoo, des plaques de bitume ont été détachées de la chaussée pour se retrouver sur le ravin, défigurant du coup l’éclat de la route. Pourtant la réhabilitation de cette voirie (carrefour Williamsville-Zoo) a été réalisée en octobre 2010 sous le financement de la Banque mondiale, à travers le Projet d’urgence des infrastructures urbaines (PUIUR). Idem dans la commune de Yopougon, où le même projet a donné une autre image de la voirie. Là encore, l’on constate une dégradation avancée sur certains axes, notamment de la base CIE à la station Corlay. Ce qui pose des questions sur la qualité. Que dire de l’échangeur de la Riviéra-2 ? Là aussi, les dernières pluies diluviennes ont mis à nu des défaillances techniques. Le bassin du Gourou, au niveau du carrefour de l’Indenié, est pitoyable en saison pluvieuse, et ce depuis belle lurette. Quant à l’autoroute du Nord, l’on aperçoit déjà quelques zones de turbulences dans la circulation. D’autres chantiers sont concernés à travers le pays. Tout cela repose la question de la durabilité des travaux. La qualité est-elle vraiment de mise ? Les exemples cités en témoignent négativement. Aujourd’hui, il est prépondérant de veiller au strict respect des cahiers des charges pour la bonne exécution des travaux d’infrastructures économiques. D’où l’interpellation des sociétés qui exécutent ces marchés acquis par appel d’offres ou de gré à gré. La responsabilité des pouvoirs publics est aussi réelle, notamment l’Agence de gestion des routes (Ageroute) et le Bureau national d’études techniques et de développement (BNETD), qui est chargé de réaliser le contrôle des projets d’intérêt public en vue de maîtriser les coûts, la qualité et les délais. Une fois de plus, la Côte d’Ivoire doit se maintenir dans l’ère du développement durable et surtout de la recevabilité envers les contribuables. Ainsi, ceux qui exécutent mal les chantiers devront répondre de leurs actes devant les juridictions compétentes… Puisque 2015 a été décrétée année internationale de l’évaluation, un bilan exhaustif s’impose à tous les niveaux, notamment sur tous les projets du Plan national de développement (PND) 2012-2015.

ASSANE DE YAPY
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