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Société Publié le mercredi 29 avril 2015 | L’intelligent d’Abidjan

L’UE en contentieux avec Google et Gazprom: que pèse l’Afrique face à l’abus de position dominante des multinationales

Le monde change et bouge. Tout va vite dans un sens comme dans l'autre mais tout peut également s'arrêter. Sous nos yeux s'édifie la tentative d'un nouvel ordre mondial au plan commercial en Europe, qui joue collectif comme un club économique solidaire, faisant face à la concurrence déloyale dont profitent les sociétés multinationales, une souffrance de notre temps.

Le fait est rarissime, deux entreprises multinationales américaine (Google) et russe (Gazprom) sont accusées respectivement le 15 Avril 2015 et le 20 Avril 2015 par la Commission Européenne d'abus de position dominante. Les deux entreprises multinationales n'ont plus de raison d'être exemptes d'investigation et d'immense retentissement en cas de prise du gros poisson dans le filet de Madame Margrete Vestager, commissaire européenne de nationalité danoise chargée à la concurrence. Les esprits chagrins et tordus ainsi que les amateurs de l'analyse prospective pensent que c'est un coup marketing à la clé.

Cependant, il faut être prudent, rester à l'analyse du factuel et ne pas entraver l'action de la commissaire à la concurrence. Preuve de courage, de maturité, d'expertise, d'exemplarité, de probité morale du genre féminin et d'influence favorable sur ceux qui l'entourent, l'accusation de la dame de fer du suivi à la trace des conditions et tendances de la concurrence dans les pays membres de l'Union Européenne n'est pas politique mais relève d'un pur problème commercial.

Selon ses affirmations, Madame Vestager dispose d'indices, signes objectifs et preuves basés sur l'observation, la compréhension, l'analyse et l'interprétation des faits relatifs à l'abus de position dominante de Google et Gazprom qui n'est plus une menace conjoncturelle mais endémique pour l'Europe.

À la vérité, elle dispose d'éléments permettant d'objectiver l'abus de position dominante et passer à la judiciarisation du dossier.

L'histoire a besoin de recouper ses sources avant d'aboutir à une conclusion scientifique. Le Président de la Commission Européenne, Jean-Claude Junker, a annoncé le mercredi 26 Novembre 2014 la création du nouveau fonds européen pour l'investissement stratégique qui permettra de mobiliser 315 milliards d'euros au cours des trois prochaines années.
Le plan de 315 milliards d'euros pour relancer la croissance et remettre l'Europe au travail est en priorité destiné aux infrastructures stratégiques comme le numérique ou l'énergie, les transports, l'éducation, la recherche et l'innovation.

Avec un coefficient multiplicateur de 15, le plan d'investissement pourrait ajouter entre 330 et 410 milliards d'euros au PIB européen et créer entre 1 et 1,3 millions d'emplois directs et indirects, au cours des trois prochaines années.

Du 9 au 13 Avril 2015, pendant quatre jours à Paris, s'est tenue la Conférence sur les inégalités dont le thème était égalité, fraternité et fragilité. Elle était coprésidée par Monsieur Joseph Stiglitz, Prix Nobel d'Economie 2001 et Robert Johnson, Président de Institute for New Economy Thinking.

Les deux éminents économistes américains ont soutenu que les inégalités de revenus, de possibilités et d'opportunités sont un frein à la croissance dans une économie où les spéculateurs sont rois, la structure aboutit au chômage, à la mauvaise gouvernance, à la non observation de la loi sur la concurrence et le monopole.

Pour les deux grands penseurs, une bonne économie est celle où la majorité des habitants contribuent à la croissance. Ils ont fustigé les politiques d'austérité en Europe, suggéré le changement dans la politique économique européenne et trouvé que l'euro, la monnaie commune est une faille, non la Grèce.

Le 15 Avril 2015, Madame Vestager aux commandes et aux manettes de la commission européenne de la concurrence a accusé Google, le géant américain notamment son moteur de recherche d'abus de position dominante. Pour la Commission Européenne, Goolge favorise artificiellement son propre outil de comparaison des prix, oriente ses clients dont environ 80% sont en Europe et ne fait pas la neutralité par rapport à la concurrence.
Au début Google a nié les accusations mais a vite fait preuve de discernement, en proposant l'arrangement amiable, dans le bras de fer technico-diplomatique car elle a dix semaines pour se mettre en règle ou payer 6 milliards d'euros d'amende à l'Europe soit 10% de son chiffre d'affaires.

A travers sa tentative de recherche de la solution amiable, le géant américain montre au monde entier

1. qu'il y'a toujours une explication à tout;

2. qu'il y'a au moins une solution à tout problème;

3. que la société multinationale est originaire du pays d'Abraham Lincoln qui disait " j'ai toujours pensé que le pardon portait de meilleurs fruits que la stricte justice " rejoignant la célèbre phrase "une faute reconnue est à moitié pardonnée";

4. qu'elle se démarque de l'injustice, de l'arrogance, de l'ignorance et de l'aveuglement;

5. qu'elle enseigne l'humilité, le fondement de toute chose humaine durable en activité et en résultat vers la stabilité, l'expansion économique, la prospérité sociale, loin du désordre de la marche du monde et de ses répercussions néfastes sur les peuples;

6. qu'elle peut donner aussi une belle leçon américaine de gouvernance d'entreprise avant la bataille juridique et judiciaire, de protection légaliste de son image, son prestige et son audience, à la différence d'autres sociétés multinationales abonnées toujours à comparaître devant les juridictions judiciaires compétentes, sans impact négatif sur leurs capacités à s'imposer à travers leurs réseaux, leur puissance d'argent et e domination des Etats fragiles, mais préférant la confidentialité de leurs agissements, lorsqu'elles sont citées clairement et publiquement, accusées d'entrave à la justice, de non-respect de la décision de justice rendue, d'entrave à la mise en application effective de dispositions légales nationales et supranationales contre l'abus de position dominante.

Le 20 Avril 2015, la commissaire chargée à la concurrence a ensuite accusé Gazprom, le géant russe du gaz d'abus de position dominante non seulement dans les anciennes démocraties populaires du COMECOM mais aussi dans certains pays membres de l'Union Européenne acheteurs du gaz russe.

Gazprom a rejeté en bloc les accusations de Madame Vestager. Pour la Russie, l'accusation est d'ordre politique non commercial suite à l'annexion de la Crimée et à son soutien aux forces armées de l'Est de l'Ukraine. La Russie perd en environ 112 milliards d'euros par an à cause des sanctions occidentales (32 milliards d'euros) et de la chute du prix du pétrole (80 milliards d'euros).

L'Afrique peut-elle combattre l'abus de position dominante des sociétés multinationales ?
Les afro-pessimistes pensent qu'il est impossible de lutter contre le fléau. Au surplus, j'ajoute que l'Afrique peut combattre à la fois l'abus de position dominante et l'évasion fiscale des sociétés multinationales, parce que le système sur lequel les entreprises multinationales ont fondé leur prospérité en Afrique est en train de s’effondrer à cause des dix raisons suivantes :
1. En Afrique, la puissance financière des sociétés multinationales cherche sa consistance, son assise et son avenir dans la collaboration avec les entreprises étatiques et le secteur financier de la Chine, première puissance économique mondiale, à travers les concours financiers de l'EXIM BANK OF CHINA, nécessaires à l'exécution des projets conçus, formulés et évalués par les multinationales elle mêmes;

2. En Afrique, les sociétés multinationales fondent l'abus de position dominante et l'évasion fiscale sur une ingénierie financière complexe dont le démontage requiert des Etats africains des moyens humains, financiers, juridiques et matériels divers et variés qui ne sont pas pour le moment à leur portée. Depuis 2002, la Banque Mondiale est venue à la rescousse des pays africains avec le programme Doing Business qui finance les reformes relatives à l'assainissement du climat des affaires;

3. En Afrique, le statu quo, la lourdeur administrative, le secteur privé embryonnaire, les pays réticents à mettre en place les reformes, la corruption, le manque criard d'avocats chevronnés, de comptables et fiscalistes compétents, de journalistes d'investigation qualifiés, de consultants entreprises à la fois multisectoriels et polyglottes, d'experts rompus aux techniques de négociation et de surveillance du commerce international et des relations financières internationales, de l'économie bancaire, de supervision des actes de prévention et de répression des flux financiers illicites, des règles de la concurrence et du monopole, de l'analyse financière des projets, du montage financier, des pratiques commerciales déloyales et d'évasion fiscale arrangent les sociétés multinationales hors la loi;

4. En Afrique, les sociétés multinationales prédatrices craignent les pays réformateurs, les reformes structurelles, sectorielles et institutionnelles, prônant la simplification des règles sans ambiguïté ni double emploi, la modernisation de l'administration publique, la bonne gouvernance économique publique, juridique, judiciaire et d'entreprise publique, parapublique et privée dont les axes d'intervention de lutte contre les agissements délictuels des sociétés multinationales sont la technologie, le numérique, la transparence, la cohérence, la traçabilité, la simplification des règles, l'évaluation des performances, le suivi et contrôle, la post évaluation, l'obligation de rendre compte, la sanction de la faute et la reconnaissance du mérite;

5. En Afrique, il y'a des entreprises multinationales vertueuses, véritables partenaires techniques et financiers au développement, au partenariat public privé et des sociétés multinationales prédatrices et faussaires qui font fuir des milliers de milliards de devises du continent;

6. En Afrique, beaucoup de multinationales oublient que l'Etat est avant tout la puissance publique et le moteur du développement non le secteur privé qui est le moteur de la croissance. La différence entre le développement et la croissance tient à la consolidation d'un Etat fort d'une probité morale exemplaire, coercitif sans ménagement à l'égard des multinationales frondeuses, caractérisées par l'incivisme fiscal, les pratiques commerciales douteuses, les passes droits, la corruption, les dessous de table, l'évasion fiscale et le blanchiment;

7. En Afrique, s'opère de nos jours au sein des entreprises multinationales, la transformation managériale et décisionnelle interne imposée par les jeunes loups compétents et les femmes leaders alertes sur les enjeux de la concurrence et de la mondialisation, dans un souci de survie et de consolidation des acquis par le pacte avec le droit, la vérité, la justice et la bonne gouvernance d'entreprise, le respect des peuples, des lois, des us et coutumes, le renouvellement de la vieille classe dirigeante engloutie dans les scandales de corruption, passe-droit, évasion fiscale, faux et usage de faux, déstabilisation de la vision du développement économique, social et politique du continent, de l'intégration aux communautés économiques régionales, de la protection de l'environnement et de la sécurité;

8. En Afrique, en règle générale, les entreprises multinationales sont absentes des secteurs de l'éducation, de l'enseignement technique et de la formation professionnelle, de la santé, de l'immobilier etc, c'est à dire des secteurs de valorisation des ressources humaines et des compétences ainsi que du développement humain durable. Elles sont visibles dans l'agriculture, les infrastructures portuaires, aéroportuaires, routières et ferroviaires, l'énergie, les transports, la logistique, les services, les télécommunications proches de la haute finance et de la bourse des valeurs;

9. Les carnets de commande dans lesdits secteurs privilégiés par les sociétés multinationales peinent à se remplir à cause de la rude concurrence des entreprises nationales et privées des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), de la Turquie, du Maroc, de l'Egypte etc au profit de la coopération Sud Sud mutuellement avantageuse, sans conditionnalité drastique ni aide liée;

10. La création de la Banque Asiatique d'Investissement dans les Infrastructures (AIIB) au capital de 46,6 milliards d'euros) dont le siège sera à Pékin qui prêtera à prix dérisoire des centaines de milliards de dollars aux pays africains et asiatiques, risques majeurs que ne peuvent prendre ni les pays occidentaux ni les sociétés multinationales actuellement dont les investissements publics sont bridés par l'absence de marge budgétaire des Etats tandis que les investissements privés restent insuffisants, sans amortisseur de risque ni garantie solide, est l'illustration du livre " Quand la Chine s'éveille, le monde tremblera".

Laurent Maurice Kouakou
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