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Société Publié le samedi 16 mai 2015 | Diasporas-News

Médias en Afrique: l’arrivée des grands groupes de presse inquiète

L’Afrique, c’est 6 à 13 % de croissance annuelle en 2015 contre 1,7 % pour toute l'UE, 1,3 % pour la zone euro et 1,2 % pour la France. L’Afrique, c’est 1/3 des réserves minières et de nombreuses opportunités d’affaires à ramasser à la pelle (sic !). L’Afrique, c’est enfin une démographie très prometteuse qui devrait passer dans le seul espace urbain de 500 millions à plus d'un milliard et demi d'habitants dans les décennies à venir. Des chiffres très envieux qui donnent, naturellement de l’appétit.

On comprend bien que les entreprises occidentales qui s’y installent ne viennent pas investir dans le but de faire de la philanthropie encore moins de l’humanitaire. La réflexion de Jean-Louis Castelnau, ancien président délégué du Conseil français des investisseurs en Afrique (CIAN) en dit long. « Faut-il encore investir en Afrique ? Bien sûr ! Nous ne sommes pas des sociétés de bienfaisance. Si nous ne trouvions pas notre compte en Afrique, nous n’y serions plus. D’ailleurs, les grands groupes sont toujours présents sur ce continent.»

Il n’y a qu’à voir le nombre impressionnant de poids lourds du CAC 40 ou des plus grandes fortunes de France pour comprendre que les affaires sont florissantes sur le continent. Les multinationales comme B. Arnault (LVMH), Bouygues, Bolloré, Pinault (CFAO), Seillière (Bureau Véritas), J. Saadé (CMA-CGM), R. Zaleski (Eramet), Lafarge, Total, Technip, Vinci, Véolia, BNP Paribas, Natixis, Crédit Agricole, Alcatel, Accor, Gaz de France, Michelin, Alsthom, Air-France-KLM (…) liste non exhaustive, illustre bien la prédation économique.

Aujourd’hui, si l’on tente de masquer la triste réalité à travers de nouveaux concepts comme celui du Forum franco-africain pour «une croissance partagée », l’idée du pillage des matières premières africaines et la commercialisation de produits transformés qui étaient au cœur du processus colonial, demeure encore dans la pratique.

Comme on le voit, 130 années sont passées, les faits donnent encore raison à Jules Ferry qui déclarait déjà en 1885 que « Les colonies sont, pour les pays riches, un placement de capitaux des plus avantageux (…) La politique coloniale est fille de la politique industrielle. L’Europe peut être considérée comme une maison de commerce qui voit décroître son chiffre d’affaires, car la consommation européenne est saturée.»

La saturation, le mot est lâché, explique ce souci permanent de prédation économique à chercher à prospérer ailleurs en territoires conquis. Et bien, les multinationales traditionnelles ne sont plus les seules à se bousculer aux portes du continent. Les entreprises de presse leur emboîtent désormais le pas, à la conquête de nouveaux marchés émergents. Disposant de plus de moyens financiers et humains, ces entreprises se présentent comme de sérieux concurrents des médias locaux.

Après avoir conquis quasiment l’espace audiovisuel – Canal Horizons en est un bel exemple –, la presse écrite et internet est dans le collimateur des grands groupes. La conquête sera d’autant plus aisée que l’on ne trouve pas toujours une presse écrite de qualité sur le continent, des journalistes bien formés et bien payés. Un avantage indiscutable mis à profit.

Le grand quotidien français, Le Monde, et le magazine hebdomadaire Le Point qui ont désormais une déclinaison Afrique – Le Monde Afrique et Le Point Afrique – commencent à s’implanter, sans coup férir, dans le paysage médiatique du continent à la grande joie des lecteurs en quête d’une presse de « qualité ».

Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette expatriation est également vue d’un mauvais œil. Des associations comme Survie dénoncent même une certaine collusion entre ces groupes de presse et les multinationales occidentales qui opèrent sur le continent parfois en violation de certaines règles d’usage. Ils sont accusés d’observer une omerta sur les dérives. Pour Survie, ces médias ne se risquent pas à relayer certaines informations compromettantes en échange d’espèces sonnantes et trébuchantes. Des pratiques bien connues sur le continent avec la presse locale sont constamment décriées.

«Une réalité bien peu relayée par les médias, victimes ou complices de stratégies de cadenassage médiatique, à l’exemple de celle du groupe de Vincent Bolloré. Outre le contrôle direct de médias (Direct 8, Direct Soir...) et de structures qui les alimentent en informations (institut de sondage CSA, Associated Press…), le groupe sait s’attirer par exemple les bons services de journalistes » dénonce l’association de Me William Bourdon à l’origine des dossiers sur les « Biens mal acquis » qui ont éclaboussé plus d’un dirigeant africain.

On est tenté de dire que dans le contexte de la mondialisation actuelle, si les entreprises de presse africaines ne veulent pas disparaître, elles doivent redoubler d’effort et être à la hauteur de la rude concurrence que leur livrent les grands groupes de presse occidentaux. Seules les meilleures subsisteront à la compétition à l’instar des Pme et Pmi africaines face aux mastodontes occidentales.

Clément Yao
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