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Économie Publié le jeudi 30 juillet 2015 | Cote d’Ivoire Economie

50es assemblées annuelles de la Banque africaine de développement à Abidjan : BAD : le coup de gueule du secteur privé africain

Si l’implication de la Banque africaine de développement est reconnue le financement des projets de développement, son soutien au secteur privé reste sujet à caution. C’est en tout cas le sentiment d’un certain nombre d’opérateurs qui déplorent sa frilosité en la matière.


La Banque africaine de développement (BAD), en cinquante ans, a investi près de 90 milliards d’euros, soit environ 60.000 milliards FCFA pour financer le développement en Afrique, à en croire le ministre tchadien des Finances et du Budget, Kordjé Bédoumra, par ailleurs candidat malheureux à la succession du Rwandais Donald Kaberuka à la tête de l’institution financière panafricaine. Et lors des assemblées annuelles de la BAD tenues en fin mai 2015 à Abidjan, les chefs d’Etat africain et les 80 gouverneurs de la Banque se sont félicités du fait que la BAD avait jusqu’ici joué pleinement son rôle d’institution de développement du continent, car les fonds investis ont entre autres financé les grands projets d’intégration tels que les réseaux routiers et électriques, les télécoms, les infrastructures éducatives et sanitaires, de même que l’agriculture…

Une implication tardive dans le secteur privé
Cependant, ce satisfecit ne provoque pas l’assentiment d’une frange importante d’opérateurs économiques du continent qui, comme M. Massadeck Bally, fondateur du groupe Azalaï Hôtels, regrette que la BAD n’ait pas assez soutenu le secteur privé comme le fait, par exemple, la Société financière internationale (SFI), filiale de la Banque mondiale en charge du secteur privé. «Il est indéniable, reconnaît M. Massadeck, que la BAD participe au développement des infrastructures dans nos pays, cependant, elle jouerait encore un rôle beaucoup plus important, et pourrait même surpasser les autres institutions de développement telles que la Banque mondiale si elle réoriente davantage ses interventions en direction du secteur privé reconnu comme étant pourvoyeur d’emplois, créateur de richesse, mais aussi moteur de la croissance.»
Il convient d’ailleurs de faire remarquer que c’est seulement à partir de 1991 que la BAD a introduit le secteur privé dans ses interventions. «Et entre 1991 et 2006, elle n’a financé que pour 500 millions de dollars le secteur privé. Ce n’est que ces dix dernières années qu’elle a fait un bon qualitatif et cumule ainsi aujourd’hui une intervention de près de 6.000 millions de dollars», précise le ministre Bédoumra. Ce niveau d’investissement est résiduel pour un secteur censé absorber le chômage des jeunes africains, et, comme le révèle une enquête de la Banque mondiale réalisée en 2011, environ 40% de ceux qui rejoignent les mouvements rebelles se disent motivés par le manque d’emplois. Une véritable bombe à retardement.

Un opérateur économique déçu et frustré
L’industriel camerounais Célestin Tawamba, patron du groupe Cadyts Invest, actif dans l’agro-industrie et président de Cinpharm opérant dans l’industrie pharmaceutique au Cameroun, est encore beaucoup plus acerbe à l’égard de la BAD. Lui aussi ne dit pas que la banque ne doit pas financer les Etats, il assimile d’ailleurs la BAD à une «caisse» des Etats africains. Cependant, estime-t-il, «nous avons le sentiment qu’il y a une mauvaise répartition des investissements qui sont beaucoup plus portés vers les investissements structurants au détriment du secteur privé qui, aujourd’hui, souffre de l’accessibilité au financement». Pour lui, «c’est un véritable paradoxe stratégique, une erreur historique de la BAD qui, aujourd’hui, ne participe pas au développement réel et concret du secteur privé africain». A titre d’illustration, il cite son exemple.
En effet, M. Tawamba indique qu’avec Cinpharm – qui est la conjonction de plusieurs partenariats, notamment allemand, indien, français et camerounais –, il a monté un projet de 12 milliards pour mettre sur pied une usine de référence dans l’industrie pharmaceutique au Cameroun en vue de produire des médicaments génériques dont des antidouleurs, des antipaludéens, des antiparasitaires, des antirétroviraux et des antituberculeux. Et dans cette perspective, il a sollicité en 2012 un soutien d’accompagnement de 1,5 milliard d’euros auprès de la BAD. Malheureusement, trois ans après, regrette-t-il, pas de réponse de la Banque. Et donc, faute d’accès au financement, tout est à l’arrêt aujourd’hui depuis deux ans avec à la clé 300 emplois hypothéqués, déplore l’industriel camerounais qui dénonce l’asphyxie de l’industrie pharmaceutique en Afrique centrale, alors que dans le même temps plus 150 milliards sont investis dans l’importation des médicaments, hormis la contrebande des faux médicaments, dangereux pour la santé des populations de toute une région. «Pour une fois qu’on met en place un projet intégrateur, fédérateur, susceptible de créer l’emploi et la richesse, de faire la promotion des pharmaciens tout en sauvant des vies humaines, ce projet-là ne bénéficie pas du soutien de la Banque de développement panafricaine. C’est un véritable scandale», s’insurge M. Tawamba pour qui la Banque doit impérativement réorienter ses interventions afin d’intégrer tous les besoins de financement de la nouvelle Afrique des cinquante prochaines années.

Jean-Claude ACKE
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