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Art et Culture Publié le samedi 5 septembre 2015 | L’intelligent d’Abidjan

Les Samedis de Biton : Et si Karamoko Touré avait raison…

© L’intelligent d’Abidjan Par DR
Isaie Biton Koulibaly
Profitant d’une grande liberté, le 14 juillet dernier, j’ai pris plaisir à regarder la télévision française, notamment France 2, pour regarder le défilé militaire. J’écris bien : « Le défilé militaire. » Les défilés des fêtes de l’indépendance, dans les pays africains sont le plus souvent folkloriques. On voit même des bouffons amuser la galerie, des femmes, venus de tous les quartiers, parader dans de différents vêtements. Regarder un défilé du 14 juillet, en direct des Champs-Elysées, donne l’impression de s’y trouver dans une des tribunes tant la retransmission est de grande qualité. Ce jour-là, comme tous les 14 juillet, la France nous fait une revue de sa force militaire. Et ce qui a été montré est impressionnant. Je dirai même qu’on a vu des armes de destruction massive tant au niveau des forces terrestres, navales et aériennes. Surtout dans ce domaine. Des avions militaires peuvent voir leurs cibles à des milliers de kilomètres et les détruire. En regardant passer toutes ces armes sophistiquées, j’ai pris pitié de nos armées africaines. Mais, durant presque tout le défilé, je n’ai fait que penser à Karamoko Touré. La nouvelle génération ne sait même pas qui c’est. La mienne, même quand j’ajoute que c’est le fils de Samory Touré, ne s’en souvient pas. Comment peut-on oublier ainsi l’histoire ? Il y a une vraie lacune dans la formation en Afrique et singulièrement une carence dans la lecture de tous les genres. J’ai été toujours passionné de l’histoire, j’ai de nombreux ouvrages et de nombreuses revues dans la matière. Je possède encore mon livre des cours moyen et supérieur de l’histoire de l’Afrique occidentale française. Et voici ce qui est écrit à la page 119 : « Enfin, au traité de Bissandougou (1887), Samory acceptait de limiter ses Etats au Niger et au Tinkisso. En outre, pour prouver sa bonne foi, il remettait comme otage son fils Karamoko aux Français. Karamoko fut emmené en France et il visita Paris. Revenu dans son pays quelques années plus tard, Karamoko fut mis à mort sur l’ordre de son père parce qu’il ne cessait de vanter les Français et la force de leurs armées. » Celui qui ne veut rien comprendre finit par se suicider lui-même. On sait comment a fini Samory, fuyant devant les troupes françaises qui lui criaient : « illo ! illo ! Samory ». Pour lui dire de s’arrêter. Epuisé, il tombe. Il sera arrêté, enchaîné et exilé sur une île du Gabon. Jusqu’aujourd’hui, la plupart des Africains manquant de réalisme et rempli de démagogie, complètement inconscients de la réalité mondiale, se comportent comme le dictateur Samory. Et le pire, ce sont ceux qui vivent en Europe et se comportent en « toubab » qui pousse les autres à affronter l’Occident. Toute confrontation avec l’Occident a été, depuis des siècles, des échecs cuisants pour l’Afrique noire. Sans qu’on en tire une leçon. Personne ne souhaite écouter la mise en garde de Karamoko Touré. Et l’humiliation devient de plus en plus grande. Ce sont nos Présidents qu’ils viennent chercher, enlever, emprisonner, juger sans que rien ne se passe. A cause de leur puissance militaire. Le pouvoir, c’est la force, le fanga. L’Occident nous domine dans tous les domaines. L’Occident nous écrase. Et le pire, l’Occident a fait de nous des enfants perdus. Chaque africain est devenu un petit copiste de l’Occident. Nous vivons et pensons Occident. Regardez les habillements. Des vraies copies de l’Occident. C’est presqu’une honte de voir des gouvernements où tous les ministres sont en costume, cravate. En cinquante ans, aucun costume n’a pu s’imposer, faute de créativité et de tribalisme. Des enfants ne parlent plus leur langue nationale. Des jeunes ne supportent que des équipes européennes qui ont leur nom, chaque jour, dans leur bouche. Des écrivains se sentent véritablement romanciers que lorsqu’ils sont acclamés par l’Occident. Quelle honte pour l’Afrique ! Si on avait écouté Karamoko Touré, on ne serait pas à ce stade d’aliénation aussi poussée et irréversible. Qu’on finisse, enfin, de faire la gueule, de nous taire et de réfléchir à notre domination culturelle et chercher comment s’en sortir avec l’aide de cet Occident qu’on ne pourra jamais battre. Allons à l’école de Félix Houphouët-Boigny, le premier à comprendre Karamoko Touré, qu’on n’a aucun intérêt à affronter l’Occident et à chercher plutôt à coopérer. Ceux qui ont cherché l’affrontement ont tout perdu, même la vie. Comment un continent perd tous les combats et continuent de foncer la tête baissée sans chercher à réfléchir sur une nouvelle stratégie, après le refus du projet valable de N’Kwamé Nkrumah. C’est enrageant de voir des Samory vociférer, chaque jour, et de se comporter encore plus que Karamoko Touré. « Un pied dedans, un pieds dehors, c’est dehors ». Que les pousse-en-guerre commencent, d’abord, à revenir, en Afrique, pour prendre la tête du combat. Et surtout ne pas parler de manque de démocratie car cela, c’est se mettre à l’école de Karamoko Touré. Regardons-nous, analysons-nous pour accorder nos paroles et nos actions. Ainsi va l’Afrique. A la semaine prochaine.

Par Isaïe Biton Koulibaly
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